Disponible en ligne :
Pour lire les formats PDF et ePub vous avez besoin d’un lecteur adapté.
Le rapport propose un état des lieux des centres de santé pluriprofessionnels en France et en évalue la situation économique, financière et organisationnelle, tenant compte de leur grande diversité.
En 2022, 586 centres de santé pluriprofessionnels (CDS), employant au moins un médecin généraliste et un auxiliaire médical, étaient en activité. Ces centres, ouverts à tous les usagers, dispensent principalement des soins de premiers recours et des activités de prévention. Ils se sont fortement développés entre 2016 et 2022, avec un nombre en hausse de 65 %.
Ce mode d'exercice demeure toutefois minoritaire en France, contrairement à d'autres pays comparables, qui ont opté pour un exercice pluridisciplinaire et un panachage des modes de tarification, avec presque toujours une composante de capitation. Environ 7 750 professionnels médicaux y exercent, le plus souvent en médecine générale et soins dentaires, et majoritairement à temps très partiel.
Au cours de la période récente, l'augmentation des charges d'exploitation a fortement impacté la rentabilité de ces centres. Leur situation économique est préoccupante, avec de nombreux centres en déficit. Cela est dû, pour une large part, à une augmentation de la masse salariale, plus rapide que celle des effectifs, non compensée par une hausse de la productivité des médecins.
Pourtant, certains centres sont essentiels pour lutter contre la désertification médicale et réduire les inégalités d'accès aux soins, notamment dans les quartiers prioritaires et auprès des populations défavorisées. Leur capacité à offrir des soins coordonnés et pluriprofessionnels est un atout majeur pour améliorer la qualité des soins et répondre aux besoins des patients.
Vingt pistes pour améliorer le modèle
Ce rapport propose vingt pistes pour consolider le modèle de rémunération actuel, inciter à une prise en charge coordonnée et augmenter la file active des patients. Parmi les recommandations clés, figurent l'accompagnement des gestionnaires de centres, l'amélioration des téléservices par l'Assurance maladie et la mise en place de mesures pour prévenir la désertification médicale.
Les inspecteurs préconisent également l'expérimentation de nouveaux modèles de tarification, basés sur la capitation, pour les centres engagés de manière effective dans des pratiques de coordination intégrées entre médecins et infirmières.
En conclusion, le rapport recommande une série de réformes structurées autour de l'amélioration des pratiques internes, du soutien aux gestionnaires, et de l'évolution des modèles de financement, pour garantir un accès équitable et de qualité aux soins primaires.
SYNTHESE
RECOMMANDATIONS DE LA MISSION
1 LES CENTRES DE SANTE PLURIPROFESSIONNELS, AUX CARACTERISTIQUES TRES HETEROGENES, SONT DES ACTEURS MAJEURS DE L'OFFRE DE SOINS DE PREMIER RECOURS AUPRES DE POPULATIONS DEFAVORISEES ET DANS CERTAINS TERRITOIRES
1.1 LE PAYSAGE DES CENTRES DE SANTE PLURIPROFESSIONNELS EST MARQUE PAR SA DIVERSITE
1.1.1 586 centres pluriprofessionnels en activité en 2022, composés principalement de centres de santé polyvalents au sens de la CNAM
1.1.2 Le montant des honoraires des centres pluriprofessionnels représente 1,2 % des dépenses de soins de ville en 2022
1.1.3 Les centres, concentrés en Ile-de-France et dans quelques départements, essaiment dans la plupart des régions
1.1.4 Les centres sont principalement gérés par des associations, des collectivités territoriales et des organismes de sécurité sociale
1.1.5 Près de la moitié des centres dispensent des soins dentaires ou ophtalmologiques
1.1.6 L'effectif médian s'établit à 21 salariés par centre, dont 6 médecins à temps partiel le plus souvent, soit 11,4 et 2,6 ETP annuels respectivement
1.1.7 Le paysage se renouvèle fortement, marqué par l'apparition de petits centres, parfois portés par des collectivités territoriales
1.1.8 La création de centres par les collectivités ne s'inscrit pas toujours dans un cadre conventionnel validé par les ARS
1.2 LA HAUSSE DES EFFECTIFS ATTESTE L'ATTRACTIVITE DE L'EXERCICE EN CENTRE, LE PLUS SOUVENT A TEMPS PARTIEL
1.2.1 Plus d'un tiers des centres n'emploient que des médecins généralistes à côté des auxiliaires médicaux
1.2.2 Les effectifs de médecine générale en centre ont augmenté de 64 % entre 2016 et 2022
