Texte intégral
Durant près de 20 ans. la population française a subi des discours consacrés à la famille dont la double orientation était lancinante :
- La famille est en crise en raison de la décadence des valeurs morales,
- "Faîtes des enfants pour la patrie".
Ce discours passéiste, normalisateur et chagrin ne correspond nullement à la réalité ; nous pensons en effet :
- que la famille est un facteur d'adaptation formidable aux changements socioculturels et qu'elle a su elle-même évoluer profondément et diversifier ses structures par le développement de l'activité féminine, de la régulation des naissances et de la cohabitation juvénile.
- qu'en son sein s'exercent plus activement que jamais, en raison des détresses que fait naître la crise économique, des solidarités quotidiennes entre les générations qui la composent.
- que son rôle démographique se conçoit heureusement de plus en plus en termes de liberté, selon lesquels il faut que tous les enfants qui naissent soient désirés et que tous les enfants désirés puissent naître.
Cassant les normes culturelles dominantes, et tirant les conséquences de la disparition des fatalités démographiques, une révolution tranquille s'opère sous nos yeux qui libère la famille.
L'aveuglement de la droite face à ce renouveau a naturellement entraîné une décadence de la politique familiale, marquée par l'absence d'horizon, le morcellement du système d'aide et l'inégalité croissante entre ses bénéficiaires.
Comment aurait-il pu en être autrement alors que les seuls repères de l'action restés en place étaient le développement de l'assistance et une vision rétrograde de notre avenir démographique ?
Donner un horizon à la politique familiale, restaurer la cohérence du système d'aide, prendre en compte les besoins des familles : voilà nos objectifs.
Leur réalisation exige à mon sens que s'engage d'abord un débat démocratique portant sur tous les aspects de la politique familiale. Les perspectives à long terme dégagées par cette concertation pourraient faire l'objet d'une loi d'orientation, marquant de façon solennelle, le dialogue rétabli et la confiance retrouvée entre la collectivité nationale et les familles.
Dans le cadre ainsi tracé, j'envisage une ou plusieurs lois d'application portant refonte des aides directes aux familles.
L'une des novations de la concertation qui va être entreprise, sera d'appréhender globalement cette aide directe : en effet, il n'y a pas de cohérence possible à considérer séparément les avantages fiscaux, les prestations et l'accès aux équipements.
Il faut reformer les prestations familiales dans le cadre de la révision de l'ensemble des mesures financières concernant les familles, y compris leur volet fiscal et tout d'abord dans les limites autorisées par la seconde revalorisation prévue pour 1982.
L'accès aux équipements destinés à l'enfance constitue un impératif national, compte tenu de l'état de carence que nous constatons : 2 300 000 enfants ont moins de trois ans, dont 1.300.000 ont particulièrement besoin d'une structure d'accueil.
Face à cette demande massive, il n'existe que 100 000 places de crèches et 300 000 places de garde par assistante maternelle : les chiffres parlent d'eux-mêmes et réclament des mesures exceptionnelles.
Quels sont les objectifs ?
Satisfaire les besoins tout en assurant aux parents le libre choix du mode de garde.
Pour cela, il faut, dans les 2 ans, construire de nombreuses places de crèches collectives ou familiales. Les crédits inscrits à ce titre au budget de 1982 permettent déjà de réaliser plus de 10 000 places.
Il faut également alléger la charge que supportent les collectivités locales au titre du fonctionnement, faute de quoi, l'effort de l'Etat ne serait aucunement relayé, le financement de cette mesure à imputer sur le coût de la réforme des prestations, constitue une priorité que nous soumettrons à la concertation.
J'ai fait entreprendre une étude approfondie de l'ampleur, de la diversité et de la localisation des besoins.
A partir de constats, nous cherchons à élargir la gamme des modes d'accueil en créant des crèches collectives et familiales et en favorisant le développement de toutes les initiatives émanant des parents, des associations, des collectivités locales, afin de répondre à la diversité des besoins tout en maîtrisant les coûts de fonctionnement.
Toute action économique ou politique concerne la famille, toute politique familiale est économique et politique : par le rétablissement de l'équité fiscale et la revalorisation des prestations, notre action contribue à la relance d'une demande assainie : par un programme sans précédent de création d'équipements, elle lutte efficacement contre le chômage : plus de 130.000 emplois seront créés en quatre ans par les effets directs de ce programme.
Mais tout ceci ne serait rien si la politique familiale restait confinée dans ce système d'aides directes : faire éclater le ghetto dans lequel la politique familiale s'est appauvrie me conduira à veiller sans relâche à ce que les politiques sectorielles, menées par le gouvernement, conservent ou acquièrent une dimension familiale.
