Texte intégral
Bonjour P. Devedjian. Un gouvernement qui refuse de céder, Entre 300 et 600.000 personnes dans la rue. Comment ça va se passer ? Est-ce que la situation va être complètement bloquée ?
- " D'abord, dans une démocratie, le lieu où la souveraineté nationale s'exprime, c'est au Parlement ! et donc le débat continue, mais il continue au Parlement, et il sera nourri. "
Néanmoins, comment allez-vous tenir compte de ce mécontentement ? Vous dites - François Fillon dimanche soir l'a dit - "on ne bougera pas, on ne remet pas en cause le fondement du projet". Mais comment allez-vous tenir compte de ce qui a été dit dimanche dans cette manifestation ?...
- "Ecoutez, d'abord cette manifestation ce n'est qu'une manifestation. Ils étaient assez nombreux, j'en conviens volontiers. Cela dit, si on veut comparer les chiffres, par exemple il y a un an aux élections législatives, il y a 11 millions d'électeurs qui ont approuvé le programme du gouvernement. Donc si on réfléchit en termes de légitimité, c'est au Parlement que ça doit se décider. Et puis cette réforme, c'est une réforme indispensable. D'abord, c'est une question d'équité. "
On parle de la réforme des retraites. Parce qu'on parlera, après, de la réforme de la décentralisation.
- "La réforme des retraites, qui était sur la sellette hier, c'est une réforme qui est une réforme d'équité. Il s'agit, huit ou neuf ans après celle du secteur privé, qui a porté à 40 annuités, de mettre le secteur public à égalité. 40 annuités pour tout le monde. "
C'est le nouvel angle du gouvernement. C'est ce qu'a dit aussi F. Fillon dimanche: il n'y a que les fonctionnaires, les services publics, qui ont défilé dimanche.
- "Je ne sais pas si c'est le nouvel angle. C'est en tous les cas une question d'équité. Et cette réforme des retraites, tous les observateurs le disent, elle est inévitable, incontournable, parce que d'ici quelques années, dans très peu de temps, on ne pourra plus les payer ! Moi, j'observe qu'il y a des critiques qui sont émises sur ce projet, et sans doute qu'il peut encore être amélioré, j'en conviens volontiers mais travaillons plutôt dans le sens de l'amélioration, plutôt que de vouloir dire : non, non, non, il faut retirer le projet. Parce que, personne n'a proposé de projet alternatif et surtout pas les partis de gauche ! ils sont très bons avant les élections, enfin avant d'être au gouvernement. "
Dimanche, c'étaient les syndicats qui étaient dans la rue. Les partis de gauche étaient là, mais discrètement.
- "Ecoutez, ils étaient là aussi : Monsieur Hollande était là, le parti communiste était là aussi. "
Discrètement.
- "On a vu quand même que cette manifestation avait rassemblé aussi "tous" les responsables de la gauche, y compris M. Fabius, tous ceux qui avaient été au gouvernement pendant cinq ans, et qui n'avaient absolument rien fait et qui aujourd'hui viennent critiquer ce qui a été fait, alors qu'il faut absolument faire quelque chose ! "
Donc vous voulez mettre cela sur le terrain politique, et dire que cela se passera
- "... c'est politique. "
... se passera au Parlement.
- "Bien sûr, au sens noble du terme d'ailleurs. "
Concrètement, si la semaine prochaine les transports sont bloqués, la SNCF, la RATP - il y a des préavis de grève pour le 3 juin, des grèves reconductibles - si l'économie ne fonctionne plus, est-ce que vous penseriez, est-ce que le gouvernement pensera à des recours devant l'opinion ? est-ce qu'on ira à un référendum ?
- "Les Français jugeront. Ils verront d'ailleurs la contradiction de ceux qui prétendent se battre pour l'emploi, et qui ne prendront pas en compte finalement - parce que ça, ça va fabriquer des chômeurs vous savez - tous ces mouvements sociaux, toutes ces grèves, toutes ces paralysies, tout ça va jouer sur l'économie tout ça va jouer sur l'emploi et finalement les Français vont juger tout ça. "
Et vous seriez favorable à un référendum sur la question de l'équité entre fonctionnaires et les salariés du privé ?
