Texte intégral
Messieurs les Présidents,
Monsieur le Rapporteur Général,
Mesdames, messieurs les Sénateurs,
Le collectif que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui est celui d'une croissance retrouvée et solide, que le Gouvernement s'attache à rendre durable et solidaire.
Cette volonté politique est visible sur le front de l'emploi : grâce à la politique menée depuis trois ans, un million d'emplois a été créé et nous avons pour objectif la création d'un million d'emplois supplémentaires d'ici la fin 2002, pour passer sous la barre des deux millions de chômeurs.
Cette volonté politique est également visible dans la gestion de nos finances publiques. A croissance exceptionnelle, recettes exceptionnelles : c'est de ce succès que viennent les 51 milliards de recettes qui figurent dans ce projet de loi de finances rectificative. Ces recettes sont mises au service d'une stratégie de croissance, grâce à des allégements d'impôts favorables à l'emploi et au pouvoir d'achat. Au total, 80 milliards auront ainsi été rendus aux Français sur la seule année 2000. Cette stratégie de croissance passe également par le renforcement des services publics, avec 10 milliards F de dépenses nouvelles, au titre de l'indemnisation des tempêtes et de la solidarité dans des domaines essentiels de la vie des Français comme l'hôpital ou l'éducation nationale.
Enfin, cette volonté politique est celle qui guide notre stratégie de finances publiques. Transparente et prévisible, elle conforte les anticipations en faveur de la croissance.
Transparence pour les évaluations de recettes : le montant figurant dans le collectif a été évalué sur la base notamment du rapport de Didier MIGAUD sur " les fruits de la croissance retrouvée ", déposé en mars de cette année. Je comprends d'ailleurs que cette évaluation est confirmée par l'étude demandée par votre Commission des Finances à l'OFCE pour le taux de croissance associé au collectif.
Transparence de nos débats : plutôt que de recourir à des méthodes réglementaires et opaques, le Gouvernement a fait le choix du débat démocratique devant la représentation nationale.
Transparence enfin du comportement du Gouvernement : Laurent Fabius et moi-même nous sommes engagés à ce que tout surplus de recettes au-delà de ce qui est prévu dans ce collectif - et toute moindre dépense qui pourrait être constatée en exécution - soient affectés à la réduction du déficit, donc à la réduction de la dette et des impôts de demain.
Y aura-t-il un surplus de recettes ? De combien sera ce surplus de recettes au-delà de ce qui est prévu dans le collectif ? Il m'est encore impossible de le dire.
D'abord parce que je ne suis pas en mesure de déterminer de manière définitive à ce stade de l'année le taux de croissance qui sera finalement celui de l'année 2000. Lorsque nous avons déposé ce PLFR devant l'Assemblée nationale, l'INSEE situait la croissance dans une fourchette allant de 3,4 % à 3,8 %, qui explique le taux de croissance moyen de 3,6 % associé à ce collectif.
Lorsqu'il y a quelques semaines je défendais ce projet de loi devant l'Assemblée nationale, des hypothèses de croissance allant parfois au-delà de 4% ont été évoquées par certains instituts de conjoncture.
La semaine dernière cependant, l'INSEE a publié un chiffre de croissance au premier trimestre un peu plus faible que prévu, 0,7%, inférieur aux prévisions de 0,9% faites en mars par l'INSEE.
Dans ces conditions, il n'y a pas de raison de modifier l'évaluation de recettes figurant dans le collectif.
De même, toutes les dépenses ne seront pas effectuées au centime jusqu'au plafond autorisé par vous. C'est ainsi chaque année, dans des proportions variables, et sans que nous sachions dire a priori sur quels chapitres et avec quelle ampleur il en sera ainsi.
Tous ces éléments ont fait dire au Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, lors du débat devant l'Assemblée nationale, que nous espérions un déficit en exécution 2000 de l'ordre de 200 milliards F. Tel est notre objectif. Telle est aussi notre volonté de transparence vis à vis du Parlement. Mais nous ne saurions à cette époque de l'année le traduire dans notre projet de loi sans prendre de risques. Nous aurons donc l'occasion d'en reparler au moment de l'élaboration du projet de loi de finances pour 2001 et du collectif de fin d'année, sur la base de nouvelles évaluations qui seront expertisées par la Commission économique de la Nation. Dès cette année, le Parlement disposera donc d'un avis extérieur au Gouvernement sur les évaluations de recettes 2000 et 2001.
