Texte intégral
M. le président. L'ordre du jour appelle le débat sur la politique du Gouvernement en faveur des associations.
La conférence des présidents a décidé d'organiser ce débat en deux parties. Dans un premier temps, nous entendrons les orateurs des groupes, puis le Gouvernement. Nous procéderons dans un second temps à une séquence de questions-réponses.
(…)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de l'engagement.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de l'engagement. La crise a effectivement bousculé nos associations…
M. Jean-Louis Bricout. Il n'y a pas que la crise !
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. …et pour leur apporter les réponses nécessaires, il convient de tenir compte de leur diversité, évoquée par M. de Courson, entre autres. Certaines sont des associations employeuses – c'est le cas d'une association sur neuf – quand d'autres ne fonctionnent que par le bénévolat. Certaines sont fédérées, d'autres non. La crise a également entraîné pour elles des conséquences diverses, non seulement économiques mais également humaines. Certaines ont fermé faute de pouvoir poursuivre leur activité, d'autres au contraire ont été particulièrement mobilisées – cela a été rappelé par la députée Faucillon – pour répondre à une situation sanitaire d'urgence.
Face à cette diversité des situations, si la réponse doit être évidemment collective, il n'y a pas de baguette magique mais une diversité de solutions à améliorer au fur et à mesure, je le crois fondamentalement.
La première réponse, et pour moi une des plus fortes, apportée par le Gouvernement, a été de reconnaître l'importance des bénévoles dans la période de confinement dur dans laquelle nous sommes entrés en mars 2020, en leur permettant de continuer leurs actions d'accompagnement d'urgence, parce que ma conviction, partagée par l'ensemble des bancs, est qu'un engagement associatif est d'abord un engagement pour le bien commun qui dépasse très largement l'action pour laquelle on est debout.
Il y a eu ensuite des réponses très concrètes sur le plan économique et d'abord, évidemment, l'accès au chômage partiel et aux prêts garantis par l'État. Certes, cela ne concerne que les associations employeuses, mais il était nécessaire cependant de leur apporter une réponse dans la mesure où elles emploient près de 2 millions de salariés – 1,8 million pour être tout à fait exact – qu'il fallait accompagner dans cette période.
Nous avons également répondu assez rapidement au besoin des associations de renforcer leur trésorerie et leurs fonds propres, déployant 45 millions pour France Active et 40 millions pour la Banque des territoires. Il a fallu également prendre en compte une réalité que les parlementaires qui ont travaillé sur l'accompagnement du monde associatif connaissent, à savoir le fait que le monde associatif n'avait pas un accès rapide à ces prêts. C'est la raison pour laquelle le prêt solidaire a été créé à hauteur de 100 millions d'euros.
Il fallait également accompagner les employés du monde associatif, ce qui peut prendre plusieurs formes. Ainsi l'Agence nationale du sport a déployé 2 500 emplois au bénéfice des associations sportives, auxquelles je sais que le M. di Filippo est particulièrement attaché. Dans le cadre du plan de relance, nous avons déployé 1 000 emplois FONJEP supplémentaires. Je rappelle qu'il ne s'agit pas d'emplois d'insertion mais d'emplois de soutien à la vie associative, financés à hauteur de 7 500 euros sur trois ans. De plus, ma collègue Olivia Grégoire a accéléré l'institution du fonds d'urgencESS, aujourd'hui abondé à hauteur de 30 millions d'euros, d'un accès volontairement simple. Voilà pour les réponses d'urgence.
Mais il convient de répondre également à des problèmes beaucoup plus profonds qui préexistaient à la crise. Le fonds de développement de la vie associative, dont beaucoup d'entre vous, mesdames, messieurs les députés, ont parlé, a été particulièrement abondé cette année pour atteindre 45 millions, et ce de deux manières. Il l'a d'abord été dans le cadre du plan de relance, la loi de finances rectificative prévoyant d'abord le maintien du budget initial, avant que le vote d'un amendement d'origine parlementaire n'y ajoute 20 millions supplémentaires.
L'avantage de ce fonds, qui certes peut toujours être amélioré, c'est que le volet formation s'accompagne d'un volet fonctionnement. Or, comme ceux qui travaillent régulièrement avec le monde associatif le savent, leur fonctionnement est très peu subventionné, à la différence des appels à projets.
Mme Cécile Untermaier. C'est essentiel !
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. C'est pourquoi il est essentiel, je vous l'accorde, madame la députée, de préserver ce volet.
À moyen terme, nous continuons nos travaux visant à valoriser l'emploi associatif comme un emploi de soutien, au-delà du FONJEP et du monde de l'éducation populaire, secteur historiquement très investi par le monde associatif. Il y a aussi les deux propositions de lois qui ont été régulièrement évoquées sur plusieurs bancs. J'ai appris ce matin une très bonne nouvelle, mesdames, messieurs les députés : la proposition de loi visant à améliorer la trésorerie des associations est inscrite à l'ordre du jour du Sénat où elle sera discutée dès le 12 mai. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)
À la suite de l'adoption d'un amendement proposé par le député Juanico, ce texte doit permettre aux parlementaires de siéger à la commission pour le déploiement du fonds de développement de la vie associative sur le territoire. Elle doit permettre aussi de recréer de la proximité. Cette proposition de loi a été votée à l'unanimité, parce qu'il s'agit d'un texte de consensus. Cela montre bien que sur le sujet de la vie associative, nous cherchons le bien commun, le point d'équilibre et je crois que la qualité des travaux de la commission des lois trouvera un écho au Sénat.
Au-delà se pose la question de la reconnaissance et de la valorisation, qui peuvent là encore prendre plusieurs formes. C'est évidemment le déploiement et l'accompagnement du compte engagement citoyen, voté sous le précédent quinquennat et qui est aujourd'hui pleinement mis en oeuvre. Il permet de reconnaître l'engagement bénévole par le versement d'un droit à la formation sur son compte professionnel de formation, ce qui lui permet de continuer à se former. Cela représente 240 euros par activité d'engagement, jusqu'à un plafond de 740 euros par an. Il s'agit de reconnaître l'engagement de bénévoles tels que les sapeurs-pompiers volontaires, les réservistes, les volontaires du service civique que je sais aujourd'hui être sur ce chemin de cette nation engagée que nous soutenons.
Le compte Asso est également en plein développement. Il s'agit d'un dispositif de simplification administrative dont l'objectif est d'éviter aux associations de devoir pour chaque demande de subvention remettre une copie des statuts et des procès-verbaux des dernières assemblées générales. Cet outil est le fruit de concertations avec le Mouvement associatif.
