La proposition de loi traduit les recommandations d'un rapport des sénateurs Les Républicains sur la transidentité des mineurs.
Elle vise à limiter les pratiques médicales mises en œuvre auprès des mineurs dans l'indication de la "dysphorie de genre" (incongruence de genre qui génère une souffrance). La onzième révision de la classification internationale des maladies (CIM) publiée par l'Organisation mondiale de la santé définit l'incongruence de genre de l'adolescent et de l'adulte comme "une incongruité marquée et persistante entre le genre auquel une personne s'identifie et le sexe qui lui a été assigné, ce qui conduit souvent à un désir de "transition", afin de vivre et d'être accepté comme une personne du genre ressenti, par le biais d'un traitement hormonal, d'une intervention chirurgicale ou d'autres services sanitaires visant à faire correspondre le corps de la personne, autant que souhaité et dans la mesure du possible, au genre ressenti". L'OMS exclut l'incongruence de genre des troubles mentaux.
Dans une note sur le parcours de transition des personnes transgenres de 2022, la Haute Autorité de santé (HAS) a précisé que moins de 300 adolescents de 17 ans et moins en France étaient inscrits en affection de longue durée (ALD) pour "transidentité" en 2020. Ces jeunes patients sont aujourd'hui pour l'essentiel suivis par des services spécialisés à l'hôpital.
La HAS doit rendre prochainement, au ministre de la santé qui l'a saisie, ses premières recommandations sur le parcours de transition des personnes en questionnement sur leur identité de genre ou transgenres, avec pour objectif d’améliorer leur accompagnement et leur prise en charge.
L'essentiel de la proposition de loi
La proposition de loi confie le diagnostic et la prise en charge des enfants transgenres de moins de 18 ans à des centres de référence spécialisés, dont la liste serait fixée par arrêté du ministre de la santé. Leur prise en charge serait assurée par des réunions de concertation pluridisciplinaire.
La prescription de bloqueurs de puberté ne pourrait être faite que par des médecins exerçant dans un de ces centres spécialisés, "après évaluation de l'absence de contre-indication et de la capacité de discernement du mineur". Toutefois, la première prescription ne pourrait intervenir au minimum que deux ans après la première visite de l’adolescent dans un centre.
Initialement, la proposition de loi allait plus loin puisqu'elle interdisait purement de prescrire des bloqueurs de puberté aux mineurs.
Le texte interdit, par ailleurs, aux médecins de :
- prescrire des traitements hormonaux (de féminisation ou de masculinisation) à des adolescents transgenres ;
- pratiquer des actes chirurgicaux de réassignation de genre sur ces mêmes jeunes (destinés à féminiser ou masculiniser le corps ou le visage…).
Il précise que les traitements engagés avant l'éventuelle promulgation de la loi ne seraient pas interrompus.
La violation par les médecins de ces nouvelles règles sera punie de deux ans de prison et de 30 000 euros d'amende ainsi que d'une peine complémentaire d'exercer.
Le dernier article de la proposition de loi met en place une stratégie nationale pour la pédopsychiatrie.
La loi, si elle est promulguée, devra faire l'objet d'un nouvel examen par le Parlement dans cinq ans.
En séance, le ministre délégué à la santé s'est dit défavorable à la proposition de loi.
La proposition de loi a été transmise à l'Assemblée nationale, qui peut ou pas l'inscrire à son ordre du jour.
À noter : parmi les autres recommandations du rapport sénatorial sur la transidentité des mineurs, figurait l'abrogation de la circulaire du ministère de l’Éducation du 29 septembre 2021 "Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l'identité de genre en milieu scolaire."
Avis de la Défenseure des droits sur la proposition de loi
Dans un avis du 6 mai 2024 au Parlement, la Défenseure des droits s'inquiète des effets de la proposition de loi, qui est de nature à porter atteinte aux droits à la santé et à l'intérêt supérieur de l'enfant.
Le droit actuel est pertinent et le cadre d’intervention médicale auprès des mineurs transgenres doit rester celui de la poursuite de l’intérêt supérieur de l’enfant, de la bonne information par l’équipe médicale du mineur, dont la parole doit être entendue, et de ses parents et de leur consentement éclairé.
Par ailleurs, les transitions médicales d’enfants transgenres sont rares et que les interventions chirurgicales avant la majorité ne concernent qu’une infime minorité des enfants trans et s’inscrivent toujours dans un parcours médical approfondi.
La proposition de loi appelle à l'élaboration d'une stratégie nationale pour la pédopsychiatrie, ce qui "interroge" dans un texte restreint à la seule transidentité. La Défenseure des droits rappelle l’importance d’une conception non pathologique de la transidentité.
Enfin, la Défenseure des droits réitère ses recommandations concernant le respect de l’identité de genre à l’école.
Cette page propose un résumé explicatif du texte pour le grand public. Elle ne remplace pas le texte officiel.