1.2.3 Les professionnels de santé, en particulier médicaux, exercent leur activité à temps partiel, presque à mi-temps sur l'année en moyenne, ce qui renchérit les coûts de gestion
1.3 LA CONTRIBUTION DES CENTRES A L'OFFRE DE SOINS DE PREMIER RECOURS EST IMPORTANTE DANS LES TERRITOIRES ET POUR DES PUBLICS DEFAVORISES
1.3.1 La majorité des centres est implantée en zone sous dense
1.3.2 Le degré de précarité sociale de la patientèle ressort comme étant plus nettement élevé que pour l'exercice libéral au niveau national
1.3.3 Les centres consolident l'offre de soins de premier recours en réalisant des prestations délaissées ou peu prisées des professionnels libéraux
2 LE DEFICIT MEDIAN D'EXPLOITATION, QUI S'ETABLIT A 10 % DES DEPENSES EN 2022, S'EXPLIQUE POUR UNE PARTIE DES CENTRES PAR UNE MAITRISE INSUFFISANTE DU MODELE DE REMUNERATION
2.1 LA SITUATION ECONOMIQUE ET FINANCIERE DES CENTRES PLURIPROFESSIONNELS, TRES VARIABLE SELON LES CENTRES, S'EST DEGRADEE EN 2022
2.1.1 L'analyse des données issues de la plateforme e-CDS s'est basée sur des ratios d'exploitation
2.1.2 Les charges d'exploitation des CDS, pris de manière agrégée hors ceux gérés par des collectivités territoriale, ont augmenté de 82 % entre 2016 et 2022
2.1.3 80 % des recettes des CDS pluriprofessionnels sont constituées par les honoraires
2.1.4 Les aides des ARS représentent moins de 1 % des recettes
2.1.5 Le déficit médian d'exploitation qui s'établit à près de 10 % des dépenses en 2022 varie fortement selon les centres, un tiers dégagent un excédent
2.1.6 Le déficit médian varie entre -5 % et -67 % des dépenses selon les grandes catégories de gestionnaires de centres en 2022
2.1.7 Des analyses simples de corrélations menées sur la situation des centres en 2022 montrent que l'équilibre économique est dépendant de différents facteurs, dont logiquement l'activité des personnels médicaux
2.2 LA PRODUCTIVITE DES MEDECINS EST L'UN DES PRINCIPAUX DETERMINANTS DE L'EQUILIBRE ECONOMIQUE DES CENTRES
2.2.1 Le nombre de consultations moyen par heure est une donnée essentielle qui n'est pas suivie au niveau de chaque praticien
2.2.2 Rapportée au nombre d'ETP annuels de médecins généralistes, la file active « médecin généraliste » des CDS varie fortement selon les centres
2.2.3 Très variable selon les centres, la patientèle « médecin traitant » par ETP de MG employés des centres est globalement inférieure au volume de patientèle suivie par les médecins exerçant en libéral
2.2.4 Très variable selon les centres, le nombre d'actes par médecin généraliste en équivalent temps plein est inférieur à celui des médecins libéraux
2.2.5 La sous-cotation des actes génère des pertes de recettes
2.3 LES LEVIERS D'OPTIMISATION DES RECETTES SONT PARTIELLEMENT ACTIONNES
2.3.1 Les plages horaires d'ouverture des CDS pluriprofessionnels sont étendues mais très variables selon les centres
2.3.2 L'activité de télémédecine est disponible dans un peu plus de la moitié des centres
2.3.3 Le suivi des rendez-vous non honorés non excusés n'est pas toujours rigoureux
2.3.4 Une partie du flux de facturation n'est pas fiabilisé
2.3.5 Près d'un quart des centres indiquent ne pas avoir perçu de montant de subvention Teulade en 2022
2.3.6 Le taux de non recours à la rémunération spécifique interroge
3 LES EXEMPLES ETRANGERS ET LES EXPERIMENTATIONS FRANÇAISES TEMOIGNENT DE LA NECESSITE DE FAIRE EVOLUER LE MODELE DE TARIFICATION VERS UNE PRISE EN CHARGE COORDONNEE DES PATIENTS PAR DES EQUIPES PLURIPROFESSIONNELLES INTEGREES
3.1 LES MODELES ECONOMIQUES DES STRUCTURES PLURIPROFESSIONNELLES A L'ETRANGER REPOSENT MAJORITAIREMENT SUR UN "MIX" DE TARIFICATIONS
3.1.1 Les soins primaires sont majoritairement délivrés dans des structures pluriprofessionnelles privilégiant l'exercice collectif
3.1.2 Le panachage des tarifications est quasiment devenu la norme
3.1.3 En Allemagne et au Danemark, les modes de tarification sont désincitatifs à la multiplication des consultations en face à face
3.2 LES PREMIERS CONSTATS DES EXPERIMENTATIONS "ARTICLE 51" FONT RESSORTIR UNE LEGERE PROGRESSION DE LA FILE ACTIVE "MEDECIN TRAITANT" DES CENTRES PARTICIPANTS
3.2.1 Le modèle PEPS ajoute une "surcouche" au modèle de droit commun sur le versant tarification
