Déclaration de M. Noël Mamère, député des Verts et candidat à l'élection présidentielle, sur les grands axes du "contrat vert" proposé pour la campagne des Verts, notamment sur la mondialisation solidaire et sur le contrôle démocratique des choix technologiques après l'explosion de l'usine chimique AZT, Toulouse le 17 janvier 2002.

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Circonstance : Meeting de lancement de la campagne des Verts pour l'élection présidentielle, à Toulouse le 17 janvier 2002

Texte intégral

Chers amis,
Ce soir, nous sommes tous des toulousains, ce soir, nous voudrions tous avoir l'accent d'ici, porté par le vent d'Autan, pour saluer haut et fort la mémoire des 30 disparus du 21 septembre 2001, pour crier notre colère. 30 morts pour rien, 30 familles traumatisées qui ne se remettront jamais de ces absences sans retour. Pour elles, pour la mémoire des disparus, pour ce à quoi nous croyons, nous devons dire "plus jamais ça". (une minute de silence).
Je voudrais placer ce premier meeting de campagne sous le patronage de quelques justes auxquels nous tous, écologistes, nous devons beaucoup, parce qu'ils nous ont montré la voie et parce qu'ils se sont battus leur vie entière pour que justement, il n'existe plus jamais des tragédies comme le 21 septembre. Théodore Monod, d'abord, l'homme aux semelles de vent, le pacifiste qui jusqu'à la fin de sa vie parcourut le monde et dénonça le recours à la violence et à la prolifération nucléaire; Jacques Ellul qui, le premier, nous alerta sur les impostures d'un progrès technique non contrôlé démocratiquement; Bernard Charbonneau, son compagnon de route, qui de son refuge Béarnais, consacra sa vie à décrire les méfaits d'un mode de développement qui finit par tuer nos libertés; René Dumont, dont je ressens le lourd héritage en tant que candidat des Verts, puisqu'il fut le premier d'entre nous à défendre nos idées lors de l'élection présidentielle de 1974. René Dumont, l'agronome qui jusqu'à son dernier souffle combattit l'apartheid planétaire qui affame les peuples du Sud.. Enfin, Anil Agarwal, l'indien, décédé à New-Delhi, le 2 janvier dernier. Il avait affirmé le premier que la défense de l'environnement n'allait pas contre le développement des pays du Sud mais en était, bien au contraire, une condition indispensable. Ces hommes, courageux et politiquement incorrects, étaient des insoumis, des écorchés, des irrévérencieux, ils s'indignaient et se battaient. Puissions nous leur ressembler un peu et respecter leur héritage.
Ce n'est évidemment pas un hasard si je suis ici, aujourd'hui, avec vous, pour lancer la campagne présidentielle des Verts. La catastrophe industrielle qui a meurtri Toulouse et ses habitants dans leur chair le 21 septembre, n'est pas un banal accident à passer au compte des profits et pertes. C'est un de ces événements qui structure la mémoire collective d'un pays, parce que sa signification dépasse l'horreur même de l'événement. La tragédie du 21 septembre, c'est la preuve par la mort des impasses de la société de marché, de ce modèle productiviste que dénoncent les Verts depuis des lustres et qui de Tchernobyl à l'Erika, de Bophal à, l'Ievoli Sun, de la vache folle au Tunnel sous le Mont Blanc, révèle ses failles béantes. L'horreur écologique existe. Les habitants de Toulouse l'ont rencontrée le 21 septembre. Et si je dis avec vous " plus jamais ça ", je veux aussi comprendre avec vous pourquoi et comment ce drame a pu se produire, qui en sont les responsables. Nous devons savoir la vérité parce que, demain, cela peut se reproduire ici même ou dans 600 sites du même type en France; nous devons le savoir pour nos enfants et pour les générations futures. L'explosion de Toulouse n'est pas un accident, mais un crime écologique dont les auteurs et les mobiles sont connus de tous : C'est pourquoi, ici, j'accuse solennellement les responsables de Total Fina Elf d'avoir laissé une bombe chimique exploser en pleine ville, par négligence, par souci de rentabilité et par non application du principe de précaution.
Dans cette affaire, Monsieur Desmarest fait plus fort que cette ancienne ministre socialiste qui disait : responsable mais pas coupable. Monsieur Desmarest, lui, il dit: ni responsable , ni coupable. C' est vrai qu'il n'est pas responsable, monsieur Desmarest, il est même totalement irresponsable, lui qui, l'année précédente, avait déjà sur la conscience le crime de l'Erika contre la Bretagne. L'irresponsabilité et la culpabilité des dirigeants de Total Fina Elf n'ont d'ailleurs pas de frontières : Ce sont les mêmes qui, en Birmanie, soutiennent les militaires contre la démocratie;
Ce sont les mêmes qui, en Afrique, arment les dictatures contre les peuples. Les habitants du Congo Brazzaville ont une chose en commun avec ceux de Toulouse et de la Bretagne. Total Fina Elf, ils ont déjà donné: 15 OOO morts durant la guerre civile de 1997, financée par l'entreprise pétrolière et ce n'est pas fini. Si nous sommes écoeurés par la tragédie du 21 septembre, au moins ici, en France, des mesures ont commencé à être prises, une loi est en préparation, un débat public est engagé. Mais qui parle des conséquences sociales, environnementales, politiques et militaires, humaines, surtout humaines, de la politique de Total Fina Elf pour protéger les royalties de son pétrole au Congo, au Gabon, en Algérie, en Angola, en Sibérie, en Iran ou ailleurs ?
