Texte intégral
P. Rancé-. Vous avez donné des instructions aux procureurs de la République pour qu'ils demandent des peines sévères et pour que des contrôles d'identité soient systématiquement effectués dans la région des incendies. Qu'est-ce qui vous permet de croire que ces incendies sont d'origine criminelle ?
- "C'est l'expérience. Depuis malheureusement de nombreuses années, on a pu observer que bien souvent, les incendies sont d'origine criminelle. Et il semble bien, au vu des enquêtes en cours que ce soit le cas, pour une part significatives d'entre eux en tout cas, pour les feux de cette année."
Il y a des suspects ?
- "Vous avez observé qu'un homme a été mis en garde à vue et est suspecté d'une partie des mises à feu. Ma déclaration a aussi une volonté de prévention ; prévention grâce aux contrôles d'identité, puisque les procureurs de la République ont la possibilité de donner l'autorisation aux policiers et aux gendarmes de faire des contrôles d'identité systématiques. Je leur ai demandé de le faire dans des zones à risques. Deuxièmement, le rappel de la gravité des peines, qu'à mon avis, beaucoup de Français ne connaissent pas, qui sont inscrites dans le code pénal, me parait également avoir un effet dissuasif. Je rappelle qu'en cas de décès, la peine peut aller jusqu'à la réclusion criminelle à perpétuité."
Ce n'est pas si simple, parce qu'on a souvent affaire à des malades mentaux. Hier, dans l'Aude, c'était un ouvrier agricole dépressif ; il a été condamné à 18 mois, dont 6 fermes. Vous voyez que c'est difficile...
- "Oui, mais le feu avait été arrêté très vite et les dégâts extrêmement faibles. Il n'y avait eu ni blessés ni tués..."
Vous nous annoncez ce matin, sur l'antenne d'Europe 1, une nouveauté dans les enquêtes criminelles : désormais, il y aura des "profileurs" dans la police française. De quoi s'agit-il ?
- "Il y aura des profileurs agréés. C'est quelqu'un qui a une formation psychologique et qui peut donc, au vu par exemple d'une série de crimes ou de viols, comportant des similitudes, arriver à faire le profil psychologique du suspect probable et ainsi d'aider à l'avancement de l'enquête. Quelle était la situation jusqu'à aujourd'hui ? Nous avions des spécialistes - des vrais, des faux, peut-être des semi-gourous, on ne sait pas trop... - qui apportaient volontiers leur concours aux services d'enquête. Ce qui nous avons voulu, avec un petit groupe de travail comportant des policiers, des gendarmes, mais aussi des magistrats et des avocats, c'est rendre possible cette technique - puisque c'est une technique intéressante qui se pratique, par exemple, aux Etats-Unis - mais l'encadrer suffisamment pour qu'il n'y ait pas de dérive et que l'on ne tombe dans une espèce de psychologisme de pacotille, type "roman policier" de mauvaise qualité - il y a de très bons romans policiers - et faire en sorte que dans la procédure, l'intervention de ces profileurs puissent être prise en compte. Cela veut dire qu'il faut que ces profileurs soient des officiers de police judiciaire formés. Nous allons les former dès les prochains mois, en particulier à l'ENM. Deuxièmement, il faut que cet élément de travail d'enquête soit également contradictoire, c'est-à-dire que le rapport du profileur sera à la disposition des avocats qui pourront le contester. Voilà quelque chose de très important pour que la Cour de cassation n'ait pas à annuler, comme ce fut le cas, des enquêtes qui ont pu utiliser des profileurs par le passé."
Qu'est-ce qui vous séduit dans cette méthode, inventée par le FBI au début des années 70, et en quoi peut-elle être utile ?
- "Nous avons de plus en plus les moyens, grâce à des fichiers comme le fichier Salvac, dont N. Sarkozy parlait il y a quelques semaines, d'accumuler des informations sur des faits en apparence n'ayant rien à voir les uns avec les autres, mais sur lesquels, grâce à ces fichiers nouveaux, on s'aperçoit qu'il y a des points communs dans des crimes, des délits. Donc, à partir de là, on peut essayer de trouver ce qu'il y a de commun, on peut essayer d'analyser le profil psychologique probable de celui qui a commis ces actes et ainsi favoriser, faciliter la recherche du coupable par les services d'enquête."
