Déclaration de M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale, sur la situation financière de la branche maladie de la sécurité sociale en 2003 et 2004, et sur les grandes lignes du projet de loi de réforme de l'assurance maladie, Paris le 16 juin 2004.

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Circonstance : Réunion de la Commission des comptes de la sécurité sociale à Paris le 16 juin 2004

Texte intégral

Monsieur le secrétaire général, mesdames et messieurs,
Cette commission des comptes de la sécurité sociale de printemps intervient cette année dans un contexte très particulier, celui de la réforme de l'assurance maladie. Avec Xavier Bertrand, nous avons présenté ce matin en conseil des ministres le projet de loi relatif à l'assurance maladie.
Conformément au souhait du Président de la République, le Gouvernement engage ainsi, un an après la réforme des retraites, la modernisation du pilier majeur de notre système de protection sociale que constitue l'assurance maladie. Cela montre tout l'attachement que le Gouvernement accorde à ce système public et solidaire.
J'y reviendrai tout à l'heure dans le détail mais je souhaite ouvrir cette réunion de la Commission des comptes en remerciant chaleureusement le secrétaire général, Monsieur François Monnier, pour la qualité de ses travaux. J'associe à mes remerciements le directeur de la sécurité sociale, Monsieur Dominique LIBAULT et l'ensemble des équipes de la direction de la sécurité sociale qui ont accompli, comme à l'accoutumée, un travail très important dans un délai très contraint.
1. Je souhaiterais centrer en premier lieu mon propos sur la situation difficile des comptes de la sécurité sociale en 2003 et en 2004, que vient de nous présenter le secrétaire général.
La dégradation des comptes du régime général est une réalité puisque le déficit global pourrait atteindre, fin 2004, 14 milliards d'euros, soit un peu moins de 100 milliards de francs. C'est considérable, et un tel déséquilibre met en péril les fondements même de notre sécurité sociale.
Ce déficit, c'est d'abord celui de l'assurance maladie qui pourrait afficher à la fin de l'année une perte de près de 12,9 milliards d'euros. Les autres branches seront aussi probablement déficitaires en 2004, mais à des niveaux bien moindres.
Cette dégradation s'explique d'abord par la faible croissance des recettes. Comme François Monnier l'a très bien montré, la croissance de 1,9 % de la masse salariale en 2003 a été la plus basse qu'ait connu notre pays depuis 1993 et les prévisions actualisées pour 2004, 2,9% au lieu de 3,1% sont en recul par rapport aux prévisions initiales sur lesquelles a été construite la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004.
La croissance montre des signes de reprise mais qui demeurent encore trop modestes pour avoir un impact sur les recettes. Nous souhaitons tous voir cette tendance s'accélérer. Nous en reparlerons ensemble à la Commission des comptes d'automne.
Cette atonie conjoncturelle des recettes se conjugue avec un dynamisme des dépenses qui ne se dément pas encore, et qui est d'abord celui de l'assurance maladie. J'y reviendrai tout à l'heure mais le rapport de la commission des comptes, comme celui du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie avant lui et différents travaux de la CNAMTS, montre bien la continuité des évolutions dans ce domaine depuis 1997. Depuis cette date, le déficit structurel de l'assurance maladie, c'est à dire corrigé des variations conjoncturelles, à crû continûment. Une croissance exceptionnelle des recettes en 2001 et 2002, liée à une conjoncture économique internationale très particulière, a masqué ce dynamisme des dépenses. Une fois cette évolution favorable des recettes passée, le ralentissement de la croissance a brusquement fait ressortir le déficit cumulé. Une telle vivacité des dépenses fait peser une menace sur l'équilibre des comptes sociaux.
Les années 2002 et 2003 ont été aussi marquées par des mesures ponctuelles qui ont contribué à entretenir ce dynamisme des dépenses en particulier la mise en place des 35h. 3,4 milliards d'euros, c'est le coût des 35h à l'hôpital. C'est évidemment considérable et cela continue de peser en 2004 sur l'évolution des dépenses hospitalières.