Ils génèrent une morale de la jungle, basée sur la loi du plus fort et celle du profit maximum. C'est le mobile de leurs crimes. Mais ces délinquants écologiques en col blanc ne sont déférés devant aucun tribunal en comparution immédiate. On met en procès une femme qui vole quelques jouets à Noël pour ses gosses mais on les laisse en toute impunité jouer avec la vie de leurs concitoyens. Depuis le 21 septembre, les habitants de Toulouse attendent vainement qu'une action réelle soit engagée contre le PDG de Total et qu'on oblige ses dirigeants à prélever un peu de leurs stocks options pour rembourser les frais occasionnés par l'accident chimique le plus violent et le plus meurtrier de ces quinze dernières années. Les toulousains ont passé les fêtes à ruminer leur colère. Mais les responsables de Total, en parfaite bonne conscience, eux, l'ont passé bien au chaud, sans courant d'air et fenêtres bien fermées.
Mais les pouvoirs publics sont aussi responsables : Pourquoi alors qu'en 1998, le site de Grande Paroisse avait connu une fuite d'ammoniac, rien n'a été fait pour faire appliquer la réglementation?
Pourquoi la préfecture a-t-elle systématiquement ignoré les demandes des associations de riverains ?
Pourquoi les pouvoirs publics se sont-ils opposés aux exercices d'alerte pour la population, prévus par la réglementation en vigueur ?
Pourquoi, malgré les incidents de 1986 et de 1998, les autorités locales ont-elles continué à développer l'urbanisation en distribuant des permis de construire et en permettant le développement d'infrastructures routières?
Pourquoi ont-elles diligenté une enquête il y a 3 ans visant à agrandir la zone industrielle ?
Pourquoi, malgré la demande des associations de riverains, aucune étude de danger n'a-t-elle été réalisée pour savoir s'il était possible de maintenir une installation à risque majeur en dessous de la trajectoire des avions atterrissant à l'aéroport de Toulouse-Blagnac ?
Pourquoi, malgré les mises en garde de la Commission Européenne qui s'est traduite par une plainte contre la France devant la cour de Justice européenne, la France n'a-t-elle pas intégralement transposé dans son droit certaines dispositions de la directive Seveso de 1996?
Non, décidément, l'explosion de l'usine chimique AZF de Toulouse n'est pas un accident. Il pouvait être évité si les élus, les pouvoirs publics et la direction du Groupe Total Fina Elf avaient écouté et répondu aux demandes des associations de riverains, de consommateurs et des Verts qui mettaient en cause depuis de nombreuses années ce qu'elles qualifiaient de "bombe chimique potentielle ".
Les leçons de Toulouse doivent donc être tirées :
- Première leçon: quand on ne prévoit pas les risques à long et moyen terme, on crée les conditions des catastrophes industrielles. L'usine a été installée par des décideurs qui se souciaient, d'abord, de la rentabilité à court terme. Il faut désormais s'interroger sur la conformité des installations au règlement en vigueur, sur leur mise aux normes le cas échéant, sur l'arrêt de toute installation dont la dangerosité serait avérée à l'issue de ces contrôles ainsi que sur le renforcement du dispositif de surveillance de ces installations classées.
- Deuxième leçon: la précarisation du travail entraîne la précarité de tous. La sous-traitance, l'intérim , développent des pratiques dangereuses . Bernard Thibaud, le secrétaire général de la CGT a fait le 10 décembre dernier des propositions dans ce sens. Je les approuve complètement. Il faut étendre et renforcer le pouvoir des salariés élus dans les commissions Hygiène et Sécurité et des conditions de travail sur les sites et renforcer la formation de leurs membres. La responsabilité du donneur d'ordre doit être automatiquement engagée en cas de sinistre ou d'accident lié à la sous-traitance. L'inspection du travail doit pouvoir intervenir de manière plus efficace. C'est possible, il faut le faire.
- Troisième leçon: l'accumulation des injustices sociales et environnementales dans une zone donnée, produit de l'horreur écologique. Ce n'est pas à Neuilly, Auteuil ou Passy que sont installés les usines à risques, c'est au coeur des quartiers et des cités défavorisés, déjà touchés par le chômage et la crise sociale que se trouvent ces bombes à retardement. Depuis les années cinquante, on a laissé se construire des zones à risques dans des quartiers urbanisés, il faut maintenant organiser un divorce à l'amiable entre ces installations à risques et l'urbanisation . Il faut le faire tout de suite quand c'est possible, comme ici, à Toulouse, où je le dis clairement c'est tout le pôle chimique qui doit être délocalisé. Ce n'est pas fromage ou dessert: On garde la SNPE et on largue AZF. C'est la plate-forme, toute la plate-forme qui doit être déplacée et remplacée par des installations moins dangereuses.. Il faut aussi analyser les causes d'aggravation des accidents comme la proximité urbaine ou le survol par des avions. Il faut donc bloquer l'urbanisation autour des sites classés et organiser la solidarité territoriale par le moyen des lois sur l'aménagement du territoire et la SRU. Sur Toulouse, il faut reconstruire les lycées, la piscine, les habitations, dépolluer le site pour en faire, à terme, une grande zone verte urbaine. Nous savons que c'est possible, il faut le faire.