Cette action s'exercera en fonction de trois perspectives prioritaires :
- le cadre de vie
- le rythme de vie
- l'égalité dans la vie quotidienne
Le cadre de vie
L'école constitue un élément fondamental du cadre de vie des parents comme des enfants. C'est pourquoi je voudrais souligner l'intérêt que j'attache à la concertation entre les parents et les enseignants annoncée par M. le ministre de l'éducation nationale.
En ce qui concerne l'habitat, je poursuivrai en collaboration avec les ministres intéressés, deux objectifs :
- mettre fin à la ségrégation des âges provoquée par le coût des logements et l'absence de vue d'ensemble des besoins, en encourageant notamment le logement évolutif pour permettre aux familles d'accroître temporairement la surface de leur logement et faciliter ainsi le rapprochement familial des générations.
- il s'agit d'autre part, d'encourager partout et toujours la prise en main par les habitants de la gestion de leur habitat : ce n'est qu'en empruntant cette voie, qui est le contraire d'un effort réglementaire de plus, qu'on obtiendra une expression des besoins réels, que se dessinera progressivement la juste place de l'enfant dans la cité où il est actuellement toléré plus qu'accueilli.
Le rythme de vie
L'aménagement du temps doit favoriser l'adaptation du travail au fait familial et non l'inverse.
En ce sens, je souhaite contribuer à l'adoption de la réduction de la journée de travail, seule à même de permettre vraiment aux parents de jeunes enfants, de mieux gérer leur emploi du temps sans restreindre leurs droits sociaux et pénaliser leur carrière.
L'égalité dans la vie quotidienne
C'est, j'en suis convaincue, dans la vie quotidienne familiale que commence la bataille pour l'égalité.
Egalité pour les familles en état de précarité parce qu'un parent isolé, l'existence du chômage, l'incompréhension, l'ignorance des mécanismes complexes de l'aide sociale, ouvrent la voie à la déstructuration familiale et sociale. Ceci exige donc une action particulière à mener sous l'égide du ministre de la solidarité nationale.
Egalité pour tous les membres de la famille en considérant que la reconnaissance par chacun des droits de la femme est la condition essentielle à l'épanouissement de tous au sein de l'univers familial.
Lutter contre les inégalités par la refonte des transferts sociaux et le développement des modes de garde, mais aussi défendre la dimension familiale de toutes les actions du gouvernement : tels sont les deux axes du programme que je vous soumets. Cette action d'ensemble est le contraire d'une politique " au coup par coup " ; elle vise à renforcer le tissu social contemporain afin qu'il porte les changements de société que nous réaliserons et qu'il fasse naître ainsi le monde de demain.
- La famille est en crise en raison de la décadence des valeurs morales,
- "Faîtes des enfants pour la patrie".
Ce discours passéiste, normalisateur et chagrin ne correspond nullement à la réalité ; nous pensons en effet :
- que la famille est un facteur d'adaptation formidable aux changements socioculturels et qu'elle a su elle-même évoluer profondément et diversifier ses structures par le développement de l'activité féminine, de la régulation des naissances et de la cohabitation juvénile.
- qu'en son sein s'exercent plus activement que jamais, en raison des détresses que fait naître la crise économique, des solidarités quotidiennes entre les générations qui la composent.
- que son rôle démographique se conçoit heureusement de plus en plus en termes de liberté, selon lesquels il faut que tous les enfants qui naissent soient désirés et que tous les enfants désirés puissent naître.
Cassant les normes culturelles dominantes, et tirant les conséquences de la disparition des fatalités démographiques, une révolution tranquille s'opère sous nos yeux qui libère la famille.
L'aveuglement de la droite face à ce renouveau a naturellement entraîné une décadence de la politique familiale, marquée par l'absence d'horizon, le morcellement du système d'aide et l'inégalité croissante entre ses bénéficiaires.
Comment aurait-il pu en être autrement alors que les seuls repères de l'action restés en place étaient le développement de l'assistance et une vision rétrograde de notre avenir démographique ?
Donner un horizon à la politique familiale, restaurer la cohérence du système d'aide, prendre en compte les besoins des familles : voilà nos objectifs.
Leur réalisation exige à mon sens que s'engage d'abord un débat démocratique portant sur tous les aspects de la politique familiale. Les perspectives à long terme dégagées par cette concertation pourraient faire l'objet d'une loi d'orientation, marquant de façon solennelle, le dialogue rétabli et la confiance retrouvée entre la collectivité nationale et les familles.
Dans le cadre ainsi tracé, j'envisage une ou plusieurs lois d'application portant refonte des aides directes aux familles.
L'une des novations de la concertation qui va être entreprise, sera d'appréhender globalement cette aide directe : en effet, il n'y a pas de cohérence possible à considérer séparément les avantages fiscaux, les prestations et l'accès aux équipements.
Il faut reformer les prestations familiales dans le cadre de la révision de l'ensemble des mesures financières concernant les familles, y compris leur volet fiscal et tout d'abord dans les limites autorisées par la seconde revalorisation prévue pour 1982.
