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© Andrey Popov - stock.adobe.com

Projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales

Temps de lecture  10 minutes

Le projet de loi vient renforcer les actions déjà engagées depuis deux ans pour lutter contre les fraudes fiscales et sociales, avec le triple objectif de mieux prévenir et détecter, mieux lutter et sanctionner, mieux recouvrer. En 2024, 20 milliards d'euros de fraudes publiques ont été détectées, dont 3 milliards dans le champ social.

Où en est-on ?

  1. Étape 1 validée

    Conseil des ministres

    14 octobre 2025

  2. Étape 2 validée

    Dépôt au parlement

    14 octobre 2025

  3. Étape 3 en cours

    Examen et adoption

    18 novembre 2025

    1ère lecture

  4. Étape 4 à venir

    Promulgation

Qu'est-ce que la procédure législative ?

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Le 18 novembre 2025, le Sénat a adopté, avec modifications, le projet de loi en première lecture.

Le projet du gouvernement

Le projet de loi vise à amplifier la stratégie contre la fraude menée par l’État depuis 2023, au travers du plan interministériel de lutte contre toutes les fraudes aux finances publiques. Il complète des réformes récentes, notamment la loi du 30 juin 2025 contre toutes les fraudes aux aides publiques et la loi du 13 juin 2025 visant à sortir la France du piège du narcotrafic, qui renforce la réponse pénale face aux organisations criminelles.

L’objectif du gouvernement est de :

  • développer des outils plus performants de détection des fraudes pour couper les flux ou d'adapter les outils actuels et le régime des sanctions aux nouvelles pratiques (essor du numérique, complexification des circuits financiers...) ;
  • renforcer les moyens de recouvrement pour que l’argent public détourné soit récupéré, ce qui, dans certains schémas de fraudes, est encore insuffisamment le cas.

Mieux détecter les fraudes 

Le texte prévoit tout d'abord de décloisonner les échanges d'informations entre administrations. Il favorise la communication des informations fiscales et douanières. Il étend le droit d’accès des organismes de sécurité sociale aux bases de données patrimoniales (bases du Fisc portant sur les données patrimoniales, les transactions immobilières et les contrats d’assurance vie, de capitalisation ou de placements). 

Dans le domaine de la santé, le projet de loi favorise les échanges d’informations entre les mutuelles santé complémentaires et la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) afin de mieux lutter contre la fraude notamment dans les secteurs dentaire, de l’optique et de l’audiologie. Concernant la branche autonomie, une disposition permettra les échanges d’informations entre les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), les services départementaux chargés d’attribuer l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et les autres services autorisés à partager des informations en matière de fraude sociale. 

Les entreprises de transport sanitaire et les taxis conventionnés devront d'ici le 1er janvier 2027 équiper leurs voitures d’un logiciel de géolocalisation (certifié par l’assurance maladie) et d’un système électronique de facturation intégré. La volonté du gouvernement est de "renforcer la juste facturation des kilomètres réalisés par les transporteurs sanitaires".

Des dispositions entendent contrer la fraude qui s’est développée dans le secteur des voitures de transport avec chauffeur (VTC) à travers le rattachement de chauffeurs indépendants à des sociétés dites "de gestion de flotte". Ces structures, sans existence juridique dans le code des transports, servent souvent à contourner les obligations sociales et fiscales et à dissimuler l’emploi de travailleurs.

Le recours à l'anonymisation sera autorisé pour les contrôles de la formation professionnelle. Les contrôleurs pourront utiliser une identité d’emprunt pour effectuer une inscription en ligne auprès des organismes de formation et ainsi vérifier par exemple le contenu exact de la formation, si l’offre initiale est vague ou trompeuse.

Les caisses de sécurité sociale pourront mandater l’une d’entre elles pour déposer une plainte pénale unique lorsqu'elles constatent des fraudes en réseau commises en plusieurs endroits. Cette plainte unique permettra de gagner du temps dans la procédure.

Mieux lutter, mieux sanctionner 

Le projet de loi impose aux chômeurs résidant à l'étranger de disposer d'un compte bancaire domicilié en France ou dans l’Union européenne pour le versement de leurs allocations chômage. La non-déclaration de la résidence ou du travail à l’étranger est la principale fraude détectée subie par France Travail. Elle est en constante évolution sur les dix dernières années.

Pour maîtriser la circulation des espèces et lutter contre le blanchiment d’argent et la fraude fiscale particulièrement utilisés par les groupes criminels, les obligations imposées aux professionnels de la vente de biens de luxe sont renforcées. En outre, les revenus criminels seront taxés plus durement, avec une majoration de la contribution sociale généralisée (CSG) sur les activités illicites. 

L'interdiction de cumuler des revenus issus d’activités illicites et des prestations de chômage est posée dans la loi. L’objectif est de permettre à France Travail de tenir compte, rétroactivement, des revenus issus d’activités illégales dans le calcul des allocations chômage afin de récupérer le trop-perçu versé indûment, ce que l'opérateur ne peut pas faire aujourd'hui faute de disposition législative.

Les peines pour les escroqueries en bande organisée commises au préjudice des finances publiques sont alourdies (jusqu'à 15 ans de prison désormais). La durée possible de la détention provisoire est, en parallèle, allongée afin de pouvoir faire aboutir des enquêtes complexes. 

Les personnes qui font la promotion de la fraude risqueront des sanctions plus lourdes. Cette aggravation des peines s’accompagnera d’un renforcement des moyens d’investigations judiciaires.