- "La question des retraites est un sujet assez complexe. C'est un peu difficile à placer sur le champ référendaire. Mais en tous les cas - le Parlement prendra le temps qu'il faut pour cela d'ailleurs - il y a les moyens de porter le débat sur la place publique. Les Français seront témoins de cela... "
Certains observateurs estiment que pour faire passer les retraites, il faudrait reculer sur la décentralisation des personnels, ceux qu'on appelle les TOS, donc des personnels administratifs : des cantines, des gardiens, etc. dans les collèges.
- "Ca c'est un prétexte, vous savez. "
C'est votre domaine directement, la décentralisation.
- "Oui, c'est vraiment peu de chose parce que la décentralisation de ces personnels, pour ce qui est de leur statut propre, ne va absolument rien changer ! Ils vont continuer à faire la même chose, le même travail, au même endroit, sous la même autorité : le principal de collège ou le Proviseur de lycée. "
Ils ne seront plus payés par l'Etat.
- "Avec le même statut, avec la même rémunération, mais cette fois-ci la rémunération viendra du Conseil général ou du Conseil régional, au lieu de venir de l'Etat. C'est tout ce qui va changer pour eux. La différence pour les citoyens, elle va être très importante. Parce que par exemple, lorsque dans un établissement, comme ça arrive très souvent, les postes ne sont pas pourvus, parce que la machine administrative est très lourde, que les crédits aussi viennent à manquer, et qu'il faut remonter jusqu'au Rectorat au minimum pour avoir un peintre supplémentaire ou un agent des espaces verts, qu'est-ce qui se passera ? Les parents d'élèves, cette fois-ci iront voir les élus, ceux du Conseil Général, ceux du Conseil Régional, et ils leur diront: on a rendez-vous aux prochaines élections, dans un an, dans six mois, dans deux ans, et dans le collège "Tartempion" vous n'avez pas pourvu aux personnels qui étaient nécessaires, qui sont prévus, vous en supporterez les conséquences aux prochaines élections et croyez-moi, ça change tout ! "
C'est-à-dire que ça sera plus rapide et plus facile d'accès.
- "Plus efficace. Plus efficace et plus équilibré. "
Mais que répondez-vous par exemple à François Bayrou, qui était au Grand Jury dimanche, qui dit que finalement, décentraliser pour décentraliser alors que ça ne répond pas aux besoins profonds de l'Education, eh bien c'est un petit peu un gadget.
- "Pas du tout ! D'abord je rappelle que ces personnels-là, il s'agit de l'école primaire, ils sont décentralisés depuis Jules Ferry ! Pas Luc, Jules Ferry ! 120 ans! C'est-à-dire que tous les personnels qui concourent à la maintenance des établissements de l'école primaire, c'est les communes qui les assurent. En 1982, lorsque l'on a donné la maintenance et le propriété des collèges et des lycées aux départements et aux régions, on a oublié - et c'est Pierre Mauroy qui le dit, et qui l'a répété pendant vingt ans - on a oublié de transférer en même temps que les bâtiments et collèges ceux qui étaient affectés à la maintenance de ces bâtiments. Si bien qu'aujourd'hui on a ce paradoxe. Par exemple : les peintres, qui sont chargés de remettre en état les classes chaque année, sont des agents de l'Etat. La peinture, elle est achetée par le Conseil général ou par le Conseil régional. Tout ça est quand même un peu incohérent, non ? "
Je sens bien que vous ne seriez pas tout à fait prêt à céder sur ce terrain, mais est-ce que néanmoins il n'y aura pas des concessions qui vont être faites aux enseignants. Mardi il y a un conseil interministériel sur cette question.
- "Mais je pense que le malaise profond de l'Education Nationale, il est dû à d'autres raisons, bien plus importantes"
qui seront évoquées mardi mais en tout cas donc il n'y aura pas de monnaie d'échange pour faire passer les retraites. En un mot.