L'accès aux équipements destinés à l'enfance constitue un impératif national, compte tenu de l'état de carence que nous constatons : 2 300 000 enfants ont moins de trois ans, dont 1.300.000 ont particulièrement besoin d'une structure d'accueil.
Face à cette demande massive, il n'existe que 100 000 places de crèches et 300 000 places de garde par assistante maternelle : les chiffres parlent d'eux-mêmes et réclament des mesures exceptionnelles.
Quels sont les objectifs ?
Satisfaire les besoins tout en assurant aux parents le libre choix du mode de garde.
Pour cela, il faut, dans les 2 ans, construire de nombreuses places de crèches collectives ou familiales. Les crédits inscrits à ce titre au budget de 1982 permettent déjà de réaliser plus de 10 000 places.
Il faut également alléger la charge que supportent les collectivités locales au titre du fonctionnement, faute de quoi, l'effort de l'Etat ne serait aucunement relayé, le financement de cette mesure à imputer sur le coût de la réforme des prestations, constitue une priorité que nous soumettrons à la concertation.
J'ai fait entreprendre une étude approfondie de l'ampleur, de la diversité et de la localisation des besoins.
A partir de constats, nous cherchons à élargir la gamme des modes d'accueil en créant des crèches collectives et familiales et en favorisant le développement de toutes les initiatives émanant des parents, des associations, des collectivités locales, afin de répondre à la diversité des besoins tout en maîtrisant les coûts de fonctionnement.
Toute action économique ou politique concerne la famille, toute politique familiale est économique et politique : par le rétablissement de l'équité fiscale et la revalorisation des prestations, notre action contribue à la relance d'une demande assainie : par un programme sans précédent de création d'équipements, elle lutte efficacement contre le chômage : plus de 130.000 emplois seront créés en quatre ans par les effets directs de ce programme.
Mais tout ceci ne serait rien si la politique familiale restait confinée dans ce système d'aides directes : faire éclater le ghetto dans lequel la politique familiale s'est appauvrie me conduira à veiller sans relâche à ce que les politiques sectorielles, menées par le gouvernement, conservent ou acquièrent une dimension familiale.
Cette action s'exercera en fonction de trois perspectives prioritaires :
- le cadre de vie
- le rythme de vie
- l'égalité dans la vie quotidienne
Le cadre de vie
L'école constitue un élément fondamental du cadre de vie des parents comme des enfants. C'est pourquoi je voudrais souligner l'intérêt que j'attache à la concertation entre les parents et les enseignants annoncée par M. le ministre de l'éducation nationale.
En ce qui concerne l'habitat, je poursuivrai en collaboration avec les ministres intéressés, deux objectifs :
- mettre fin à la ségrégation des âges provoquée par le coût des logements et l'absence de vue d'ensemble des besoins, en encourageant notamment le logement évolutif pour permettre aux familles d'accroître temporairement la surface de leur logement et faciliter ainsi le rapprochement familial des générations.
- il s'agit d'autre part, d'encourager partout et toujours la prise en main par les habitants de la gestion de leur habitat : ce n'est qu'en empruntant cette voie, qui est le contraire d'un effort réglementaire de plus, qu'on obtiendra une expression des besoins réels, que se dessinera progressivement la juste place de l'enfant dans la cité où il est actuellement toléré plus qu'accueilli.
Le rythme de vie
L'aménagement du temps doit favoriser l'adaptation du travail au fait familial et non l'inverse.
En ce sens, je souhaite contribuer à l'adoption de la réduction de la journée de travail, seule à même de permettre vraiment aux parents de jeunes enfants, de mieux gérer leur emploi du temps sans restreindre leurs droits sociaux et pénaliser leur carrière.
L'égalité dans la vie quotidienne
C'est, j'en suis convaincue, dans la vie quotidienne familiale que commence la bataille pour l'égalité.
Egalité pour les familles en état de précarité parce qu'un parent isolé, l'existence du chômage, l'incompréhension, l'ignorance des mécanismes complexes de l'aide sociale, ouvrent la voie à la déstructuration familiale et sociale. Ceci exige donc une action particulière à mener sous l'égide du ministre de la solidarité nationale.
Egalité pour tous les membres de la famille en considérant que la reconnaissance par chacun des droits de la femme est la condition essentielle à l'épanouissement de tous au sein de l'univers familial.
Lutter contre les inégalités par la refonte des transferts sociaux et le développement des modes de garde, mais aussi défendre la dimension familiale de toutes les actions du gouvernement : tels sont les deux axes du programme que je vous soumets. Cette action d'ensemble est le contraire d'une politique " au coup par coup " ; elle vise à renforcer le tissu social contemporain afin qu'il porte les changements de société que nous réaliserons et qu'il fasse naître ainsi le monde de demain.