Interview de Mme Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques, à BFM TV le 6 juillet 2021, sur la vaccination contre le coronavirus, la réforme des retraites et le pouvoir d'achat des fonctionnaires.

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Média : BFM TV

Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Amélie de MONTCHALIN, bonjour.

AMELIE DE MONTCHALIN
Bonjour.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous, ministre de la Fonction publique et de la Transformation, nous parlerons tout à l'heure pouvoir d'achat des fonctionnaires. Amélie de MONTCHALIN, le virus, le taux d'incidence, c'est-à-dire le nombre de personnes qui sont infectées par le virus, de nouveaux cas, le taux d'incidence repart à la hausse, et sérieusement depuis quelques jours maintenant, particulièrement chez les 20-30 ans, comme l'été dernier, comme en Catalogne, comme dans d'autres pays d'Europe, alors, la question est posée, la vaccination obligatoire des soignants est en débat, vous êtes ministre de la Fonction publique, je rappelle que la Fonction publique hospitalière ce sont les soignants, Amélie de MONTCHALIN, est-ce qu'il faut vacciner obligatoirement tous les soignants en France ?

AMELIE DE MONTCHALIN
D'abord, effectivement, il faut que nous accélérions la vaccination, pas parce que c'est pour faire plaisir au gouvernement, pas parce que ce serait l'acte de certains militants, moi j'appelle solennellement aujourd'hui, à votre micro, tous les Français, quel que soit leur âge, et évidemment tous les agents publics, à se faire vacciner. Se faire vacciner c'est avoir moins de chance d'être contaminé, c'est avoir moins de chance de contaminer les autres, c'est avoir moins de chance d'aller à l'hôpital, et donc c'est réduire ses chances, on doit le dire clairement, de mourir, parce qu'on a eu énormément de morts dans cette épidémie. Et donc, oui, nous avons aujourd'hui un objectif, c'est que les lieux où l'on se soigne, les hôpitaux, les EHPAD, ne soient pas des lieux où on attrape le virus, et c'est pour ça qu'avec le Premier ministre, Olivier VERAN, on est très clairs, il faut qu'on puisse accélérer la vaccination des soignants, aujourd'hui dans les EHPAD il y a certains endroits où il n'y a même pas la moitié des soignants qui sont vaccinés, si nous n'arrivons pas à le faire par l'incitation, la facilitation, alors il faudra le rendre obligatoire. Après, hier, voyez, j'ai réuni les organisations syndicales, et avec le Premier ministre j'ai décidé de prendre nos responsabilités, c'est-à-dire de faciliter très concrètement la vaccination pour les agents publics qui pour l'instant ne sont pas vaccinés. Parfois il y a des raisons pratiques, parce que le centre de vaccination est très loin, parce que dans l'organisation du travail c'est compliqué, donc on va faire venir des centres de vaccination au pied des lieux de travail dans certains territoires, mais on a aussi levé tous les freins qui peuvent exister en s'assurant que personne ne perd de salaire, qu'il n'y ait pas le jour de carence, qu'il n'y ait pas, au fond, de freins financiers à s'absenter pour aller se faire vacciner ou aller faire vacciner ses enfants, quand on a des enfants, ou quand on a des effets secondaires. Donc moi, ma mobilisation aujourd'hui, déjà c'est de lever tous les freins pratiques, financiers, c'est d'appeler solennellement, je le refais, l'ensemble des Français et l'ensemble des agents publics à se faire vacciner, et si nous n'arrivons pas, pour les soignants, pour qui c'est une obligation professionnelle, alors nous devrons en passer par l'obligation, ce qui est déjà le cas pour d'autres vaccins.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors soyons clairs, Amélie de MONTCHALIN soyons clairs, est-ce que vous êtes favorable à la vaccination obligatoire pour tous les agents publics ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Pour tous les agents publics ce serait, je pense, disproportionné, parce qu'il y a beaucoup d'agents publics qui ne sont pas dans des situations…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc pas d'enseignants, pas de personnels travaillant dans les écoles, pour préparer la rentrée prochaine ?