Au-delà de ce débat, le projet de loi soumis aujourd'hui à votre examen reflète donc deux grandes orientations politiques du Gouvernement, la baisse des impôts et des dépenses nouvelles en faveur de la solidarité.
1. Il s'agit d'abord de baisser les impôts.
Je vous l'ai rappelé dès l'abord, il s'agit d'une baisse massive : quarante milliards qui s'ajoutent aux quarante milliards déjà décidés dans la loi de finances pour 2000.
Et c'est une baisse instantanée. L'impôt sur les revenus de 1999, que les Français ont déclarés en mars, baissera dès cette année. Il en sera de même de la taxe d'habitation. Et la baisse de la TVA, effective depuis le 1er avril, sera pérennisée.
C'est enfin une baisse productive et solidaire. Il s'agit en effet de faire bénéficier tous les Français de la croissance et d'aider ceux qui voient aujourd'hui leurs impôts augmenter trop vite lorsqu'ils retrouvent un emploi.
Nous vous proposons d'abord une baisse d'un point des deux premiers taux de l'impôt sur le revenu dès 2000. Pour plus de 650 000 foyers, cela se traduira par une exonération complète. Pour tous, ce sera un allégement, important pour les plus bas revenus, modeste mais non négligeable pour les autres, dans le respect du principe de progressivité et de redistributivité de l'impôt. Cette mesure représente 11 milliards de francs.
Deux dispositions issues d'amendements de l'Assemblée nationale complètent cette mesure : l'une concerne la solidarité due aux victimes de l'amiante et l'autre l'aménagement du régime des dons dans le cas de l'abandon de produits financiers en faveur d'associations.
Nous vous proposons ensuite une réforme profonde de la taxe d'habitation. Cette mesure est évidemment complémentaire de la précédente car, si tout le monde ne paie pas l'impôt sur le revenu, tout le monde est concerné par la taxe d'habitation.
Or, vous en connaissez et vous en éprouvez les défauts : une assiette vieillissante, une complexité croissante et, surtout, une réelle injustice d'une taxe qui demande plus aux plus modestes, même avec les mécanismes existants d'allégement.
En proposant de supprimer sa part régionale, le projet de loi s'adresse à tous les contribuables, et concerne la fraction de cette taxe qui est la plus éloignée du citoyen et la plus faible dans son produit.
Vis-à-vis des régions, après un dégrèvement en 2000, une compensation indexée comme la dotation globale de fonctionnement sera mise en place à partir de 2001. Je n'ignore pas les opinions qui ont été exprimées à ce sujet et je sais qu'ici, au Sénat, nous en débattrons en profondeur. Mais j'estime que ceci préserve la responsabilité et l'autonomie des régions.
Par ailleurs, il est proposé de réformer les mécanismes de dégrèvement, sans, bien entendu, diminuer les dispositions actuelles de complète exonération.
Malgré les efforts du Gouvernement et de la majorité - je pense en particulier au prolongement du dégrèvement total pour les titulaires du RMI pour l'année où ils retrouvent un emploi ou bien à l'abaissement de 1 500 à 1 200 F du minimum de taxe laissé à la charge des plus modestes -, le système actuel comporte encore trop d'injustices :
Des inégalités, car à ressources égales, on n'est pas traité de la même manière selon l'origine des revenus ;
Des effets de seuil, qui, par leur brutalité, n'encouragent pas la reprise d'activité ;
Un poids de la taxe par rapport aux revenus plus faible pour les revenus moyens que pour les revenus modestes.
C'est pourquoi le Gouvernement vous propose un système unifié et plus juste, qui fonctionne pour tous en deçà d'un certain seuil de revenu, sans montant minimum fixe à la charge des contribuables. Ceci permettra à 1 300 000 contribuables de bénéficier d'un dégrèvement total. Cette mesure représente, elle aussi, 11 milliards de francs.
