Interview de Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée, chargée du Renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement, à CNews le 29 février 2024, sur l'inscription de la liberté de recourir à l'interruption volontaire de grossesse dans la Constitution, la situation en Ukraine et la construction de places de prison.

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Intervenant(s) : 

Média : CNews

Texte intégral

ROMAIN DESARBRES
Il est 7h30. Merci à vous d'être là. Nous accueillons Prisca THEVENOT. Bonjour Prisca THEVENOT.

PRISCA THEVENOT
Bonjour.

ROMAIN DESARBRES
Porte-parole du Gouvernement. On va revenir avec vous dans un instant sur l'actualité numéro un de ces dernières heures, c'est le vote du Sénat qui introduit le vote du Congrès, donc du Parlement, qui aboutira à l'inscription de l'interruption volontaire de grossesse dans la Constitution. On va en parler avec vous dans un instant. Tout d'abord, le journal.

/// Journal ///

ROMAIN DESARBRES
Prisca THEVENOT, avec nous, porte-parole du Gouvernement. Merci d'être là, Prisca THEVENOT.

PRISCA THEVENOT
Merci.

ROMAIN DESARBRES
Je voulais vous entendre évidemment sur l'inscription de l'IVG dans la Constitution. Le vote du Sénat n'était pas gagné d'avance, le président de la République a souligné hier soir une victoire historique, c'est le cas ? C'est ce que vous pensez, c'est une victoire historique pour les femmes ?

PRISCA THEVENOT
Effectivement, oui. Le 4 mars 2024 va être une date historique pour notre pays et pour les femmes du monde entier. Nous allons pouvoir sanctuariser un droit important pour les femmes, comme vous l'avez dit, le Président de la République va réunir en Congrès à Versailles le Parlement pour pouvoir avoir cette grande avancée nécessaire et essentielle.

ROMAIN DESARBRES
Ça ne sera qu'une formalité lundi pour le vote du Congrès ?

PRISCA THEVENOT
Un vote est toujours un vote.

ROMAIN DESARBRES
Mais a priori, il y aura la majorité des 3/5e ?

PRISCA THEVENOT
A priori, nous serons sur une date historique.

ROMAIN DESARBRES
Prisca THEVENOT, qu'est-ce que vous dites à ceux qui, comme au RN ou chez Reconquête!, estiment que c'est une fausse urgence que d'inscrire l'IVG dans la Constitution ? Que le droit à l'avortement en France n'est pas mis en danger ?

PRISCA THEVENOT
Mais rien que de le dire justifie que nous soyons plus attentifs que jamais. Parce que, moi, ce que je vois, c'est que depuis quelques jours, quelque temps, nous avons effectivement un Rassemblement national qui est très bavard, qui est très loquace, qui est très bruyant, et depuis hier, silence radio. Rien. Plus rien ! Celle qui, Marine LE PEN, passe son temps à dire qu'elle défendra la voix des femmes, celle qui est l'égérie féminine d'une famille politique, finalement, n'est pas si présente que ça pour défendre des droits très fragiles. Et ce n'est pas moi qui le dis seulement, nous pouvons le constater sur la scène internationale, sur la scène européenne, nous devons sanctuariser ce droit important. Et là encore, à nouveau, Marine LE PEN se terre dans ce qu'elle sait faire de mieux, c'est-à-dire, le silence et le camouflage.

ROMAIN DESARBRES
Alors Edwige DIAZ, députée du Rassemblement national, a écrit : les Français ont du mal à se nourrir, les agriculteurs sont en crise, et là, on essaie de détourner l'attention et de faire croire qu'il s'agit, là, d'une journée historique, alors que c'est un droit qui n'est pas du tout remis en question aujourd'hui. Il y a d'autres urgences.

PRISCA THEVENOT
Mais bien sûr, ce n'est pas absolument pas remis en question, ce n'est absolument pas remis en cause, juste en regardant ce qui se passe, pas si loin de chez nous, en Pologne, en Hongrie, il y a eu effectivement de grandes manifestations, parce que ce droit a été remis en cause, quand, et force est de constater, les extrêmes, l'extrême droite, arrivent au pouvoir, eh bien, c'est le premier droit auquel ils touchent. Et Cameron, Cameron DIAZ (sic), pardon, Edwige DIAZ, décidément, il est tôt ! Edwige DIAZ, eh bien, rappelle que nous devons le sanctuariser. Donc oui, le 4 mars sera extrêmement important pour les femmes de France, n'en déplaise à Marine LE PEN.