Notre politique consiste également en des expérimentations dans les territoires, saluées par M. Naegelen et M. Dirx l'ont salué. Mme Janvier a également évoqué celles en cours en Centre-Val-de-Loire et en Nouvelle-Aquitaine pour soutenir des groupements d'employeurs, limiter le non-recours et lutter contre la dispersion d'énergie et le manque d'ingénierie qui caractérisent une partie du monde associatif.
Je souhaite également répondre à l'une des interrogations de M. Juanico sur le choix entre service civique et SNU. Monsieur le député, les deux options ne s'opposent pas : accueillir des jeunes entre 15 ans et 17 ans, leur permettre de vivre un premier engagement, leur donner une boussole pour s'orienter dans le pays, c'est cela, l'égalité des chances, c'est leur donner accès à une information qu'ils n'ont pas.
Le problème est qu'un jeune sur deux ne connaît pas les dispositifs d'aide. Accueillir les jeunes pendant quinze jours et les accompagner permettra ainsi de leur donner la chance de trouver leur chemin. La deuxième phase obligatoire du SNU, qui consiste en une mission d'intérêt général, d'une durée, certes courte, de douze jours ou au minimum de 84 heures, leur permettra ensuite de goûter à l'engagement.
Ainsi, cette année, des jeunes ont aidé, comme lors du week-end organisé par la Fédération française des banques alimentaires, grâce à un accompagnement sur ce parcours destiné à se prolonger, nous l'espérons, par un service civique.
Pour conclure, les réponses sont économiques, mais elles doivent également être humaines, avec l'accompagnement et la reconnaissance des dirigeants associatifs, ce que permettra la proposition de loi de Sylvain Waserman. L'objectif est de favoriser l'engagement de bénévoles en leur en présentant de nouvelles modalités sur le site internet jeveuxaider.gouv.fr.
Notre nation connaît un fort taux d'engagement, avec un Français sur trois membres d'une association : je ne doute pas que, pour ce bien commun, nous trouvions les moyens d'accompagner les associations, quelles que soient notre couleur politique et notre place sur ces bancs. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et LT.)
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite du débat sur la politique du Gouvernement en faveur des associations.
Nous en venons aux questions. Je rappelle que leur durée, ainsi que celle des réponses, est limitée à deux minutes sans droit de réplique.
Nous commençons par deux questions du groupe La République en marche.
La parole est à M. Christophe Lejeune.
M. Christophe Lejeune (LaREM). Madame la secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de l'engagement, 1,3 million d'associations, présentes sur l'ensemble du territoire national, occupent une place essentielle dans le quotidien des Français. Ainsi, dès la fin de l'année 2018, une feuille de route « Vie associative » était présentée par le Gouvernement afin de prendre une série de quinze mesures visant à favoriser le développement de la vie associative. Celles-ci ont prouvé à quel point le Gouvernement se trouvait aux côtés des associations et combien l'État leur était reconnaissant de leur contribution à l'intérêt général.
Il me semble aujourd'hui opportun de faire un nouveau point d'étape sur l'avancée des mesures prises depuis un an. Les confinements successifs ont privé le monde associatif de recettes essentielles à leur équilibre. Selon l'enquête du Mouvement associatif, en septembre dernier, 4 000 associations employeuses sont menacées de disparaître et près de 30 000 associations risquent le dépôt de bilan.
Nous pouvons évidemment saluer les différents dispositifs instaurés par l'État français depuis le début de la crise sanitaire pour sauvegarder le tissu associatif français. Le FDVA, fonds pour le développement de la vie associative, est un outil majeur pour lui venir en aide pendant la crise et maintenir ainsi les différents projets innovants. C'est particulièrement vrai pour les petites et les moyennes associations qui font la fierté de mon département, la Haute-Saône.
Les crédits du FDVA non utilisés par manque de projets pourront-ils être conservés au niveau départemental pour l'année prochaine ? Par ailleurs, pouvez-vous retracer l'action menée par le Gouvernement depuis le début de l'année 2020 en faveur des associations ? Êtes-vous en mesure de rassurer les millions d'adhérents et de bénévoles sur les engagements de l'État en faveur du monde associatif pour les mois à venir ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de l'engagement.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de l'engagement. Effectivement, le Gouvernement s'est largement engagé en lançant un plan d'action en faveur des associations, dont le volet économique comprend un soutien à l'emploi, et un autre volet, une aide à l'accompagnement et au développement de la vie associative allant jusqu'à la valorisation de l'engagement et du statut du bénévole.
Ce plan a été percuté, comme beaucoup d'autres, par la crise de la covid. Dans un premier temps, la réponse du Gouvernement a été économique : c'est sur ce plan qu'il fallait accompagner les associations. En tout, un engagement financier de 1 milliard d'euros a été déployé pour soutenir le monde associatif. Il a pris plusieurs formes : le crédit d'impôt pour les salariés – à hauteur de 500 millions –, l'augmentation des crédits alloués au FDVA – pour 20 millions, ce qui porte le montant global de ce fonds à 45 millions – et l'allocation au fonds UrgencESS, fonds d'urgence pour l'économie sociale et solidaire, placé sous la responsabilité de ma collègue Olivia Grégoire – 30 millions, destinés aux petites associations employeuses. S'y ajoutent un soutien à la trésorerie et le prêt solidaire à taux zéro, que les associations pourront demander à la Banque des territoires.
Vous m'interrogez sur la manière dont nous accompagnons les associations pendant la période de reprise et de relance, et vous avez salué l'engagement des associations sur votre territoire. Parce qu'il est effectivement nécessaire de les aider, ma collègue Roxana Maracineanu lance le pass'sport pour la rentrée, qui permettra de déployer 100 millions d'euros pour les jeunes entre 6 et 16 ans des familles les plus modestes.
De plus, nous apportons des réponses sectorielles à la culture, au sport ou à l'éducation. Ce que nous devons au monde associatif, c'est du soutien humain, qui comprend l'accompagnement des bénévoles et leur reconnaissance, afin de leur donner l'énergie nécessaire et évidemment répondre à leurs besoins économiques.
Je terminerai par votre question sur le FDVA. Aujourd'hui, les demandes dépassent le montant de ce fonds, ce qui nous amène à interroger son budget.
M. Pierre Cordier. Il faut abonder la ligne !
M. Jean-Marie Sermier et M. Stéphane Viry. Et réactiver la réserve parlementaire !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas.
Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas (LaREM). Il existe globalement deux types d'associations : celles qui emploient des salariés et qu'on trouve dans les EHPAD, les structures d'aide à domicile, les clubs sportifs départementaux, ainsi que dans le secteur caritatif ou culturel ; celles sans salariés, qu'on rencontre dans les petits villages : les comités des fêtes, le club des aînés, le club des loisirs… Mais les premières comme les secondes s'appuient sur des bénévoles, sans qui rien ne serait possible. J'évoquerai ces deux types d'associations et leurs problèmes en sortant un peu du contexte de la covid.
