Texte intégral
Monsieur le Sénateur maire, cher ami, Mesdames et messieurs les élus, Mesdames et messieurs,
Je suis particulièrement heureux de l'occasion que m'offre aujourd'hui Gérard COLLOMB d'évoquer avec vous la nouvelle économie.
Particulièrement heureux, en raison du thème que vous avez choisi, la nouvelle économie et plus particulièrement les nouvelles technologies.
Particulièrement heureux en raison du lieu de ce colloque, Lyon et plus généralement la région Rhônes-Alpes, pôles essentiels pour la dynamique des technologies françaises.
Enfin, particulièrement heureux car les interventions de Pierre-Alain MUET, Jean-Louis GUIGOU, Gérard COLLOMB et Maria Joao RODRIGUES, chargée de la préparation du sommet européen des chefs d'Etat sur les nouvelles technologies permettront, j'en suis sûr, d'aborder en profondeur ces questions.
Pour l'ouverture de ce colloque, je voudrais me concentrer sur deux questions :
- quelle nouvelle économie voulons-nous ? -
quels moyens nous donnons-nous pour y parvenir ?
1 - Quelle nouvelle économie voulons-nous ? Tout d'abord un constat : aujourd'hui, la nouvelle économie est là. Il y a deux ans et demi, ce n'était pas le cas.
La France rattrape actuellement à vitesse accélérée le retard qui était le sien en matière de nouvelle croissance et de société de l'information.
1997 a été l'année de la prise de conscience de notre retard ;
1998, celle des premières mesures gouvernementales avec le Programme d'action gouvernemental pour la société de l'information ;
1999 , celle des premiers fruits de notre action.
Je souhaite que 2000 soit l'année de la démocratisation de la société de l'information pour que tous les citoyens, toutes les entreprises s'approprient ce formidable outil au service de la liberté de communication et de la croissance.
La nouvelle économie est devenue une réalité : la France dispose de la 4ème industrie mondiale dans le domaine de la société de l'information.
Ce secteur représente 12% de notre industrie, 5% de notre PIB, soit plus que l'automobile et l'énergie réunis. La nouvelle croissance est là : en 1998 déjà, 95% de la croissance supplémentaire était due aux secteurs technologiques innovants.
En 2 ans, ces secteurs ont connu une croissance de 18%, entraînant avec eux l'ensemble de l'économie.
L'importance des fonds levés pour ces secteurs est prometteuse pour les années à venir car les stars-up d'aujourd'hui sont nos entreprises, petites, moyennes et grandes, de demain. Entre 1997 et 1998, les fonds levés sur le nouveau marché, dans le capital-risque et le capital-investissement ont été multipliés par 3 et par 8 si l'on ajoute les contrats dits DSK.
Enfin, le nouvel emploi se développe : 2,4 millions de salariés sont employés dans des secteurs innovants, comme l'industrie informatique, les télécommunications ou la communication.
Ces secteurs sont marqués, non pas par le chômage, mais souvent par le plein emploi et sont porteurs d'espoir pour tous ceux qui connaissent actuellement le chômage, même si leur nombre décroît rapidement.
A ce titre, l'effort en faveur de l'éducation et de la formation tout au long de la vie revêt une importance particulière pour que tous soient effectivement en mesure de bénéficier des emplois offerts par ces nouveaux secteurs. J'ai personnellement lancé une opération pour la formation à l'informatique des jeunes ingénieurs et techniciens. En partenariat avec les professionnels du secteur et des organismes de formation, ce programme a permis d'offrir des emplois pérennes à plus de 1000 jeunes diplômés non informaticiens.
La nouvelle économie est là, porteuse de croissance et d'emplois. A quelle image voulons-nous la façonner ? Je voudrais à ce titre vous faire part de mes convictions sur 3 points qui me paraissent fondamentaux et qui animent mon action :
- la nouvelle économie ne doit pas être réservée à certains secteurs industriels et aux grands groupes : au contraire, il est essentiel que les secteurs qui ne sont pas directement concernés par la société de l'information soient pleinement impliqués dans la nouvelle économie. Les études dont je dispose montrent que les trois quarts de la croissance supplémentaire liée aux technologies de l'information concernera dans les années à venir des secteurs qui ne sont pas liés à l'informatique, aux communications et aux télécommunications.