AMELIE DE MONTCHALIN
D'abord ce que je dis, vous savez, pendant des mois et des mois, les syndicats, les agents publics, de manière légitime, m'ont demandé, ont demandé aux différents ministres, de la protection, des masques, des mesures barrières.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais je vous pose la question.

AMELIE DE MONTCHALIN
La meilleure protection aujourd'hui, qu'on puisse leur accorder…

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est le vaccin.

AMELIE DE MONTCHALIN
C'est le vaccin.

JEAN-JACQUES BOURDIN
On est d'accord.

AMELIE DE MONTCHALIN
Et donc, aujourd'hui je prends des dispositions pour qu'il n'y ait aucun frein à se faire vacciner.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Etes-vous favorable, je vous repose la question, à la vaccination obligatoire pour tous les agents publics ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Aujourd'hui la priorité c'est les soignants, et la priorité c'est que l'ensemble de la population se fasse vacciner, donc non…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, êtes-vous favorable à la vaccination obligatoire pour les soignants ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Pour les soignants, oui, j'y suis favorable, si nous n'arrivons pas dans les tout prochains jours à passer le cap de l'immunité nécessaire pour que, je le répète, quand on va dans un hôpital, quand on va dans EHPAD, on n'attrape pas le virus parce que les uns et les autres ne seraient pas suffisamment vaccinés.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Une loi est en discussion, un projet de loi sera en discussion à l'Assemblée nationale, pas encore, mais prêt, en discours à l'Assemblée nationale la semaine prochaine ?

AMELIE DE MONTCHALIN
De toute façon, pour qu'il y ait obligation il faut qu'il y ait loi, et donc vous savez que le Premier ministre réunit, jeudi, l'ensemble des forces politiques, qu'effectivement nous préparons, et nous nous préparons, à toutes les éventualités et que, évidemment, si nous devons en passer par une obligation, parce que nous ne voyons par l'accélération se produire, alors il faudra une loi parce que nous sommes…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc une loi est prête ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Parce que nous sommes un pays démocratique, Monsieur BOURDIN.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, une loi est prête ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Une loi est en cours d'être écrite pic pour que, si nous devons l'activer, nous puissions le faire rapidement.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Rapidement, ça veut dire quand, ça veut dire avant la fin du mois ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Exactement, c'est pour ça qu'il y a des consultations.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc en discussion à l'Assemblée nationale la semaine prochaine ou la semaine d'après ?

AMELIE DE MONTCHALIN
C'est pour ça que, vous savez dans la crise on a toujours été extrêmement réactifs.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Si la vaccination est rendue obligatoire pour les soignants, ceux, celles et ceux qui n'accepteront pas d'être vaccinés seront sanctionnés ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Vous savez, c'est comme le vaccin pour l'hépatite B. Aujourd'hui, quand vous êtes soignant, vous devez être vacciné contre l'hépatite B, si vous ne l'aide pas, eh bien vous ne pouvez pas exercer vos métiers de soignant, vous pouvez faire d'autres choses, vous pouvez travailler dans des endroits où vous ne voyez pas de patients, mais les règles sont connues, les professionnels…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc des mutations, et, des sanctions ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Mais, les professionnels de la santé connaissent très bien les règles…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, il y aura des sanctions prévues dans la loi.

AMELIE DE MONTCHALIN
Il y aura des conséquences. Si votre métier vous oblige de faire quelque chose que vous ne faites pas, alors vous ne faites pas votre métier exactement pareil, c'est tout, c'est assez simple à comprendre. Le but ce n'est pas de stigmatiser quiconque, ce n'est pas de pointer le doigt sur quiconque, c'est de considérer qu'en France, quand on va dans un hôpital pour se faire soigner, quand on est une personne âgée, quand on est soi-même peut-être avec un système immunitaire défaillant parce qu'on est très âgé, qu'on a pu être soi-même vacciné, mais qu'on reste fragile, vous ne pouvez pas, et nous ne pouvons pas, nous responsables politiques, faire prendre de risques à des Français parce que ceux et celles qui ont la responsabilité de les soigner ne sont pas assez vaccinés. Je le redis, quand Irène FRACHON, ce matin, une personne que beaucoup de Français connaissent, dit avec beaucoup de solennité et beaucoup même de sens pratique…

JEAN-JACQUES BOURDIN
A l'origine, elle a dénoncé le scandale du Médiator.