Il y a néanmoins des signes positifs lorsque l'on regarde très attentivement l'évolution très récente de l'assurance maladie : l'année 2003 marque une première décélération de la croissance des dépenses de l'assurance maladie par rapport à 2002 qui était de 7,2 %. Ensuite, le dépassement de l'ONDAM (objectif national des dépenses d'assurance maladie), même s'il reste important, se réduit substantiellement par rapport aux années antérieures : il ne sera que de 1,2 milliards d'euros en 2003, contre plus de 3 milliards d'euros en 2001 et presque 4 Milliards en 2002.
Les premiers chiffres pour 2004 confirment cette nouvelle tendance même s'il convient de rester prudent. Bien évidemment, ces évolutions ne nous permettront pas de revenir à l'équilibre mais elles évitent une plus forte dégradation des comptes.
En ce qui concerne l'équilibre des autres branches, j'aimerais revenir sur deux sujets. Tout d'abord la réforme des retraites. La majorité parlementaire et le gouvernement ont voulu permettre aux personnes ayant commencé à travailler à 14 ou 15 ans de partir plus tôt à la retraite. Nous devons en être fière même si cette mesure pèse sur les comptes de la CNAVTS en 2004 et est directement la cause de ce déficit. C'est une mesure de justice sociale. C'est une mesure qui était indispensable pour l'équilibre de la réforme des retraites.
Une deuxième mesure me paraît aussi importante. C'est la création de la PAJE, la prestation d'accueil du jeune enfant. Je vais laisser ma collègue, Mme la ministre de la famille, en parler tout à l'heure. Mais j'aimerais en rappeler le sens. Le Gouvernement a engagé d'ici 2007 un milliard d'euros par an, 6,5 milliards de francs, pour améliorer l'accueil des jeunes enfants dans notre société. C'était nécessaire pour ne pas laisser notre pays vieillir inexorablement.
Ainsi, les comptes de ces dernières années, les comptes de la sécurité sociale reflètent d'abord les déficits structurels qui menacent l'assurance maladie. Mais ils comprennent aussi des mesures de justice sociale qu'a prises le Gouvernement pour préparer l'avenir.
2. Je souhaitais d'ailleurs, avant d'aborder la réforme de l'assurance maladie, revenir sur la modernisation des autres branches de la sécurité sociale
L'année 2004 est marquée par la mise en uvre de deux séries de mesures très importantes initiées dans le domaine de la famille et de la vieillesse.
Comme je vous l'ai déjà dit, je laisserai dans quelques instants, Marie José Roigt évoquer l'actualité de la politique familiale et ses perspectives.
Je me concentrerai donc sur les retraites. J'aimerais à cette occasion saluer mon prédécesseur, François Fillon, pour le courage et l'ardeur dont il a fait preuve. La réforme des retraites de 2003 est un élément essentiel pour assurer la pérennité de notre protection sociale.
Les quelques mois passés depuis la commission de septembre ont permis de commencer l'application des mesures de la loi du 21 août 2003. L'activité réglementaire a été très fournie, afin de finaliser les textes nécessaires.
Je vous ai déjà parlé des mesures concernant les personnes ayant commencé à travailler très jeunes. Ce sont les fameuses carrières longues. Elles sont déjà mises en oeuvre et connaissent un vrai succès. Près de 100 000 demandes d'attestation ont été traitées par les services de la branche retraite depuis le 1er janvier et le dispositif est en passe de trouver son rythme de croisière.
Le 23 juin, le conseil d'administration de la CNAV examinera plusieurs projets de décrets importants, concernant la réversion, le cumul emploi retraite et le droit à l'information. Ces décrets devraient être publiés dans le courant de l'été.
Le Groupement d'intérêt public chargé de coordonner l'ensemble des régimes de retraite pour fournir aux assurés sociaux l'information sur leurs droits à retraite, à laquelle ils ont désormais droit, sera installé dès le 5 juillet prochain.
S'agissant de la branche accident du travail et maladie professionnelle, je voulais souligner la préparation de la convention d'objectif et de gestion relative à cette branche. Des discussions sont en cours et devraient déboucher rapidement. La politique de santé au travail auquel je suis extrêmement attaché est un des volets essentiels du plan santé -environnement qui est en cours d'élaboration.