Les secteurs traditionnels, comme le textile par exemple, peuvent grâce aux nouvelles technologies définir de nouveaux modes d'organisation, plus décentralisés, fabriquer des produits conçus grâce à des technologies innovantes et enfin utiliser le nouveau vecteur de commercialisation qu'est l'internet.
- la nouvelle économie ne doit pas être réservée à une partie de la population : pas d'internet à deux vitesses mais un internet à très grande vitesse... C'est là un enjeu fondamental.
Si deux tiers des populations diplômées et des jeunes se disent intéressés par Internet, en revanche, d'autres catégories de la population se sentent moins directement concernées par la société de l'information. Les dernières enquêtes sur le sujet montrent que l'absence de véritable utilité est le motif généralement invoqué pour expliquer ce manque d'intérêt.
Le développement du commerce électronique, le développement de l'internet citoyen, le développement de l'internet à haut débit qui permettra d'accéder à des contenus plus dynamiques seront autant d'occasion, je l'espère dès cette année, de renforcer l'intérêt de tous pour la société de l'information.
Il s'agit là d'un enjeu politique : une société de l'information pour tous, tel est l'objectif que nous nous sommes fixés sous l'égide de Lionel Jospin ; tel est le titre du document d'orientation que nous avons publié en octobre dernier.
- la nouvelle économie doit être au service de l'emploi : l'émergence de cette croissance innovante est l'occasion, comme l'évolution de l'emploi le confirme, de marquer une rupture avec les périodes antérieures : le modèle de production tayloriste où dominait l'emploi peu qualifié, menacé par des formes de production automatisées, a vécu.
La richesse de l'entreprise d'aujourd'hui et de demain, c'est l'intelligence humaine, productrice d'innovations. C'est cette révolution que nous sommes en train de vivre et de susciter à la fois. Une nouvelle économie porteuse de croissance et d'emplois ; une nouvelle économie au service de tous les secteurs économiques et de l'ensemble de la population, une nouvelle économie tirée par l'intelligence humaine, telle est la volonté qui m'anime.
2 - Quels moyens nous donnons-nous pour atteindre ces objectifs ?
Le Gouvernement, les pouvoirs publics et les élus à tous les niveaux ne sont pas spectateurs mais acteurs de cette évolution. Le colloque d'aujourd'hui en témoigne. Pour ce qui concerne mon action dans le cadre du PAGSI, je voudrais évoquer 4 chantiers qui me paraissent prioritaires :
- l'administration électronique, sujet sur lequel je sais que les élus sont particulièrement mobilisés tout comme l'est le Gouvernement. Il me paraît essentiel, pour assurer la démocratisation de l'internet, pour développer un internet citoyen, que les pouvoirs publics et les services publics soient un élément fort dans la familiarisation de chacun avec la société de l'information.
C'est le sens du développement d'internet dans l'éducation. C'est un objectif qui est partagé par nos services publics, je viens d'en avoir encore une fois la preuve dans le bureau de poste du quartier du Tonkin à Villeurbanne qui est doté d'une borne Cyberpost.
1000 bornes de cette sorte ont été installées sur l'ensemble du territoire.
En matière d'administration électronique, nous sommes maintenant considérés à l'étranger comme un modèle : diffusion gratuite de principaux rapports administratifs et parlementaires, ouverture du portail Admifrance, mise en lige de 300 formulaires couvrant 50% du volume des procédures, services à distance comme le paiement des impôts ou l'accomplissement de certaines formalités.
- le développement des réseaux : il doit permettre de mieux irriguer notre territoire afin que tous puissent bénéficier des nouvelles technologies. Le développement des réseaux à haut débit constitue une priorité pour le Gouvernement. Il permettra de diffuser dans de nouveaux territoires et à des prix concurrentiels des accès de haute qualité à Internet. Pour y parvenir, plusieurs technologies sont disponibles (câble, xDSL, satellite, boucle locale radio pour laquelle le Gouvernement a lancé un appel à candidature, UMTS d'ici à quelques années).