AMELIE DE MONTCHALIN
C'est une femme qui les Français écoutent.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Pneumologue à Brest.

AMELIE DE MONTCHALIN
J'aimerais qu'on écoute davantage ceux et celles qui ont des messages rationnels, des messages de protection, des messages qui montrent que c'est notre meilleure arme contre ce virus, et contre tout ce qui nous a empêché de vivre normalement depuis 15 à 18 mois. On ne fait pas ça, à nouveau, pour faire de la politique, on fait ça pour protéger des gens contre une maladie qui, pour eux et pour les autres, peut les conduire, on va peut-être le rappeler, au pire, à la mort, il faut le dire.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, Amélie de MONTCHALIN, la vaccination obligatoire pour tous, comme le propose François BAYROU, vous êtes pour ou contre ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Moi je pense qu'on n'en est pas là, je pense qu'il y a beaucoup de Français, d'ailleurs si vous regardez, qui veulent se faire vacciner, et qui ne le sont pas encore…

JEAN-JACQUES BOURDIN
On a les doses, on a la possibilité de se faire vacciner aujourd'hui Amélie de MONTCHALIN.

AMELIE DE MONTCHALIN
Et donc c'est pour ça qu'on va bouger les lieux de vaccination sur les lieux de vacances, c'est pour ça qu'on va mettre des lieux de vaccination en bas des lieux de travail.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors autre question, le pass sanitaire, faut-il étendre le pass sanitaire, pourquoi ? Parce que la fracture sociale, une fracture entre les Français, risque de se produire à la rentrée, entre ceux qui sont vaccinés et ceux qui ne sont pas vaccinés. Est-ce que vous imaginez quelqu'un cas de vacciné forcé à rester à la maison, confinés, alors que celui qui n'est pas vacciné sera lui aussi confiné à la maison ?

AMELIE DE MONTCHALIN
C'est pour ça que d'abord, un, si tout le monde est vacciné, la question ne se posera pas. Deux…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Si tout le monde est vacciné, mais tout le monde ne sera pas vacciné à la rentrée.

AMELIE DE MONTCHALIN
Non, mais deux, c'est un débat que vous posez en des termes qui sont d'abord des termes démocratiques, c'est des choix qui ne se prennent pas juste de part et d'autre d'un micro, ça demande un débat…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, mais d'accord, mais vous êtes ministre de la République.

AMELIE DE MONTCHALIN
Et donc ministre de la République, oui c'est un débat que nous voyons bien, que nous devons organiser, que nous devons organiser de manière méthodique, c'est d'ailleurs pour ça, à nouveau, que le Premier ministre consulte…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, pourra-t-on imaginer, comme ça se produit ailleurs dans le monde, pourra-t-on imaginer, je ne sais pas, des bars, des restaurants, des théâtres, des cinémas, interdits à celles et ceux qui ne sont vaccinés ?

AMELIE DE MONTCHALIN
C'est une question posée, et le Premier ministre l'a posée aux différentes forces politiques, c'est une réflexion qui doit progresser, là pour le coup, dans le consensus.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous n'êtes pas contre là ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Mais moi je suis…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Cette solution.

AMELIE DE MONTCHALIN
Je ne suis pas contre des choses qui sont perçues comme efficaces et qui font, comme vous l'avez dit, que l'on peut respecter une forme d'unité nationale, parce que dans cette crise, vous le savez, le pire c'est la division.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, à Nice un label permettra aux clients des commerces et restaurants de savoir si le personnel est vacciné, c'est une bonne initiative ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Là moi, vous savez, à nouveau évitons les mesures qui stigmatiseraient, mais le but…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il ne s'agit pas de stigmatiser.