3. Cela m'amène maintenant à évoquer la réforme de l'assurance maladie
Nous entrons, mesdames et messieurs, dans une nouvelle étape de cette réforme, celle du débat au Parlement. C'est une étape majeure qui nous permettra de faire évoluer le projet du Gouvernement. J'ai déjà pris des engagements sur le sens de ces évolutions.
Ce débat au parlement fait suite à une phase de concertation très intense que Xavier Bertrand et moi avons menée avec beaucoup d'acteurs réunis aujourd'hui au sein de cette commission. Nous n'avons pas, je crois, ménagé notre peine et j'ai le sentiment que cette concertation a permis d'aboutir à un projet qui va faire évoluer en profondeur notre système de santé et d'assurance maladie.
Je souhaitais, à l'occasion de cette réunion de la commission des comptes, vous redonner les lignes de force qui caractérisent ce projet de loi et cette réforme.
Dans le prolongement des conclusions du Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, organiser notre système de soins est la priorité du Gouvernement.
Premier élément de cohérence du système de soins, le dossier médical personnel. Chaque Français doit pouvoir disposer d'ici 2007 de ce dossier médical, qu'il partagera avec son médecin traitant et, le cas échéant, avec l'ensemble des professionnels de santé avec qui il est en contact. Ce dossier répond à une demande d'information médicale de la part de nos concitoyens, et à un droit que leur donne la loi du 4 mars 2002 sur l'accès aux données de santé.
Ce dossier sera obligatoire et, à terme, l'accès au dossier conditionnera le remboursement des soins. L'ensemble des partenaires gagnera à la mise en place rapide d'un dossier médical: le médecin pour un meilleur suivi de son patient grâce à l'information en temps réel sur son patient ; le patient pour une garantie de qualité de soins et un accès unifié à l'information le concernant, trop souvent éparse ; l'assurance-maladie par la limitation des soins inutiles ou dangereux .
L'organisation de l'offre de soins suppose aussi de construire de véritables parcours de soins au bénéfice du malade qui ne doit plus être laissé face à une organisation qu'il ne comprend pas toujours et dans laquelle, parfois, il se perd. Nous avons par ailleurs tous en tête des exemples personnels ou parmi nos proches de cas d'examens ou de consultations répétés parce qu'on est mal renseigné ou parce que tout simplement on ne sait pas précisément à qui s'adresser.
Il nous faut remettre de la cohérence dans un système de soins qui est parmi les plus performants du monde dans ce que les experts appellent le "curatif individuel" mais qui s'épuise, simplement parce qu'il manque de repères et d'organisation.
C'est évidemment tout le sens de la mise en place du médecin traitant. Porte d'entrée pour le malade, ce médecin qu'il soit spécialiste ou généraliste, sera librement choisi par le malade car la liberté est au cur de notre système. Aucun français ne se verra imposer son médecin car ce n'est pas notre modèle. Le médecin traitant orientera le patient dans le système de santé afin de l'aider à construire le parcours de soins que j'évoquais à l'instant. Un certain nombre de spécialistes resteront évidemment en accès direct, je pense par exemple aux ophtalmologistes.
Nous ne souhaitons pas que la loi ou des décrets fixent un cadre rigide à ce médecin traitant car cela relève de la responsabilité des partenaires conventionnels, c'est-à-dire des caisses d'assurance maladie et des professionnels de santé.
Dernier point sur lequel je souhaitais insister dans cette nouvelle organisation de l'offre de soins, c'est la nécessité de renforcer le lien entre la médecine de ville et l'hôpital. Il n'y a pas d'un côté une réforme de l'assurance maladie et de l'autre une réforme de l'hôpital. Il y a bien une réforme de l'organisation des soins qui vise au décloisonnement, au développement des réseaux, à l'élaboration d'une véritable stratégie d'offre de soins sur un territoire donné.
