Au total, 1,6 million d'amendes forfaitaires délictuelles (AFD) ont été établies en France entre 2019 et 2024, selon une étude du service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI).
Une procédure pénale simplifiée
Introduite par la loi du 18 novembre 2016, l’amende forfaitaire délictuelle (AFD) permet de sanctionner immédiatement certains délits par une amende, sans passer devant un juge. D’abord réservée aux infractions routières (conduite sans permis ou sans assurance), la procédure a été progressivement étendue à de nouveaux délits. Depuis 2020, elle s’applique à l’usage de stupéfiants, et depuis 2022, aux occupations illicites d’espaces communs d'immeubles ou de terrains.
La loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur, promulguée en janvier 2023, a élargi la liste à 85 autres infractions : vols simples, déchets sauvages, tags ou encore détention et usage de fumigènes... À l’origine, le gouvernement souhaitait généraliser l'amende forfaitaire délictuelle à tous les délits passibles d’un an de prison maximum, soit 3 400 infractions.
Conçue pour désengorger les tribunaux et simplifier la procédure pénale, l'amende forfaitaire délictuelle soulève aussi des questions sur le respect des droits des usagers. En mai 2023, la Défenseure des droits a appelé à supprimer ce dispositif, dénonçant des dysfonctionnements majeurs (difficulté pour contester l'amende, risque d’arbitraire dans la verbalisation...).
Un dispositif en plein essor
En 2024, la police et la gendarmerie nationales ont enregistré 499 900 amendes forfaitaires délictuelles (AFD), soit 10% de l’ensemble des délits constatés en France. C'est près de neuf fois plus qu’en 2019 (57 300 AFD enregistrées). Cette hausse s’explique à la fois par l’élargissement progressif du dispositif à de nouveaux délits et par un recours accru des forces de l'ordre à cette procédure, selon l'étude du ministère de l'intérieur.
Presque la totalité des amendes forfaitaires délictuelles ont concerné trois infractions en 2024 : le défaut d’assurance (41%), l’usage de stupéfiants (39%) et le défaut de permis de conduire (9%).
La proportion d’AFD parmi l’ensemble des délits enregistrés sur le territoire augmente d'année en année, quelle que soit la catégorie de délit. Toutefois, les AFD sont moins fréquentes parmi les vols simples (5%), les installations en réunion sur le terrain d’autrui (2%) et les dépôts illégaux de déchets (moins d’1%).
Une hausse des infractions dans les territoires les plus concernées par ce type d'amende
Le recours aux AFD varie fortement d'un département à l'autre. Pour les défauts d’assurance par exemple, les trois quarts des départements affichent un taux d’utilisation inférieur à la moyenne nationale, tandis que Paris, les Yvelines, Mayotte ou la Guyane dépassent les 81%.
L’usage plus fréquent de ce dispositif dans certains territoires semble aussi associé à une hausse plus marquée du nombre d’infractions. Entre 2019 et 2024, les délits pour usage illicite de stupéfiants ont progressé de 161% dans les départements les plus concernés par les AFD, contre 47% dans les départements les moins concernés.
Par ailleurs, le profil des personnes mises en cause pour certains délits a évolué du fait de la mise en place des AFD. Ce dispositif ne s’applique pas aux mineurs, ni aux personnes en récidive, impliquées dans plusieurs infractions ou sans domicile connu. Entre 2016 et 2018, les mineurs représentaient 17% des mis en cause pour usage de stupéfiants et 24% pour vol à l’étalage. En 2024, ces chiffres tombent à 4% et 5%.