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© Henry Nicholls/AFP

Proposition de loi visant à réduire l'impact environnemental de l'industrie textile

Temps de lecture  8 minutes

La proposition de loi prévoit plusieurs mesures pour réduire la pollution engendrée par la "fast fashion" : définition de la mode ultra express, sensibilisation des consommateurs, interdiction de la publicité, taxe sur les petits colis, gestion des déchets. Jamais autant de vêtements neufs n’ont été mis sur le marché, ni jetés.

Où en est-on ?

  1. Étape 1 validée

    Dépôt au parlement

    30 janvier 2024

  2. Étape 2 en cours

    Examen et adoption

    10 juin 2025

    1ère lecture

  3. Étape 3 à venir

    Promulgation

Qu'est-ce que la procédure législative ?

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Le 10 juin 2025, le Sénat a adopté, avec modifications et à l'unanimité, la proposition de loi en première lecture. Le gouvernement a notifié le texte à la Commission européenne, avant la réunion à l'automne 2025 d'une commission mixte paritaire chargée de trouver un accord sur une version finale.

La "fast fashion", dite mode éphémère ou encore mode express en français, inonde les marchés français et européen d'articles de faible qualité à prix cassés, fréquemment renouvelés et à la durée de vie très courte. Pour inciter à l’achat, elle emploie une publicité très agressive. Les entreprises les plus emblématiques de ce modèle économique sont des grandes sociétés, implantées dans des pays d’Asie du Sud-Est, comme Shein, Temu ou AliExpress en Chine. Shein propose par exemple 900 fois plus de produits qu'une enseigne française traditionnelle. 

Cette mode éphémère a des conséquences sur les plans environnemental, social et économique. L'industrie textile est responsable de près de 10% des émissions de gaz à effet de serre (GES) mondiales et participe à l’épuisement de la ressource en eau. En outre, les enseignes de fast fashion, lointaines et délocalisées, sont problématiques sur le plan social (travail forcé, des enfants...) et fragilisent le secteur de l'habillement français (nombre d'emplois divisé par trois depuis 1990. Actuellement, 20 000 emplois sont menacés et 50 000 à terme). 

Devant les conséquences environnementales de cette industrie, la loi "Anti-gaspillage" de 2020 a introduit un bonus à la réparation des produits pour favoriser l'économie circulaire et la loi "Climat et résilience" de 2021 a prévu un affichage environnemental, dit éco-score, dans certains secteurs, dont celui du textile. 

La proposition de loi, qui a été amendée par les parlementaires et le gouvernement, envisage d'aller plus loin au travers de différentes mesures.

Définition de la fast fashion

La proposition de loi définit, dans le code de l'environnement, la pratique de la "mode ultra express" ou fast fashion. Les sénateurs ont sécurisé le texte initial et visé spécifiquement, sur proposition du gouvernement, la mode "ultra" express (et non la mode express ou éphémère en général), afin de s'aligner avec les rédactions des textes européens. L'objectif est de cibler le renouvellement extrêmement rapide des collections, et non les enseignes bon marché traditionnelles situées en France qui proposent des vêtements d’entrée de gamme.

Relèveront de cette mode ultra express les pratiques industrielles et commerciales qui consistent à mettre sur le marché un nombre élevé de références de produits neufs, dont la durée d’usage ou de vie est limitée ou dont l'incitation à les réparer est faible. Les seuils de ces références et les critères de faible incitation à réparer seront définis par décret.

Lors des débats, les députés ont inclus dans le périmètre de ces pratiques les places de marché en ligne (marketplaces comme Temu) ou autres interfaces internet qui permettent d’acheter des produits de différents vendeurs. Les sénateurs ont précisé ces règles.

En outre, la possibilité pour les acteurs de l'ultra fast fashion, de bénéficier d'un crédit d’impôt en cas de dons de leurs invendus aux associations (abattement d'impôt de 60%) est supprimée. Pour les sénateurs à l'origine de cet amendement, "il apparait en effet que cette déduction reste avant tout un outil d'optimisation fiscale pour de grands groupes pratiquant justement la mode éphémère avec, à la clé, plusieurs millions d'euros en jeu. La presse nationale s'est ainsi fait le relai d'un exemple marquant. Pour un groupe comme Shein, une ristourne fiscale de 7,2 € pour un pantalon vendu initialement 12 € peut ainsi être attendue." 

Sensibilisation des consommateurs

La proposition de loi impose aux entreprises de vente en ligne d'ultra fast fashion de mieux informer les acheteurs. Elles devront ainsi afficher sur leur site internet des messages à proximité du prix de vente des articles :

  • informant sur leur impact social, sensibilisant à leur impact environnemental y compris en matière de livraison ;
  • indiquant l'origine géographique de fabrication du vêtement ou du textile ;
  • encourageant la sobriété, le réemploi, la réparation, la réutilisation et le recyclage.

Par amendement, les sénateurs ont interdit aux acteurs de l'ultra fast fashion d'utiliser la mention "livraison gratuite" de même que toute publicité mettant en avant la gratuité de la livraison d'un produit.

Afin que les enfants deviennent des consommateurs éclairés, les sénateurs ont inclus la mode éco-responsable dans l'éducation des élèves au développement durable, prévue par le code de l'éducation.