- "S'il y avait de vrais arguments - moi je crois qu'il faut être sensible aux vrais arguments - mais pour le moment, je vois une espèce d'opposition frontale inexpliquée, car le moins qu'on puisse dire c'est que les syndicats, ils disent qu'ils sont contre, mais ils ne disent pas pourquoi ! ils ne proposent pas d'alternative. Et lorsqu'ils auront un discours peut-être plus construit, sans doute le débat avancera davantage ! "
(source http://www.retraites.gouv.fr, le 27 mai 2003)
- " D'abord, dans une démocratie, le lieu où la souveraineté nationale s'exprime, c'est au Parlement ! et donc le débat continue, mais il continue au Parlement, et il sera nourri. "
Néanmoins, comment allez-vous tenir compte de ce mécontentement ? Vous dites - François Fillon dimanche soir l'a dit - "on ne bougera pas, on ne remet pas en cause le fondement du projet". Mais comment allez-vous tenir compte de ce qui a été dit dimanche dans cette manifestation ?...
- "Ecoutez, d'abord cette manifestation ce n'est qu'une manifestation. Ils étaient assez nombreux, j'en conviens volontiers. Cela dit, si on veut comparer les chiffres, par exemple il y a un an aux élections législatives, il y a 11 millions d'électeurs qui ont approuvé le programme du gouvernement. Donc si on réfléchit en termes de légitimité, c'est au Parlement que ça doit se décider. Et puis cette réforme, c'est une réforme indispensable. D'abord, c'est une question d'équité. "
On parle de la réforme des retraites. Parce qu'on parlera, après, de la réforme de la décentralisation.
- "La réforme des retraites, qui était sur la sellette hier, c'est une réforme qui est une réforme d'équité. Il s'agit, huit ou neuf ans après celle du secteur privé, qui a porté à 40 annuités, de mettre le secteur public à égalité. 40 annuités pour tout le monde. "
C'est le nouvel angle du gouvernement. C'est ce qu'a dit aussi F. Fillon dimanche: il n'y a que les fonctionnaires, les services publics, qui ont défilé dimanche.
- "Je ne sais pas si c'est le nouvel angle. C'est en tous les cas une question d'équité. Et cette réforme des retraites, tous les observateurs le disent, elle est inévitable, incontournable, parce que d'ici quelques années, dans très peu de temps, on ne pourra plus les payer ! Moi, j'observe qu'il y a des critiques qui sont émises sur ce projet, et sans doute qu'il peut encore être amélioré, j'en conviens volontiers mais travaillons plutôt dans le sens de l'amélioration, plutôt que de vouloir dire : non, non, non, il faut retirer le projet. Parce que, personne n'a proposé de projet alternatif et surtout pas les partis de gauche ! ils sont très bons avant les élections, enfin avant d'être au gouvernement. "
Dimanche, c'étaient les syndicats qui étaient dans la rue. Les partis de gauche étaient là, mais discrètement.
- "Ecoutez, ils étaient là aussi : Monsieur Hollande était là, le parti communiste était là aussi. "
Discrètement.
- "On a vu quand même que cette manifestation avait rassemblé aussi "tous" les responsables de la gauche, y compris M. Fabius, tous ceux qui avaient été au gouvernement pendant cinq ans, et qui n'avaient absolument rien fait et qui aujourd'hui viennent critiquer ce qui a été fait, alors qu'il faut absolument faire quelque chose ! "
Donc vous voulez mettre cela sur le terrain politique, et dire que cela se passera
- "... c'est politique. "
... se passera au Parlement.
- "Bien sûr, au sens noble du terme d'ailleurs. "
Concrètement, si la semaine prochaine les transports sont bloqués, la SNCF, la RATP - il y a des préavis de grève pour le 3 juin, des grèves reconductibles - si l'économie ne fonctionne plus, est-ce que vous penseriez, est-ce que le gouvernement pensera à des recours devant l'opinion ? est-ce qu'on ira à un référendum ?
- "Les Français jugeront. Ils verront d'ailleurs la contradiction de ceux qui prétendent se battre pour l'emploi, et qui ne prendront pas en compte finalement - parce que ça, ça va fabriquer des chômeurs vous savez - tous ces mouvements sociaux, toutes ces grèves, toutes ces paralysies, tout ça va jouer sur l'économie tout ça va jouer sur l'emploi et finalement les Français vont juger tout ça. "
Et vous seriez favorable à un référendum sur la question de l'équité entre fonctionnaires et les salariés du privé ?