Dans les premières, comment pourrions-nous valoriser les bénévoles et leur apporter une reconnaissance ? Je pense, dans mon département du Tarn, aux bénévoles de la MARPA – maison d'accueil et de résidence pour personnes âgées – de Valderiès, à sa présidente et à son équipe, qui, en responsabilité totale, ont oeuvré, face au covid-19, sans compter leur temps ni ménager leur peine. Quel statut pourrions-nous leur donner, pour qu'ils continuent à être motivés ? Avant cette crise, nous parlions de créer un statut du bénévole dans ce type d'associations.
M. Jean-Marie Sermier. Pour en parler, vous en avez parlé !
Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas. Qu'en est-il donc aujourd'hui ?
Les secondes associations sont souvent celles qui n'ont pas pu mener leur activité, du fait de la covid-19. Actuellement, les maires craignent que, faute de motivation, les bénévoles cessent de venir sur le devant de la scène. Comment peut-on les aider à remotiver les bénévoles, ce qui redonnera à nos villages un semblant de vie normale, en leur rendant toutes les festivités qu'on pouvait y rencontrer ?
En somme, il y a deux types d'associations, deux types de problèmes et deux questions toutes simples, auxquelles, j'en suis consciente, il n'est pas facile de répondre.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. Vous avez parlé de deux types d'associations et signalé deux problèmes auxquels il faut apporter des réponses. Je me concentrerai sur les associations que nous connaissons bien, parce qu'elles font vivre le lien social sur nos territoires et qu'en créant de la vie, elles leur apportent une dimension immatérielle mais absolument nécessaire.
S'agissant de la reconnaissance du statut du bénévole, nous avons enfin réussi, grâce à la mobilisation de la représentation nationale, il y a quelques mois, à créer et à déployer le compte engagement citoyen – CEC –, qui est désormais actif. J'invite d'ailleurs l'ensemble des bénévoles à l'ouvrir – pour ce faire, il leur suffit d'indiquer leur numéro de sécurité sociale – afin d'acquérir 240 euros par an de droits à la formation, ce qui constitue en réalité une première forme de valorisation.
Sont éligibles à ce compte bénévoles, dirigeants associatifs – qu'ils soient sportifs, culturels ou sociaux –, jeunes engagés dans le service civique, réservistes ou volontaires des sapeurs-pompiers : autant d'hommes et de femmes qui s'engagent et qui servent la communauté nationale, à laquelle nous tenons.
Au-delà, la proposition de loi de notre président Sylvain Waserman en faveur de l'engagement associatif, laquelle a vocation à aboutir, tend à reconnaître aux dirigeants associatifs bénévoles un statut particulier. Cette reconnaissance supprimera un problème : en effet, le risque de judiciarisation peut freiner l'accès à certaines responsabilités de président ou de trésorier.
Enfin, je mène des travaux avec un collectif qui vise à faire revivre les différentes formes de bénévolat. Benevolat.fr réunit en effet différentes associations comme France Bénévolat ou Benenova, en soutien à la grande plateforme JeVeuxAider.gouv.fr, réserve civique des citoyens, hommes et femmes prêts à donner de l'énergie aux associations, qui étaient en grande partie aidées par des bénévoles âgés auxquels on a demandé de rester chez eux pour se protéger.
Vous le voyez : vous pouvez compter sur la mobilisation du Gouvernement pour accompagner les bénévoles.
M. le président. Je vous remercie doublement, madame la secrétaire d'État.
Nous passons aux questions du groupe Les Républicains. La parole est à M. Marc Le Fur.
M. Marc Le Fur (LR). Madame la secrétaire d'État, je connais votre engagement personnel sur toutes ces questions et je n'ai pas de raison d'en douter, mais, convenons-en, votre majorité et le Gouvernement sont passés totalement à côté du monde associatif. On l'a constaté dès le début du mandat, lorsque vous avez supprimé la réserve parlementaire. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LR.)
M. Philippe Vigier. Quelle erreur !
Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas. Quelle bonne idée !
M. Marc Le Fur. On l'a également observé lorsque vous avez supprimé les emplois aidés, sans que cette mesure ait été préparée.
Il faut dire que vous êtes arrivés en n'ayant à la bouche que le mot de start-up, de sorte que vous ne pouviez pas comprendre le monde associatif. L'échec s'est poursuivi avec la gestion du covid. Que devient notre vie sportive, culturelle ou caritative lorsque les associations sont mises à l'arrêt ?
M. Stéphane Viry. Zéro !
M. Jean-Marie Sermier. Elle s'arrête aussi !
M. Marc Le Fur. Les associations, c'est l'économie du don : don de temps, don de soi. C'est le contraire de l'économie du marché. Et ça, vous avez, je crois, du mal à le comprendre. Par ailleurs, les associations, c'est l'engagement, c'est-à-dire le contraire de la passivité et de l'assistanat. On se prend en main. On n'attend pas tout de l'État ou des collectivités. C'est aussi la philosophie politique de ceux qui siègent sur nos bancs…
M. Jean-Marie Sermier. Exactement !
M. Marc Le Fur. …et vous le savez bien. Votre échec est hélas très réel. Aujourd'hui, dans nos communes, il n'y a plus un seul match de foot, le dimanche. Dans mon département, peut-être l'un des plus cyclistes de France, il n'y a plus une seule course à bicyclette depuis le début de l'année. Les clubs de jeunes qui, chaque année, organisent de grands concerts de rock qui soudent toute une génération sont à l'arrêt, comme les troupes de théâtre – il en existe pratiquement dans chaque commune – et les salles de cinéma associatif – on en trouve dans chaque canton.
Vous êtes passés à côté, peut-être pas des grandes associations, que vous avez traitées finalement comme des entreprises, mais des petites, qui vivent du bénévolat et parfois du bal, du loto ou du repas qu'on organise, ce que vous n'avez su ni comprendre ni mesurer. Qu'est-ce que ces associations attendent de vous ? De la confiance, de la liberté et plus encore de la simplification. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. Monsieur le député, je connais votre attachement au monde associatif et sais à quel point vous accompagnez celui-ci dans votre territoire. Les associations dont vous parlez sont celles qui n'ont pas de salariés. Dans notre pays, c'est le cas de neuf associations sur dix, et ce sont elles qui font vivre notre projet de communauté nationale et d'action.