A terme, l'ensemble du territoire devrait ainsi pouvoir bénéficier de ces technologies.
- le soutien à l'innovation. Je viens d'arrêter la programmation des crédits dont je dispose pour soutenir les innovations industrielles.
Sur les 2 MdsF que je consacre au soutien à des projets innovants, j'ai décidé d'affecter plus d'1,5 MdsF à la société de l'information. Il s'agit notamment d'aider à la production de contenus utilisant des technologies innovantes, comme la télévision numérique.
Car, le développement de la société de l'information ne peut reposer que sur une combinaison entre infrastructures et contenus : sans réseaux suffisamment rapides et développés, pas d'internet ; mais également sans contenus intéressants pour le public, pas d'internet.
Depuis 2 ans et demi, j'ai engagé une profonde évolution des aides à l'innovation dont je dispose : les thématiques ont été renouvelées (société de l'information, mais aussi des biotechnologies). Je note avec satisfaction que la région Rhône-Alpes est au cur de ces deux secteurs, notamment à Lyon et à Grenoble, autour des laboratoires Pasteurs-Mérieux et de ceux du Commissariat à l'énergie atomique ou encore avec la société SMT-Electronics.
Mais aussi autour d'un nombre grandissant de spécialisations technologiques. Le réseau national de recherche technologique sur les micro et macro technologies a donc tout naturellement été implanté à Grenoble. Pour le fond d'amorçage sur les biotechnologies, le choix s'est porté sur Lyon. J'ai souhaité que ces soutiens soient moins concentrés sur certaines entreprises, qu'il y ait un renouvellement régulier des entreprises soutenues et enfin que les PME soient incitées à être parties prenantes des innovations et de la société de l'information. C'est le sens d'ailleurs du programme UCIP (utilisation collective de l'internet par les PME) que j'ai lancé en 1998 et qui connaît un très large succès, notamment en Rhône-Alpes. C'est également le sens des aides attribuées par l'ANVAR, avec des pôles d'excellence, pour lesquelles votre région constitue le deuxième pôle national. la loi sur la société de l'information : la diffusion du commerce électronique, les nouvelles formes d'accès aux réseaux et plus généralement le développement des communications en ligne posent des questions juridiques nouvelles.
C'est pourquoi le Premier ministre a annoncée en août dernier l'adaptation de notre droit à la société de l'information. Le document d'orientation que j'ai rendu public en octobre dernier aux côtés du Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, de la Ministre de la justice et de la Ministre de la culture et de la communication, a été soumis à une consultation publique jusqu'à la fin de l'année 1999.
Assurer la liberté des communications en ligne, favoriser l'accès du plus grand nombre aux réseaux de la société de l'information, veiller à la sécurité et à la loyauté des transactions en ligne, tels sont les enjeux pour 2000 de la loi sur la société de l'information.
Je voudrais vous dire à ce titre mes convictions sur ce texte que Christian SAUTTER et moi-même présenterons en étroite liaison avec Elisabeth GUIGOU et Catherine TRAUTMANN : la société de l'information et internet n'appellent pas un droit nouveau.
ais les modalités concrètes permettant d'appliquer effectivement les principes de notre droit sur les réseaux doivent être précisés. Il s'agit d'un enjeu fondamental pour assurer la confiance des utilisateurs, notamment pour le commerce électronique. La société de l'information et internet doivent reposer sur une responsabilisation des acteurs essentielle pour que la France soit exemplaire en matière de bonnes pratiques sur internet.
En conclusion, je souhaite évoquer notre future présidence de l'Union européenne au deuxième semestre : la société de l'information y sera bien évidemment un enjeu majeur, comme elle est au cur des préoccupations de l'actuelle présidence portugaise de l'Union. Car il nous faut développer ensemble une société européenne de l'information, comme nous y invite l'initiative E-Europe de la commission européenne, comme la France s'y attache depuis plus de deux ans.
(Source http://www.industrie.gouv.fr, le 21 février 2000).