C'est notamment pour mettre en uvre ces décloisonnements que le projet de loi prévoit un rapprochement entre les URCAM (Unions Régionales des Caisses d'Assurance Maladie) et les ARH (agences régionales de l'hospitalisation). Ces deux institutions devront travailler ensemble sur toute une série de sujets comme la répartition de l'offre de soins, la permanence des soins, le développement des réseaux. Le rapprochement entre la ville et l'hôpital est une exigence. Il passe aussi par un même respect par les professionnels de santé des réferentiels de bonne pratique, la même adhésion aux démarches d'évaluation, le même engagement en faveur de la qualité des soins. En tant que médecin hospitalier, je suis certain de l'adhésion de mes confrères à une démarche qui met le patient au coeur de nos préoccupations
Pour accompagner cette organisation de l'offre de soins, il nous est apparu indispensable de mieux définir les compétences de l'ensemble des acteurs qui participent à ce que les experts appellent la régulation du système, son pilotage.
C'est le sens tout d'abord de la nouvelle gouvernance de l'assurance maladie. Sans doute avons nous trop tendance à ne parler de cette gouvernance qu'en terme d'institutions et de pouvoirs. Ayons bien en tête, encore une fois, qu'il s'agit avant tout de mettre notre système d'assurance maladie au service du malade et d'une offre de soins plus efficace et mieux organisée.
La délégation de nouvelles compétences au bénéfice des caisses d'assurance maladie et le partenariat entre régimes de base et organismes complémentaires doivent permettre aux gestionnaires de l'assurance maladie de mener une politique globale du risque maladie, sur la base des objectifs de santé publique et des principes généraux dont l'Etat reste garant. Sur le médicament et la gestion de l'hôpital, l'assurance maladie sera très étroitement associée aux décisions au travers de sa participation au comité économique des produits de santé dont les compétences sont élargies et au comité de l'hospitalisation qui va se mettre en place.
De la même façon, le renforcement de la coopération entre les différents régimes d'assurance maladie via l'UNCAM (Union nationale des caisses d'assurance maladie) et la réforme des instances dirigeantes des caisses nationales et locales doivent donner plus de lisibilité et d'efficacité à notre système.
Cela passe aussi par un dialogue conventionnel rénové et je l'espère, pacifié entre les caisses d'assurance maladie et les professionnels de santé. Il nous faut retrouver confiance dans les relations conventionnelles. Là encore, la loi donne des outils grâce à l'arbitrage pour régler les éventuels différents et consolide les accord grâce au droit d'opposition donné aux syndicats majoritaires. C'est à vous, les acteurs du système de santé et d'assurance maladie qu'il revient de faire vivre cette négociation conventionnelle dans un esprit de dialogue et d'ouverture.
La deuxième ligne de force de ce projet, c'est la promotion de la qualité des soins, notamment au travers du rôle confié à la Haute autorité de santé : la nécessité d'une évaluation de l'utilité médicale fondée sur des critères réellement scientifiques était un des messages forts du rapport du Haut Conseil. Notre système s'épuise, d'une certaine façon, à vouloir tout financer, sans hiérarchie ni visibilité. C'est la raison pour laquelle il faut redonner une cohérence aux choix que nous sommes amenés à faire et nous donner les moyens de rembourser les médicaments et les traitements innovants qui constituent la médecine de demain.
Nous de disposons pas aujourd'hui des outils nous permettant d'évaluer l'utilité médicale d'un acte lorsqu'une demande d'admission au remboursement est faite, alors que la démarche existe pour le médicament. C'est évidemment une lacune très importante à laquelle il fallait remédier. La haute autorité devra émettre un avis sur l'utilité médicale des produits et des actes avant l'admission au remboursement. Elle pourra également être sollicitée par différents acteurs, l'assurance maladie, l'Etat, les professionnels de santé, les représentants des usagers pour réévaluer l'efficacité de certains traitements si cela s'avère nécessaire.
La Haute autorité se verra confier une deuxième mission toute aussi centrale dans le nouveau dispositif : celle de veiller à l'élaboration et à la diffusion des référentiels de bonne pratique. Sur ce sujet, il nous faut passer à la vitesse supérieure et surtout diffuser des référentiels qui soient effectivement applicables dans la vie quotidienne des professionnels de santé.