Enfin nous vous proposons une baisse d'un point du taux de TVA au bénéfice de tous. Ce faisant, le Gouvernement accompagne la croissance en rendant du pouvoir d'achat aux Français et donne sur les prix un signal de baisse à l'heure où des tensions apparaissent dans certains secteurs. L'effet positif de la mesure apparaît d'ailleurs dans la stabilité des prix constatée en avril.
Il veut aussi, tout simplement, achever de restituer aux Français la hausse de 58 milliards de F décidée par le Gouvernement Juppé en août 1995. Avec les baisses ciblées mises en uvre depuis 1998, qui ont représenté 30 milliards de francs, ce sera chose faite puisque la mesure proposée aujourd'hui, qui représente plus de 18 milliards de francs dès 2000 et plus de trente en 2001, porte nos baisses de TVA à plus de 60 milliards.
2. Ce collectif a aussi vocation à financer les dépenses de solidarité liées aux tempêtes ou à des domaines essentiels dans la vie des français comme l'hôpital ou l'éducation.
Une solidarité exceptionnelle, d'abord, pour faire face à des circonstances exceptionnelles et aider les personnes qui ont souffert des deux ouragans qui ont balayé notre territoire, du cyclone Lenny aux Antilles ou de la marée noire de l'Erika.
Les engagements pris par le Premier Ministre ont été tenus, les crédits nécessaires étant évidemment mobilisés de manière immédiate. Ils seront confirmés et confortés grâce à ce collectif. Plus de 6 milliards F y sont consacrés.
Quels sont donc les grandes mesures qui trouvent leur traduction dans ce collectif ?
Un milliard F sont ouverts en faveur de nos forêts. Deux mesures fiscales viennent renforcer ce dispositif : le taux de TVA sur les travaux forestiers est ramené de 20,6% à 5,5% et l'achat de parcelles forestières ou de terrains nus destinés à être reboisés est temporairement exonéré de droits.
Autre axe fort de ce collectif, l'aide aux collectivités locales sinistrées en métropole et aux Antilles avec un milliard de crédits et 500 millions au titre de l'accélération des remboursements de TVA pour les travaux réalisés à la suite de la tempête.
Plus de 700 millions sont ouverts par ailleurs pour la restauration du réseau routier et des digues, des phares et balises et des infrastructures portuaires endommagées.
L'Etat s'est également engagé à aider les secteurs économiques les plus touchés : près de 600 millions sont ouverts pour les agriculteurs, les pêcheurs et les conchyliculteurs, les entreprises contraintes au chômage partiel, l'hôtellerie de plein air, le tourisme social, et plus généralement l'ensemble du secteur du tourisme. Il faut que la saison soit réussie sur nos côtes, qu'elle soit réussie à hauteur des efforts déployés par tous pour nettoyer et remettre en état nos plages et nos rochers.
Un effort particulier, plus de 500 millions, a également été consenti en faveur des monuments historiques.
Le budget de l'environnement et de l'aménagement du territoire est abondé de près de 300 millions pour accompagner la restauration des sites et des écosystèmes affectés par la marée noire de l'Erika et par les tempêtes.
Enfin, l'Etat a immédiatement apporté son soutien à l'effort de solidarité des communes et des organismes sociaux par une dotation exceptionnelle aux commissions d'aide sociale d'urgence. 350 millions sont ouverts à ce titre.
Cette solidarité exceptionnelle ne doit pas nous faire oublier la solidarité du quotidien, pour l'école, pour la santé et pour la ville notamment.
Le collectif propose donc d'ouvrir 2,6 milliards d'engagements au profit des hôpitaux, à la suite du protocole d'accord négocié par Martine Aubry et Dominique Gillot. Cet argent servira principalement à payer le remplacement d'agents absents, ce qui se traduira par une amélioration du service pour nos concitoyens, en particulier dans les services d'urgence.
Un milliard est ouvert au profit de l'éducation nationale Dans ce collectif, nous avons donc voulu marquer notre soutien au corps enseignant, montrer aux familles que leurs préoccupations sont les nôtres. La réforme de l'enseignement professionnel va permettre de moderniser les équipements et de renforcer le suivi des élèves en stage. Dans le second degré, 1 000 maîtres d'internat seront recrutés dès la rentrée prochaine pour améliorer l'encadrement et lutter contre la violence. Le suivi médico-social des élèves, système d'alerte et de soins essentiel dans les collèges et lycées les plus défavorisés, sera aussi renforcé. Enfin, des moyens pédagogiques supplémentaires seront mis à la disposition des enseignants et les carnets de correspondance qui sont le lien entre l'école et la famille seront désormais gratuits. Cette priorité en faveur de l'éducation nationale sera confirmée en 2001.