Vous avez raison : ce sont des associations de la considération, de l'action, qui se lèvent et font vivre le lien entre les générations, en apportant non seulement de la douceur mais aussi de la vie culturelle ou du lien. Que demandent-elles ? Sur ce point, je vais vous rejoindre : elles souhaitent retrouver la vie normale…
M. Marc Le Fur. La liberté !
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. …et le temps de l'engagement. Seulement aujourd'hui, où toutes nos activités sont percutées par la crise sanitaire, notre responsabilité consiste à ne laisser aucune association à genoux ou dans l'incapacité de reprendre ses activités.
M. Jean-Marie Sermier. Cela va être difficile !
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. C'est pourquoi Jean-Michel Blanquer, Roxana Maracineanu et moi-même nous sommes mobilisés pour que les activités sportives, à commencer par celles des plus jeunes, puissent reprendre à l'extérieur. Ce n'est qu'une étape, je vous l'accorde, mais elle nous oblige, car plus que jamais, nous devons faire confiance – et c'est le cas – à nos associations, particulièrement aux associations sportives. Je salue la qualité des protocoles sanitaires que chaque fédération a proposés pour la reprise. Vous le savez, monsieur le député, la reconnaissance de l'engagement et du don, nous la devons aux bénévoles, parce qu'ils modèlent le visage de nos territoires.
Vous vous en souvenez : dans le cadre des lois de finances passées, nous avons créé puis augmenté la franchise qui s'applique aux PME et aux TPE pour les dons aux associations. Ces petites entreprises pourront donc continuer à accompagner les associations sportives, par exemple les clubs de foot dont vous avez parlé, parce qu'elles connaissent la nécessité de les faire vivre sur nos territoires. Je sais que, sur tous les bancs de notre assemblée, il n'y a qu'un combat : il vise à reconnaître le rôle des associations et à permettre à celles-ci de rouvrir et, quand la situation sanitaire le permettra, de reprendre leur activité.
M. le président. La parole est à M. Maxime Minot.
M. Maxime Minot (LR). Depuis le début de la crise sanitaire, le secteur associatif est mis à rude épreuve. Les différentes mesures prises par le Gouvernement pour tenter d'enrayer l'épidémie de covid-19 ont en effet lourdement pesé sur les associations et leurs bénévoles. Rendons-nous compte : en France, près de 30 000 associations sont directement menacées de disparition, alors qu'un tiers des Français était engagé dans la vie associative. Pourtant, nous n'avons jamais eu autant besoin d'elles dans nos territoires. En effet, la crise sanitaire a fait basculer sous le seuil de pauvreté plus d'un million de nos compatriotes. Les associations sont plus nécessaires que jamais pour leur venir en aide, notamment dans l'Oise, premier département touché par la crise. Plus largement, elles sont indispensables pour créer du lien social entre les citoyens et leur permettre de partager une passion commune, qu'elle soit culturelle, sportive ou autre.
Ces liens sont une première nécessité. C'est pourquoi le Gouvernement doit enfin déployer une politique ambitieuse de soutien sans tergiversation ni faux-semblant, ce qu'il n'a pas fait jusqu'à présent – plusieurs orateurs ont répété que le FDVA n'était pas à la hauteur des enjeux –, alors que de nombreuses collectivités territoriales continuent à soutenir fortement les associations, comme le fait, par exemple, le conseil départemental de l'Oise, dont le travail est exceptionnel.
Madame la secrétaire d'État, quand mènerez-vous enfin une politique à destination des associations, particulièrement du tissu associatif non employeur, afin d'en faire demain un acteur de la relance dans notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
M. Jean-Marie Sermier. Rétablissez la réserve parlementaire !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. Vous avez évoqué deux éléments. Premièrement, les moyens du FDVA, qui ont été mentionnés par plusieurs parlementaires, ont été réellement augmentés de 20 millions d'euros pour atteindre 45 millions d'euros. Ce n'est pas le seul engagement du Gouvernement au soutien de la vie associative : tous financements confondus, nous atteignons 1 milliard d'euros pour accompagner le secteur associatif.
Deuxièmement, vous vous demandez comment on peut faire vivre le lien et continuer à le créer. Pour ce faire, notre engagement repose sur deux piliers. Je salue les collectivités qui continuent à soutenir les associations. Jamais nous n'opposerons l'action de l'État, du Gouvernement à celle des collectivités. Au contraire, nous devons créer cet élan, faire bloc pour les associations, chacun dans son rôle, quelle que soit notre capacité d'action : les entreprises avec le mécénat et le Gouvernement avec le soutien à l'emploi et la reconnaissance de l'engagement.
Comment insuffler, dès le plus jeune âge, la volonté de s'engager ? C'est pourquoi nous déployons un programme fort qui fonde un important dispositif en faveur de la jeunesse, structurant à l'avenir : le service national universel.
M. Marc Le Fur. Il n'y a personne sur les bancs de la majorité ! Cela ne les intéresse pas !
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. Il faut également le soutien humain en permettant à davantage de jeunes de s'engager dans les relations intergénérationnelles, ainsi que le prévoit le service civique en faveur des personnes les plus âgées.
Je l'ai toujours affirmé et je continuerai à le faire : je n'établis aucune hiérarchie entre les causes. Peu importe que l'on s'engage dans une association de boulistes, pour la planète, pour lutter contre les discriminations ou en faveur des langues régionales, comme sur mon territoire. Aujourd'hui, tous les engagements doivent être accompagnés sans aucune hiérarchie. C'est pourquoi, nous souhaitons, Jean-Michel Blanquer et moi-même, susciter, dès le plus jeune âge, la culture de l'engagement, dont le service universel constitue notamment la première étape.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Mette.
Mme Sophie Mette (Dem). Madame la ministre, chers collègues,…
Un député du groupe LR. Chère amie !
Mme Sophie Mette. …chère amie, bien entendu, je souhaite remercier mes collègues du groupe LaREM de nous permettre d'échanger ce soir sur les politiques gouvernementales qui accompagnent nos associations.
Le sujet est capital car leurs activités sont précieuses et peut-être aujourd'hui davantage qu'hier. Partout sur notre territoire, elles contribuent au lien social, à l'émancipation des personnes et à la construction de l'esprit critique. Dans ma région, la Nouvelle-Aquitaine, nous décomptons fièrement 30 000 associations culturelles, réunissant plus de 400 000 adhérents.
Elles ont une valeur incommensurable en raison de ce qu'elles impriment à la société, à travers la liberté d'expression, de création et d'innovation sociale, et par leur capacité à soutenir et à rendre concrètes les politiques publiques. Aussi font-elles partie intégrante de la construction de notre société, nous le savons bien toutes les deux.
Depuis plus d'un an désormais, l'ensemble du monde culturel est sévèrement touché par les répercussions de la crise : audiovisuel, livres, musique, spectacle vivant… Cela se traduit concrètement pour les associations par des baisses de recettes d'activité, une diminution notable du nombre de créations, le tassement des adhésions et des difficultés accrues en matière d'engagement bénévole. C'est dramatique, surtout lorsque l'on sait le rôle joué par certaines d'entre elles dans le maintien des solidarités en direction des plus démunis.