Troisième axe de ce projet, le redressement financier de l'assurance maladie. Ce point prend évidemment une importance particulière lorsqu'est réunie la commission des comptes de la sécurité sociale.
Je l'ai rappelé au tout début de mon intervention ; la situation financière de l'assurance maladie est grave et il était urgent d'agir. En présentant un plan de redressement de 15 milliards d'euros, le Gouvernement répond à ce défi.
15 milliards d'euros, c'est évidemment considérable. Il y a eu un temps où les plans de réforme de la sécurité sociale étaient sur ces ordres de grandeurs, mais en francs et non en euros. C'est donc un plan ambitieux et structurant pour l'avenir.
Il repose d'abord sur 10 milliards d'euros de moindres dépenses et non d'économies comme, par un raccourci trompeur, on a trop souvent tendance à le dire. Oui, nous dépenserons en 2007 beaucoup plus pour notre santé qu'en 2004. Les dépenses de santé continueront de croître car c'est légitime. Il n'y a pas et il n'y aura pas de rationnement des soins, de quelque nature que cela soit. Cependant, nous mettons tout en uvre pour que chaque euro investi dans notre système de soins le soit à bon escient.
Cela passe tout d'abord, à hauteur de 3,5 milliards par la mise en uvre des mesures de maîtrise médicalisée des dépenses, notamment le dossier médical personnel, le médecin traitant et le promotion du bon usage du médicament. La diffusion effective de référentiels de bonne pratique sous l'égide de la Haute autorité de santé constitue aussi un volet essentiel de cette maîtrise médicalisée des dépenses.
J'entends ici et là des interrogations sur les moyens d'atteindre ces objectifs. Or la CNAMTS vient de nous expliquer dans une étude qui date du mois mais dernier qu'en réalité les dépenses inutiles se montaient à près de 5 à 6 milliards, soit 15% des prescriptions de biens et de soins médicaux.
La politique du médicament, au travers notamment d'un développement rapide du médicament générique constitue le deuxième volet de ce plan, à hauteur de 2,3 milliards d'euros. Nous sommes en train de construire ce volet en lien avec l'industrie du médicament afin de concilier les exigences d'économies avec la nécessaire valorisation de la recherche et de l'innovation. Soigner mieux en dépensant mieux doit aussi s'appliquer à la filière des produits de santé. C'est tout le sens de cette politique du médicament que je souhaite développer dans les années qui viennent. Si le développement du générique constitue l'axe principal de ce plan, d'autres mesures y contribueront:
- d'une part une meilleure adaptation des conditionnements aux prescriptions, par exemple en permettant la délivrance de boite de 3 mois aux malades chroniques ;
- d'autre part une plus grande maîtrise du processus de rétrocession des médicaments de l'hôpital vers la ville qui est à l'origine d'une forte progression des dépenses ;
- enfin, un relèvement mesuré des taxes applicables aux industries du médicament, au travers de la reconduction de la taxe sur le chiffre d'affaires des laboratoires pharmaceutiques instaurée par la loi de financement pour 2004 et l'augmentation de la taxe sur les dépenses de promotion ; je rappelle que nous consommons en moyenne une boite de médicament par personne et par semaine, soit 1,5 fois plus que les Allemands et les Espagnols.
La promotion contribue indéniablement à cette situation même si ca n'est pas la seule explication. Le projet de loi prévoit aussi la mise en place d'une charte de qualité de la visite médicale entre les industriels et le comité économique des produits de santé. Cela devra aussi permettre de favoriser une diffusion de l'information d'une meilleure qualité sur le médicament.
Parce qu'il contribue à près de la moitié des dépenses d'assurance maladie, il était légitime que la modernisation de la gestion de l'hôpital participe à la réforme de l'assurance maladie. C'est principalement grâce à une rationalisation de la politique d'achat que l'hôpital contribuera à ces 10 milliards d'euros, à hauteur d'1,6 milliards. La mission d'étude et d'analyse hospitalière a souligné la très grande hétérogénéité des coûts d'achats à l'hôpital, qui vont pour certains produits de 1 à 5. Ce n'est évidemment pas satisfaisant et il y a là des marges de progrès très importantes.