Par ailleurs, 450 millions sont consacrés à la politique de la ville. La croissance ne doit pas s'arrêter à la porte des quartiers en difficulté. La croissance retrouvée doit être celle de tous les Français. Grâce à ce collectif, le programme de 10.000 adultes-relais pourra débuter. Ils vont contribuer à rénover les liens sociaux en accompagnant les habitants dans leurs démarches, en facilitant le dialogue entre générations, en contribuant à résoudre les petits conflits de la vie quotidienne. 150 équipes emploi-insertion seront également constituées et disponibles sur le terrain. Enfin, des crédits nouveaux sont ouverts pour la revitalisation économique des quartiers, et pour encourager le maintien et le développement des services publics.
Mais les dépenses qui vous sont proposées ne s'arrêtent pas à l'école, la santé ou la ville. En effet :
250 MF abondent la dotation de compensation de la taxe professionnelle, venant ainsi consacrer les progrès de l'intercommunalité, voulue par le Gouvernement et dont le succès ne peut que nous réjouir collectivement.
La formation professionnelle des transporteurs routiers et le fonctionnement du comité national routier sont améliorés.
Le plan d'urgence pour les prisons est accéléré avec des moyens pour la modernisation et la construction d'établissements pénitentiaires.
Plus de 200 millions sont débloqués pour le programme de dépistage de la maladie dite " de la vache folle ".
Enfin, 50 millions seront consacrés à la création artistique et 40 millions financeront un " appel à projets " en direction des initiatives d'économie solidaire. *
Voilà l'essentiel des mesures que le Gouvernement soumet à votre approbation. Comme vous le voyez, elles s'inscrivent dans le cadre d'une stratégie de long terme, cohérente et déterminée, en faveur d'une croissance au service de la lutte contre les inégalités.
(source http://www.finances.gouv.fr, le 9 juin 2000)
Monsieur le Rapporteur Général,
Mesdames, messieurs les Sénateurs,
Le collectif que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui est celui d'une croissance retrouvée et solide, que le Gouvernement s'attache à rendre durable et solidaire.
Cette volonté politique est visible sur le front de l'emploi : grâce à la politique menée depuis trois ans, un million d'emplois a été créé et nous avons pour objectif la création d'un million d'emplois supplémentaires d'ici la fin 2002, pour passer sous la barre des deux millions de chômeurs.
Cette volonté politique est également visible dans la gestion de nos finances publiques. A croissance exceptionnelle, recettes exceptionnelles : c'est de ce succès que viennent les 51 milliards de recettes qui figurent dans ce projet de loi de finances rectificative. Ces recettes sont mises au service d'une stratégie de croissance, grâce à des allégements d'impôts favorables à l'emploi et au pouvoir d'achat. Au total, 80 milliards auront ainsi été rendus aux Français sur la seule année 2000. Cette stratégie de croissance passe également par le renforcement des services publics, avec 10 milliards F de dépenses nouvelles, au titre de l'indemnisation des tempêtes et de la solidarité dans des domaines essentiels de la vie des Français comme l'hôpital ou l'éducation nationale.
Enfin, cette volonté politique est celle qui guide notre stratégie de finances publiques. Transparente et prévisible, elle conforte les anticipations en faveur de la croissance.
Transparence pour les évaluations de recettes : le montant figurant dans le collectif a été évalué sur la base notamment du rapport de Didier MIGAUD sur " les fruits de la croissance retrouvée ", déposé en mars de cette année. Je comprends d'ailleurs que cette évaluation est confirmée par l'étude demandée par votre Commission des Finances à l'OFCE pour le taux de croissance associé au collectif.
Transparence de nos débats : plutôt que de recourir à des méthodes réglementaires et opaques, le Gouvernement a fait le choix du débat démocratique devant la représentation nationale.