Une action publique forte est déjà engagée et elle sera nécessaire dans les mois prochains pour inverser cette spirale dévastatrice. Je me désole de voir le conseil régional de Nouvelle-Aquitaine diminuer le budget consacré à la vie associative de 550 000 euros pour l'exercice 2021. La place du Gouvernement n'en est que plus centrale encore dans le nécessaire soutien aux têtes de réseaux associatifs et aux associations qui prennent des initiatives dans les territoires.
Les territoires ruraux, dont je suis issue, ont particulièrement besoin d'être irrigués par l'action bénéfique de ces associations. Par exemple et très concrètement, dans la commune de Bazas où vous êtes venue, l'association de danse ou encore l'association Bazas Culture Cinéma ne savent pas encore si elles ont un avenir.
Madame la secrétaire d'État, certaines régions doivent encore négocier pour signer avec l'État un plan de relance. Quelle sera la position du Gouvernement concernant la place des associations dans cet accord ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. Vous avez posé une question relative aux associations culturelles. Le Gouvernement a souhaité apporter des réponses transversales à l'ensemble des associations en leur permettant d'accéder au droit commun. Cette première étape était nécessaire.
Je sais combien vous êtes attachée aux associations de votre territoire. Quand on se déplace sur le terrain, on se rend compte à quel point chacune d'entre elles a un besoin particulier. Il était donc nécessaire de compléter le droit commun, notamment les dispositions relatives au chômage partiel et à l'accès aux prêts garantis par l'État, en apportant des réponses spécifiques et sectorielles.
En matière culturelle, la ministre de la culture a présenté un plan d'urgence de 95 millions d'euros qui a vocation à irriguer les associations artistiques et théâtrales. Il ne s'agit pas seulement de compenser les pertes dues à la suspension de leurs activités ; il est nécessaire d'accompagner les associations au moment de la relance pour éviter qu'elles ne soient affectées par les conséquences de cette période.
L'engagement associatif occupe une place essentielle dans les priorités du Gouvernement, qui porte un regard attentif sur l'engagement des uns et des autres. Nous pouvons tous apporter notre soutien. Si demain le monde culturel ne pouvait pas recevoir l'appui nécessaire, nous continuerions – j'en suis certaine –, Roselyne Bachelot et moi-même, à déployer l'ensemble des éléments permettant d'accompagner les structures, les associations culturelles, sportives, mais également d'aide, qu'elle soit alimentaire ou encore d'urgence. En effet, aujourd'hui plus que jamais, les hommes et les femmes qui s'engagent, permettent à notre pays de traverser cette crise, tout en conservant le lien humain sur notre territoire. Je crois que c'est ce qui fait fondamentalement la résilience et la force de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)
M. le président. La parole est à Mme Cécile Untermaier.
Mme Cécile Untermaier (SOC). Madame la secrétaire d'État, je ne doute pas des efforts que vous menez en faveur des associations. D'ailleurs, vous l'avez fort bien exprimé à la tribune.
Nous avons beaucoup évoqué la réserve parlementaire et, sans vouloir prononcer un discours démodé, je pense que sa suppression était une erreur magistrale, dont je n'avais moi-même pas mesuré les effets. La réserve contribuait trois fois plus que l'actuel FDVA au financement des associations – en matière d'abondance de crédit, on sent la différence. Quant à l'accès aux subventions, on avait là un dispositif assez agile, transparent, à la main du député qui pouvait s'affranchir du clientélisme en instaurant une collégialité ou des jurys citoyens. C'est ce que j'ai proposé de faire dans le cadre du FDVA, mais, hélas, le Gouvernement n'a pas répondu à nos sollicitations. C'est mon premier regret.
Mon deuxième regret concerne, bien entendu, les contrats aidés, qui représentent une forme d'aide au fonctionnement d'associations qui n'ont pas de moyens. Vous les avez compensés par plusieurs dispositifs qui ne sont pas équivalents. Or cette crise sanitaire de la covid-19 est une période de vaches maigres pour les associations qui n'embauchent pas de salariés : elles n'ont plus aucune ressource mais doivent payer les charges ; elles sont sur le flanc.
Madame la secrétaire d'État, ne pourriez-vous pas faire preuve d'humilité en reconnaissant que le FDVA n'est peut-être pas le dispositif technocratique qui convient au régime des associations ? Pourrions-nous retrouver – quitte à le nommer autrement – un dispositif aussi agile que celui de la réserve parlementaire, en le nettoyant du risque de clientélisme ?
Ma dernière question est relative aux associations sans salariés, qui ne disposaient pour vivre que des ressources liées à leur animation. Soumises actuellement à de très lourdes charges, elles ne savent pas comment s'en sortir – on le constate lorsqu'on assiste aux assemblées générales.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. Vous avez commencé par évoquer la suppression de la réserve parlementaire et la création du FDVA.
Si l'on fait appel à nos souvenirs parlementaires, le FDVA a été créé un soir en commission des finances à l'initiative de M. Joël Giraud, alors député. Notre volonté est de continuer à l'abonder parce qu'aujourd'hui, les demandes dépassent son budget.
La nécessité d'accompagner les associations, notamment de pourvoir à leurs frais de fonctionnement, est réelle. Or de moins en moins de subventions couvrent ces frais, au profit de l'investissement ou du financement de projets. Or les associations qui n'ont pas de salariés ne disposent pas de l'ingénierie nécessaire pour accéder aux financements.
C'est pourquoi je place mes espoirs dans le vote de la proposition de loi visant à améliorer la trésorerie, qui sera bientôt débattue au Sénat et qui prévoit la présence de parlementaires dans les collèges départementaux du FDVA, disposition votée à l'Assemblée nationale. C'est une première étape pour créer plus de lien et porter un regard territorial sur les demandes de subventions.
S'agissant de la suppression de la réserve parlementaire, je ne mets pas tout le monde dans le même panier : certains parlementaires étaient très engagés et faisaient preuve de transparence, en fournissant l'ensemble des informations. Mais la décision a été prise par la représentation nationale.
Aujourd'hui, notre responsabilité est d'accompagner le FDVA, qui continue à croître. Chaque année, 20 millions d'euros provenant du produit des comptes bancaires inactifs viendront l'abonder, comme ce fut le cas cette année. Cette disposition de la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté avait été censurée par le Conseil constitutionnel comme cavalier législatif, avant d'être, de nouveau, votée par la représentation nationale. Elle permet de continuer à abonder le fonds, qui a vocation à grandir, à s'améliorer et à s'inscrire dans les territoires.