- quatrième leçon: il faut construire des systèmes de prévention des risques à la source: Il faut expertiser tous les sites classés et verbaliser systématiquement les entreprises dérogeant aux réglementations et aux autorisations. Il n'y a pas seulement les 1200 sites Seveso classés très dangereux, mais aussi les 65 000 installations à risques de toute nature en France, soumises à autorisation préfectorale et contrôlés par seulement 750 inspecteurs des installations classées. Il faut multiplier le nombre de contrôleurs de l'industrie et les rendre indépendants des informations données par les industriels en leur donnant les moyens de faire toutes les investigations nécessaires et de déterminer, en toute indépendance, la nature des dangers sur les sites industriels. Il faut réaliser des exercices grandeur nature avec la population pour évacuer les zones d'impact ou toute autre conduite à adopter en fonction des alertes émises. Nous savons que c'est possible, il faut le faire
- Cinquième leçon: il faut en finir avec la culture du secret et développer l'information du public: Les pouvoirs publics doivent développer et diffuser largement les consignes de sécurité à tenir à proximité des sites classés et informer régulièrement le public des évolutions des productions sur le site et des risques, indiquer les périmètres de protection et les études de danger, remettre les informations avec les actes notariés en cas d'achat de logement. Il faut permettre l'accès des élus et des représentants de la population aux installations classées; Il faut afficher comme l'indique le décret du 11/10/90, les consignes de sécurité dans les halls d'immeuble et tous établissements recevant du public. Nous savons que C'est possible, il faut le faire
- Sixième leçon : Le droit à la protection passe par l'éloignement du risque : On a vu à Toulouse que l'urbanisation à proximité des sites industriels a constitué un facteur aggravant de la catastrophe. On a vu également que le périmètre de protection défini par Seveso 2 n'était pas respecté.
Le risque zéro n'existe pas et dans toutes les interventions de " responsables " qui ont voulu faire de la zone chimique toulousaine un pôle industriel pérenne et important il était dit que les mesures de sécurité étaient prises.
La thèse d'une sécurisation maximale pour redémarrer les usines actuellement arrêtées à Toulouse, n'est pas crédible : une centrale nucléaire n'a pas sa place au coeur d'une agglomération, un site chimique classé non plus.
Il faut faire supporter au groupe industriel toutes les conséquences financières qui lui incombent, y compris le salaire des personnels dans l'attente d'une reconversion ou de l'acceptation de l'emploi relocalisé en Midi-Pyrénées. La reconversion doit devenir une priorité nationale . Nous avons les instruments de politiques publiques pour cela en termes d'aménagement du territoire et d'économie industrielle. Il faut les utiliser en étudiant, par exemple, dans quelle mesure la dépollution offre une perspective de reconversion d'une partie des emplois. Mais il faut aussi créer une agence publique de l'environnement qui ait la responsabilité de l'expertise et de l'évaluation des produits, laissant à l'Etat sa responsabilité régalienne de contrôle de l'application des réglementations et du respect des normes Nous savons que c'est possible , il faut le faire.
Voilà qui nous amène aux trois P: Protection, prévention, précaution, fondements du développement durable.
Assurer le droit à la protection, mettre au centre des politiques publiques le principe de précaution, organiser la prévention, sont les trois axes qui doivent structurer la politique des pouvoirs publics dans les années à venir. Cela s'applique à l'environnement, de responsabilité, ce n'est pas la évidemment, à commencer par la sécurité alimentaire mais aussi à la protection sociale, à l'emploi, aux libertés publiques, à la mondialisation. Le droit à la protection c'est la solidarité, ce n'est pas le discours sécuritaire . C'est la réparation pour les victimes , ce n'est pas la recherche du bouc émissaire, c'est le principe méthode autoritaire. Ce qui s'est passé à Toulouse est une métaphore de la société moderne, devenue une manufacture de risques que nous font subir les tenants d'un libéralisme sans foi ni loi.
Mais que dire de la sécurité alimentaire, de la mal bouffe : des poulets fous, des vaches folles, des moutons fous, du soja transgénique? Que dire des centrales nucléaires et de leurs déchets? Que dire de l'effet de serre qui transforme silencieusement notre climat? Que dire de la pollution de l'air qui tue chaque année des milliers de citadins? Que dire de l'eau polluée par les nitrates, par les pesticides, autant de poisons produits par des usines à risques comme AZF? Nous ne refusons pas le risque en soi mais nous n'acceptons pas qu'il nous soit imposé sans que nous puissions exercer notre contrôle de citoyens. Nous n'acceptons plus que ce soient toujours les mêmes qui imposent leur loi à l'immense majorité.
Face à l'explosion du 21 septembre, les forces politiques traditionnelles ont toutes des réponses conformes à leur projet. Et c'est sur ce projet que vous, habitants de Toulouse et d'ailleurs, vous devrez vous prononcer le 21 Avril 2002.
Le candidat probable, Lionel Jospin a une réponse : l'équilibrisme. Il faut dire que c'est un expert. En 1997, il y avait 120 000 sans papiers . Il a coupé la poire en deux, en a régularisé 60 000 et rejeté 60 OOO dans la clandestinité. Il fait pareil avec Toulouse. Il suspend l'activité d'AZF, et poursuit celle de la SNPE. C'est l'équilibre , oui mais pour combien de temps? Jusqu'à quel autre 21 septembre? Non, Lionel, je te le dis fraternellement , cette politique qui consiste à tracer un point d'équilibre permanent entre les victimes et les responsables de leur souffrance, cette politique à court terme, qui consiste avant le 21 septembre à ne rien faire tant que la bombe n'a pas explosé et, après coup, à fonctionner dans la compassion est une politique qui a trouvé ses limites. Il n'y a pas d'équilibre pour les habitants du Mirail ou d'Ampalot, il n'y a pas d'équilibre pour les habitants de Ramonville, il n'y a pas d'équilibre pour les habitants de Tabar ou de Bordelongue.