Pénalités renforcées selon le principe pollueur-payeur

La proposition de loi introduit de nouveaux critères de modulation des éco-contributions ciblés sur la filière de responsabilité élargie des producteurs (REP) "textiles". Cette filière REP permet l'application du principe pollueur-payeur dans le secteur de l'habillement et de la chaussure. Les éco-contributions, c'est-à-dire les contributions financières acquittées par les producteurs à leur éco-organisme Refashion pour prévenir et gérer leurs déchets, sont modulées en fonction de critères de performance environnementale. Le texte ajoute aux critères existants "l’impact environnemental, notamment les atteintes à la biodiversité et l’empreinte carbone" des articles et leur durabilité liée "aux pratiques industrielles et commerciales".

Pour lutter contre les pratiques frauduleuses, les entreprises établies à l'étranger devront désigner un mandataire en France chargé des obligations découlant de la REP.

Le texte permettra surtout d'ajuster les éco-contributions de l'industrie textile en fonction du coefficient de durabilité de l'affichage environnemental (l'affichage Ecobalyse sera déployé à l’automne 2025). Les vêtements, textiles de maison et chaussures ayant la plus mauvaise performance environnementale ne pourront pas bénéficier de primes mais seront soumis à des pénalités dissuasives. Le montant des pénalités sera arrêté dans un cahier des charges ministériel mais des plafonds sont fixés dans la proposition de loi : 5 euros par article en 2025 pour atteindre progressivement 10 euros en 2030, dans la limite de 50% du prix de vente hors taxe. Ces pénalités pourront servir à financer des bonus au profit des entreprises vertueuses. 

L'éco-organisme Refashion devra utiliser une partie des éco-contributions pour financer des infrastructures de collecte et de recyclage en France, et non dans des pays étrangers comme l'avaient voté les députés.

Interdiction de la publicité

La proposition de loi prévoit une interdiction générale de toute publicité sur les médias classiques en faveur des articles ou des marques de l'ultra mode express ou fast fashion

Cette interdiction a été étendue par les parlementaires aux influenceurs commerciaux, qui l'ont précisée afin d’inclure les activités d’influence donnant lieu à des contreparties non financières (don ou prêt de vêtements, voyages et invitations diverses...). L'influenceur, qui viole cette interdiction, risquera une amende de 100 000 euros maximum.

Toute publicité pour des produits de l'ultra fast fashion devra informer sur leur impact environnemental et être accompagnée d'un message encourageant des modes de consommation plus durables, tels que l'achat de produits de seconde main ou la location. 

Ces trois mesures seront applicables à partir du 1er janvier 2026

Taxe sur les petits colis expédiés de l'étranger

Une dernière disposition, introduite au Sénat, permettra de taxer les petits colis (de moins de 2kg) expédiés en France à des particuliers.

Cette taxe sera due par les places de marché et autres plateformes en ligne établies hors Union européenne (UE) qui livrent des produits. Il est prévu que son montant soit fixé par arrêté. Il sera compris entre 2 et 4 euros

Cet amendement s'inspire d'une proposition faite par la Commission européenne fin mai 2025 d'imposer des frais de 2 euros sur chaque petit colis entrant en Europe, dont la quasi-totalité provient de Chine.

Enfin, deux rapports sont demandés au gouvernement : le premier sur l'opportunité d'étendre le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières aux vêtements importés de pays hors UE ; le second dressant un bilan de la mise en œuvre de mesures miroirs aux frontières du marché européen pour imposer des normes européennes à l'importation des vêtements issus de la fast fashion

  • Produire un t-shirt nécessite 2160 litres d'eau (pour un t-shirt porté trente fois - Source : Ademe) ;
  • 20% de la pollution industrielle mondiale de l'eau causés par la teinture utilisée pour les textiles (Source : Parlement européen) ;
  • L'industrie textile responsable de 4 à 8% des émissions mondiales de gaz à effet de serre ; potentiellement 26% en 2050 (source : Ademe) ;
  • 4 millions de tonnes de textile jetés chaque année en Europe ; des déchets peu recyclés (source : Ademe) ;
  • Des phénomènes accentués par la fast fashion : mode éphémère, mode éclair, mode express, mode jetable ;
  • Ses caractéristiques ? Des vêtements produits en permanence et en grand nombre, des prix bas et un marketing agressif favorisant les achats compulsifs, des matières utilisées et des méthodes de confection polluantes ;
  • Quelles alternatives pour le consommateur ?
  • Choisir des matières durables, choisir des matières moins polluantes, privilégier les matières recyclées, acheter des vêtements d'occasion ;
  • Et pour la filière textile ?
  • Faire assumer aux producteurs la responsabilité de leurs produits tout au long de la chaîne ;
  • C'est l'objectif de la stratégie européenne pour des textiles durables et circulaires (2022) ;
  • Et en France ?
  • 2021 - Loi Climat et résilience : affichage environnemental sur les vêtements ;
  • Objectif : informer le consommateur de l'impact environnemental du vêtement qu'il souhaite acheter.

Cette page propose un résumé explicatif du texte pour le grand public. Elle ne remplace pas le texte officiel.

Où en est-on ?

  1. Étape 1 validée

    Dépôt au parlement

    30 janvier 2024

  2. Étape 2 en cours

    Examen et adoption

    10 juin 2025

    1ère lecture

  3. Étape 3 à venir

    Promulgation

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