Déclaration de M. Marc-Philippe Daubresse, secrétaire d'état au logement, sur les mesures en faveur de la lutte contre la crise du logement, au travers des dispositions du plan de cohésion sociale, de la réforme de l'accession à la propriété et du projet de loi 'Habitat pour tous', Nice le 21 octobre 2004.

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Circonstance : Congrès de la Confédération Nationale des Administrateurs de Biens (CNAB) à Nice le 21 octobre 2004

Texte intégral

Monsieur le président,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux d'être présent au congrès des administrateurs de biens, ici à Nice. Ma présence traduit l'intérêt que le gouvernement porte à tous les secteurs du logement et aux professions qui agissent dans ces secteurs :
- le parc locatif privé, ses cinq millions et demi de logements, et un rôle social indéniable,
- le parc public, avec un peu plus de quatre millions de logements
- l'accession à la propriété - la France a treize millions de propriétaires occupants.
Trois secteurs quantitativement importants, qui sont également concernés par la crise du logement et qui partagent avec nous le diagnostic sur la situation. Une crise paradoxale car on n'a jamais construit autant de logements : 340 000 ces douze derniers mois. Une crise :
- qui résulte de dix années d'insuffisance de construction,
- qui se traduit par une spirale à la hausse, fige la mobilité,
- qui concerne l'ensemble des secteurs, car l'accès à un logement locatif est problématique dans le parc public et dans le parc privé ;
les ménages arrivent de plus en plus difficilement à accéder à la propriété, qui touche d'abord les plus modestes d'entre nous.
L'objectif du gouvernement est de résoudre cette crise, et c'est pour cela qu'il a nommé un Secrétaire d'Etat au logement, placé auprès du Ministre de la cohésion sociale.
J'entends à cette fin agir sur tous les leviers. Deux des volets de notre action sont prêts et seront les prochains jours examinés par le Parlement : le plan de cohésion sociale et la réforme de l'accession à la propriété ; le troisième, le projet de loi Habitat pour tous, va être mis en chantier : je ne pense donc vraiment pas que l'on puisse ne parler que d'effets d'annonce en matière de logement. Je vous l'avais en effet indiqué au mois de juin, Monsieur le Président, le secteur privé n'est pas et ne sera pas oublié. Et il ne vous a probablement pas échappé en particulier que le plan de cohésion sociale concernait très largement le parc privé.
Premier volet de notre action : le plan de cohésion sociale
La crise du logement se joue à quitte ou double et, nous, nous avons choisi de doubler : et pas seulement le logement social. Vos craintes devraient donc être dissipées : le logement social est un préoccupation légitime du gouvernement - car il y a une insuffisance évident de logements sociaux - mais ce n'est pas la seule.
Donc, si nous doublons la production dans le parc public, nous doublons aussi :
o le nombre de logements privés remis sur le marché (de 20 à 40 000 par an). L'aide de l'ANAH (Agence nationale de l'amélioration de l'habitat) sera majorée pour ces logements et ils seront exonérés de la CRL pendant trois ans.
o le nombre de logements privés à loyers conventionnés, et ainsi accessibles aux familles modestes.
Les moyens nécessaires sont mis en place : dans le budget 2005 nous aurons 70 M Euros d'autorisations de programme pour le parc privé (80 pour la parc public) et en 2006, 140 M Euros (120 pour le parc public). Il y a donc plus de moyens pour le parc privé que pour le parc public.
Les propriétaires privés, ils me l'ont dit, sont prêts à travailler dans ce sens, et je ne doute pas que les professionnels de ce secteur les conseillent et les aident.
Sans doute faut-il répondre à la crainte d'impayés et mieux sécuriser les risques des bailleurs.
A cette fin j'ai lancé au sein du Conseil National de l'Habitat, que je présidais alors, une réflexion sur ce thème. J'attends ses propositions pour examiner avec tous les partenaires ce qui peut être fait dans ce domaine.
Vous avez sur ce plan évoqué le problème des squats. Je partage votre sentiment : les squats doivent être combattus. Et je vous ferai remarquer que la loi sur la sécurité que vous avez citée n'y a pas renoncé : elle a pénalisé les organisateurs de squats. Dans la pratique, les décisions de justice prononcent l'expulsion et seuls les risques de troubles à l'ordre public peuvent légitimer le refus du concours à la force publique, une décision de justice l'a rappelé il y a quelque temps.
Je veux aussi rappeler qu'il ne saurait être question de mettre fin aux expulsions dans le parc privé. Les mesures de prévention des expulsions qui ont été annoncées ne concernent que le parc public. Elle ne peuvent être appliquées au parc privé, et ceci au nom du respect du droit de propriété. L'expulsion doit rester un recours ultime, mais on ne peut pas exclure d'avoir à y recourir.
Second volet : l'accession à la propriété
L'accession est un élément essentiel de la politique du logement. Accéder à la propriété est une aspiration forte des français. En même temps l'accession favorise les parcours résidentiels et libère des logements locatifs sociaux qui sont en nombre insuffisants.