Je vais vous parler d'un autre coupable, qui est en prison depuis cinq semaines maintenant, et qui doit théoriquement purger encore six mois : J. Bové, qui a demandé à bénéficier d'un placement à l'extérieur. Quel est le principe du placement à l'extérieur ?
- "D'abord, je me réjouis que J. Bové ait enfin accepté de rencontrer le juge d'application des peines. S'il avait accepté de le faire au mois de février dernier, quand cela lui avait été proposé, il ne serait peut-être là où il est aujourd'hui. Je me permets de le rappeler, parce que ce n'est pas tout à fait anodin. Deuxièmement, le placement à l'extérieur, cela veut dire que le juge d'application des peines, qui est un juge indépendant peut, au vu du profil du détenu, compte tenu de la gravité de l'infraction, accepter que le détenu soit placé à l'extérieur - cela veut dire ce que cela veut dire -, auprès d'une association qui peut être agréée par l'administration pénitentiaire, pour faire un travail d'intérêt général."
Qui peut être agréée ou qui doit l'être ?
- "Qui doit être agréée. Mais ce n'est pas une formalité extraordinairement longue. L'idée est de remplacer l'incarcération par un travail d'intérêt général, auprès d'une structure qui remplit une mission d'intérêt général."
Hier, le procureur de la République de Montpellier a fait savoir qu'il était opposé à cette demande de placement à l'extérieur de J. Bové et ses avocats crient à l'acharnement judiciaire. Est-ce que c'est vous qui avez donné des instructions ?
- "Je n'ai pas donné d'instructions au parquet dans cette affaire particulière. Deuxièmement, je crois que le juge a entendu les parties. Aujourd'hui, il a mis en délibéré, il décidera demain. Vous comprendrez que je ne puisse pas en dire davantage aujourd'hui. Le juge prendra sa décision d'une manière totalement indépendante."
D'autant qu'il va rendre sa décision demain. Ce n'est donc pas le procureur de la République qui décide, c'est le juge d'application des peines...
- "C'est un juge indépendant du siège."
Toujours selon les avocats de J. Bové, il parait que les services de l'administration pénitentiaire ont donné un avis favorable ?
- "Sur le plan technique, c'est exact, dans la mesure où le service de l'administration pénitentiaire, comme un certain nombre d'autres services, donne des avis techniques pour savoir si c'est techniquement possible ou techniquement impossible. Mais c'est le juge d'application des peines qui tranche en fonction des éléments techniques qui lui sont apportés par les différents services publics."
Parmi ces éléments techniques, il y a l'association de défense du Larzac - c'est où J. Bové a demandé à être placé - qui est une association agréée par les services de l'administration pénitentiaire ?
- "A ma connaissance, aujourd'hui, elle ne l'est pas."
Cela peut poser un problème ?
- "Le juge en décidera."
Des parcelles d'OGM sont fauchées en ce moment, en soutien à J. Bové. Est-ce remonté jusqu'à la chancellerie, est-ce que vous avez donné des instructions aux procureurs qui pourraient localement être concernés par ces destructions de parcelles ?
- "Les procureurs savent ce qu'ils ont à faire. Le ministre de la Justice que je suis ne passe pas son temps à passer des coups de fil dans toute la France pour s'occuper de tout ce qui s'y passe. A partir du moment où il y a délit, il y a constatation, il y a procédure."
Parlons d'un autre procureur, celui de Nice. Que se passe-t-il à Nice avec E. de Montgolfier et ce rapport de l'inspection générale des services ?
- "D'abord un petit rappel - parce que ce n'est pas tout à fait inutile - : le rapport de l'inspection sur le fonctionnement du TGI de Nice a été demandé par monsieur de Montgolfier, il a été décidé par mon prédécesseur, madame Lebranchu, et lorsque je suis arrivé au ministère de la Justice, le rapport était très largement rédigé, on était dans la phase contradictoire..."
Vous ne l'avez pas rendu public tout de suite ?