Quant au candidat à peine officieux de l'Elysée a-t-il en 40 ans de vie politique contesté une seule fois l'installation de la plate-forme chimique ? Dans les années soixante dix au cours desquelles il a été secrétaire d'Etat, ministre, super ministre , premier ministre, a-t-il une seule fois mis en cause l'installation des ces bombes au coeur des villes? Au contraire, il a tout fait pour que les agriculteurs dont il a été longtemps ministre, utilisent nitrates et pesticides et que les zones industrielles se mélangent sans entrave avec l'urbanisation. Il était alors le VRP du modèle pompidolien triomphant de la France surindustrialisée. Le président sortant a récemment déclaré qu'il fallait un sursaut national . Oui il faut un sursaut national: contre l'hypocrisie, contre la soumission aux lobbies industriels, autoroutiers et agro-alimentaires; Oui il faut un sursaut national contre le mensonge et la corruption ; oui il faut un sursaut national contre les pratiques politiques qui entraînent depuis des décennies le laxisme de l'Etat et des maires qui ont attribué des permis de construire dans des zones de plus en plus proches des usines.
Le Pen, le candidat permanent du fascisme à la française a sa réponse. Expulsons les immigrés de ces usines et des quartiers qui les entourent. Voilà qui rassurera les habitants des cités sinistrées! Des victimes, peut-être, mais seulement françaises, blanches et catholiques. Le Pen, le candidat silencieux, n'a pas de programme autre que celui de fabriquer de la haine. Mais quand il prend position c'est toujours pour le grand business et contre les salariés et la population.
Chevènement, le candidat qui veut lui aussi sauver la nation en perdition a sa réponse : depuis mardi dernier, date de sa visite à Toulouse en forme de provocation pour les victimes d'AZF, il a pris la tête d'un nouveau pôle : le pôle chimique. Pas de discrimination positive. Des usines chimiques républicaines partout. Pas d'Europe, des usines françaises partout. Il est venu, paraît-il, à Toulouse juste pour me couper l'herbe sous le pied. Il a lancé son cri d'alarme : " France, ton industrie fout le camp ". Les toulousains apprécieront la provocation de ce mutant de la politique, hier de gauche, devenu aujourd'hui un AZF transcourant. Monsieur Chevènement a été ministre de l'Industrie entre 1982 et 1984. Il a encouragé le développement de ces entreprises dont les dirigeants, à l'image de ceux de Total finaElf se moquent éperdument de la sécurité des populations et de la souveraineté nationale chère au clone de Charles Pasqua. Notre imprécateur national-républicain a financé le procès du Préfet Bonnet, l'incendiaire des paillotes mais s'est moqué de ceux qui ont été victimes de l'impéritie des pouvoirs publics et qui auraient pourtant plus de légitimité pour intenter des actions en justice. Après être devenu le moto- crotte du gaullisme des années cinquante et soixante, en embauchant des vieux chevaux de retour dans son écurie, pour ne rien dire des anti pacs ou de Poujade lui même, monsieur Chevènement est passé à la vitesse supérieure: Il s'est transformé en Airbus 380 chargé de convoyer les camionneurs qui veulent la réouverture du tunnel du mont-Blanc, les promoteurs autoroutiers et les patrons des usines à risques Je ne sais pas si ça fera des voix mais, à coup sûr, on peut déjà le dire : ce rassemblement là, comme on dit des automobiles, ça pue et ça pollue .
Madelin, le candidat qui se prend pour la synthèse virtuelle de Thatcher et de Bush a une réponse : des usines partout mais avec un amendement bien libéral : le moins de réglementation possible. A ses yeux, ce qui existe déjà devrait disparaître pour laisser place à une déontologie autogérée par les patrons.
Arlette, la candidate toujours présente depuis 1917 a une réponse : Tout ira bien quand les travailleurs et leur parti unique auront pris le pouvoir. La réponse est cependant un peu courte et limitée.
Robert, le syndic de la place du Colonel Fabien a une réponse : renforcez le parti communiste , sauvez ses derniers bastions et il n'y aura plus de problème. Arlette et Robert sont-ils prêts, ici, à s'engager pour délocaliser ces usines de mort? A s'engager pour une vraie reconversion des sites? C'est une vraie question qui se pose pour les entreprises chimiques, pour les entreprises nucléaires, pour les entreprises d'armement. La défense des intérêts des salariés est une chose, mais elle ne doit pas contrevenir à l'intérêt général, à la défense des droits humains. Si je respecte profondément l'électorat et les candidatures d'Arlette, Robert ou Olivier, je considère qu' elles ne servent pas à grand chose à l'aune des véritables enjeux qui sont devant nous, parce qu'elles sont des candidatures de témoignage.
Chers amis, le 21 avril 2002, les habitants de Toulouse et l'ensemble des français, devront choisir entre trois pôles, celui du Medef, celui de la peur et celui de l'espoir
Le pôle du Medef a un projet de société identifié : une société de concurrence, une société à risques illimitées , une société d'inégalités, une société jetable. C'est la logique de la compétitivité qui s'est imposée ici le 21 septembre. C'est la loi du plus fort et du marché déréglementé qui s'est imposé ici le 21 septembre.Toulouse, le Mont-Blanc, la vache folle, le poulet à la dioxine, ne sont pas des exemples isolés. Ils montrent que faute de limitation, de modération à la logique du profit, un processus irréversible est en train de s'instaurer.
