Texte intégral
Irak
"la guerre n'est pas la voie à prendre"
"Nous avons le sentiment qu'en ce moment la majorité au Conseil de sécurité est plutôt dans notre camp. Nous pensons sincèrement qu'il y a une alternative à la guerre. Bien sûr, si Saddam Hussein ne répondait pas aux appels des inspecteurs, nous n'excluons pas le recours à la force. Mais la guerre n'est pas la voie à prendre, ce n'est pas une voie morale, ni une voie efficace. Nous devons convaincre. Dire la vérité à nos alliés. Nous avons, les Normands le savent bien, une gratitude du sang avec les Américains, un attachement fondateur. On ne peut oublier ni Lafayette ni Omaha Beach, nos histoires sont trop mêlées pour qu'il y ait entre nos deux peuples des incompréhensions. Les Américains veulent une réponse au 11 septembre, mais la guerre en Irak n'est pas la réponse appropriée. Que ce soit clair, nous n'avons pas de tendresse pour le régime irakien, mais penser que le peuple irakien soit menacé atteint profondément notre conscience. Bien sûr, nous assumerons toutes nos responsabilités, mais pour le moment, nous pensons pouvoir convaincre. Et notre détermination est grande".
Economie
"Je dois financer les réformes Jospin et tenir nos engagements"
"Le ralentissement de la croissance est très rapide, les 2, 5 ne seront effectivement pas atteints. Ralentissement qui se comprend par l'attentisme international et européen. D'autre part nous rencontrons des difficultés budgétaires. La Poste est en déficit de 300 millions d'euros, il faut mettre beaucoup d'argent dans France Télécom, Edf est aussi en difficulté financière. Sans parler du coût des 35 heures. En fait, je dois aujourd'hui financer les réformes de Lionel Jospin et tenir nos engagements. C'est lourd! Mais ma politique économique reste la recherche d'une nouvelle croissance durable. Je pense qu'elle est accessible."
Austérité: "Non au tour de vis!"
"Je ne suis pas pessimiste sur nos grands indices économiques. La consommation se situe encore à un niveau fort et nous avons des perspectives d'investissements chez les industriels. Les fondamentaux économiques sont bons. Nous ne sommes donc pas en situation de déclencher la rigueur en France. Je dis non au tour de vis et je tiendrai les engagements de baisse des impôts".
Réformes: "il faut accélérer"
"Il faut accélérer les réformes, la décentralisation et les retraites notamment. Cette dernière est très importante car elle va sécuriser les français sur leur avenir. Les difficultés internationales actuelles ne sont pas de nature à stopper nos projets de réforme".
Méthode: "je dirai toujours la vérité aux Français"
"Je dirai toujours la vérité aux Français. Je le dirais avec une grande clarté et des mots très directs. Quand je dis que nous serons à 3 % de déficit 2002, c'est la vérité. Le président de la République m'a confié une mission, je suis là pour l'assumer, dans la clarté".
- Quelle est la principale raison qui, selon vous, justifie la réforme de la décentralisation en France ?
Il faut simplifier la vie des Français. Le 21 avril dernier, ils nous ont adressé un message clair. Notre monde est un monde de complexité et d'incertitudes. Les rapports sociaux, les rapports salariaux sont souvent difficiles. Les relations les plus stables, au sein des familles, au sein de l'école sont fragilisées. Or, notre système institutionnel et administratif n'aide plus les Français à gérer cette complexité et ces incertitudes. L'ambition du président de la République et du Gouvernement, c'est d'en faire à nouveau un facteur de simplification pour les Français. Enfin, ce que nous expérimentons avec la décentralisation, c'est une nouvelle méthode pour réformer l'Etat. Nous voulons un Etat plus efficace, concentré sur ses missions et qui sait faire confiance aux élus de proximité.
- Vous conservez tous les étages de la "fusée institutionnelle" française dont on entendait dire qu'elle était l'une des plus généreusement dotée d'Europe. Pour quelle raison, l'idée de supprimer un de ces étages - à une époque les conseils généraux se sentaient visés - s'est-elle évanouie ?