M. le président. La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo.
Mme Agnès Firmin Le Bodo (Agir ens). Dès le début de l'épidémie de la covid-19, notre tissu associatif a été au rendez-vous et je tiens ici à saluer tous ceux qui se sont mobilisés et nous ont permis de réagir plus efficacement à cette crise. De nombreuses associations se sont ainsi mises à confectionner des masques et des visières ou à organiser le portage de courses et de repas aux personnes vulnérables et au personnel soignant. Nous leur devons beaucoup et je veux leur témoigner toute notre reconnaissance.
Nous pouvons nous réjouir de la vitalité de notre tissu associatif : les 1,5 million d'associations qui maillent notre territoire mobilisent 13 millions de bénévoles et emploient 1,8 million de salariés. Elles rythment la vie quotidienne d'un grand nombre de nos communes et cimentent de notre société. Ce sont nos clubs sportifs, nos comités des fêtes, nos associations culturelles, nos organisations caritatives.
Il faut, bien entendu, saluer l'action de ces millions de bénévoles qui, chaque jour, donnent de leur temps au service des autres. Si la crise a révélé la grande solidarité des Français, elle a aussi plongé le secteur associatif dans une crise importante. À l'heure où une partie de notre territoire est confinée, les associations s'adaptent pour maintenir le lien entre leurs membres, mais elles rencontrent aussi de nombreuses difficultés : la création d'associations est en chute de 40 %, les adhésions dans les associations culturelles, sportives et de loisirs ont diminué de 25 à 50 % et la plupart ont dû suspendre leurs activités.
Je tiens à insister sur l'importance des associations dans la cohésion sociale, la formation et l'insertion de nos jeunes. La crise actuelle affecte fortement leur engagement et nous nous devons d'apporter des solutions. En 2018, sur 140 000 volontaires du service civique, seuls 2 500 exerçaient en milieu rural. Il est essentiel de ne pas oublier nos territoires ruraux et de proposer des solutions en matière de logement, de transport et d'encadrement des jeunes afin de mieux les accompagner dans le bénévolat.
Madame la secrétaire d'État, nous connaissons votre engagement pour le maintien du secteur associatif et pour son développement. Face aux conséquences de la crise, comment l'État compte-t-il agir pour ne pas tarir la vitalité de ce secteur ? Quels sont les premiers résultats des dispositifs de soutien aux salariés du secteur associatif ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. Vous avez soumis au débat deux éléments. Premièrement, comment continuer à accompagner la culture de l'engagement dans une période de crise où une partie de nos bénévoles a été sursollicitée, alors que d'autres ont perdu le lien du quotidien, qui, on le sait, se délite dans le temps ? Le premier élément de réponse, c'est la reconnaissance de leur engagement et le soutien à l'éclosion de nouvelles énergies.
C'est pourquoi le Gouvernement avait créé la réserve civique, née d'une idée presque folle : aujourd'hui, qui est prêt à s'engager ? En quelques semaines, 350 000 personnes se sont inscrites dans la réserve civique, prêtes à donner de leur temps. Pour plus de la moitié, c'étaient des primo engagés, qui n'avaient pas eu d'autres engagements bénévoles dans des structures associatives. La moitié des 350 000 inscrits dans la réserve civique ont moins de 30 ans, ce qui montre bien que l'énergie est là.
Il est absolument fondamental – c'était l'une des réponses à M. Maxime Minot – de déterminer comment on accompagne le parcours de la citoyenneté et de l'engagement dès le plus jeune âge. Nous menons évidemment beaucoup d'actions en ce sens.
S'agissant de la deuxième partie de votre question – le temps file et je souhaite absolument répondre à tous les points –, vous nous demandiez comment relancer les adhésions au moment où certaines associations perdent des membres. Il se trouve que deux grandes actions seront entreprises à la rentrée prochaine. La première est l'enveloppe de 100 millions d'euros destinée au pass'sport, qui vise à encourager les activités sportives, et la seconde est le déploiement massif du pass culture. Ces deux actions doivent contribuer à accroître le nombre d'adhésions et à soutenir la vitalité et le redémarrage des associations, y compris celles qui n'ont pas de salariés, quand la situation sanitaire nous permettra de retrouver une vie normale.
Je ne doute pas une seconde que les associations reprendront alors leur activité. Et pour remédier à la baisse du nombre de créations d'associations, nous déployons avec énergie le « compte asso » afin de simplifier la vie des structures associatives, dont le temps ne doit pas être consacré à composer avec le millefeuille technique et administratif français. Ce n'est pas ce que nous leur demandons et il convient d'être à la hauteur de leur action.
M. le président. La parole est à M. Pascal Brindeau.
M. Pascal Brindeau (UDI-I). Chacun d'entre nous peut en témoigner sur son territoire – en ville, dans les quartiers, dans nos campagnes –, le tissu associatif et sa vitalité sont importants et indispensables, non seulement à la cohésion nationale, mais aussi à l'animation des territoires et à la solidarité entre nos concitoyens, et ce quel que soit le champ couvert par le milieu associatif. Son importance est d'ailleurs une spécificité très française. Très peu de pays possèdent une telle capacité à organiser un système associatif. Le nôtre est issu de grandes lois du début du XXe siècle et peut d'ailleurs se substituer à la puissance publique pour réaliser certaines actions.
Cela étant, la crise de la covid-19 n'a fait que confirmer un phénomène que nous connaissions depuis un certain temps : celui d'une crise du bénévolat. Nous le savons et le voyons dans nos circonscriptions, une même personne est souvent responsable de plusieurs associations. Pour beaucoup d'entre elles, ces personnes prennent de l'âge sans que, le plus souvent, il ne soit prévu quelqu'un pour reprendre les rênes. À cet égard, le degré d'engagement de la jeunesse n'est pas seul en cause : en réalité, c'est la question de l'engagement des générations actives dans leur ensemble qui est posée. Celles-ci profitent parfois de l'action des associations sans donner en retour ce que pouvaient donner les générations précédentes.
Ma question est donc la suivante : au-delà des différents plans et du service national universel, que pourrait faire le Gouvernement pour susciter l'engagement citoyen bénévole, y compris chez les actifs âgés de 25 à 50 ou 60 ans ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. Vous avez raison, nous avons tous de l'énergie et un engagement à apporter au monde associatif. J'en ai parlé tout à l'heure mais il me paraît nécessaire de le répéter, je crois que le premier des freins à l'implication des personnes est la complexité des démarches administratives relatives aux associations, laquelle conduit à une transformation de l'engagement. Par le passé, le parcours traditionnel était d'être d'abord bénévole, puis de devenir adhérent, d'entrer au conseil d'administration et de devenir vice-président ou encore secrétaire général. Aujourd'hui, la complexité administrative à laquelle font face les structures associatives est telle qu'une partie de leurs membres craignent d'occuper une fonction dirigeante. C'est pourquoi le Gouvernement s'engage pleinement à faire aboutir la proposition de loi de Sylvain Waserman visant à reconnaître un statut de dirigeant bénévole, disposition nécessaire pour rassurer les personnes engagées.