AMELIE DE MONTCHALIN
Le but, le but à nouveau…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il s'agit d'informer, pardon !

AMELIE DE MONTCHALIN
C'est que, si tous les Français…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il s'agit d'informer le client.

AMELIE DE MONTCHALIN
Beaucoup plus massivement, se vaccinent, il n'y aura pas besoin de mettre des étiquettes…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais pourquoi avoir peur en permanence de fragiliser les Français, d'inquiéter les Français, pourquoi ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Parce que moi j'ai une peur, Monsieur BOURDIN, j'ai une peur très franche…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, laquelle ?

AMELIE DE MONTCHALIN
C'est que notre pays se divise, c'est que l'unité nationale ne soit pas là…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais il est déjà divisé Amélie de MONTCHALIN.

AMELIE DE MONTCHALIN
C'est que la relance ne se produise pas, et donc nous devons utiliser tous les outils pour que, dans cette phase de relance, de, on l'espère, sortie de crise, nous fassions bloc, et donc vous aurez, en tant que ministre de la République comme vous dites, eh bien un engagement, c'est que nous travaillons avec beaucoup de dialogue, beaucoup de débats, beaucoup de dialogue social en ce qui me concerne, pour que nous ne stigmatisions personne, mais que chacun puisse prendre ses responsabilités et comprendre que ce qui lui est proposé, ce n'est pas une injonction liberticide, c'est au contraire une protection pour que la vie culturelle, éducative, sociale, puisse reprendre. Et j'y mets beaucoup de conviction parce que, on a vécu 15 mois, 18 mois, très difficiles, vous savez, les 5 millions d'agents publics dont je vous parle, des hommes et des femmes, qui parfois ont des métiers inconnus, qui ont fait des métiers difficiles, et en tant que ministre je suis fière de leur engagement, mais je leur dois, et je le dis à nouveau solennellement, une protection absolue…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Une vérité.

AMELIE DE MONTCHALIN
Et une vérité.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Une parole de vérité.

AMELIE DE MONTCHALIN
C'est qu'en se vaccinant…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Que n'a pas tenue Emmanuel MACRON, lorsqu'il a dit « jamais nous n'imposerons l'obligation vaccinale », il l'a dit.

AMELIE DE MONTCHALIN
Et il a toujours dit…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il l'a dit, c'était quand, en janvier, en décembre ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Il a toujours dit que les soignants avaient une responsabilité, pour le coup, différente des autres, parce que les lieux…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais il a dit " nous n'imposerons jamais d'obligation vaccinale. "

AMELIE DE MONTCHALIN
Ecoutez, je crois que sur ce sujet on a toujours pris nos responsabilités.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Amélie de MONTCHALIN, Emmanuel MACRON justement, s'exprimera le 14 juillet, avant le 14 juillet, on est bien d'accord ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Je ne sais pas quand est-ce que le président décide de parler, ce que je sais c'est que nous sommes au travail et que le pire qui pourrait être fait aujourd'hui, à nouveau dans des circonstances très particulières, mais aussi parce que c'est un engagement politique, c'est de considérer que comme on est à 9 mois d'une élection présidentielle on arrête tout, et donc moi en tant que membre du gouvernement, je peux vous dire que ce que le président, et le Premier ministre, nous demandent, c'est de continuer à travailler à la relance, de continuer à travailler pour le pays, et de considérer que 2022, avril 2022…

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est la priorité.

AMELIE DE MONTCHALIN
Ce n'est pas une échelle qui va nous faire tomber…

JEAN-JACQUES BOURDIN
La reprise économique, c'est la priorité Amélie de MONTCHALIN.

AMELIE DE MONTCHALIN
Evidemment que c'est une priorité.

JEAN-JACQUES BOURDIN
On est bien d'accord. La gestion de l'après-crise c'est la priorité.