Le débat n'a pas conduit à contester une collectivité en particulier, mais à simplifier leur organisation.
La commune a été plébiscitée comme le lieu historique du lien social et des services de proximité. Le département est l'institution chargée de la proximité donc de la solidarité. La région est l'espace de la stratégie donc de la formation des personnes et du développement des territoires. Enfin, l'intercommunalité comme lieu de solidarité entre les communes.
Croyez vous qu'au moment où le lien civique se distend, nous puissions nous passer de la diversité et de l'enthousiasme des 500 000 élus locaux ? Au contraire, mon Gouvernement s'attache à leur confier des responsabilités claires et des moyens nouveaux. C'est pourquoi aussi j'ai réformé le mode de scrutin régional pour dégager des majorités et ancrer les élus régionaux dans les territoires.
- La crainte majeure exprimée par l'opposition tient non pas dans le principe de la décentralisation, mais dans sa forme. En substance: les moyens - personnel, finances - accompagneront-ils les transferts de compétences ? Ou encore: l'Etat n'est-il pas tenté de décentraliser ses déficits ?
L'opposition cherche des sujets de polémique mais, sur le fond, il y a une filiation évidente entre notre projet et celui de MM. Mauroy et Deferre en 1982. La plupart de mes propositions d'aujourd'hui sont inscrites noir sur blanc dans le rapport Mauroy d'hier. Sur la question des moyens, le Gouvernement a pris les engagements les plus formels, puisqu'il a modifié la Constitution pour garantir que les moyens humains et financiers suivront les compétences. Ce principe sera respecté et le Conseil constitutionnel en sera le garant. Concrètement, nous avons l'intention de transférer aux territoires une part de la TIPP.
- Aller plus loin dans la décentralisation ne comporte-t-il pas le risque d'un affaiblissement de l'Etat républicain auquel les Français sont très attachés ?
Je pense exactement le contraire. La décentralisation, c'est le moyen pour l'Etat de redevenir fort là où les Français l'attendent. L'Etat, à force de vouloir tout faire, a fini par négliger ce que lui seul peut faire. L'Etat tient le guichet de dizaine de fonds. Il gère, pour le compte des collectivités, la carrière de milliers d'agents pour des compétences transférées depuis 20 ans. Mais il n'a pas été capable de prévoir la pénurie d'infirmières, ni d'empêcher l'explosion de la petite délinquance. Et il a produit des normes sans se préoccuper de savoir si elles étaient respectées. Ce que nous construisons, ce n'est pas le désengagement de l'Etat, c'est son renforcement, là où il est essentiel.
- Laurent Fabius, ancien Premier ministre socialiste, député de Seine-Maritime, a rebaptisé votre projet de décentralisation en "projet pour l'augmentation des impôts locaux". Les contribuables doivent-ils être inquiets ?
Le Fabius que je préfère, ce n'est pas celui des formules partisanes. A Bercy L. Fabius était plutôt centralisateur. Ainsi le Gouvernement précédent a mis en place la décentralisation non financée de l'APA et les 35 h, deux réformes qui ont littéralement plombé les finances des collectivités !
Pour les années à venir, je garantis aux Français que la somme des impôts locaux et des impôts d'Etat n'augmentera pas à cause de la décentralisation. Je pense même qu'à terme, nous ferons des économies. Et si l'opposition le souhaite, je suis prêt à ce que le Parlement constitue une commission de suivi de cet engagement.
- Une des notions maîtresses émergeant des ateliers préparatoires à ces assises tient dans le mot "simplification". Quelle va en être, dans votre projet, l'expression la plus symbolique pour le citoyen ?