Afin de contrer les fraudes fiscales internationales des personnes les plus fortunées, les sanctions et les obligations déclaratives en cas d’avoirs financiers en trusts non déclarés sont accrues.

Pour "responsabiliser" les acteurs de santé, les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) pourront désormais cumuler les pénalités financières avec les sanctions conventionnelles en cas de fraude. Par exemple, une caisse pourra appliquer des pénalités à un pharmacien surfacturant systématiquement des médicaments (ou facturant des médicaments non délivrés) et suspendre dans le même temps la convention qui le lie à l’assurance maladie. La procédure de mise sous objectif (MSO) pourra être utilisée dès la première étape pour les médecins dont le volume de prescriptions d'arrêt maladie est jugé excessif. 

Les titulaires du compte personnel de formation (CPF) sont responsabilisés. Ils devront se présenter aux épreuves prévues par l’organisme certificateur, sous peine de rembourser les sommes mobilisées.

Le champ des fraudes pouvant être constatées par les caisses en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles est étendu. Un dispositif de sur-cotisation des entreprises en cas de fraude est créé.

Mieux recouvrer

Une nouvelle procédure de flagrance sociale permettra aux URSSAF de geler immédiatement les avoirs des entreprises soupçonnées de travail dissimulé. Cette procédure doit conduire à un meilleur recouvrement des dettes sociales. Elle remplacera la saisie conservatoire par les URSSAF, qui s’avère inefficace pour recouvrer les créances des sociétés éphémères susceptibles d’organiser leur propre insolvabilité.

Le texte étend par ailleurs le devoir de vigilance des donneurs d’ordre à l’égard de leurs sous- traitants et renforce leur solidarité financière en cas de constat de travail dissimulé.

France Travail disposera de moyens élargis pour recouvrer les allocations de chômage versées à tort, notamment via des saisies administratives à tiers détenteur (SATD) par exemple auprès des banques. Cette saisie permettra de débiter le compte du fraudeur.

Enfin, les organismes de recouvrement pourront saisir la valeur de rachat des contrats d'assurance-vie dans le cadre de la procédure dite d’opposition à tiers détenteur. Cette procédure permet de bloquer des sommes détenues par un tiers, ici l’assureur, afin de les affecter au paiement des dettes sociales du cotisant débiteur.  

L'examen du texte au Parlement

Les sénateurs, en première lecture, ont modifié et complété le texte du gouvernement. Ils ont prévu l'inscription dans le Répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS) des personnes définitivement sanctionnées pour fraude caractérisée aux prestations sociales et fiscales. Ils ont également élargi, dans le cadre de l'instruction des demandes de titre de séjour, l'accès au RNCPS aux agents préfectoraux.

Les sénateurs ont également renforcé les sanctions contre la fraude au travail dissimulé et le dispositif dit de" liste noire". Ils ont durci l'amende à l'encontre des plateformes qui ne respectent pas leur devoir de vigilance vis-à-vis des exploitants VTC. Le nouveau devoir de vigilance imposé aux maîtres d'ouvrage, pour éviter l'infraction au travail dissimulé chez un sous-traitant, a été complété. 

De nouvelles prérogatives ont été conférées à France Travail pour contrer la fraude aux allocations chômage : droit de communication auprès des opérateurs de téléphonie, possibilité d’interroger le registre des Français établis hors de France et le fichier des compagnies aériennes (PNR pour passengers name record) pour vérifier le respect de la condition de résidence en France des allocataires, traitement des données de connexion des inscrits à France travail. 

En cas d'indices sérieux de fraude, France Travail pourra suspendre, à titre conservatoire, le versement d’une allocation. Il en ira de même pour les organismes de sécurité sociale s'agissant des aides, allocations ou prestations.

Un article a été ajouté pour systématiser, dans le cadre des procédures de rétablissement personnel, la non-recevabilité des dettes RSA et des prestations relevant de l’aide sociale des départements qui ont une origine frauduleuse.

Plusieurs amendements ont été adoptés pour mieux contrer la fraude au compte personnel de formation et mieux contrôler les organismes de formation.

Dans des conditions définies par décret, le bénéfice du tiers-payant des assurés condamnés pour une fraude à l'assurance maladie pourra être suspendu temporairement.

Les sénateurs ont étendu les possibilités de contrôle de l’administration fiscale pour les entreprises assujetties à la TVA. 

Ils ont, en outre, prévu une sanction spécifique en cas d'obstacle à l'exercice du droit de communication des juridictions financières (Cour des comptes, Conseil des prélèvements obligatoires...). 

Ils ont, enfin, proposé le déremboursement des prescriptions médicales émises par les professionnels déconventionnés pour fraude à l’assurance maladie. Les patients seront informés préalablement du non-remboursement, dans les mêmes conditions que celles prévues pour l’information sur les dépassements d’honoraires. 

L'Assemblée nationale doit désormais examiner le projet de loi. 

 

Cette page propose un résumé explicatif du texte pour le grand public. Elle ne remplace pas le texte officiel.

Où en est-on ?

  1. Étape 1 validée

    Conseil des ministres

    14 octobre 2025

  2. Étape 2 validée

    Dépôt au parlement

    14 octobre 2025

  3. Étape 3 en cours

    Examen et adoption

    18 novembre 2025

    1ère lecture

  4. Étape 4 à venir

    Promulgation

Qu'est-ce que la procédure législative ?

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