AMELIE DE MONTCHALIN
Evidemment.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, est-ce que la réforme des retraites c'est la priorité ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Ce qui est une priorité c'est de considérer, je le redis, que le monde ne va pas s'arrêter en avril 2022, il y a des sujets qui sont sur la table depuis des années, voire des décennies, le sujet de la réforme des retraites, un engagement d'ailleurs que le président a pris en disant on a devant nous des grands défis, d'équité, d'efficacité, économiques, on doit arrêter de faire payer aux actifs qui travaillent des sommes incroyables de cotisations pour financer des retraites qui en plus sont en parfois réduites pour nos aînés, donc il y a un problème d'efficacité. Ce problème il existait avant la crise, il existe après la crise. Il serait donc irresponsable de venir vous dire, vous savez, comme ce n'est pas le moment potentiellement tout de suite, là demain, de lancer la réforme, faisons comme si le sujet n'existe plus.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que la réforme sera relancée avant la fin du quinquennat ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Ce qui est sûr c'est que les réflexions…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il faut…

AMELIE DE MONTCHALIN
Il faut réfléchir, et il faut…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il faut la relancer ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Il faut relancer les questions qui sont, comment on travaille plus dans notre pays, comment… voyez, en tant que ministre de la Fonction publique, je vais parler du sujet qui me concerne, tout le système de rémunération des fonctionnaires aujourd'hui, sur le sujet à la fois des salaires, on va y revenir j'imagine, mais également le sujet des retraites, nécessite qu'on le pose à plat. Est-ce que vous savez que beaucoup de fonctionnaires…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc terminé les régimes spéciaux ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Mais, terminé le fait, par exemple, que quand vous êtes fonctionnaire, parfois la moitié de votre salaire ne cotise pas aux retraites, est-ce que c'est logique que quand dans un pays on veut valoriser le travail, la moitié parfois du salaire ne cotise pas aux retraites…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Terminé les régimes spéciaux ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Est-ce que c'est logique que dans la Fonction publique, de ce fait, on prend uniquement les six derniers mois, considérant que le reste de votre carrière ne compte pas, ce n'est pas logique, ça crée des inégalités, ça crée…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Entre le public et le privé.

AMELIE DE MONTCHALIN
Beaucoup aussi de défiance, donc nous on doit poser sur la table un enjeu, c'est que pour réussir la relance il faut qu'on soit extrêmement mobilisés, qu'au coeur de la relance il y a le sujet du travail, et qu'au coeur du travail il y a le sujet des retraites, tout ça se tient ensemble.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc, la réforme des retraites sera relancée avant la fin du quinquennat ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Ce que je peux vous dire c'est que, d'abord il serait suicidaire et irresponsable de considérer que ce sujet n'est plus un sujet.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, mais ça j'ai compris…

AMELIE DE MONTCHALIN
Le sujet ce n'est pas le quand, c'est le comment, c'est le pourquoi, c'est…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas le quand, vous pensez que les Français ne s'intéressent pas au quand ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Mais, ce sera un arbitrage que prendront le président et le Premier ministre, mais ce que je peux vous dire aujourd'hui…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous, vous êtes favorable à la relance de…

AMELIE DE MONTCHALIN
Alors moi je suis très favorable… voyez, j'ouvre aujourd'hui, alors que le président tient un sommet social…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais est-ce que vous êtes favorable, oui ou non, à la relance de la réforme des retraites avant la présidentielle ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Je suis favorable à ce que nous parlions, en toute transparence aux Français, d'enjeux qui sont très liés à la relance, qui est de savoir comment le travail paye, comment on soutient les actifs, comment les actifs ne sont pas deux à qui on remet des cotisations, et des cotisations pour faire tenir un système qui n'est plus équilibré, comment on travaille sur par exemple l'emploi des seniors, vous savez qu'on a 7 % de taux d'emploi de moins des seniors par rapport au reste de la zone euro…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.

AMELIE DE MONTCHALIN
Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que c'est un de nos premiers défis, travailler plus, c'est déjà que ceux qui sont en âge…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Premier défi, c'est de trouver de la main-d'oeuvre, premier défi, c'est de favoriser et de relancer l'emploi.

