Les enseignants et/ou chercheurs universitaires doivent pouvoir choisir leur enseignement (contenu pédagogique, liberté d'expression, liberté de diffusion, par exemple) et/ou leur recherche sans subir de pression (politique, religieuse ou budgétaire, notamment). La liberté académique comprend aussi l'autonomie des universités.
En France, le Conseil constitutionnel a qualifié la liberté académique de principe fondamental reconnu par les lois de la République en 1984 : "les fonctions d'enseignement et de recherche non seulement permettent mais demandent, dans l'intérêt même du service, que la libre expression et l'indépendance des personnels soient garanties". Cette décision portait sur la loi du 26 janvier 1984, dite "loi Savary", qui a consacré le principe de liberté académique. Elle a ensuite été inscrite dans le code de l'éducation : "les enseignants et les chercheurs jouissent d'une pleine indépendance et d'une entière liberté d'expression dans l'exercice de leurs fonctions", selon l'article L952-2. Ces libertés sont aussi un "gage de l'excellence de l'enseignement supérieur et de la recherche français."
D'autres articles codifiés consacrent cette liberté :
- les universités doivent assurer "les conditions d'indépendance et de sérénité indispensables à la réflexion et à la création intellectuelle" (article L123-9) ;
- "le service public de l'enseignement supérieur est laïque et indépendant de toute emprise politique, économique, religieuse ou idéologique (...) Il doit garantir à l'enseignement et à la recherche leurs possibilités de libre développement scientifique, créateur et critique." (article L141-6).
En droit européen, dans son article 13, la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (UE) de 2000 dispose que "Les arts et la recherche scientifique sont libres" et que "la liberté académique est respectée".
Une recommandation du Conseil de l'Europe du 30 juin 2006 affirme aussi que la liberté académique, dans la recherche comme dans l’enseignement, doit garantir la liberté d'expression et d'action, de communiquer des informations, de rechercher et de diffuser sans restriction le savoir et la vérité. Le texte rappelle également que "l'autonomie institutionnelle des universités devrait recouvrir un engagement indépendant envers leur mission culturelle et sociale traditionnelle".
La recommandation de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco) sur les libertés académiques
Dans une recommandation adoptée en 1997, l'Unesco précise de nombreuses règles, notamment :
- la liberté académique, dans la recherche comme dans l’enseignement, doit garantir la liberté de rechercher et de diffuser sans restriction le savoir et la vérité ;
- les universités sont des communautés d’érudits qui ont pour mission de préserver et de diffuser le savoir traditionnel et la culture, d’exprimer librement leur opinion à ce sujet et de poursuivre leur quête de la connaissance sans être entravés par des impératifs doctrinaires ;
- enseigner dans le supérieur est "une profession dont les membres assurent un service public" exigeant "des enseignants le respect de normes professionnelles rigoureuses dans l’étude et la recherche". Les États membres ont le devoir de protéger l’autonomie des établissements contre toute menace, d’où qu’elle vienne.
Les atteintes à la liberté académique augmentent dans le monde. En 2024, la liberté académique a baissé dans 34 pays, dont les États-Unis, l'Argentine, la Géorgie, la Finlande, Israël. L'accès au pouvoir de certains partis menace la liberté académique.
C'est le constat de l'indice de liberté académique publié le 13 mars 2025. Élaboré à partir des évaluations d'experts dans 179 pays, cet outil évalue chaque année les niveaux de liberté selon plusieurs paramètres :
- la liberté de recherche et d’enseignement ;
- la liberté d’échange et de diffusion universitaires ;
- la liberté d’expression académique et culturelle ;
- l'autonomie institutionnelle des universités.
En 2023, le rapport constatait qu'un citoyen sur trois dans le monde vivait dans une zone de liberté académique (contre un sur deux en 2006). En 2023, 25 pays ont un score élevé de liberté académique entre 0,9 et 1 (contre 46 en 2006). Les pays européens, dont la France, sont en tête du classement. Inversement, la Chine (0,07), l'Inde (0,16) et la Russie (0,21) ont un score plus faible. Toutefois, la liberté académique a, dans le même temps, augmenté dans certains pays, dont le Brésil, le Kazakhstan, le Rwanda et la Thaïlande.
Quant aux États-Unis, les experts notent une baisse de la liberté académique depuis 2019 (0,68 en 2024). Le rapport 2025 pointe "une pression sans précédent" de l'administration de Donald Trump sur la science depuis janvier 2025. La politique "anti-science" et les attaques contre les universités (coupes budgétaires, législation restrictive...) ont pris de l'ampleur dans certains États fédéraux, selon la chercheuse Katrin Kinzelbach enseignante à l’université Friedrich-Alexander d’Erlangen-Nuremberg (Allemagne) qui est à l'origine de l'indice de liberté académique (Le Monde du 13 mars 2025).
Les attaques contre la liberté académique font l'objet d'une mobilisation et de soutiens.
Des universitaires se mobilisent pour défendre leur liberté :
- un guide sur la manière dont les universités peuvent protéger et promouvoir la liberté académique, publié par l’Organisation représentative des universités et des conférences nationales des recteurs de 49 pays européens (EUA), publié en 2025 dispense des conseils "sur la manière dont les universités peuvent protéger et renforcer la liberté académique" ;
- le dispositif de soutien PAUSE, lancé en France en 2017, permet d’accueillir des scientifiques en danger en provenance d'une quarantaine de pays ;
- la journée "Mobilisons nous pour les sciences !" du 7 mars 2025 dans les villes universitaires en France visait à défendre la liberté académique face à la désinformation, dans la continuité du mouvement "Stand up For Science !" qui se déroule aux États-Unis.
Dans une tribune au "Monde" publiée le 7 janvier 2025, un collectif d'associations alertait les pouvoirs publics sur l'existence de menaces et de poursuites de la part de régimes autoritaires contre des chercheurs travaillant en France. Le collectif appelle les pouvoirs publics français à "protéger leurs chercheurs et la liberté académique".
Autre moyen pour défendre la liberté académique : renforcer la protection juridique. Par exemple, le Conseil de l'Europe a mis en place le projet "Libertés académiques en action" dans le cadre de son programme "Mission démocratique de l'enseignement supérieur" (2024-2027). Il prévoit, notamment de :
- renforcer le cadre juridique ;
- démocratiser la science et l'engagement civique (libre accès, participation du public au débat lors des résultats de la recherche, par exemple) ;
- relever les défis du numérique et de l'IA (menaces des algorithmes, harcèlement en ligne et influence des entreprises sur la diffusion des connaissances).