Le Baron Seillière, l'héritier des maîtres des forges, vient de proposer 9 orientations pour démanteler la sécurité sociale, augmenter la compétitivité, organiser la flexibilité, décupler la précarité, mettre en cause la retraite par répartitions. Ce programme du grand business c'est le programme commun de la droite, de toute la droite , de Bayrou à Chirac, de Madelin à Douste- Blazy. Ils n'ont aucune idée. Le Medef, lui, en a un stock complet dans lequel ces messieurs puisent pour nous imposer leur future facture sociale si jamais ils revenaient au pouvoir. Et voyez comme ils se réjouissent tous du démantèlement des mesures pourtant bien modérées qui avaient été prises contre les licenciements. Nous nous étions abstenus sur la loi de modernisation sociale. Les mesures proposées contre les licenciements étaient de notre point de vue nettement insuffisantes pour nous qui prônions le droit de veto des CE sur les licenciements boursiers. La décision, réactionnaire, du Conseil Constitutionnel est une gifle supplémentaire pour les salariés de Moulinex, de Danone, de Marks et Spencer et des dizaines d'autres grandes entreprises qui ont licencié depuis le printemps des milliers de salariés. Cette décision montre que nos instances de contrôle sont complètement coupées de la société. J'appartiens à la convention pour la 6ème république d'Arnaud Montebourg. J'approuve sa proposition de réforme profonde de cette assemblée de notables qui, sous la présidence de Roland Dumas, a expliqué benoîtement que le Président de la République pouvait se soustraire à la procédure judiciaire.
Le pôle de la peur a, lui aussi, un projet: une société fermée, frileuse, inhospitalière , du tout sécuritaire , une société qui oppose le repli sur soi à l'ouverture et à la tolérance. Boutin, De Villiers, Pasqua, Chevènement et d'autres se bousculent au portillon pour prendre le leadership de ce pôle souverainiste, nationaliste, centraliste, productiviste, anti européen, de ce rassemblement hétéroclite des défenseurs de l'ordre, de l'autorité , de la nation en danger toujours en danger, et, surtout de la sécurité, encore plus de sécurité. Ce pôle des frileux rassemble tous ceux qui s'opposent à l'Europe en mouvement , tout ceux qui s'opposent à la société en mouvement , tout ceux qui s'opposent à la jeunesse en mouvement. Ils refusent de ratifier la charte des langues régionales et minoritaires, ils rêvent de nous ramener au temps de Clémenceau, au temps béni des colonies et à celui de la ligne Maginot. Leur mot clef est interdiction : interdiction des rave parties, interdiction du cannabis, interdiction des sans papiers, interdiction de sortie le soir pour les mineurs, interdiction des SDF dans le centre des villes. Non messieurs et dames les marchands de peur, vous n'imposerez pas une chape de plomb sur ce pays fût- ce au nom de la République une et indivisible.
Nous sommes ici, à Toulouse, dans la ville des Motivés , où en mars 2001 a surgi une folle espérance démocratique, où un paysage de la gauche plurielle renouvelé a failli se mettre en place. Face à ce saut dans l'inconnu la droite a joué sur la peur qui est toujours mauvaise conseillère. Elle a gagné en jouant sur la rumeur putride et les sous-entendu malsains. C'est le moment de mettre un frein à ces discours qui veulent trouver des boucs émissaires chez le voisin. Non, notre ennemi ce n'est pas le jeune, l'immigré, le sans-papier, l'handicapé, le sans-droitNotre adversaire, nous le connaissons, il se trouve dans les conseils d'administration des multinationales, dans les bureaux feutrés où les énarques concoctent des directives bureaucratiques aux effets pervers, dans les citadelles du ministère des Finances qui gère une fiscalité injuste et mal répartie, dans les lobbies des entreprises nucléaires, des bâtiments et travaux publics, qui emploient des dizaines d'activistes pour casser les progrès de la transparence et de la justice environnementale; l'adversaire c'est l'intégrisme qui, sous ses formes terroristes et étatiques, menace la paix et veut le retour au moyen âge; l'adversaire ce sont les Etats qui bafouent la gouvernance mondiale en refusant le protocole de Kyoto, de Carthagène, la cour pénale internationale, les traités anti-missile ABM ou Start. En faisant monter la mayonnaise de la peur, ils ne font que répandre le virus de la violence sans répondre à aucun des vrais problèmes posés par la situation.
Et puis, il y a le pôle de l'espoir, celui de la citoyenneté, celui des démocrates, le pôle écologiste et européen. J'en appelle au rassemblement de tous les écologistes qui se battent pied à pied contre le nucléaire, la mal bouffe , les OGM , les autoroutes et les usines à risques. J'en appelle au rassemblement de tous les régionalistes qui se battent, ici en Occitanie, comme en Bretagne, en Corse ou en pays catalan pour le respect de leur territoire, de leur culture, de leur langue, pour une France où les régions auront de vrais pouvoirs, de tous ceux qui se battent contre le colonialisme aux Antilles et dans tous les confettis de l'Empire. J'en appelle à tous ceux et à toutes celles qui refusent la discrimination sous toutes ses formes, le racisme , le sexisme, le harcèlement moral, à tous les défenseurs des droits humains, aux féministes qui veulent la parité économique et l'égalité professionnelle et sociale ; j'en appelle à tous les fédéralistes européens qui veulent faire de l'Europe la nouvelle frontière de la génération qui se lève. J'en appelle à ceux pour qui le monde n'est pas une marchandise qui, de Seattle à Gênes, se battent pour qu'un autre monde soit possible; J'en appelle à tous ceux qui dans les quartiers, les zones rurales en désertification, dans les ateliers, les bureaux et les universités se battent pour conquérir de nouveaux droits et de nouvelles libertés ; j'appelle tous les citoyens actifs, engagés pour la participation démocratique dans leur cité à se rassembler; j'en appelle à la jeunesse qui en a assez d'être stigmatisée, ghettoisée, marginalisée, criminalisée, qui en a assez de ce racisme anti-jeunes subtil qui est en train de se développer en cautionnant l'idée qu'il y aurait aujourd'hui dans ce pays une classe dangereuse. Eh, Chevènement te souviens tu des "sauvageons"?