ROMAIN DESARBRES
Prisca THEVENOT, je voulais vous entendre également sur d'autres sujets, et Dieu sait qu'il y en a. Vous êtes porte-parole du Gouvernement. Je profite de votre de votre présence, l'Ukraine, c'est un sujet qui inquiète beaucoup les Français, l'Ukraine. Le Président La République a donné le sentiment qu'il pouvait enclencher l'envoi de troupes occidentales au sol, en disant qu'il ne l'excluait pas. Il a été contredit par les autres pays européens, et 76 % des Français ne veulent pas que la France envoie des troupes au sol en Ukraine. Est-ce que c'est plus qu'une maladresse de la part du président de la République ?

PRISCA THEVENOT
Je pense qu'au-delà d'un sentiment, comme vous le dites, il y a une réalité, celle du durcissement de la Russie, de sa position. Et ce n'est pas un fantasme, c'est des faits. La mort de NAVALNY, les menaces de MEDVEDEV, les cyberattaques, les ingérences informationnelles, c'est du concret. Alors, que faisons-nous ? On attend de se faire complètement satelliser ? On attend cette menace étrangère en restant les bras croisés ? Nous devons agir en responsabilité. Et donc, oui, nous devons continuer à soutenir l'Ukraine. Nous devons avoir les yeux grands ouverts sur ce qui se passe et ne pas avoir la main qui tremble pour continuer à défendre les intérêts des Français en Européens, et ça, il faut le voir…

ROMAIN DESARBRES
Et donc, il faut se préparer à une guerre avec l'envoi de troupes au sol ?

PRISCA THEVENOT
Mais attendez, arrêtons d'inverser la situation. Qui est l'agresseur ici ? Qui est l'agresseur ? C'est Vladimir POUTINE. Et ça, il ne faut pas l'oublier. Je pense qu'on passe beaucoup de temps en ce moment à pointer du doigt un président de la République, en l'occurrence, le nôtre, qui défend nos intérêts, et oublier de regarder celui qui agresse, pas depuis dix semaines, pas depuis quelques mois, mais depuis deux ans. Depuis deux ans, il ne cesse de progresser. Alors, soit on reste ici et on se dit : les menaces étrangères, finalement, ce n'est pas grave, soit, on se mobilise, et je pense qu'en Français, nous devons nous mobiliser pour défendre nos intérêts et nos valeurs.

ROMAIN DESARBRES
Gabriel ATTAL a sous-entendu à l'Assemblée que les députés RN étaient des représentants de Moscou. Il a dit aux élus RN : c'est à se demander si les troupes de Moscou ne sont pas déjà à Paris. Vous partagez son point de vue ?

PRISCA THEVENOT
Mais je pense que la réaction de Marine LE PEN a montré qu'il avait raison. Je l'ai entendue hier au Salon de l'agriculture, si je ne m'abuse, ou avant-hier, et je l'ai vue quelque peu énervée. Elle est sortie littéralement de ses gonds, parce que c'est vrai que celle qui est passée experte dans l'art du camouflage, dans le silence, eh bien, oui, elle est démasquée. Elle est démasquée aussi bien sur sa capacité à agir en France, mais aussi en Européenne, parce qu'elle a un groupe de parlementaires au niveau du Parlement européen, et quand il a s'agit de soutenir NAVALNY, quand il a s'agit de soutenir l'Ukraine ou de dénoncer, eh bien, le Kremlin, elle a dit : non, non et encore non. Alors, peut-être pourra-t-elle nous dire : oui, mais en fait, au Parlement européen, c'est Jordan BARDELLA qui gère, et comme sur les prix plancher, il n'a pas compris ce qu'il fallait faire ou ce qu'il fallait dire. Eh bien, on va voir ce qu'elle va, elle, dire et faire, parce que le sujet va être présenté au Parlement sur notre soutien à l'Ukraine, et on va voir ce qu'elle va pouvoir dire.

ROMAIN DESARBRES
Quand vous parlez d'art du camouflage, vous dites que le RN, concrètement, défend les intérêts russes en France, c'est ça ?

PRISCA THEVENOT
Je ne le dis pas concrètement, je le dis fermement, je le dis fermement. Et ce n'est pas simplement des paroles en l'air, ce sont des votes qui le confirment. Je le dis à nouveau au Parlement européen en permanence quand il s'agit de pointer du doigt, de dénoncer le régime de POUTINE. Soit, ils sont absents, ils ont piscine, soit, ils sont absolument contre. Donc maintenant, je dis peut-être qu'elle s'est trompée. Il y aura un débat prochainement, J'espère qu'elle sera là.