AMELIE DE MONTCHALIN
Mais c'est aussi ceux qui sont en âge de travailler puissent travailler, les jeunes, les seniors, et en tant que ministre de la Fonction publique…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais ils peuvent, mais ils peuvent les seniors, ils peuvent cumuler…

AMELIE DE MONTCHALIN
Pourquoi j'ouvre…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Retraite et travail…

AMELIE DE MONTCHALIN
Oui, ils peuvent aussi... on peut peut-être s'assurer qu'ils ne soient pas au chômage à 50 ans ou à 55 ans. C'est quand même un grand sujet de mobilisation collective. Donc, moi, mon engagement, c'est qu'un système politique qui considérait que parce que nous sommes 10 mois avant la présidentielle, eh bien, les sujets qui sont des sujets majeurs devant nous, ne sont plus des sujets, ça s'appelle être irresponsable, c'est-à-dire, faire du théâtre politicien plutôt que de travailler sur les enjeux du pays…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il n'y a pas, Amélie de MONTCHALIN, la volonté de relancer la réforme des retraites pour ne pas laisser ce sujet à l'opposition, et notamment à Xavier BERTRAND, n'est pas une tactique politicienne, purement politicienne ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Ecoutez, moi, ce matin, je réunis toutes les organisations syndicales, tout comme le président réunit tous les dirigeants syndicaux, pour le secteur privé de son côté, pour le secteur public du mien, pourquoi j'ouvre cette conférence sur les perspectives salariales…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour le pouvoir d'achat…

AMELIE DE MONTCHALIN
Parce que je considère qu'il y a beaucoup de sujets où nous devons prendre nos responsabilités, pas par tactique politicienne, pas pour occuper le terrain…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Sur la réforme des retraites, tout le monde a des doutes…

AMELIE DE MONTCHALIN
Dans ce qui me concerne, ce n'est pas de la tactique politicienne, ce n'est pas de l'opportunisme, ça s'appelle l'esprit de sérieux, nous avons aujourd'hui un système de rémunérations et des carrières qui est bloqué, qui est illisible, qui n'est pas attractif…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Pouvoir d'achat des fonctionnaires, alors, parlons-en…

AMELIE DE MONTCHALIN
Qui rend quand même le sujet des retraites, on en a parlé, très compliqué dans la Fonction publique…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, tous les syndicats sont contre la reprise de la réforme des retraites…

AMELIE DE MONTCHALIN
Tous les syndicats, je peux vous dire, qui seront à la table aujourd'hui, et je les réunis dans quelques heures, sont très, très intéressés et très ouverts à ce que, enfin, on pose à plat tous les sujets, et que dans les 6 mois qui viennent, on soit capable de faire avancer des sujets qui parfois n'ont jamais été ouverts depuis des décennies. On prend nos responsabilités…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, Amélie de MONTCHALIN, le pouvoir d'achat des fonctionnaires, sujet non-ouvert depuis des décennies, c'est ce que vous dites, eh bien, moi, j'ai vu, j'ai regardé, 5.660.000 agents de la Fonction publique, vous avez rendez-vous donc avec les syndicats tout à l'heure, le point d'indice n'augmentera pas. Est-ce que le point d'indice augmentera ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Il n'augmentera pas, parce que ça aurait été une mesure de facilité…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, il est gelé depuis plus de dix ans, on est bien d'accord, sauf en 2016, exception, où il a augmenté…

AMELIE DE MONTCHALIN
Est-ce que je peux reprendre…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais oui, non, mais je vous…