Je voudrais vous citer un exemple qui me tient à coeur, celui du handicap. L'insertion des handicapés est une cause nationale, sur laquelle le président de la République nous a mobilisés. Voilà un domaine où nous pouvons faire mieux et plus simple : aujourd'hui, selon que vous êtes majeur ou mineur, que vous travaillez ou non, que vous avez besoins de soins, vous vous adressez à la COTOREP, à l'Etat, aux départements ou à l'assurance maladie, selon que vous cherchez un auxiliaire de vie, un foyer d'hébergement, médicalisé ou non, un atelier protégé, un CAT, une maison d'accueil spécialisée. Il faut clarifier tout cela.
Autres exemples de simplification nécessaire : en matière de formation professionnelle, la région est censée avoir toute la compétence, mais elle maîtrise actuellement moins de la moitié des outils ; en matière d'éducation, les départements et les régions ont en charge l'entretien des collèges et des lycées, mais ils n'ont pas la gestion du personnel ; la région est censée être compétente en matière d'intervention économique, mais elle est concurrencée par au moins trois ou quatre services de l'Etat, et une entreprise qui a un projet doit courir d'un guichet à l'autre voilà ce qu'il nous faut simplifier !
- La possibilité de l'expérimentation a suscité également beaucoup de commentaires. Comment pouvez-vous l'illustrer aujourd'hui ? Comment va-t-elle se traduire sur le terrain ?
L'expérimentation est un moyen de réformer sans bloquer et de tester avec pragmatisme le bon niveau d'exercice des compétences. Je m'inspire de la réforme des chemins de fer régionaux. On nous promettait le pire. Finalement, on a pris le temps nécessaire, 6, puis 7 régions ont commencé il y a 8 ans, et que s'est-il passé ? Les syndicats, les cadres, les usagers ont vu que les trains étaient à l'heure, qu'ils étaient confortables, que les gares reprenaient des couleurs. La réforme a été généralisée l'an dernier.
Nous ne multiplierons pas les expérimentations, parce que les Français ont besoin de lisibilité. Mais je souhaite que des expérimentations soient conduites en matière de santé, de protection judiciaire de la jeunesse, de gestion des moyens de l'éducation nationale. Plus généralement, je suis prêt à répondre aux demandes des collectivités.
- La réunification de la Normandie peut-elle s'inscrire dans cette logique d'expérimentation, et comment ?
J'ai la conviction que la réforme constitutionnelle aura des conséquences très importantes dans les 20 ans à venir. Pendant longtemps, le débat était virtuel. " Ah, si l'on pouvait. " Maintenant on peut ! On peut consulter les électeurs. Et on peut organiser certaines collectivités - je pense à la Corse, à Paris, à l'Alsace, si elle le souhaite - selon un statut particulier. L'Etat favorisera tout ce qui va dans le sens des regroupements et des simplifications. Il s'opposera - du moins tant que je serai Premier ministre - aux politiques de division et de fractionnement des territoires. Il n'y a pas de " plan secret " pour redessiner la carte des régions et des départements. L'impulsion doit venir des territoires.
- Le transfert de compétences ressemble, dans les déclarations d'intentions, à un vaste marché d'échanges. Dans la même région, Conseil régional et Département sont parfois intéressés par les mêmes domaines. Qui tranchera ? Et sur quels critères ?
C'est le Parlement qui décide des compétences des collectivités. Un des grands enseignements des assises des libertés locales, c'est qu'il y a globalement un consensus sur la répartition des compétences :
Aux régions, les politiques d'orientation des hommes et des territoires : la formation des jeunes adultes, leur orientation vers les métiers de demain, l'appui aux universités, les interventions économiques, la formation tout au long de la vie, la participation à la définition de l'offre de soins, les schémas d'aménagement et de transport qui structurent les territoires. Aux départements, en subsidiarité avec les grosses agglomérations, les politiques de solidarité (bloc social dans son ensemble : enfance, exclus, personnes âgées, handicapés) et les équipements de proximité (collèges, logement, transports, eau). Aux communes et aux agglomérations, les services de proximité et le lien citoyen.
Je suis sûr que cette énergie nouvelle que libèrera la décentralisation mobilisera les territoires. La décentralisation, c'est d'abord bon pour l'emploi.