M. Pierre Cordier. Le MODEM parle au MODEM !
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. Plus largement, vous nous interrogez sur les manières de stimuler l'énergie de notre nation d'engagés. Vous avez raison, un Français sur trois est actuellement bénévole dans notre pays. C'est une chance qu'il nous faut préserver. C'est pourquoi Olivia Grégoire et moi-même travaillons à augmenter le nombre de mécénats de compétence de la part des entreprises, et encourageons celles-ci à reconnaître l'engagement de leurs propres salariés.
S'agissant des plus jeunes, au-delà des dispositifs que j'ai déjà cités, je tiens à insister sur les services civiques, qui constituent des temps d'engagement importants. J'ajoute que le service national universel – qui ne se trouvait certes pas au coeur de votre question –, qui dure deux semaines, quatre-vingt-quatre heures pour être exacte, représente une pépite potentielle pour une famille. En effet, un jeune qui passe du temps dans une fédération, une association d'aide alimentaire ou une collectivité, racontera ensuite à ses parents l'importance de son action et le sens qu'il a trouvé en s'engageant. J'ai le sentiment, voire la certitude, que quand on voit de la fierté dans le regard de ses enfants, on désire l'accompagner dans ses démarches. C'est bien collectivement, chacun à son rythme et à son échelle, que nous pourrons faire vivre et redynamiser les structures associatives.
M. le président. La parole est à M. Bertrand Pancher.
M. Bertrand Pancher (LT). Je souhaite remercier vivement l'ensemble des bénévoles et des responsables associatifs de notre pays, qui s'engagent au bénéfice du plus grand nombre avec un sens de l'abnégation et du dévouement qu'il convient de saluer.
Nous le savons tous, la crise démontre un besoin de relations sociales, d'engagement, de participation. Nombre de nos concitoyens se retrouvent seuls et je pense que nous sortirons de la crise beaucoup plus forts, justement parce que nous aurons redécouvert l'importance des relations humaines. J'estime également que le tissu associatif se trouvera revivifié, du moins j'en formule l'espoir. Nous voyons partout combien l'engagement est important, notamment pour rompre les grandes solitudes.
Quand on interroge les responsables associatifs, tous nous disent combien mener leur action est complexe. Il est de plus en plus difficile d'obtenir des subventions. Il existe presque autant de formulaires que d'organisations. Pour avoir organisé il y a maintenant deux ans une rencontre avec près de 200 associations du département dont je suis élu, je puis vous assurer que tous les participants m'ont fait part de cette complexité.
C'est pourquoi je souhaite évoquer le FDVA, qui a succédé à la réserve parlementaire. Madame la secrétaire d'État, personne ne comprend pourquoi ces fonds ont été retirés aux parlementaires alors que nous en faisions bon usage et, surtout, pourquoi ils n'ont pas été directement alloués aux collectivités territoriales. C'eût été beaucoup plus simple que de créer un nouvel organisme dépendant de l'État, lequel représente une complexité supplémentaire.
M. Philippe Vigier. Eh oui !
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le député.
M. Bertrand Pancher. Allons-nous simplifier ces aides ? Et ne serait-il donc pas possible de distribuer directement ces financements aux collectivités, afin de gagner en efficacité ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. La suppression de la réserve parlementaire et la création du FDVA résultent d'une volonté de la représentation nationale, d'un choix de cette majorité et de rien d'autre. Cela étant, ma mission est d'accompagner le développement du Fonds et d'en simplifier l'accès. À cet égard, notre objectif principal est de le faire connaître et donc de remédier au manque d'informations à son sujet. Il convient également de continuer d'augmenter son budget car nous constatons que les demandes excèdent les fonds disponibles. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le FDVA a été crédité cette année de 25 millions d'euros supplémentaires, ce qui porte son budget total à 45 millions d'euros.
Par ailleurs, vous avez insisté sur un point qui me paraît essentiel : la nécessité de procéder à une simplification globale. Ainsi, à l'occasion du déploiement du « compte asso », le Gouvernement s'est engagé à ce qu'il ne soit plus jamais demandé à une association de fournir à trois ou quatre reprises son dernier procès-verbal d'assemblée générale ou une nouvelle copie de ses statuts. Il revient à l'État de faciliter la vie quotidienne des structures associatives et leur accès au FDVA. Si nous souhaitons continuer de faire vivre les associations, il s'agit d'une nécessité. Il ne faut pas les laisser crouler sous un poids administratif.
Sur ce point, monsieur le député, mon engagement est littéralement féroce. Je suis convaincue que l'avenir de nos structures associatives, surtout lorsqu'elles ne disposent pas de salariés et reposent sur des bénévoles, passe par la simplification administrative et l'accès le plus direct possible à l'accompagnement et aux aides. C'est sur quoi mon administration travaille.
M. le président. La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon.
M. Jean-Hugues Ratenon (FI). Comment pouvons-nous parler de la politique du Gouvernement en faveur des associations alors que vous avez supprimé leur ministère de tutelle ? Il s'agit d'un manque de considération pour les 1,3 million d'associations et les quelque 21 millions de Français qui se déclarent engagés dans le monde associatif, secteur qui représente entre 9 et 10 % de l'emploi dans le privé. Une grande majorité des Français sont attachés aux associations, créatrices de lien social et de solidarité.
La crise sanitaire que nous traversons en fournit une nouvelle preuve. Lors des confinements, les associations, agissant bénévolement, n'étaient pas à court d'idées pour aider les personnes isolées et perdues. Elles ont livré à domicile des paniers de produits frais, des courses, des colis alimentaires ou des médicaments. Elles ont soutenu les plus vulnérables, distribué des repas, ou encore apporté un soutien psychologique. Les associations ont été et demeurent au front, mais pour quelle reconnaissance du Gouvernement ?
Bien avant la crise, le Gouvernement avait envoyé un très mauvais signal à ce secteur, en procédant à des coupes dans les contrats aidés, mettant à mal la continuité des services à la personne et la solidarité sous toutes ses formes. Pourtant, lors du grand débat de 2019, Emmanuel Macron avait promis un grand plan de soutien aux associations.