- "Je ne l'ai pas rendu public tout de suite, pour que chacun puisse répondre des assertions. Si je l'ai rendu public - c'est un point important à rappeler -, c'est dans un souci de transparence. J'ai observé, lorsque je suis arrivé en charge de ce ministère, qu'il y avait une grande polémique, beaucoup de débats à Nice - les "pour", les "contre", qui se disaient beaucoup de choses... Dans un souci de transparence, de clarté, j'ai fait savoir que je rendrai public le rapport lorsqu'il serait définitif, pour que chacun puisse voir ce qui est vrai, ce qui est faux et que l'on ne vive pas à travers des fantasmes. Deuxième chose : les hommes, les magistrats, les procureurs comme monsieur de Montgolfier et beaucoup d'autres, qui souhaitent aller au bout des enquêtes, faire la vérité sur un certain nombre d'affaires, j'approuve leur comportement. Que les choses soient bien claires ! Je pense que le rôle de la justice est d'aller au bout des choses, quelles que soient par ailleurs les difficultés des dossiers..."
Y avait-il des affaires particulières à Nice, une situation difficile, différente d'ailleurs ?
- "C'est un tribunal qui connaît des affaires..."
La justice ne passe pas ?
- "C'est ce que monsieur de Montgolfier lui-même avait dit. C'est la raison pour laquelle il avait demandé ce rapport. Ce que je souhaite maintenant, c'est que les conclusions du rapport - le rapport n'est pas seulement un constat, c'est un constat de dysfonctionnement sur le tribunal, sur le parquet ; on ne va pas présenter le rapport ce matin sur votre antenne mais il dit un certain nombre de choses - soient mises en oeuvre. C'est-à-dire que l'amélioration du fonctionnement du parquet mais aussi du tribunal, se réalise progressivement. C'est ce que je souhaite, je ne souhaite rien d'autre."
Vous demandez la réorganisation du tribunal de Nice et notamment du parquet ?
- "Vous avez tout compris. je souhaite que le travail soit mieux organisé, mieux réparti, puisque c'est un des points forts du rapport, et que les choses s'améliorent dans le fonctionnement quotidien du parquet."
Certainement, et la justice sera rendue. Néanmoins, une des conclusions de ce rapport, c'est que monsieur de Montgolfier quitte ses fonctions...
- "Ce n'est pas dit de cette manière, aussi nettement, par le rapport. Il ne faut pas sortir une phrase de l'ensemble du rapport. C'est une affaire de volonté de réforme. je souhaite que monsieur de Montgolfier, effectivement, prenne un certain nombre de décisions d'organisation dans son parquet. Pour le reste..."
Donc le refus de monsieur de Montgolfier de quitter Nice ne pose pas de problème ?
- "Il le refuse à qui ? Ce n'est pas un rapport de l'inspection qui décide de mouvement de magistrats ! Les mouvements de magistrats sont proposés par le ministre de la Justice ; ensuite, le Conseil supérieur de la magistrature donne un avis, qui lie le ministre s'il s'agit de magistrat des tribunaux, du siège, et qui ne lie pas le ministre s'il s'agit des procureurs de la République. Aucune de ces procédures n'est en cours aujourd'hui."
Il n'y aura pas de nouvelles enquêtes, de nouvelles inspections des services judiciaires à Nice ?
- "Le rapport a été rendu public il y a quelques mois. Maintenant, mettons-le en oeuvre et améliorons le fonctionnement du tribunal de Nice."
La situation dans les prisons : comment cela se passe, avec 61.000 détenus, chiffre jamais atteint ?
- "Ce chiffre va baisser dans les semaines qui viennent, il est en train de baisser compte tenu de la grâce présidentielle. Pour le reste, nous sommes très attentifs, avec le personnel qui fait un travail très difficile sur cette situation. Heureusement, les recrutements massifs de surveillants vont nous permettre, dès le mois de septembre, d'avoir davantage de personnels dans les établissements. Par ailleurs, nous accélérons le programme de construction. En attendant la réalisation de ces constructions, je travaille avec mes services sur le développement de formules alternatives aux courtes peines de prison, pour faire en sorte que, d'abord, l'insertion des condamnés puissent se faire dans de meilleures conditions, que les conditions de vie en prison soient meilleures, et que les conditions de travail des personnels soient moins dures."
Il faudra aussi parler des longues peines et de la réinsertion des longues peines de prison...