AMELIE DE MONTCHALIN
Pour nos auditeurs le sujet au départ…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, je vous pose la question. Alors, attendez, est-ce que le point d'indice augmentera, vous dites non ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Il n'augmentera pas, parce que l'augmenter, ça veut dire, pour ceux qui nous écoutent, augmenter tout le monde, vous voyez, de l'agent administratif jusqu'au directeur du ministère, du même pourcentage, si j'augmentais le point d'indice de 1%, ceux qui sont en bas de l'échelle, ils gagnent entre 10 et 14 euros de plus par mois l'année prochaine, et c'est le maximum de ce qui a été fait depuis des quinquennats, en général, en fin de quinquennat, augmenter le point d'indice, c'est une mesure électoraliste, tout le monde était content, tout le monde avait la même augmentation, je ne sais pas si les gens étaient si contents que ça, parce que ça a créé derrière le fait que ceux qui avaient le plus besoin, ceux qui sont dans des métiers dont on ne parle jamais, qui sont des gens oubliés, qui étaient ceux qui étaient en première ligne de la continuité du service public pendant cette crise sanitaire, c'est-à-dire les agents administratifs, les cantonniers, les agents d'accueil, tous ces métiers qu'on appelle les catégories C, dont le salaire est le plus proche du SMIC, ce sont des gens qui, si vous augmentez de 1% le salaire de tout le monde, pour eux, ça fait 10 à 14 euros, et pour les directeurs de ministères, ça fait des centaines d'euros, alors, la décision que je prends ce matin, et que je vais annoncer, c'est que, au lieu que ça coûte 1% du point d'indice, ça coûte 2 milliards d'euros aux finances publiques, c'est que pour une enveloppe plus petite, mais extrêmement ciblée, je vais être capable d'augmenter de 40 à 100 euros pour les agents de l'Etat qui sont le plus près du SMIC par mois le pouvoir d'achat. Pourquoi on fait ça…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Attendez, attendez, attendez, 40 à 100 euros, c'est l'annonce que vous faites là, 40 à 100 euros de plus par mois nets ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Nets pour les agents de l'Etat, selon l'ancienneté quand on est, comme on dit, en catégorie C, c'est-à-dire quand on est…

JEAN-JACQUES BOURDIN
En catégorie C, c'est la catégorie la plus basse, on est bien d'accord...

AMELIE DE MONTCHALIN
Exactement.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Combien d'agents de l'Etat sont concernés ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Les agents de l'Etat, il y en a des centaines de milliers, ça concerne aussi les agents qui sont…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Combien d'agents de l'Etat sont concernés ?

AMELIE DE MONTCHALIN
1,2 million d'agents dans les trois Fonctions publiques, parce que ça concerne aussi les agents de la territoriale, hospitalière…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Trois Fonctions publiques, 40 à 100 euros de plus, on est bien d'accord, nets, pour 1,2 million de fonctionnaires ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Pour l'Etat, ça fait ces calculs-là…

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est bien cela ?

AMELIE DE MONTCHALIN
C'est cela que ça fait pour l'agent de l'Etat, après, on a des différences…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, mais attendez, attendez, agent de l'Etat, agent des trois Fonctions publiques ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Tout à fait, 1,2 million d'agents, de catégorie C…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui vont toucher, 1,2 million agents qui vont toucher entre 40 et 100 euros de plus par mois ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Pourquoi on fait ça, Monsieur BOURDIN ?

JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, mais c‘est ça ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Oui, c'est ça, c'est ça que je vous dis. Mais pourquoi on fait ça ? Parce que depuis des années, quand vous faisiez l'augmentation générale, pour les gens qui ont le moins, ça fait très peu d'euros, et pour les gens qui ont déjà beaucoup, ça fait beaucoup d'euros…

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est ce que vous m'avez dit, donc…

AMELIE DE MONTCHALIN
Et derrière, c'est quoi ? C'est la lutte contre les inégalités…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Dites-moi, les contractuels, ils sont concernés aussi ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Bien sûr, les contractuels, on va s'assurer déjà qu'ils sont tous au-dessus du SMIC, on va relever les salaires aussi des contractuels, on va s'assurer que, notamment, on ait plus de promotions, parce qu'il y a aussi beaucoup de ces hommes et ces femmes pour qui les promotions n'arrivent que très peu souvent, voire jamais, on va aussi s'assurer, regardez, qu'à salaire égal, qu'à travail égal, on ait salaire égal, vous avez des gens, ils font le même métier, le même, même métier, ils ne sont pas dans le même ministère, ils ne gagnent pas le même argent à fin du mois, c'est un scandale.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Puis, les femmes sont moins payées que les hommes…