M. Pierre Cordier. Encore une promesse non tenue !
M. Jean-Hugues Ratenon. Madame la secrétaire d'État, la chambre régionale de l'économie sociale et solidaire, et l'université de La Réunion, ont proposé un schéma social et économique plus équilibré, plus durable, plus solidaire et mieux géré. Il s'articule autour de trois axes stratégiques : le développement et la transition territoriale, la production de valeurs et de richesses, et la création de nouvelles dynamiques solidaires de proximité. Qu'en pensez-vous ? Quelles suites comptez-vous donner à cette proposition ? Par ailleurs, êtes-vous prête à créer un dispositif d'emploi pour le monde associatif qui serait basé sur un conventionnement pluriannuel de cinq ans, à l'instar des emplois-jeunes ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. Vous m'obligez à vous contredire : à aucun moment le ministère chargé de la vie associative n'a été supprimé. Bien au contraire et étant en charge, au Gouvernement, de la jeunesse et de l'engagement, j'en suis en quelque sorte la preuve vivante. Quel plus beau mot, monsieur le député, pour qualifier le monde associatif que celui d'« engagement » ? En effet, si la vie associative est portée par des salariés, elle l'est surtout par des bénévoles. L'engagement consolide la vie associative.
À cet égard, la direction du ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports qui me concerne au premier chef est celle de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative. Elle est inchangée depuis mon entrée en fonction. J'ajoute que l'ambition du Gouvernement dans le domaine associatif va croissant, dans la mesure où le portefeuille de ma collègue Olivia Grégoire, secrétaire d'État chargée de l'économie sociale, solidaire et responsable, a récemment été créé. Son rôle est d'accompagner spécifiquement les associations employant des salariés.
De quelle manière agissons-nous en la matière ? Premièrement, pour répondre à la crise, nous avons créé le fonds UrgencESS, doté de 30 millions d'euros. Il vise à soutenir les plus petites associations, employant entre une et dix personnes, et qui ont le plus besoin d'aide. Nous apportons également des réponses nettement plus structurelles, de long terme, avec l'ouverture très importante de postes FONJEP – fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire. Ce sont des emplois aidés à hauteur de 7 000 euros, qui ne sont plus exclusivement réservés aux jeunes et qui répondent d'ailleurs à votre demande de pluriannualité étant donné qu'ils font l'objet d'un engagement financier de l'État pendant trois ans.
S'agissant des contrats aidés – il ne faut éluder aucune question –, ils n'ont pas été supprimés, mais transformés au profit des parcours emploi compétences – les PEC –, qui constituent des emplois beaucoup plus stables. Disons-le, les contrats aidés représentaient 8 % des emplois du monde associatif. Il convient donc d'accompagner les structures associatives pour qu'elles puissent recruter et ainsi se consolider. C'est pourquoi nous avons aussi lancé trois expérimentations dans trois régions visant à soutenir des groupements d'employeurs associatifs et à créer des emplois d'insertion, déployés par ma collègue Brigitte Klinkert, qui peuvent prendre plusieurs formes.
M. le président. La parole est à Mme Manuéla Kéclard-Mondésir.
Mme Manuéla Kéclard-Mondésir (GDR). Madame la secrétaire d'État, nous avons pris acte des efforts annoncés par le Gouvernement pour soutenir le secteur touristique, durement touché par la crise sanitaire, même si des adaptations urgentes seraient nécessaires pour l'outre-mer afin de tenir compte de nos réalités et de la taille de nos entreprises.
Pour le secteur associatif, souvent très lié à l'activité touristique en outre-mer, la situation est inquiétante. Près de 20 000 associations oeuvrent aux Antilles, souvent dans le tourisme, mais aussi dans le sport et la culture pour la moitié d'entre elles, ou encore l'éducation populaire, la jeunesse et l'aide sociale pour près d'un tiers. La moitié de ces associations n'ont pas ou peu de salariés, souvent moins de cinq, même si certaines peuvent en avoir plusieurs dizaines. L'INSEE estime que le secteur associatif aux Antilles draine près de 10 % des effectifs des salariés du secteur privé en outre-mer.
Confrontées à la crise sanitaire, la moitié des associations ont cessé leur activité pendant le confinement, et moins d'une sur dix a maintenu un taux d'activité supérieur à 50 %. Les effets de la crise sont donc catastrophiques pour le monde associatif. Les associations ont souvent un budget annuel de moins de 50 000 euros et ne vivent que des activités financées par leurs adhérents. En perdant leur activité, elles ont souvent perdu leur financement, sans pouvoir recourir aux aides de l'État.
Je souhaite donc vous interroger sur l'accompagnement juridique et financier que l'État pourrait proposer au secteur associatif, dont nous savons qu'il est essentiel en France. Je souhaite plus spécifiquement vous sensibiliser aux outre-mer, où le monde associatif joue un rôle démocratique et social déterminant auprès des personnes fragilisées par la vie ou vivant sous le seuil de pauvreté. Il faut un plan spécifique de soutien au secteur associatif, à l'instar de ce qui a été fait pour l'apprentissage, particulièrement durant cette période sanitaire inédite.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État. Pour vous donner quelques éléments chiffrés, le plan d'urgence pour l'économie sociale et solidaire de ma collègue Olivia Grégoire a touché, dans les Antilles, 1 200 associations pour un budget de 2,24 millions d'euros. Par ailleurs, le FDVA les a aidées à hauteur de 1,2 million. Mais, en réalité, votre question traite plus largement des structures associatives employeuses qui ont connu une perte d'activité économique. Ces associations ont évidemment accès aux dispositifs de droit commun que sont le chômage partiel et le prêt garanti par l'État, mais nous ne nous arrêterons pas là.
En effet, il existe actuellement un important problème de non-recours aux droits. Certains fonds ne sont pas totalement utilisés. Je donnerai un exemple dans le secteur du tourisme que vous avez cité. Un fonds d'aide d'urgence piloté par le FONJEP, qui a vocation à aider les structures qui accompagnent les colonies de vacances ou les centres aérés, permet de leur verser une aide forfaitaire en soixante-douze heures. Il leur suffit d'aller sur le site du FONJEP pour en faire la demande. L'aide est ouverte à toutes les structures associatives pour un montant disponible de 15 millions d'euros, et il reste des fonds.
Il existe une multitude d'aides sectorielles ou de droit commun. Notre but est d'accompagner chacune de ces structures pour lui donner l'information nécessaire et lui apporter la bonne réponse. Chaque fois que nous trouvons une structure ou une situation qui n'est pas couverte, le Gouvernement s'engage pour trouver la réponse nécessaire. C'est un vrai défi, et Olivia Grégoire et moi-même travaillons à diffuser largement, avec les structures fédératives, l'information qui ne parvient pas suffisamment aux structures qui en ont le plus besoin. Vous pouvez compter sur la mobilisation du Gouvernement.
M. le président. Le débat est clos.
source http://www.assemblee-nationale.fr, le 25 mars 2021