Déclaration de M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, sur les grands axes de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure et sur les mesures en faveur de la Préfecture de police, Paris le 20 août 2002.

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Circonstance : Commémoration du soulèvement des policiers parisiens le 19 août 1944, à la préfecture de police de Paris le 20 août 2002

Texte intégral

Monsieur le Préfet de Police,
Monsieur le Maire de Paris,
Mesdames et Messieurs,
C'est avec émotion et également avec fierté que je préside pour la première fois ce grand événement que représente pour la Préfecture de Police la Commémoration du soulèvement du 19 août 1944.
Au travers de cette cérémonie toujours marquée par la solennité et le recueillement, je tiens à porter témoignage de notre attachement à la Préfecture de Police et tout spécialement à ses glorieux défenseurs lors de la Libération.
Voilà 58 ans, les policiers de la Capitale prenaient en effet les armes et se rassemblaient ici même, dans cette cour baptisée depuis lors "du 19 août", pour lancer avec éclat l'insurrection du peuple de Paris contre l'occupant nazi. Après cinq jours d'une lutte acharnée et héroïque, ils accueillaient au soir du 24 août les premiers chars de la 2ème DB du Général Leclerc arrivant sur l'Ile de la Cité, et c'est à la Préfecture de Police même, dans un salon donnant sur le boulevard du Palais que le lendemain, 25 août, Leclerc recevait des mains du Gouverneur militaire de Paris la capitulation des troupes allemandes.
En se soulevant contre l'ennemi, ces courageux policiers parisiens ont risqué leur vie pour défendre contre les attaques allemandes la Caserne de la Cité, transformée en forteresse. C'est aussi l'honneur et la liberté de la France qu'ils ont défendus, jusqu'au sacrifice suprême, puisque 167 d'entre eux sont tombés pendant les combats de la Libération, les armes à la main.
Il nous revient aujourd'hui d'honorer leur mémoire, afin de leur rendre le vibrant hommage qui leur est dû. Dans cet esprit, je veux également remercier avec chaleur et gratitude tous ceux d'entre eux qui sont aujourd'hui parmi nous, anciens combattants et résistants de la Préfecture de Police, dont l'abnégation et le comportement magnifique dans les heures les plus sombres de notre histoire forcent le respect et suscitent l'admiration de tous.
Policiers parisiens, vous portez fièrement la fourragère rouge, décernée à la Préfecture de Police par le Général de Gaulle le 12 octobre 1944. Continuez à vous montrer dignes de cette distinction, elle est le témoignage de l'engagement sans faille de vos aînés au service des valeurs de la République et de la France.
C'est à vous, hommes et femmes de la Préfecture de Police, que je veux particulièrement m'adresser, pour vous dire toute la confiance et toutes les attentes que je place en vous.
Vous appartenez à une grande Maison, forte d'une histoire ancienne et prestigieuse, dont les combats de la Libération marquèrent un point d'orgue. Votre action quotidienne au profit de vos concitoyens de la Capitale s'inscrit dans la continuité de cette tradition d'excellence du service public.
Je connais votre engagement au bénéfice de la société, et votre dévouement sans faille au bien public. Dès ma prise de fonctions, j'ai voulu aller à votre rencontre.
De ces contacts nombreux et fructueux avec vous et avec votre hiérarchie, de même qu'au travers des échanges confiants que j'ai pu nouer avec vos représentants et vos organisations syndicales, j'ai retiré des enseignements importants pour l'exercice de mes fonctions ministérielles. J'en ressens également une immense fierté, celle de diriger un Ministère où servent des hommes et des femmes de qualité. Je mesure aussi le niveau d'exigence qui doit être le mien, face à l'ampleur de la tâche à accomplir.
La sécurité intérieure est un enjeu majeur pour notre société. Nos concitoyens exigent que les pouvoirs publics répondent à leurs attentes, attentes qu'ils ont exprimées avec force et détermination. La lutte contre la délinquance, sous toutes ses formes, est la priorité des priorités : il faut rendre confiance à ces millions de français qui doutent parfois de nos institutions, parce qu'ils veulent vivre en paix, et que cette possibilité leur est refusée.
Nous avons dans ce domaine une obligation absolue de résultats : faire reculer l'insécurité de manière significative et durable. Pour ce faire, nous devons et j'insiste sur la dimension collective de cette démarche, nous devons mettre tout en uvre.
Malgré la difficulté de cette tâche, je suis certain que nous réussirons, parce que nous avons la volonté d'y parvenir, et parce que le gouvernement est décidé à vous donner les moyens de notre ambition.
Je sais pouvoir compter sur l'engagement et la compétence professionnelle de chacune et chacun d'entre vous, hommes et femmes de la Préfecture de Police, attachés à une conception particulièrement élevée du service public.
En retour, vous savez pouvoir compter sur moi et sur ma détermination à vous apporter les conditions nécessaires pour travailler efficacement, conditions à la fois structurelles et humaines, matérielles et financières. Les premières mesures, très significatives, prises par le Gouvernement au cours des cent premiers jours sont la concrétisation de cette détermination.
La loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, la LOPSI, adoptée par le Parlement lors de la session extraordinaire tenue cet été, constitue désormais le cadre général de l'action gouvernementale en matière de lutte contre l'insécurité. Ce texte à vocation prospective sera complété par d'autres dispositions législatives, soumises au Parlement dès l'automne. Il fixe d'ores et déjà deux axes principaux sur lesquels je souhaite insister : donner aux forces de sécurité les moyens juridiques pour lutter plus efficacement contre la délinquance d'une part, et d'autre part leur donner les moyens humains et matériels supplémentaires qui leur seront nécessaires.
Pour ce qui concerne le premier volet, le texte de loi prévoit des mesures tendant à restaurer l'autorité et la capacité des agents de l'Etat à agir, ainsi que le renforcement de l'efficacité des investigations policières. Je veux en particulier donner un coup d'arrêt au développement de nouveaux types de délinquance qui se développent, comme les vols de voiture, les vols de téléphones portables ou de cartes bancaires. Le contrôle des armes sera renforcé, au travers d'une réglementation simplifiée et plus efficace pour prévenir le renouvellement de malheureuses affaires que nous avons connues récemment.
Par ailleurs, j'estime qu'il est urgent de donner une réponse, à la fois en termes de prévention et d'action, à la délinquance des mineurs, problème majeur de notre société.
Il faut également réprimer le proxénétisme, le plus souvent alimenté par des réseaux criminels étrangers, et plus généralement tous les comportements qui perturbent gravement la vie sociale, comme la mendicité agressive ou les regroupements en bandes dans les halls d'immeubles.
Cependant, et c'est le second volet du projet gouvernemental, ces mesures, tout à fait indispensables seraient insuffisantes, si elles n'étaient pas accompagnées d'un effort budgétaire conséquent, à la hauteur des besoins des services de sécurité. En la matière, le Gouvernement a tenu sa promesse, puisque c'est une enveloppe de 5,6 milliards d'euros supplémentaires qui a été dégagée sur cinq ans pour les policiers et les gendarmes, soit une progression de leurs crédits de fonctionnement de 25 % sur cette même période.
Ces crédits vont permettre de recruter les effectifs nécessaires au renforcement de la présence policière partout où elle est indispensable, au plus près de nos concitoyens. 6.500 emplois supplémentaires de policiers seront créés en 5 ans. Ici même, à la Préfecture de Police, l'effectif du corps de maîtrise et d'application sera porté à 15.400 au 1er avril 2003. Ultérieurement, cet effectif sera encore augmenté, pour mettre en uvre les priorités que j'ai eu l'occasion de fixer au Préfet de Police et à ses collaborateurs en venant à la Préfecture le 4 juillet dernier.
Par ailleurs, afin d'améliorer les conditions de travail des fonctionnaires, les moyens matériels dont ils disposent seront sensiblement améliorés. La construction ou la rénovation des locaux, notamment, sera accélérée, grâce au développement de formules juridiques innovantes, comme le crédit-bail. La police parisienne constituera dans ce domaine une priorité, en raison de l'exiguïté et de la vétusté de nombreux commissariats de la Capitale. Je remercie la Ville de Paris qui a accepté le principe d'un partenariat pour mettre en uvre ce plan d'ampleur exceptionnelle puisqu'il s'élève à 300 millions d'euros.
Les moyens supplémentaires ainsi dégagés nous obligent à obtenir des résultats, rapidement, car l'opinion publique ne comprendrait pas, et elle aurait raison, que ce déploiement de force ne produise pas un recul significatif de la délinquance. De ce point de vue, l'évolution des chiffres de la délinquance à Paris me conduit à être confiant.
Ainsi, j'enregistre avec satisfaction les statistiques du mois de juillet 2002, qui marquent pour le troisième mois consécutif une baisse de la délinquance par rapport à la même période de 2001. Sur les mois de mai, juin et juillet 2002, la délinquance générale a diminué à Paris de 5,2 %, et la délinquance de voie publique de 17,3 %. Les vols avec violence, quant à eux, ont reculé de plus de 36%. Ces très bon résultats ne sont pas le fruit du hasard, mais la conséquence immédiate et directe du travail fourni par les policiers parisiens. Les indicateurs d'activité des différents services de la Préfecture de Police, tous à la hausse, reflètent d'ailleurs ces efforts de terrain, constants et prolongés.
C'est dans cette voie qu'il nous faut continuer, pour faire reculer la délinquance et rendre l'espoir à ceux de nos concitoyens qui l'auraient perdu. Il s'agit là d'un vaste programme, ambitieux mais tout à fait à la portée d'une grande Maison comme la Préfecture de Police, habituée depuis plus de deux siècles à relever les défis de son temps en répondant aux attentes placées en elle.
Mesdames et Messieurs, je veux dire toute la confiance et toute l'estime que je porte à la Préfecture de Police, à son chef, le Préfet de Police, Jean-Paul PROUST, et à tous les agents et fonctionnaires, hommes et femmes, qui ont la chance d'y servir.
J'ai également une pensée toute particulière pour les policiers blessés en service à Paris au cours de l'année écoulée, ainsi qu'à leurs familles, et je leur adresse mes sentiments de sympathie et mes pensées très proches. A ceux qui sont aujourd'hui encore dans la douleur ou en convalescence, j'exprime mes vux les plus chaleureux de prompt et complet rétablissement.
A vous tous, enfin, je dis ma gratitude et ma considération pour le sens élevé du service public dont vous faites preuve au bénéfice des Parisiennes et des Parisiens, dans la continuité prestigieuse de vos prédécesseurs glorieux du mois d'août 1944. Soyez-en tous chaleureusement félicités et remerciés.
Vive la République !
Vive la France !
(Source http://www.prefecture-police-paris.interieur.gouv.fr, le 22 août 2002)