AMELIE DE MONTCHALIN
Les femmes, on va lancer un baromètre de l'égalité, comme dans le privé, il y a un index, vous savez, qui permet de comparer très précisément, moi, mon combat, c'est que depuis 2017, on a une politique salariale cohérente, il y a des métiers sur lesquels on était en retard, je pense aux enseignants, aux forces de l'ordre, aux soignants, il y a aussi des inégalités au sein de la Fonction publique sur les bas salaires, sur les hommes et les femmes, sur les inégalités entre Paris et la province, et donc moi, je suis la ministre qui, de manière extrêmement efficace, utilise chaque euros d'argent public pour combler les inégalités, pour s'assurer qu'on ne fait pas du saupoudrage, qu'on ne fait pas de l'électoralisme, qu'on ne fait pas de la facilité, alors c'est sûr que c'est un débat plus à difficile à conduire…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors rien pour les fonctionnaires catégorie A et B, tout pour les fonctionnaires catégorie C, et vous allez aussi prendre en charge une partie de la complémentaire santé à partir de quand ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Et l'autre point, c'est que, comme je vous l'ai dit, il n'y a pas rien pour les A et B, parce que, quand on fait la convergence, quand vous faites le même métier dans deux ministères, que vous soyez A, B ou C, ce n'est pas normal que vous n'ayez pas le même salaire. Et ça, je le fais pour tout le monde. Mais il y a une autre inégalité effectivement, que vous citez, je pense que les Français ne savent pas que les fonctionnaires paient eux-mêmes tout seuls leur mutuelle santé, dans le privé, 50% est pris en charge par l'employeur, dans le public, jusqu'à maintenant, c'était zéro. Donc moi, j'ai mené une négociation qui s'est terminée avec un accord majoritaire, et nous sommes en train de faire que dès le 1er janvier 2022, tous les agents de l'Etat, tous les agents de l'Etat auront 15 euros par mois sur leur feuille de paye pour les aider à payer leur mutuelle, et ensuite, tous les fonctionnaires des trois versants, entre 2024 à 2026, auront la prise en charge de 50 % de leur mutuelle santé. Moi, je suis le ministre, vous voyez, qui tient des engagements concrets, politiquement, la Fonction publique, quand vous écoutez aujourd'hui ce qu'on dit à droite, qu'est-ce que vous entendez ? C'est compliqué, il n'y a qu'à mettre à bas le statut, ce n'est pas de la facilité, et c'est caricatural. Quand vous écoutez à gauche, on vous dit : ah, Monsieur MACRON ne fait pas assez pour les plus démunis, avec ce qu'on fait, là, alors que la gauche, elle, a toujours fait des mesures générales de facilité, moi, je cible les actions, et surtout, nous allons ouvrir, comme je vous l'ai dit, une conférence de dialogue social sur ce système…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Quand ?

AMELIE DE MONTCHALIN
Qui commence aujourd'hui, qui se terminera en février, et tous les sujets de carrière, de mobilité, de promotion, d'avancement, de valorisation aussi des uns et les autres, vu l'engagement qu'ils mettent dans leur travail, nous devons regarder comment c'est valorisé sur les salaires. C'est une conférence qui n'a jamais eu lieu, parce qu'aujourd'hui, entre les échelons, les grades, les catégories, personne ne s'y retrouve, et ça a une conséquence, c'est que les jeunes ne viennent plus rejoindre la Fonction publique, or, on a besoin des talents, on a besoin de l'engagement, et on a besoin que ce service public auquel croient les Français, eh bien, les hommes et les femmes qui le font vivre soient reconnus à la hauteur de leur investissement, en particulier quand ils sont avec les plus bas salaires, et c'est le combat que je mène.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Amélie de MONTCHALIN d'être venue nous voir ce matin sur RMC et BFM TV.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 15 juillet 2021