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Depuis le déclenchement de la crise européenne de la dette souveraine, plusieurs rapports émanant d'entités tant publiques que privées ont exprimé des inquiétudes concernant la politique de distribution menée par l'Etat actionnaire, qui serait dominée par des considérations budgétaires, au risque de fragiliser la trajectoire financière des entreprises. Si le montant des dividendes prélevés sur les entreprises dont l'Etat est actionnaire a été multiplié par plus de quatre depuis la mise en place de l'Agence des participations de l'Etat (APE), les taux de distribution des principales entreprises du portefeuille sont actuellement en ligne avec ceux des sociétés comparables du même secteur, constate le rapporteur. La forte hausse des dividendes perçus par l'Etat actionnaire semble donc traduire un simple phénomène de « rattrapage » lié à la volonté de ce dernier de « normaliser » sa politique de distribution en exigeant une juste rémunération de l'ensemble de son patrimoine. Le rapporteur estime toutefois que le cas d'EDF rappelle la nécessité pour l'Etat actionnaire d'adapter rapidement sa politique de distribution à l'évolution de la situation financière des entreprises de son portefeuille - le groupe ayant été contraint de recourir à l'endettement pour verser son dividende.
LES OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL
AVANT-PROPOS
I. L'IMPORTANCE PRISE PAR L'OBJECTIF DE RÉDUCTION DU DÉFICIT PUBLIC A RAVIVÉ LA CRAINTE QUE L'ÉTAT PRIVILÉGIE LA RECHERCHE D'UN RENDEMENT À COURT-TERME DE SES PARTICIPATIONS
A. L'ÉTAT S'EST FIXÉ POUR OBJECTIF D'INTERVENIR DANS LA POLITIQUE DE DISTRIBUTION DES ENTREPRISES DONT IL EST ACTIONNAIRE COMME UN INVESTISSEUR DE DROIT COMMUN
1. L'objectif de la politique de dividendes consiste à ne permettre à l'entreprise de réinvestir son résultat que lorsqu'elle dispose de projets d'investissement porteurs de valeur
a) Sous certaines conditions restrictives, la politique de dividendes n'a aucune incidence sur la valeur des entreprises
b) En relâchant les différentes hypothèses sous-jacentes à la théorie de la neutralité du dividende, la littérature économique a progressivement tracé les contours de la politique de distribution optimale
2. Les principes guidant la politique de dividendes de l'État actionnaire ne diffèrent pas de ceux des actionnaires privés
a) L'État actionnaire entend intervenir dans la politique de distribution des entreprises de son portefeuille comme un investisseur de droit commun
b) Ses modalités d'intervention varient néanmoins selon le statut juridique de l'entité concernée
B. L'IMPORTANCE PRISE PAR L'IMPÉRATIF DE RÉDUCTION DU DÉFICIT PUBLIC A TOUTEFOIS RAVIVÉ LES CRAINTES D'UNE « DOMINANCE BUDGÉTAIRE » DE LA POLITIQUE DE DISTRIBUTION DE L'ÉTAT ACTIONNAIRE
1. Pour réduire son déficit public, l'État peut être tenté d'imposer aux entreprises dont il est actionnaire un taux de distribution trop élevé
a) En principe, les investisseurs institutionnels sont relativement neutres par rapport à la politique de distribution
b) Les règles comptables propres à l'État sont néanmoins susceptibles d'induire un « biais » en faveur des dividendes
2. Cette crainte a été renforcée par l'observation que le niveau des dividendes versés par les entreprises dont l'État actionnaire a divergé de la moyenne des sociétés du CAC 40 depuis le déclenchement de la crise européenne de la dette souveraine
a) Au cours de la période 2007-2011, le rendement du portefeuille coté de l'État actionnaire était en ligne avec celui du CAC 40
b) Depuis le déclenchement de la crise européenne de la dette souveraine, le rendement du portefeuille coté de l'État actionnaire se situe à un niveau significativement supérieur à celui du CAC 40
II. CETTE CRAINTE APPARAÎT LARGEMENT INFONDÉE, MÊME SI L'EXEMPLE D'EDF TÉMOIGNE DE LA NÉCESSITÉ DE RENFORCER L'ADAPTABILITÉ DE LA POLITIQUE DE DISTRIBUTION DE L'ÉTAT ACTIONNAIRE
A. LA DIVERGENCE OBSERVÉE PAR RAPPORT À LA MOYENNE DU CAC 40 S'EXPLIQUE PRINCIPALEMENT PAR L'ABSENCE DE RACHATS D'ACTIONS ET LE BIAIS SECTORIEL DU PORTEFEUILLE DE L'ÉTAT ACTIONNAIRE
1. L'absence de recours aux rachats d'actions par les entreprises du portefeuille explique la moitié de l'écart de rendement mesuré entre le portefeuille géré par l'APE et le CAC 40
a) Les rachats d'actions constituent une alternative aux dividendes pour rémunérer les actionnaires
b) La préférence de l'État actionnaire pour les dividendes par rapport aux rachats d'actions explique la moitié de l'écart de rendement observé entre le portefeuille coté géré par l'APE et le CAC 40
2. Une fois le biais sectoriel pris en compte, l'État actionnaire ne semble pas avoir fait preuve d'un plus grand « court-termisme » que les actionnaires privés dans la gestion de ses participations
a) Le biais sectoriel du portefeuille de l'État actionnaire peut justifier les différences de rendement observées par rapport au CAC 40 en matière de dividendes
b) Les taux de distribution des principales entreprises du portefeuille sont en ligne ou inférieurs à ceux des sociétés comparables, à l'exception d'Engie
B. L'EXEMPLE D'EDF RAPPELLE LA NÉCESSITÉ QUE L'ÉTAT ACTIONNAIRE ADAPTE RAPIDEMENT SA POLITIQUE DE DISTRIBUTION AUX ÉVOLUTIONS DE LA TRAJECTOIRE FINANCIÈRE DES ENTREPRISES DE SON PORTEFEUILLE
1. La dégradation de la situation financière d'EDF ne s'est pas accompagnée d'une évolution parallèle de sa politique de distribution
a) À plusieurs reprises, l'État actionnaire a su adapter rapidement sa politique de distribution pour soutenir les fonds propres des entreprises de son portefeuille
b) Dans le cas d'EDF, le groupe a toutefois été contraint de s'endetter pour verser son dividende
2. Les leçons de cet épisode doivent être tirées
a) Trois principaux facteurs contribuent à expliquer l'absence d'évolution de la politique de distribution d'EDF
b) Certaines évolutions pourraient utilement contribuer à remédier à ces difficultés
EXAMEN EN COMMISSION
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
- Type de document : Rapport parlementaire
- Pagination : 54 pages
- Édité par : Sénat
- Collection : Les Rapports du Sénat
- Numéro dans la série : 335