(Source (Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 4 mars 2003)
"la guerre n'est pas la voie à prendre"
"Nous avons le sentiment qu'en ce moment la majorité au Conseil de sécurité est plutôt dans notre camp. Nous pensons sincèrement qu'il y a une alternative à la guerre. Bien sûr, si Saddam Hussein ne répondait pas aux appels des inspecteurs, nous n'excluons pas le recours à la force. Mais la guerre n'est pas la voie à prendre, ce n'est pas une voie morale, ni une voie efficace. Nous devons convaincre. Dire la vérité à nos alliés. Nous avons, les Normands le savent bien, une gratitude du sang avec les Américains, un attachement fondateur. On ne peut oublier ni Lafayette ni Omaha Beach, nos histoires sont trop mêlées pour qu'il y ait entre nos deux peuples des incompréhensions. Les Américains veulent une réponse au 11 septembre, mais la guerre en Irak n'est pas la réponse appropriée. Que ce soit clair, nous n'avons pas de tendresse pour le régime irakien, mais penser que le peuple irakien soit menacé atteint profondément notre conscience. Bien sûr, nous assumerons toutes nos responsabilités, mais pour le moment, nous pensons pouvoir convaincre. Et notre détermination est grande".
Economie
"Je dois financer les réformes Jospin et tenir nos engagements"
"Le ralentissement de la croissance est très rapide, les 2, 5 ne seront effectivement pas atteints. Ralentissement qui se comprend par l'attentisme international et européen. D'autre part nous rencontrons des difficultés budgétaires. La Poste est en déficit de 300 millions d'euros, il faut mettre beaucoup d'argent dans France Télécom, Edf est aussi en difficulté financière. Sans parler du coût des 35 heures. En fait, je dois aujourd'hui financer les réformes de Lionel Jospin et tenir nos engagements. C'est lourd! Mais ma politique économique reste la recherche d'une nouvelle croissance durable. Je pense qu'elle est accessible."
Austérité: "Non au tour de vis!"
"Je ne suis pas pessimiste sur nos grands indices économiques. La consommation se situe encore à un niveau fort et nous avons des perspectives d'investissements chez les industriels. Les fondamentaux économiques sont bons. Nous ne sommes donc pas en situation de déclencher la rigueur en France. Je dis non au tour de vis et je tiendrai les engagements de baisse des impôts".
Réformes: "il faut accélérer"
"Il faut accélérer les réformes, la décentralisation et les retraites notamment. Cette dernière est très importante car elle va sécuriser les français sur leur avenir. Les difficultés internationales actuelles ne sont pas de nature à stopper nos projets de réforme".
Méthode: "je dirai toujours la vérité aux Français"
"Je dirai toujours la vérité aux Français. Je le dirais avec une grande clarté et des mots très directs. Quand je dis que nous serons à 3 % de déficit 2002, c'est la vérité. Le président de la République m'a confié une mission, je suis là pour l'assumer, dans la clarté".
- Quelle est la principale raison qui, selon vous, justifie la réforme de la décentralisation en France ?
Il faut simplifier la vie des Français. Le 21 avril dernier, ils nous ont adressé un message clair. Notre monde est un monde de complexité et d'incertitudes. Les rapports sociaux, les rapports salariaux sont souvent difficiles. Les relations les plus stables, au sein des familles, au sein de l'école sont fragilisées. Or, notre système institutionnel et administratif n'aide plus les Français à gérer cette complexité et ces incertitudes. L'ambition du président de la République et du Gouvernement, c'est d'en faire à nouveau un facteur de simplification pour les Français. Enfin, ce que nous expérimentons avec la décentralisation, c'est une nouvelle méthode pour réformer l'Etat. Nous voulons un Etat plus efficace, concentré sur ses missions et qui sait faire confiance aux élus de proximité.
- Vous conservez tous les étages de la "fusée institutionnelle" française dont on entendait dire qu'elle était l'une des plus généreusement dotée d'Europe. Pour quelle raison, l'idée de supprimer un de ces étages - à une époque les conseils généraux se sentaient visés - s'est-elle évanouie ?