- "Bien sûr, pour faire en sorte que ces gens qui restent très longtemps en prison aient la capacité de revivre en liberté, ce qui n'est pas évident si un travail de réinsertion ne les accompagne pas dans ce retour à la vie normale."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 30 juillet 2003)
- "C'est l'expérience. Depuis malheureusement de nombreuses années, on a pu observer que bien souvent, les incendies sont d'origine criminelle. Et il semble bien, au vu des enquêtes en cours que ce soit le cas, pour une part significatives d'entre eux en tout cas, pour les feux de cette année."
Il y a des suspects ?
- "Vous avez observé qu'un homme a été mis en garde à vue et est suspecté d'une partie des mises à feu. Ma déclaration a aussi une volonté de prévention ; prévention grâce aux contrôles d'identité, puisque les procureurs de la République ont la possibilité de donner l'autorisation aux policiers et aux gendarmes de faire des contrôles d'identité systématiques. Je leur ai demandé de le faire dans des zones à risques. Deuxièmement, le rappel de la gravité des peines, qu'à mon avis, beaucoup de Français ne connaissent pas, qui sont inscrites dans le code pénal, me parait également avoir un effet dissuasif. Je rappelle qu'en cas de décès, la peine peut aller jusqu'à la réclusion criminelle à perpétuité."
Ce n'est pas si simple, parce qu'on a souvent affaire à des malades mentaux. Hier, dans l'Aude, c'était un ouvrier agricole dépressif ; il a été condamné à 18 mois, dont 6 fermes. Vous voyez que c'est difficile...
- "Oui, mais le feu avait été arrêté très vite et les dégâts extrêmement faibles. Il n'y avait eu ni blessés ni tués..."
Vous nous annoncez ce matin, sur l'antenne d'Europe 1, une nouveauté dans les enquêtes criminelles : désormais, il y aura des "profileurs" dans la police française. De quoi s'agit-il ?
- "Il y aura des profileurs agréés. C'est quelqu'un qui a une formation psychologique et qui peut donc, au vu par exemple d'une série de crimes ou de viols, comportant des similitudes, arriver à faire le profil psychologique du suspect probable et ainsi d'aider à l'avancement de l'enquête. Quelle était la situation jusqu'à aujourd'hui ? Nous avions des spécialistes - des vrais, des faux, peut-être des semi-gourous, on ne sait pas trop... - qui apportaient volontiers leur concours aux services d'enquête. Ce qui nous avons voulu, avec un petit groupe de travail comportant des policiers, des gendarmes, mais aussi des magistrats et des avocats, c'est rendre possible cette technique - puisque c'est une technique intéressante qui se pratique, par exemple, aux Etats-Unis - mais l'encadrer suffisamment pour qu'il n'y ait pas de dérive et que l'on ne tombe dans une espèce de psychologisme de pacotille, type "roman policier" de mauvaise qualité - il y a de très bons romans policiers - et faire en sorte que dans la procédure, l'intervention de ces profileurs puissent être prise en compte. Cela veut dire qu'il faut que ces profileurs soient des officiers de police judiciaire formés. Nous allons les former dès les prochains mois, en particulier à l'ENM. Deuxièmement, il faut que cet élément de travail d'enquête soit également contradictoire, c'est-à-dire que le rapport du profileur sera à la disposition des avocats qui pourront le contester. Voilà quelque chose de très important pour que la Cour de cassation n'ait pas à annuler, comme ce fut le cas, des enquêtes qui ont pu utiliser des profileurs par le passé."
Qu'est-ce qui vous séduit dans cette méthode, inventée par le FBI au début des années 70, et en quoi peut-elle être utile ?
- "Nous avons de plus en plus les moyens, grâce à des fichiers comme le fichier Salvac, dont N. Sarkozy parlait il y a quelques semaines, d'accumuler des informations sur des faits en apparence n'ayant rien à voir les uns avec les autres, mais sur lesquels, grâce à ces fichiers nouveaux, on s'aperçoit qu'il y a des points communs dans des crimes, des délits. Donc, à partir de là, on peut essayer de trouver ce qu'il y a de commun, on peut essayer d'analyser le profil psychologique probable de celui qui a commis ces actes et ainsi favoriser, faciliter la recherche du coupable par les services d'enquête."