3.2.2 Si les évaluations s'avéraient positives, la complexité des modèles de rémunérations et l'absence d'échantillon représentatif plaideraient pour une implémentation graduée et limitée aux centres volontaires
3.2.3 L'association des centres de santé à d'autres expérimentations pourrait être envisagée
3.3 EN FRANCE, LE CHEMIN EST LONG VERS UNE ORGANISATION DE LA PRISE EN CHARGE DES SOINS PRIMAIRES PAR UNE EQUIPE PLURIPROFESSIONNELLE "INTEGREE"
3.3.1 Depuis de nombreuses années, les conditions de mise en oeuvre d'un travail en équipe pluridisciplinaire se mettent en place pour accroître la file active des patients pris en charge sans dégrader la qualité des soins
3.3.2 A l'étranger, le partage des tâches entre médecins et infirmières est entré dans les moeurs et dans les pratiques de nombreux pays voisins
3.3.3 En France, en dépit du feu vert des instances déontologiques et médicales, une partie des praticiens, y compris en centre de santé, demeurent réticents au partage des tâches en équipe
4 VINGT PISTES POUR INCITER A UNE PRISE EN CHARGE COORDONNEE ET A UNE AUGMENTATION DE LA FILE ACTIVE DES PATIENTS
4.1 MUSCLER L'ACCOMPAGNEMENT DES GESTIONNAIRES / PORTEURS DE PROJETS, ET DES PROFESSIONNELS DE SANTE
4.1.1 Conforter l'ARS dans son rôle de structuration de l'offre de soins de premier recours
4.1.2 Mieux articuler l'action publique avec les collectivités territoriales
4.1.3 Pour l'Assurance maladie, offrir les mêmes services d'accompagnement et de télédéclarations aux centres de santé qu'aux professionnels libéraux
4.2 PREVENIR LA DESERTIFICATION MEDICALE DES TERRITOIRES
4.2.1 Permettre d'anticiper les départs des professionnels de santé en informant les autorités
sanitaires
4.2.2 Aider les centres à s'installer en territoire déserté et à accueillir les populations vulnérables
4.2.3 La mise en place d'un statut spécifique pour les médecins généralistes employés par des collectivités n'est pas recommandée par la mission
4.3 RESPONSABILISER LES PATIENTS : TROUVER UN EQUILIBRE ENTRE LES DROITS ET LES DEVOIRS DES PATIENTS
4.3.1 La prise en charge, partielle ou totale, par l'assurance maladie du coût de gestion administrative par les centres du tiers payant "intégral" ne parait pas souhaitable
4.3.2 Donner aux professionnels la possibilité de sanctionner les patients indélicats, n'honorant pas leur rendez-vous, sans justification et de manière répétée
4.4 FAVORISER UN RAPPROCHEMENT DES MODELES ENTRE LES CENTRES ET LES MAISONS DE SANTE
4.4.1 Autoriser l'exercice libéral en centre de santé
4.4.2 Etudier l'opportunité d'autoriser les centres de santé à passer en secteur 2 / OPTAM
4.5 CONSERVER LA POSSIBILITE D'ATTRIBUER UNE PART VARIABLE DANS LA REMUNERATION DES MEDECINS
4.6 MIEUX REMUNERER LA SPECIFICITE PLURIPROFESSIONNELLE DES CDS
4.7 DANS L'ATTENTE D'UN TOURNANT DECISIF ("GAME CHANGER") : ETABLIR LES FONDATIONS D'UN NOUVEAU MODELE DE REMUNERATION
4.7.1 La majorité des praticiens salariés en centre ne semble pas prête à travailler en binôme para+médical pour augmenter leur file active
4.7.2 Les établissements de santé sont intéressés par le portage de centres "passerelle" entre l'offre de premier et de second recours
4.7.3 Dans des centres organisés sur la base d'"équipes traitantes", la part de tarification à l'acte de ces centres de santé "nouvelle formule" devrait devenir minoritaire
PIECE JOINTE : LETTRE ADRESSEE A LA MISSION PAR LE CONSEIL DEPARTEMENTAL DE LA VILLE DE PARIS DE I'ORDRE DES MEDECINS
SIGLES UTILISÉS
LISTE DES PERSONNES RENCONTREES
LETTRE DE MISSION
ANNEXE 1 : UN ETAT DES LIEUX DE LA SITUATION DES CENTRES DE SANTE PLURIPROFESSIONNELS FONDE SUR L’OBSERVATOIRE DES CENTRES DE SANTE
ANNEXE 2 : COMPARAISONS INTERNATIONALES EN MATIERE D’ORGANISATION DES SOINS PRIMAIRES ET DE REMUNERATION DES MEDECINS GENERALISTES
ANNEXE 3 : LES EXPERIMENTATIONS D’ORGANISATIONS DE SANTE INNOVANTES INTERESSANT LES CDS PLURIPROFESSIONNELS
ANNEXE 4 : PRESENTATION DE L’ACCORD NATIONAL DES CENTRES DE SANTE ET ANALYSE DE LA REMUNERATION SPECIFIQUE ISSUE DE L’ACCORD (2018-2022)
ANNEXE 5 : HISTORIQUE ET CADRE JURIDIQUE ET DE FINANCEMENT DES CENTRES DE SANTE PLURIPROFESSIONNELS
ANNEXE 6 : DECLINAISON TERRITORIALE DE LA POLITIQUE DE DEVELOPPEMENT DE L’OFFRE PAR LES ARS
ANNEXE 7 : PRESENTATION DE QUELQUES LEVIERS D’OPTIMISATION DES RECETTES DES CENTRES
- Type de document : Rapport d'inspection
- Pagination : 635 pages
- Édité par : Inspection générale des affaires sociales