Le débat n'a pas conduit à contester une collectivité en particulier, mais à simplifier leur organisation.
La commune a été plébiscitée comme le lieu historique du lien social et des services de proximité. Le département est l'institution chargée de la proximité donc de la solidarité. La région est l'espace de la stratégie donc de la formation des personnes et du développement des territoires. Enfin, l'intercommunalité comme lieu de solidarité entre les communes.
Croyez vous qu'au moment où le lien civique se distend, nous puissions nous passer de la diversité et de l'enthousiasme des 500 000 élus locaux ? Au contraire, mon Gouvernement s'attache à leur confier des responsabilités claires et des moyens nouveaux. C'est pourquoi aussi j'ai réformé le mode de scrutin régional pour dégager des majorités et ancrer les élus régionaux dans les territoires.
- La crainte majeure exprimée par l'opposition tient non pas dans le principe de la décentralisation, mais dans sa forme. En substance: les moyens - personnel, finances - accompagneront-ils les transferts de compétences ? Ou encore: l'Etat n'est-il pas tenté de décentraliser ses déficits ?
L'opposition cherche des sujets de polémique mais, sur le fond, il y a une filiation évidente entre notre projet et celui de MM. Mauroy et Deferre en 1982. La plupart de mes propositions d'aujourd'hui sont inscrites noir sur blanc dans le rapport Mauroy d'hier. Sur la question des moyens, le Gouvernement a pris les engagements les plus formels, puisqu'il a modifié la Constitution pour garantir que les moyens humains et financiers suivront les compétences. Ce principe sera respecté et le Conseil constitutionnel en sera le garant. Concrètement, nous avons l'intention de transférer aux territoires une part de la TIPP.
- Aller plus loin dans la décentralisation ne comporte-t-il pas le risque d'un affaiblissement de l'Etat républicain auquel les Français sont très attachés ?
Je pense exactement le contraire. La décentralisation, c'est le moyen pour l'Etat de redevenir fort là où les Français l'attendent. L'Etat, à force de vouloir tout faire, a fini par négliger ce que lui seul peut faire. L'Etat tient le guichet de dizaine de fonds. Il gère, pour le compte des collectivités, la carrière de milliers d'agents pour des compétences transférées depuis 20 ans. Mais il n'a pas été capable de prévoir la pénurie d'infirmières, ni d'empêcher l'explosion de la petite délinquance. Et il a produit des normes sans se préoccuper de savoir si elles étaient respectées. Ce que nous construisons, ce n'est pas le désengagement de l'Etat, c'est son renforcement, là où il est essentiel.
- Laurent Fabius, ancien Premier ministre socialiste, député de Seine-Maritime, a rebaptisé votre projet de décentralisation en "projet pour l'augmentation des impôts locaux". Les contribuables doivent-ils être inquiets ?
Le Fabius que je préfère, ce n'est pas celui des formules partisanes. A Bercy L. Fabius était plutôt centralisateur. Ainsi le Gouvernement précédent a mis en place la décentralisation non financée de l'APA et les 35 h, deux réformes qui ont littéralement plombé les finances des collectivités !
Pour les années à venir, je garantis aux Français que la somme des impôts locaux et des impôts d'Etat n'augmentera pas à cause de la décentralisation. Je pense même qu'à terme, nous ferons des économies. Et si l'opposition le souhaite, je suis prêt à ce que le Parlement constitue une commission de suivi de cet engagement.
- Une des notions maîtresses émergeant des ateliers préparatoires à ces assises tient dans le mot "simplification". Quelle va en être, dans votre projet, l'expression la plus symbolique pour le citoyen ?