Transparence enfin du comportement du Gouvernement : Laurent Fabius et moi-même nous sommes engagés à ce que tout surplus de recettes au-delà de ce qui est prévu dans ce collectif - et toute moindre dépense qui pourrait être constatée en exécution - soient affectés à la réduction du déficit, donc à la réduction de la dette et des impôts de demain.
Y aura-t-il un surplus de recettes ? De combien sera ce surplus de recettes au-delà de ce qui est prévu dans le collectif ? Il m'est encore impossible de le dire.
D'abord parce que je ne suis pas en mesure de déterminer de manière définitive à ce stade de l'année le taux de croissance qui sera finalement celui de l'année 2000. Lorsque nous avons déposé ce PLFR devant l'Assemblée nationale, l'INSEE situait la croissance dans une fourchette allant de 3,4 % à 3,8 %, qui explique le taux de croissance moyen de 3,6 % associé à ce collectif.
Lorsqu'il y a quelques semaines je défendais ce projet de loi devant l'Assemblée nationale, des hypothèses de croissance allant parfois au-delà de 4% ont été évoquées par certains instituts de conjoncture.
La semaine dernière cependant, l'INSEE a publié un chiffre de croissance au premier trimestre un peu plus faible que prévu, 0,7%, inférieur aux prévisions de 0,9% faites en mars par l'INSEE.
Dans ces conditions, il n'y a pas de raison de modifier l'évaluation de recettes figurant dans le collectif.
De même, toutes les dépenses ne seront pas effectuées au centime jusqu'au plafond autorisé par vous. C'est ainsi chaque année, dans des proportions variables, et sans que nous sachions dire a priori sur quels chapitres et avec quelle ampleur il en sera ainsi.
Tous ces éléments ont fait dire au Ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, lors du débat devant l'Assemblée nationale, que nous espérions un déficit en exécution 2000 de l'ordre de 200 milliards F. Tel est notre objectif. Telle est aussi notre volonté de transparence vis à vis du Parlement. Mais nous ne saurions à cette époque de l'année le traduire dans notre projet de loi sans prendre de risques. Nous aurons donc l'occasion d'en reparler au moment de l'élaboration du projet de loi de finances pour 2001 et du collectif de fin d'année, sur la base de nouvelles évaluations qui seront expertisées par la Commission économique de la Nation. Dès cette année, le Parlement disposera donc d'un avis extérieur au Gouvernement sur les évaluations de recettes 2000 et 2001.
Au-delà de ce débat, le projet de loi soumis aujourd'hui à votre examen reflète donc deux grandes orientations politiques du Gouvernement, la baisse des impôts et des dépenses nouvelles en faveur de la solidarité.
1. Il s'agit d'abord de baisser les impôts.
Je vous l'ai rappelé dès l'abord, il s'agit d'une baisse massive : quarante milliards qui s'ajoutent aux quarante milliards déjà décidés dans la loi de finances pour 2000.
Et c'est une baisse instantanée. L'impôt sur les revenus de 1999, que les Français ont déclarés en mars, baissera dès cette année. Il en sera de même de la taxe d'habitation. Et la baisse de la TVA, effective depuis le 1er avril, sera pérennisée.
C'est enfin une baisse productive et solidaire. Il s'agit en effet de faire bénéficier tous les Français de la croissance et d'aider ceux qui voient aujourd'hui leurs impôts augmenter trop vite lorsqu'ils retrouvent un emploi.
Nous vous proposons d'abord une baisse d'un point des deux premiers taux de l'impôt sur le revenu dès 2000. Pour plus de 650 000 foyers, cela se traduira par une exonération complète. Pour tous, ce sera un allégement, important pour les plus bas revenus, modeste mais non négligeable pour les autres, dans le respect du principe de progressivité et de redistributivité de l'impôt. Cette mesure représente 11 milliards de francs.
Deux dispositions issues d'amendements de l'Assemblée nationale complètent cette mesure : l'une concerne la solidarité due aux victimes de l'amiante et l'autre l'aménagement du régime des dons dans le cas de l'abandon de produits financiers en faveur d'associations.
Nous vous proposons ensuite une réforme profonde de la taxe d'habitation. Cette mesure est évidemment complémentaire de la précédente car, si tout le monde ne paie pas l'impôt sur le revenu, tout le monde est concerné par la taxe d'habitation.
