Le rapport Coûts des normes et de l’enchevêtrement des compétences, remis par Boris Ravignon, maire de Charleville-Mézières et président d'Ardenne Métropole, pointe "un niveau de complexité préjudiciable" du partage des compétences entre collectivités territoriales et entre l’État et les collectivités. Il en résulte un "enchevêtrement des interventions" qui "altère la lisibilité de l’action publique" locale – source d'une perception confuse des citoyens sur la quasi-totalité des politiques publiques.
Un "millefeuille" territorial coûteux
Le "millefeuille" territorial engendre des coûts annuels estimés par la mission à 6 milliards d'euros (Md€) pour les collectivités et 1,5 milliard d'euros pour l'État, soit 7,5 Md€.
Ces coûts pèsent principalement sur les communes (4,8 Md€), d'une part du fait qu'elles sont les collectivités les plus nombreuses, et d'autre part, parce qu'elles gèrent les écoles, une compétence qui leur impose de se coordonner avec l'État et les autres échelons.
Viennent ensuite les intercommunalités (696 millions d'euros – M€), les départements (355 M€) et les régions (117 M€).
À eux seuls, les coûts liés à la coordination entre les administrations exerçant conjointement une politique publique représentent 85% du coût annuel de l'enchevêtrement des compétences. Parmi les compétences dont le partage coûte le plus cher, la mission cite l'enseignement (1,2 Md€), l'urbanisme (819,5 M€) et la voirie (566 M€).
Les financements croisés, qui correspondent aux flux entre collectivités ou avec l'État, principalement sous la forme de subventions aux investissements locaux, représentent "des montants considérables" (14 Mds€) ; leurs coûts de gestion sont estimés à 974 M€.
Pour une décentralisation plus efficace
La mission affirme que "la France n’a pas une catégorie de collectivités à supprimer, une strate d’élus à liquider pour que tout s’arrange". Elle préconise de rendre la décentralisation plus efficace en alignant responsabilités, compétences, moyens partout où cela est possible, par exemple :
- au niveau des départements, en unifiant les responsabilités en matière de grand âge et de handicap, domaines où les services de l'État interviennent encore largement ;
- au niveau des intercommunalités, en procédant à l'unification de la responsabilité de la politique de la ville, et le chef de filât en matière d'équipements culturels et sportifs ;
- en confiant la charge de la tranquillité publique aux communes de plus de 20 000 habitants…
Un nombre important de compétences restent partagées en droit par tous les niveaux d’administration (culture, sport, tourisme…). D'une façon globale, la mission préconise de réviser la liste des compétences partagées afin d’identifier des chefs de file.
La "refondation complète" du financement des collectivités est jugée indispensable ; elle permettrait de dépasser la défiance qui a pu s'instaurer entre les collectivités et l’État, et de revoir profondément le partage des responsabilités et des compétences.
L’État demeure très présent dans les politiques publiques décentralisées (schémas, contractualisation…). En termes de normes applicables aux collectivités, deux axes de progrès sont identifiés :
- un processus de création plus respectueux du principe de libre administration, en tirant un meilleur parti du Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) ;
- la simplification des normes existantes, gisement de "gains financiers significatifs".