Le renforcement du contrôle des arrêts de travail au travers de procédures plus simples et plus efficaces, dans le respect des droits des professionnels comme des patients devrait permettre d'économiser 800 millions d'euros dans ce domaine d'ici à 2007. Je l'ai dit à plusieurs reprises, il ne s'agit pas de culpabiliser les uns ou les autres. Il s'agit simplement de s'assurer de la réalité de la justification médicale de l'arrêt de travail et de décourager les abus
Nous savons qu'il y a des abus : de certaines entreprises, de certains médecins, de certains patients. Ils sont, toujours, très minoritaires mais pour préserver ce système des arrêts de travail qui est historiquement l'un des fondements de notre système d'assurance maladie, il faut veiller à ce qu'il ne soit pas détourné. Encore une fois, rien ne peut raisonnablement justifier qu'on consomme trois fois plus d'arrêts de travail dans un département du sud est qu'en Ile de France.
Cela n'a, à l'évidence, rien à voir avec un quelconque besoin de santé de la population. L'économie des frais financiers liés au transfert de la dette à la CADES et la modernisation de la gestion du réseau des caisses d'assurance maladie contribueront également à ce plan, respectivement pour 1,1 et 0,2 milliards d'euros.
Pour compléter ces 10 milliards d'euros d'économies ou de moindres dépenses, le plan du Gouvernement prévoit 5 milliards d'euros qui se déclinent de la façon suivante :
- 1 Milliards d'euros au titre de la participation des usagers, au travers de la contribution de 1 euro et de l'augmentation du forfait journalier
- 4 milliards de recettes supplémentaires via un ensemble de mesures dont je souhaiterais souligner deux éléments qui me semblent majeurs
D'une part la contribution d'un milliard de l'Etat au travers d'une fraction plus importante des droits tabacs donnée à l'assurance maladie. Je crois que cette commission des comptes de la sécurité sociale a souvent souligné la complexité des liens financiers entre l'Etat et la sécurité sociale et la nécessité de clarifier les choses.
Nous avons connu entre 1997 et 2002, la multiplication des fonds et des tuyauteries les plus baroques pour financer différentes politiques et notamment les 35h. Depuis deux ans, nous remettons de l'ordre en remboursant la dette du FOREC, en supprimant ce fonds pour rétablir la réalité des flux financiers liés aux exonérations de cotisation sociales.
Avec la réforme de l'assurance maladie, nous faisons un pas de plus en opérant ce transfert d'un milliards d'euros des droits tabacs. J'ai le sentiment que ce transfert de l'Etat est un geste très fort, dans un contexte financier difficile pour les finances de l'Etat, et une réponse très concrète au débat sur les charges indues. Je crois, au surplus, qu'une telle affectation des droits tabacs à l'assurance maladie repose sur une logique forte de santé publique
Deuxième point que je souhaitais souligner, c'est le souci de justice et d'équité qui a animé le Gouvernement dans le choix de ces mesures de recettes. C'est un effort partagé, des entreprises, des actifs, des retraités, à chaque fois dans des limites qui me semblent acceptables. L'augmentation de la CSG sur les retraités ne s'applique qu'aux retraités imposables. Elle est limitée puisqu'elle se monte à 0,4 point, ce qui laisse un écart important, 0,9 points, avec la CSG payée par les actifs. Alors qu'une politique très ambitieuse de prise en charge de la dépendance se met en place, il nous a semblé cohérent que les retraités contribuent à l'effort de redressement de l'assurance maladie.
Ambition, cohérence, équité, voilà, je crois, les mots qui définissent le mieux notre projet de réforme de l'assurance maladie. En deux ans, ce Gouvernement aura engagé la consolidation de deux piliers majeurs de notre pacte républicain que sont nos systèmes de retraite et d'assurance maladie. C'est tout à fait considérable.


(Source http://www.sante.gouv.fr, le 22 juin 2004)