Je vais vous parler d'un autre coupable, qui est en prison depuis cinq semaines maintenant, et qui doit théoriquement purger encore six mois : J. Bové, qui a demandé à bénéficier d'un placement à l'extérieur. Quel est le principe du placement à l'extérieur ?
- "D'abord, je me réjouis que J. Bové ait enfin accepté de rencontrer le juge d'application des peines. S'il avait accepté de le faire au mois de février dernier, quand cela lui avait été proposé, il ne serait peut-être là où il est aujourd'hui. Je me permets de le rappeler, parce que ce n'est pas tout à fait anodin. Deuxièmement, le placement à l'extérieur, cela veut dire que le juge d'application des peines, qui est un juge indépendant peut, au vu du profil du détenu, compte tenu de la gravité de l'infraction, accepter que le détenu soit placé à l'extérieur - cela veut dire ce que cela veut dire -, auprès d'une association qui peut être agréée par l'administration pénitentiaire, pour faire un travail d'intérêt général."
Qui peut être agréée ou qui doit l'être ?
- "Qui doit être agréée. Mais ce n'est pas une formalité extraordinairement longue. L'idée est de remplacer l'incarcération par un travail d'intérêt général, auprès d'une structure qui remplit une mission d'intérêt général."
Hier, le procureur de la République de Montpellier a fait savoir qu'il était opposé à cette demande de placement à l'extérieur de J. Bové et ses avocats crient à l'acharnement judiciaire. Est-ce que c'est vous qui avez donné des instructions ?
- "Je n'ai pas donné d'instructions au parquet dans cette affaire particulière. Deuxièmement, je crois que le juge a entendu les parties. Aujourd'hui, il a mis en délibéré, il décidera demain. Vous comprendrez que je ne puisse pas en dire davantage aujourd'hui. Le juge prendra sa décision d'une manière totalement indépendante."
D'autant qu'il va rendre sa décision demain. Ce n'est donc pas le procureur de la République qui décide, c'est le juge d'application des peines...
- "C'est un juge indépendant du siège."
Toujours selon les avocats de J. Bové, il parait que les services de l'administration pénitentiaire ont donné un avis favorable ?
- "Sur le plan technique, c'est exact, dans la mesure où le service de l'administration pénitentiaire, comme un certain nombre d'autres services, donne des avis techniques pour savoir si c'est techniquement possible ou techniquement impossible. Mais c'est le juge d'application des peines qui tranche en fonction des éléments techniques qui lui sont apportés par les différents services publics."
Parmi ces éléments techniques, il y a l'association de défense du Larzac - c'est où J. Bové a demandé à être placé - qui est une association agréée par les services de l'administration pénitentiaire ?
- "A ma connaissance, aujourd'hui, elle ne l'est pas."
Cela peut poser un problème ?
- "Le juge en décidera."
Des parcelles d'OGM sont fauchées en ce moment, en soutien à J. Bové. Est-ce remonté jusqu'à la chancellerie, est-ce que vous avez donné des instructions aux procureurs qui pourraient localement être concernés par ces destructions de parcelles ?
- "Les procureurs savent ce qu'ils ont à faire. Le ministre de la Justice que je suis ne passe pas son temps à passer des coups de fil dans toute la France pour s'occuper de tout ce qui s'y passe. A partir du moment où il y a délit, il y a constatation, il y a procédure."
Parlons d'un autre procureur, celui de Nice. Que se passe-t-il à Nice avec E. de Montgolfier et ce rapport de l'inspection générale des services ?
- "D'abord un petit rappel - parce que ce n'est pas tout à fait inutile - : le rapport de l'inspection sur le fonctionnement du TGI de Nice a été demandé par monsieur de Montgolfier, il a été décidé par mon prédécesseur, madame Lebranchu, et lorsque je suis arrivé au ministère de la Justice, le rapport était très largement rédigé, on était dans la phase contradictoire..."
Vous ne l'avez pas rendu public tout de suite ?