Si nous voulons que vive ce pôle de l'espoir, il faut changer la gauche pour changer la vie. Parce qu'aujourd'hui cette gauche, encore trop marquée par l'archaïsme, est sourde à certaines aspirations de la société. Elle accepte encore trop souvent le fonctionnement du système tel qu'il est, elle s'arrête au milieu du gué de la réforme. Il faut la pousser, l'aiguillonner, pour qu'elle ose et n'ait plus peur de son ombre. Cette gauche hégémonique est aussi hémyplégique. Elle semble préférer les sirènes du libéralisme aux idées des Verts qui passent trop souvent à la trappe au motif qu'elles seraient utopiques ou laxistes. Mais, qui défend la sécurité alimentaire en disant non aux OGM dans nos champs et dans nos assiettes? Qui défend la sûreté en disant qu'il faut sortir progressivement du nucléaire, comme nos voisins allemands et Belges, en abandonnant le retraitement des déchets à La Hague? Qui est réaliste en proposant un plan silence contre le bruit, en insistant sur la protection des citoyens dans les cités , en proposant d'agir pour mettre fin aux pratiques maffieuses dans les quartiers, en légalisant le cannabis et en médicalisant les drogues dures? Qui est "républicain" en défendant un vrai service public unifié de la gendarmerie et de la police, un plan d'aide aux victimes et un plan d'urgence pour la prévention.?
Le pôle de l'espoir c'est une nouvelle alliance sociale qui doit dépasser les frontières des verts actuelles, en faisant converger dans notre projet et dans notre action les mutants qui réclament le droit à l'initiative, qui se battent pour le logiciel libre ou créent des entreprises d'économie solidaire et les mutins qui se rebellent contre le désespoir à Moulinex ou au Mirail.
Nous ne devons laisser personne au bord du chemin : exclus, classes populaires, nouvelles classes moyennes ont les mêmes aspirations au développement d'une société durable, plus juste, plus humaine, plus ouverte. C'est cette voie là, celle de la transformation sociale que je veux proposer au pays avec les Verts, avec vous.
Ce pôle de l'espoir doit se rassembler autour d'un contrat avec la société. Ce "contrat vert", je propose qu'il se structure autour de 5 axes .
Premier axe : La maîtrise des évolutions et des choix scientifiques et techniques.
Nous en avons vu les implications au sujet de Toulouse et les propositions concrètes que je fais pour une véritable culture de sûreté et une refondation de la sécurité civile. Mais, plus largement, nous devons prendre en compte le changement d'époque: mondialisation, fracture Nord-Sud, terrorisme, effet de serre, brevetage du vivant, clonage Si la politique sert à quelque chose c'est bien à choisir et non à subir, à maîtriser les évolutions scientifiques et techniques et non à constater, impuissants, les dégâts du progrès; à prévenir les risques naturels ou industriels et non à en faire un constat d'huissier d'après catastrophe, à garantir l'avenir des générations qui vont nous succéder et non à leur laisser un monde de plus en plus invivable . Autrement dit , nous devons refuser l'irréversibilité de solutions dont nous ne maîtrisons pas les effets et pas seulement dans le domaine de l'environnement. Une société durable c'est une société qui prend en compte l'avenir de nos enfants, de nos petits enfants et des générations ultérieures, une société qui ne se résume pas à la maxime : " après moi, le déluge " qui est trop souvent le mode de comportement de nos contemporains, et notamment de la classe politique.
Pourquoi pas de vrais emplois qui durent plus que le temps d'un CDD ? Pourquoi pas de vrais logements qui ne soient pas des cages à lapins que l'on doit détruire tous les 15 ou 20 ans, pourquoi pas de vrais transports collectifs et pas des automobiles- kleenex que l'on change tous les cinq ans ? pourquoi pas une énergie renouvelable qui repose sur l'eau, le soleil, le vent, et pas un système nucléaire qui rend la société dépendante ? Pourquoi jeter au rebut ce que l'on peut recycler ? Créer les conditions d'une société durable c'est passer de la rentabilité économique à court terme à l'intégration de critères de développement humain à long terme qui garantissent la qualité de la vie pour les générations à venir . Le risque a toujours été une constante. Mais aujourd'hui la vie à risques devient un principe d'organisation de la société de marché. On vous la présente comme naturelle, fatale, presque comme une nécessité. C'est faux. Il est possible de faire autrement dans les entreprises dangereuses, les transports, l'agriculture, l'énergie. Il est possible d'inventer de nouvelles formes de coopération entre les hommes, il est possible d'imposer de nouveaux droits dans le travail et l'économie. Il est possible de créer les conditions d'une société durable c'est à dire d'une société qui prenne en compte l'avenir de nos enfants, et des générations ultérieures, une société qui ne se résume pas à la maxime : " après moi, le déluge " .