Or, vous en connaissez et vous en éprouvez les défauts : une assiette vieillissante, une complexité croissante et, surtout, une réelle injustice d'une taxe qui demande plus aux plus modestes, même avec les mécanismes existants d'allégement.
En proposant de supprimer sa part régionale, le projet de loi s'adresse à tous les contribuables, et concerne la fraction de cette taxe qui est la plus éloignée du citoyen et la plus faible dans son produit.
Vis-à-vis des régions, après un dégrèvement en 2000, une compensation indexée comme la dotation globale de fonctionnement sera mise en place à partir de 2001. Je n'ignore pas les opinions qui ont été exprimées à ce sujet et je sais qu'ici, au Sénat, nous en débattrons en profondeur. Mais j'estime que ceci préserve la responsabilité et l'autonomie des régions.
Par ailleurs, il est proposé de réformer les mécanismes de dégrèvement, sans, bien entendu, diminuer les dispositions actuelles de complète exonération.
Malgré les efforts du Gouvernement et de la majorité - je pense en particulier au prolongement du dégrèvement total pour les titulaires du RMI pour l'année où ils retrouvent un emploi ou bien à l'abaissement de 1 500 à 1 200 F du minimum de taxe laissé à la charge des plus modestes -, le système actuel comporte encore trop d'injustices :
Des inégalités, car à ressources égales, on n'est pas traité de la même manière selon l'origine des revenus ;
Des effets de seuil, qui, par leur brutalité, n'encouragent pas la reprise d'activité ;
Un poids de la taxe par rapport aux revenus plus faible pour les revenus moyens que pour les revenus modestes.
C'est pourquoi le Gouvernement vous propose un système unifié et plus juste, qui fonctionne pour tous en deçà d'un certain seuil de revenu, sans montant minimum fixe à la charge des contribuables. Ceci permettra à 1 300 000 contribuables de bénéficier d'un dégrèvement total. Cette mesure représente, elle aussi, 11 milliards de francs.
Enfin nous vous proposons une baisse d'un point du taux de TVA au bénéfice de tous. Ce faisant, le Gouvernement accompagne la croissance en rendant du pouvoir d'achat aux Français et donne sur les prix un signal de baisse à l'heure où des tensions apparaissent dans certains secteurs. L'effet positif de la mesure apparaît d'ailleurs dans la stabilité des prix constatée en avril.
Il veut aussi, tout simplement, achever de restituer aux Français la hausse de 58 milliards de F décidée par le Gouvernement Juppé en août 1995. Avec les baisses ciblées mises en uvre depuis 1998, qui ont représenté 30 milliards de francs, ce sera chose faite puisque la mesure proposée aujourd'hui, qui représente plus de 18 milliards de francs dès 2000 et plus de trente en 2001, porte nos baisses de TVA à plus de 60 milliards.
2. Ce collectif a aussi vocation à financer les dépenses de solidarité liées aux tempêtes ou à des domaines essentiels dans la vie des français comme l'hôpital ou l'éducation.
Une solidarité exceptionnelle, d'abord, pour faire face à des circonstances exceptionnelles et aider les personnes qui ont souffert des deux ouragans qui ont balayé notre territoire, du cyclone Lenny aux Antilles ou de la marée noire de l'Erika.
Les engagements pris par le Premier Ministre ont été tenus, les crédits nécessaires étant évidemment mobilisés de manière immédiate. Ils seront confirmés et confortés grâce à ce collectif. Plus de 6 milliards F y sont consacrés.
Quels sont donc les grandes mesures qui trouvent leur traduction dans ce collectif ?
Un milliard F sont ouverts en faveur de nos forêts. Deux mesures fiscales viennent renforcer ce dispositif : le taux de TVA sur les travaux forestiers est ramené de 20,6% à 5,5% et l'achat de parcelles forestières ou de terrains nus destinés à être reboisés est temporairement exonéré de droits.
Autre axe fort de ce collectif, l'aide aux collectivités locales sinistrées en métropole et aux Antilles avec un milliard de crédits et 500 millions au titre de l'accélération des remboursements de TVA pour les travaux réalisés à la suite de la tempête.
Plus de 700 millions sont ouverts par ailleurs pour la restauration du réseau routier et des digues, des phares et balises et des infrastructures portuaires endommagées.