- "Je ne l'ai pas rendu public tout de suite, pour que chacun puisse répondre des assertions. Si je l'ai rendu public - c'est un point important à rappeler -, c'est dans un souci de transparence. J'ai observé, lorsque je suis arrivé en charge de ce ministère, qu'il y avait une grande polémique, beaucoup de débats à Nice - les "pour", les "contre", qui se disaient beaucoup de choses... Dans un souci de transparence, de clarté, j'ai fait savoir que je rendrai public le rapport lorsqu'il serait définitif, pour que chacun puisse voir ce qui est vrai, ce qui est faux et que l'on ne vive pas à travers des fantasmes. Deuxième chose : les hommes, les magistrats, les procureurs comme monsieur de Montgolfier et beaucoup d'autres, qui souhaitent aller au bout des enquêtes, faire la vérité sur un certain nombre d'affaires, j'approuve leur comportement. Que les choses soient bien claires ! Je pense que le rôle de la justice est d'aller au bout des choses, quelles que soient par ailleurs les difficultés des dossiers..."
Y avait-il des affaires particulières à Nice, une situation difficile, différente d'ailleurs ?
- "C'est un tribunal qui connaît des affaires..."
La justice ne passe pas ?
- "C'est ce que monsieur de Montgolfier lui-même avait dit. C'est la raison pour laquelle il avait demandé ce rapport. Ce que je souhaite maintenant, c'est que les conclusions du rapport - le rapport n'est pas seulement un constat, c'est un constat de dysfonctionnement sur le tribunal, sur le parquet ; on ne va pas présenter le rapport ce matin sur votre antenne mais il dit un certain nombre de choses - soient mises en oeuvre. C'est-à-dire que l'amélioration du fonctionnement du parquet mais aussi du tribunal, se réalise progressivement. C'est ce que je souhaite, je ne souhaite rien d'autre."
Vous demandez la réorganisation du tribunal de Nice et notamment du parquet ?
- "Vous avez tout compris. je souhaite que le travail soit mieux organisé, mieux réparti, puisque c'est un des points forts du rapport, et que les choses s'améliorent dans le fonctionnement quotidien du parquet."
Certainement, et la justice sera rendue. Néanmoins, une des conclusions de ce rapport, c'est que monsieur de Montgolfier quitte ses fonctions...
- "Ce n'est pas dit de cette manière, aussi nettement, par le rapport. Il ne faut pas sortir une phrase de l'ensemble du rapport. C'est une affaire de volonté de réforme. je souhaite que monsieur de Montgolfier, effectivement, prenne un certain nombre de décisions d'organisation dans son parquet. Pour le reste..."
Donc le refus de monsieur de Montgolfier de quitter Nice ne pose pas de problème ?
- "Il le refuse à qui ? Ce n'est pas un rapport de l'inspection qui décide de mouvement de magistrats ! Les mouvements de magistrats sont proposés par le ministre de la Justice ; ensuite, le Conseil supérieur de la magistrature donne un avis, qui lie le ministre s'il s'agit de magistrat des tribunaux, du siège, et qui ne lie pas le ministre s'il s'agit des procureurs de la République. Aucune de ces procédures n'est en cours aujourd'hui."
Il n'y aura pas de nouvelles enquêtes, de nouvelles inspections des services judiciaires à Nice ?
- "Le rapport a été rendu public il y a quelques mois. Maintenant, mettons-le en oeuvre et améliorons le fonctionnement du tribunal de Nice."
La situation dans les prisons : comment cela se passe, avec 61.000 détenus, chiffre jamais atteint ?
- "Ce chiffre va baisser dans les semaines qui viennent, il est en train de baisser compte tenu de la grâce présidentielle. Pour le reste, nous sommes très attentifs, avec le personnel qui fait un travail très difficile sur cette situation. Heureusement, les recrutements massifs de surveillants vont nous permettre, dès le mois de septembre, d'avoir davantage de personnels dans les établissements. Par ailleurs, nous accélérons le programme de construction. En attendant la réalisation de ces constructions, je travaille avec mes services sur le développement de formules alternatives aux courtes peines de prison, pour faire en sorte que, d'abord, l'insertion des condamnés puissent se faire dans de meilleures conditions, que les conditions de vie en prison soient meilleures, et que les conditions de travail des personnels soient moins dures."
Il faudra aussi parler des longues peines et de la réinsertion des longues peines de prison...
- "Bien sûr, pour faire en sorte que ces gens qui restent très longtemps en prison aient la capacité de revivre en liberté, ce qui n'est pas évident si un travail de réinsertion ne les accompagne pas dans ce retour à la vie normale."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 30 juillet 2003)