- "La question des retraites est un sujet assez complexe. C'est un peu difficile à placer sur le champ référendaire. Mais en tous les cas - le Parlement prendra le temps qu'il faut pour cela d'ailleurs - il y a les moyens de porter le débat sur la place publique. Les Français seront témoins de cela... "
Certains observateurs estiment que pour faire passer les retraites, il faudrait reculer sur la décentralisation des personnels, ceux qu'on appelle les TOS, donc des personnels administratifs : des cantines, des gardiens, etc. dans les collèges.
- "Ca c'est un prétexte, vous savez. "
C'est votre domaine directement, la décentralisation.
- "Oui, c'est vraiment peu de chose parce que la décentralisation de ces personnels, pour ce qui est de leur statut propre, ne va absolument rien changer ! Ils vont continuer à faire la même chose, le même travail, au même endroit, sous la même autorité : le principal de collège ou le Proviseur de lycée. "
Ils ne seront plus payés par l'Etat.
- "Avec le même statut, avec la même rémunération, mais cette fois-ci la rémunération viendra du Conseil général ou du Conseil régional, au lieu de venir de l'Etat. C'est tout ce qui va changer pour eux. La différence pour les citoyens, elle va être très importante. Parce que par exemple, lorsque dans un établissement, comme ça arrive très souvent, les postes ne sont pas pourvus, parce que la machine administrative est très lourde, que les crédits aussi viennent à manquer, et qu'il faut remonter jusqu'au Rectorat au minimum pour avoir un peintre supplémentaire ou un agent des espaces verts, qu'est-ce qui se passera ? Les parents d'élèves, cette fois-ci iront voir les élus, ceux du Conseil Général, ceux du Conseil Régional, et ils leur diront: on a rendez-vous aux prochaines élections, dans un an, dans six mois, dans deux ans, et dans le collège "Tartempion" vous n'avez pas pourvu aux personnels qui étaient nécessaires, qui sont prévus, vous en supporterez les conséquences aux prochaines élections et croyez-moi, ça change tout ! "
C'est-à-dire que ça sera plus rapide et plus facile d'accès.
- "Plus efficace. Plus efficace et plus équilibré. "
Mais que répondez-vous par exemple à François Bayrou, qui était au Grand Jury dimanche, qui dit que finalement, décentraliser pour décentraliser alors que ça ne répond pas aux besoins profonds de l'Education, eh bien c'est un petit peu un gadget.
- "Pas du tout ! D'abord je rappelle que ces personnels-là, il s'agit de l'école primaire, ils sont décentralisés depuis Jules Ferry ! Pas Luc, Jules Ferry ! 120 ans! C'est-à-dire que tous les personnels qui concourent à la maintenance des établissements de l'école primaire, c'est les communes qui les assurent. En 1982, lorsque l'on a donné la maintenance et le propriété des collèges et des lycées aux départements et aux régions, on a oublié - et c'est Pierre Mauroy qui le dit, et qui l'a répété pendant vingt ans - on a oublié de transférer en même temps que les bâtiments et collèges ceux qui étaient affectés à la maintenance de ces bâtiments. Si bien qu'aujourd'hui on a ce paradoxe. Par exemple : les peintres, qui sont chargés de remettre en état les classes chaque année, sont des agents de l'Etat. La peinture, elle est achetée par le Conseil général ou par le Conseil régional. Tout ça est quand même un peu incohérent, non ? "
Je sens bien que vous ne seriez pas tout à fait prêt à céder sur ce terrain, mais est-ce que néanmoins il n'y aura pas des concessions qui vont être faites aux enseignants. Mardi il y a un conseil interministériel sur cette question.
- "Mais je pense que le malaise profond de l'Education Nationale, il est dû à d'autres raisons, bien plus importantes"
qui seront évoquées mardi mais en tout cas donc il n'y aura pas de monnaie d'échange pour faire passer les retraites. En un mot.
- "S'il y avait de vrais arguments - moi je crois qu'il faut être sensible aux vrais arguments - mais pour le moment, je vois une espèce d'opposition frontale inexpliquée, car le moins qu'on puisse dire c'est que les syndicats, ils disent qu'ils sont contre, mais ils ne disent pas pourquoi ! ils ne proposent pas d'alternative. Et lorsqu'ils auront un discours peut-être plus construit, sans doute le débat avancera davantage ! "
(source http://www.retraites.gouv.fr, le 27 mai 2003)