Deuxième axe : La démocratie participative. Toulouse montre aussi que les citoyens n'ont jamais été écoutés. Qui a décidé qu' AZF s'installerait au milieu de Toulouse ? Comment a été prise la décision du troisième aéroport " parisien " ? Qui a laissé s'installer le scandale de l'abattage de centaines de milliers de bêtes pour enrayer une épidémie dont personne n'avait voulu voir la réalité ? Il s'agit de savoir si nous désirons une société organisée par le haut ou une société en mouvement par le bas.
Une société élitaire ou le pouvoir de la technocratie a fusionné avec le pouvoir de l'argent domine la France et l'Europe. Le vrai pouvoir est là qu'il s'agit de détrôner. Partout des experts, des technocrates, des énarques contrôlés par personne d'autres qu'eux-mêmes veulent nous imposer des choix issus de leurs petits cénacles. Les députés, les représentants du peuple, n'ont plus le pouvoir réel . Ce sont les hauts fonctionnaires, les Conseils d'administration des grandes entreprises, les patrons de laboratoires apatrides qui nous dirigent et prescrivent des solutions en dehors de tout contrôle démocratique. Prendre ses affaires en main, contrôler démocratiquement les choix de ceux qui veulent autoritairement nous obliger à devenir de simples pions, ce sera l'un des enjeux du débat de cette présidentielle.
Nous devons ouvrir les fenêtres de l'Etat français pour qu'à tous les niveaux, les citoyens prennent en main leur destin.. Dans les cités, les conseils de quartiers doivent avoir les moyens de contrôler la gestion des élus, de dire leur mot sur la mise en oeuvre du budget de la ville, de saisir l'autorité comme avec les CLIS les comités locaux d'information et de surveillance de la prochaine loi Cochet sur les risques industriels. La citoyenneté doit retrouver force et vigueur, tout comme la Justice. Il faut que les hommes politiques arrêtent leurs pressions sur elle et sur ceux qui la servent Je voudrais dire, ici, très calmement, que la démission du juge Alphen, honnête et tenace, est une véritable affaire d'Etat. Pour avoir dit un moment ce que je pensais de ces pratiques, le président de l'Assemblée nationale m'avait tancé depuis son perchoir. Décidément de la Mairie de Paris à la MNEF, la droite comme la gauche traditionnelle se tiennent la barbichette pour empêcher la justice de faire son travail. Ils se mettent d'accord quand il s'agit de remettre en cause les libertés avec la loi sur la sécurité quotidienne, quand il s'agit de réviser la loi sur la présomption d'innocence, sans donner plus de moyens à la justice, ou quand il s'agit d'empêcher les citoyens de Toulouse de s'attaquer aux vrais responsables de la catastrophe.
Troisième axe : la préférence citoyenne et humaine : Il faut donner plus à ceux qui ont moins. Ce qui veut dire adapter à la France le principe de la discrimination positive. Oui, si nous voulons une école efficace et exigeante qui lutte totalement contre l'échec scolaire nous devons mettre le paquet en donnant plus aux écoles qui se trouvent dans les quartiers en difficultés, en accordant à leurs profs des bonus, en ne cherchant pas à tout prix à sélectionner les enfants avant l'âge de 16 ans. Oui, si nous voulons que nos villages du Gers, de l'Ariège, de l'Ardèche, de la Creuse, de l'Aveyron ne crèvent pas sur place, nous devons maintenir les services publics. Une école sauvée, un hôpital maintenu, un bureau de poste conservé, c'est la désertification qui recule, c'est la vie qui revient. Dans les quartiers , nous devons stopper la ghettoisation et développer un plan d'urgence pour la réhabilitation des banlieues contre l'exclusion, à hauteur de 75 milliards sur 5 ans. Il faut rendre gratuit le droit d'accès à l'eau, au gaz, à l'électricité, aux transports collectifs pour tous ceux qui n'ont pas les moyens de financer ces services; il faut réaliser le droit au logement pour tous, particulièrement pour les jeunes célibataires. Il faut lutter contre la précarité à tous les niveaux en instituant le revenu minimum d'autonomie pour les jeunes de moins de 25 ans, augmenter les minima sociaux. Il faut développer l'emploi pour tous en continuant à libérer le temps. La semaine de 4 jours, c'est possible d'ici 2007. Il faut renforcer les filets de la protection sociale en faire un axe fondamental. Cela passe par trois conditions :
1) assurer une retraite progressive avec des revenus décents en défendant la pérennité du système de retraite par répartition;
2) faire évoluer le paritarisme et la concertation dans les organismes d'assurance maladie en l'ouvrant aux associations de consommateurs, de parents ou de malades;
3) assurer la couverture des soins et le droit à la santé pour tous : droit à la protection sociale quelles que soient ses capacités de cotisation; simplifier l'accès à la sécurité sociale par une prise en charge directe et universelle des soins quel que soit le régime de chacun.