ROMAIN DESARBRES
Prisca THEVENOT, je voulais vous entendre également sur ce sondage qu'on dévoile ce matin, sondage CSA pour CNews/Europe 1, Le Journal du dimanche, le JDD. 83 % des Français estiment qu'il faut construire plus de places de prison. Il en manque 30 000 aujourd'hui. Comprenons bien, 15 000 sont incarcérés. Il y a 61 000 places, 76 000 personnes incarcérées, donc 15 000 en trop, et 15 000 qui sont sous bracelet, condamnées à de la peine de prison ferme, donc il manque 30 000 places. Est-ce qu'il faut construire plus de places de prison ? Tiens, je vous pose la question…

PRISCA THEVENOT
Bien sûr, mais bien évidemment…

ROMAIN DESARBRES
Alors, pourquoi on ne le fait pas ?

PRISCA THEVENOT
Mais on le fait…

ROMAIN DESARBRES
Pourquoi on ne le fait pas assez ?

PRISCA THEVENOT
On le fait, déjà, il faut dire qu'il y a la mise en place du plus grand plan de construction de prisons avec Emmanuel MACRON depuis 2017, c'est 15 000 places supplémentaires, c'est une cinquantaine, concrètement, de centres supplémentaires. Déjà, il y en a 19 qui ont été livrés dès l'année dernière. C'est fait par exemple à Meaux, à Caen, à Montpellier, et nous allons à cette année pouvoir livrer la moitié de ce qui a déjà été annoncé, et le reste d'ici à 2027. Donc, ça arrive. Les Français ont raison d'être exigeants dessus, et nous serons à la hauteur de leurs exigences.

ROMAIN DESARBRES
Autre question très importante, primordiale la question des aides sociales et la question des finances de l'État. On est endetté à hauteur de plus de 3 000 milliards d'euros. Le chiffre commence à rentrer dans la tête des Français. 3 088 exactement. Gabriel ATTAL veut tailler dans les dépenses sociales. Il va falloir faire des économies. 10 milliards déjà ont été annoncés par Bruno LE MAIRE. L'économie va ralentir dans les prochains mois, et donc les recettes vont ralentir. Est-ce qu'il va falloir réduire les dépenses sociales ?

PRISCA THEVENOT
Est-ce qu'il faut réduire les dépenses, tout court ? Oui, maintenant, avec du bon sens. C'est-à-dire qu'on doit réduire nos dépenses là où on peut, mais on doit continuer à investir là où on doit ; de façon très concrète, sur le social, on en a beaucoup parlé, je pense, sur vos plateaux, il y a par exemple l'AME, l'Aide Médicale d'État, il ne s'agit pas de la supprimer, je le redis quand même pour être sûre, mais de la réformer. Sur la base de quoi ? D'un rapport qui avait été fait par STEFANINI et EVIN. Là, vous voyez déjà que nous avons des pistes d'amélioration, aussi bien pour l'efficacité de ce dispositif, mais aussi pour l'efficacité des dépenses publiques. Nous devons pouvoir continuer. Ensuite, il y a un certain nombre d'autres sujets sur lesquels nous devons aussi avancer en cohérence, par exemple sur MaPrimeRenov', on nous a dit en permanence qu'on allait complètement supprimer MaPrimeRenov'. Non, pas du tout. On regarde en cohérence. L'année dernière, sur l'ensemble du budget qui a été alloué sur MaPrimeRenov', il y en a une grande partie qui n'a pas été utilisée, 300 millions d'euros. Eh bien voilà ! En fait, il faut regarder ligne par ligne…

ROMAIN DESARBRES
Ligne par ligne. La ligne des APL, on y touche ou pas ?

PRISCA THEVENOT
La ligne des APL, pour l'instant, il n'y a pas eu le sujet d'y toucher. Et d'ailleurs, au contraire, ça a même été augmenté depuis le début du quinquennat.

ROMAIN DESARBRES
Edouard PHILIPPE dit que la politique du logement coûte 40 milliards d'euros par an, qu'elle n'est pas efficace, qu'on pourrait la raboter de 10 milliards.

PRISCA THEVENOT
Eh bien, Edouard PHILIPPE pose un constat très simple : est-ce que nous devons être meilleurs sur le sujet du logement ? Oui, et c'est ce à quoi s'attelle justement mon collègue Guillaume KASBARIAN.

ROMAIN DESARBRES
Prisca THEVENOT, merci d'avoir été avec nous. Merci d'être venue ce matin sur le plateau de La Matinale. Bonne journée à vous.

PRISCA THEVENOT
Merci.

ROMAIN DESARBRES
Vous êtes ministre également déléguée à la Rénovation (sic)…

PRISCA THEVENOT
Non au Renouveau démocratique…

ROMAIN DESARBRES
Au Renouveau démocratique… bon, rénovation démocratique, Renouveau démocratique, effectivement, Renouveau démocratique. Merci beaucoup d'être venue ce matin sur le plateau de La Matinale.

PRISCA THEVENOT
Merci à vous.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 4 mars 2024