L'Etat s'est également engagé à aider les secteurs économiques les plus touchés : près de 600 millions sont ouverts pour les agriculteurs, les pêcheurs et les conchyliculteurs, les entreprises contraintes au chômage partiel, l'hôtellerie de plein air, le tourisme social, et plus généralement l'ensemble du secteur du tourisme. Il faut que la saison soit réussie sur nos côtes, qu'elle soit réussie à hauteur des efforts déployés par tous pour nettoyer et remettre en état nos plages et nos rochers.
Un effort particulier, plus de 500 millions, a également été consenti en faveur des monuments historiques.
Le budget de l'environnement et de l'aménagement du territoire est abondé de près de 300 millions pour accompagner la restauration des sites et des écosystèmes affectés par la marée noire de l'Erika et par les tempêtes.
Enfin, l'Etat a immédiatement apporté son soutien à l'effort de solidarité des communes et des organismes sociaux par une dotation exceptionnelle aux commissions d'aide sociale d'urgence. 350 millions sont ouverts à ce titre.
Cette solidarité exceptionnelle ne doit pas nous faire oublier la solidarité du quotidien, pour l'école, pour la santé et pour la ville notamment.
Le collectif propose donc d'ouvrir 2,6 milliards d'engagements au profit des hôpitaux, à la suite du protocole d'accord négocié par Martine Aubry et Dominique Gillot. Cet argent servira principalement à payer le remplacement d'agents absents, ce qui se traduira par une amélioration du service pour nos concitoyens, en particulier dans les services d'urgence.
Un milliard est ouvert au profit de l'éducation nationale Dans ce collectif, nous avons donc voulu marquer notre soutien au corps enseignant, montrer aux familles que leurs préoccupations sont les nôtres. La réforme de l'enseignement professionnel va permettre de moderniser les équipements et de renforcer le suivi des élèves en stage. Dans le second degré, 1 000 maîtres d'internat seront recrutés dès la rentrée prochaine pour améliorer l'encadrement et lutter contre la violence. Le suivi médico-social des élèves, système d'alerte et de soins essentiel dans les collèges et lycées les plus défavorisés, sera aussi renforcé. Enfin, des moyens pédagogiques supplémentaires seront mis à la disposition des enseignants et les carnets de correspondance qui sont le lien entre l'école et la famille seront désormais gratuits. Cette priorité en faveur de l'éducation nationale sera confirmée en 2001.
Par ailleurs, 450 millions sont consacrés à la politique de la ville. La croissance ne doit pas s'arrêter à la porte des quartiers en difficulté. La croissance retrouvée doit être celle de tous les Français. Grâce à ce collectif, le programme de 10.000 adultes-relais pourra débuter. Ils vont contribuer à rénover les liens sociaux en accompagnant les habitants dans leurs démarches, en facilitant le dialogue entre générations, en contribuant à résoudre les petits conflits de la vie quotidienne. 150 équipes emploi-insertion seront également constituées et disponibles sur le terrain. Enfin, des crédits nouveaux sont ouverts pour la revitalisation économique des quartiers, et pour encourager le maintien et le développement des services publics.
Mais les dépenses qui vous sont proposées ne s'arrêtent pas à l'école, la santé ou la ville. En effet :
250 MF abondent la dotation de compensation de la taxe professionnelle, venant ainsi consacrer les progrès de l'intercommunalité, voulue par le Gouvernement et dont le succès ne peut que nous réjouir collectivement.
La formation professionnelle des transporteurs routiers et le fonctionnement du comité national routier sont améliorés.
Le plan d'urgence pour les prisons est accéléré avec des moyens pour la modernisation et la construction d'établissements pénitentiaires.
Plus de 200 millions sont débloqués pour le programme de dépistage de la maladie dite " de la vache folle ".
Enfin, 50 millions seront consacrés à la création artistique et 40 millions financeront un " appel à projets " en direction des initiatives d'économie solidaire. *
Voilà l'essentiel des mesures que le Gouvernement soumet à votre approbation. Comme vous le voyez, elles s'inscrivent dans le cadre d'une stratégie de long terme, cohérente et déterminée, en faveur d'une croissance au service de la lutte contre les inégalités.
(source http://www.finances.gouv.fr, le 9 juin 2000)