Quatrième axe : le choix de l'Europe : la campagne qui s'annonce va être franco-française. Je le regrette. La question européenne est au coeur de notre projet politique : L'avènement de l'euro pour 300 millions d'européens est une formidable bouffée d'espoir. C'est un moment historique de la construction européenne mais aussi de la gouvernance mondiale parce que pour la première fois un ensemble de pays s'est doté dans la libre coopération entre Etats d'une monnaie unique. Il est clair que c'est la première étape d'une impulsion politique. Le sommet européen du 14 décembre à Laeken (Belgique) a lancé un processus de réforme des institutions et du mode de fonctionnement de l'Union européenne. Je le dis ici devant l'inventeur de la formule: Il faut une révolution démocratique européenne maintenant : Nous devons entreprendre avant l'élargissement, la réforme de la majorité qualifiée. Nous devons avoir un gouvernement économique européen maintenant, pour contrôler la banque centrale européenne, définir les droits des travailleurs dans une Charte sociale européenne, imposer dans toute l'union le smic à 1000 euros net.
Nous devons avoir une Constitution européenne maintenant. Je ne peux accepter de voir l'Europe se résumer à une zone de libre-échange qui prolongerait l'action dévastatrice de l'OMC. A l'inverse, je crois en une Europe démocratique, où le citoyen redeviendrait l'acteur central où les choix qu'il effectuerait par son vote influeraient réellement sur les politiques de l'Union. l'Europe est la masse critique dont nous avons besoin. Mais l'Europe ne doit pas devenir un super-Etat. Selon moi, fédéralisation de l'Union et régionalisation de la France sont les deux facettes d'un même projet : redonner du pouvoir au citoyen tant sur la marche du monde que dans sa vie quotidienne. L'Europe doit devenir le continent du développement durable et adopter une politique énergétique commune, , une espace d'éducation commun, une politique étrangère et de défense commun.
Cinquième axe : La mondialisation solidaire:
Je serais à Porto Alegre à la fin du mois. De Seattle à Gênes, de Nice à Millau, nous avons été des centaines de milliers de personnes à demander un contrat entre le Nord et le Sud, contre cette politique d'apartheid planétaire qui laisse des millions d'africains mourir du SIDA dans le silence, qui laisse des millions d'enfants des pays pauvres mourir chaque année dans l'indifférence, qui laisse des millions d'enfants esclaves, exploités au service des multinationales, des grands propriétaires terriens, des réseaux de prostitution sexuelle, dans l'apathie généralisée. Allons nous laisser les Ben Laden continuer à surfer sur la frustration des pauvres du monde face à la désinvolture des pays riches ? Que représente une taxe Tobin, une augmentation de 1% du budget français et européen pour l'aide au développement, une annulation de la dette, en regard de ces enjeux?
D'un côté des riches de plus en plus riches, de l'autre des pauvres de plus en plus pauvres. La faillite de l'Argentine et la révolte des sans chemises de Buenos Aires et de Cordoba illustre bien la politique des puissants de ce monde et des organisations à leurs services : la FMI, la banque mondiale et l'OMC : Un taux de chômage de 20 %, 14 millions de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté sur un total de 37 millions d'habitants, une perte de pouvoir d'achat de près de 50 % en cinq ans. La dette extérieure est de 132 milliards de dollars. La rébellion sociale commencée le 19 décembre 2001 s'est déclenchée quand, précisément, le gouvernement argentin a voulu imposer de nouvelles mesures d'austérité suite à la décision prise le 5 décembre 2001 par le FMI de refuser un prêt de 1,264 milliards de dollars. Les peuples du Sud meurent de ces politiques d'austérité et d'ajustement structurel. Ces méfaits entraînent famine et démantèlement des structures sociales et des services publics. Le paiement de la dette n'est que rapine et ne justifie aucunement les souffrances des peuples d'Afrique, d'Asie et d'Amérique Latine maintenus sous la botte invisible du marché. L'Argentine c'est le naufrage du modèle FMI, OMC, Banque Mondiale. Face à cette mondialisation néolibérale, oui je l'affirme: un autre monde est possible et nécessaire, un autre monde est possible si l'on veut s'en donner les moyens.
Chers amis , après le 21 septembre, Toulouse a été comme groggy, meurtri , abasourdi par la douleur mais Toulouse est debout, elle vit et ne doit pas perdre l'espoir. Ce n'est pas seulement les bâtiments qu'il faut reconstruire c'est l'espoir. Et les nouvelles frontières de l'espoir coïncident avec celles de l'écologie. Oui, avec les habitants de Toulouse, je dis "Plus jamais ça", avec les habitants de Lyon menacés par 19 entreprises chimiques " plus jamais ça" , avec les habitants de Rouen menacés par un clone d'AZF "plus jamais ça", avec les habitants de ma Gironde où il y a 10 sites dangereux "plus jamais ça".
La seule politique publique qui vaille c'est de protéger l'avenir pour choisir sa vie, pour que tous puissent choisir leur vie.
Parce que je suis irrévocablement optimiste, et parce que, avec les verts, j'ai les pieds sur terre, je veux être le candidat de l'anti-fatalité, le haut-parleur de toutes celles et de tous ceux qui aspirent à vivre tous ensemble dans une société ouverte, tolérante, conviviale, meilleure et plus juste. En Mars 2001 vous, habitants de Toulouse, avez chanté : " allez ouste Douste ". ça a failli marcher. Le 21 avril, nous dirons à tous ces colporteurs de vieilles rengaines libérales et à tous ces marchands de peur " allez ouste " . Et ça va marcher.
Toulouse aura été le point de départ d'une belle et grande campagne où nous allons partir à la rencontre du pays tout entier. Tous ensemble, on va changer la donne, tous ensemble on va choisir notre vie. L'espoir commence maintenant ! Vive Toulouse, vive le peuple de Toulouse, vive une France ouverte et tolérante, une France fraternelle.
Je vous remercie.
Noël Mamère
(Source http://www.les-verts.org, le 22 janvier 2002)