Je voudrais vous citer un exemple qui me tient à coeur, celui du handicap. L'insertion des handicapés est une cause nationale, sur laquelle le président de la République nous a mobilisés. Voilà un domaine où nous pouvons faire mieux et plus simple : aujourd'hui, selon que vous êtes majeur ou mineur, que vous travaillez ou non, que vous avez besoins de soins, vous vous adressez à la COTOREP, à l'Etat, aux départements ou à l'assurance maladie, selon que vous cherchez un auxiliaire de vie, un foyer d'hébergement, médicalisé ou non, un atelier protégé, un CAT, une maison d'accueil spécialisée. Il faut clarifier tout cela.
Autres exemples de simplification nécessaire : en matière de formation professionnelle, la région est censée avoir toute la compétence, mais elle maîtrise actuellement moins de la moitié des outils ; en matière d'éducation, les départements et les régions ont en charge l'entretien des collèges et des lycées, mais ils n'ont pas la gestion du personnel ; la région est censée être compétente en matière d'intervention économique, mais elle est concurrencée par au moins trois ou quatre services de l'Etat, et une entreprise qui a un projet doit courir d'un guichet à l'autre voilà ce qu'il nous faut simplifier !
- La possibilité de l'expérimentation a suscité également beaucoup de commentaires. Comment pouvez-vous l'illustrer aujourd'hui ? Comment va-t-elle se traduire sur le terrain ?
L'expérimentation est un moyen de réformer sans bloquer et de tester avec pragmatisme le bon niveau d'exercice des compétences. Je m'inspire de la réforme des chemins de fer régionaux. On nous promettait le pire. Finalement, on a pris le temps nécessaire, 6, puis 7 régions ont commencé il y a 8 ans, et que s'est-il passé ? Les syndicats, les cadres, les usagers ont vu que les trains étaient à l'heure, qu'ils étaient confortables, que les gares reprenaient des couleurs. La réforme a été généralisée l'an dernier.
Nous ne multiplierons pas les expérimentations, parce que les Français ont besoin de lisibilité. Mais je souhaite que des expérimentations soient conduites en matière de santé, de protection judiciaire de la jeunesse, de gestion des moyens de l'éducation nationale. Plus généralement, je suis prêt à répondre aux demandes des collectivités.
- La réunification de la Normandie peut-elle s'inscrire dans cette logique d'expérimentation, et comment ?
J'ai la conviction que la réforme constitutionnelle aura des conséquences très importantes dans les 20 ans à venir. Pendant longtemps, le débat était virtuel. " Ah, si l'on pouvait. " Maintenant on peut ! On peut consulter les électeurs. Et on peut organiser certaines collectivités - je pense à la Corse, à Paris, à l'Alsace, si elle le souhaite - selon un statut particulier. L'Etat favorisera tout ce qui va dans le sens des regroupements et des simplifications. Il s'opposera - du moins tant que je serai Premier ministre - aux politiques de division et de fractionnement des territoires. Il n'y a pas de " plan secret " pour redessiner la carte des régions et des départements. L'impulsion doit venir des territoires.
- Le transfert de compétences ressemble, dans les déclarations d'intentions, à un vaste marché d'échanges. Dans la même région, Conseil régional et Département sont parfois intéressés par les mêmes domaines. Qui tranchera ? Et sur quels critères ?
C'est le Parlement qui décide des compétences des collectivités. Un des grands enseignements des assises des libertés locales, c'est qu'il y a globalement un consensus sur la répartition des compétences :
Aux régions, les politiques d'orientation des hommes et des territoires : la formation des jeunes adultes, leur orientation vers les métiers de demain, l'appui aux universités, les interventions économiques, la formation tout au long de la vie, la participation à la définition de l'offre de soins, les schémas d'aménagement et de transport qui structurent les territoires. Aux départements, en subsidiarité avec les grosses agglomérations, les politiques de solidarité (bloc social dans son ensemble : enfance, exclus, personnes âgées, handicapés) et les équipements de proximité (collèges, logement, transports, eau). Aux communes et aux agglomérations, les services de proximité et le lien citoyen.
Je suis sûr que cette énergie nouvelle que libèrera la décentralisation mobilisera les territoires. La décentralisation, c'est d'abord bon pour l'emploi.
(Source (Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 4 mars 2003)