Les Assises du logement ont mis en évidence que le prêt à taux zéro, dispositif lisible et efficace au départ, avait perdu de sa force au fil du temps, qu'il ne concernait pratiquement plus l'acquisition dans l'ancien, que les primo accédants réalisaient plus difficilement leur projet.
Nous mettons donc en place un " PTZ plus " qui améliore sensiblement le dispositif existant :
- il aura la même " carrosserie " : un prêt qui puisse toujours être utilisé comme quasi apport personnel par les accédants modestes et qui abaisse sensiblement leur taux d'effort ;
- le moteur en sera plus puissant : le nombre de primo accédants ainsi aidés passera de 100 000 à plus de 200 000 ;
- pour permettre aux établissements de crédit de faire ce prêt, l'aide doit passer par ces établissements et sera utilisé à cette fin un autre carburant : non plus un carburant budgétaire, mais un crédit d'impôt sur les sociétés.
L'aide apportée sera supérieure pour les ménages ayant les revenus les plus modestes et pour les familles avec au moins deux enfants, car le montant de l'aide progressera fortement avec la taille de la famille
Enfin ce nouveau PTZ sera ouvert à l'habitat ancien, favorisant ainsi la mobilité dans le parc, ce qui devrait vous intéresser.
Troisième volet : la loi " Habitat pour tous "
C'est là que les sujets de la gestion du parc privé pourront être traités, à côté d'autres dispositions : celles qui étaient prévues dans le projet de loi propriété pour tous, et celles que je prévois sur l'urbanisme et le foncier afin de favoriser l'ouverture de terrains à la construction de logements.
Notre objectif est de mettre au point le projet de loi d'ici la fin de l'année, afin qu'il soit examiné par le Parlement au cours du premier semestre 2005.
Je suis prêt à examiner notamment avec vous dans ce cadre, comment on peut mettre fin aux dispositions de la loi de 1948, statut qui est devenu obsolète et ne permet pas aux propriétaires de rénover leurs logements, et le faire sans pénaliser les ménages modestes ou âgés, par l'intermédiaire de mesures transitoires comme vous le proposez. Concernant les charges locatives, j'ai demandé à la présidente de la Commission Nationale de Concertation de consulter l'ensemble des partenaires et je note qu'elle l'a fait auprès de vous. Je ne préjugerai pas aujourd'hui du rapport qu'elle doit me remettre à la fin de ce mois. Nous pourrons alors valablement débattre des dispositions à prendre.
Nous pourrons également voir si des dispositions fiscales doivent être prises. Vous avez à cet égard évoqué la question d'un statut du bailleur privé pérenne, et souhaité la neutralité de la fiscalité par rapport à d'autres formes de placement. Il convient de souligner sur ces points que le dispositif fiscal " Robien " a permis d'avancer dans ce sens, et que nous le complétons dans le cadre de la loi Cohésion sociale par un nouveau dispositif d'incitation à l'investissement locatif très social, qui combine les dispositions du " Robien " avec une déduction forfaitaire de 40%.
J'en viens maintenant aux réformes qui ont été initiées par le précédent gouvernement et que nous veillons à mettre en oeuvre. La réforme de la loi Hoguet en premier lieu. L'ordonnance modifiant cette loi a été publiée le 1er juillet dernier. Son décret d'application a fait l'objet de discussions avec vous comme avec les autres partenaires concernés. Il en est au stade de la mise au point et sera publiée prochainement.
Les règles comptables spécifiques aux copropriétés ensuite. Vous avez rappelé que le décret qui doit fixer ces règles comptables était attendu. Vous savez que s'il n'a pas encore été publié, c'est que le gouvernement a souhaité qu'un groupe d'experts, réunissant professionnels de la gestion immobilière et représentants des copropriétés, fasse de nouvelles propositions, après un premier projet de décret qui appelait des critiques.
Je suis en mesure de vous annoncer sur ce point aujourd'hui :
- que la date d'application des nouvelles dispositions comptables, issues de la loi SRU et de son décret d'application, va être repoussée au 1er janvier 2006. Un amendement au projet de loi sur la cohésion sociale sera proposé au Parlement à cette fin. Ce report vous donnera le temps nécessaire à la mise en place des nouveaux outils ;
- que le contenu du décret vient d'être précisé sur les points qui restaient à régler et que ce décret va donc pouvoir être rapidement publié. Il suivra pour une bonne part les propositions du groupe d'experts. En particulier, le décret n'imposera pas la tenue de quatre sous-comptes pour chaque copropriétaire.
En ce qui concerne la réglementation de l'affectation des locaux, je vous rappelle que la réforme nécessite un support législatif : le projet de loi sur la simplification administrative, dit " PLH 2 ", actuellement en cours d'examen au Parlement, va nous le donner en nous permettant de prendre une ordonnance sur ce sujet, ce qui devra être fait dans les six mois qui vont suivre la publication de la loi. Le groupe de concertation va donc être de nouveau réuni début novembre, afin de faire le point sur la réforme prévue. Il n'y a donc pas là suspension du projet, mais simplement les délais nécessaires au respect de nos institutions.
Vous m'avez enfin interrogé sur le projet de réforme des baux commerciaux, sur la quelle un rapport a été rendu au Garde des Sceaux avant l'été dernier. Le gouvernement procède en ce moment aux consultations qui paraissent nécessaires, avant que ne soit arrêté un texte qui doit traiter d'un sujet complexe.
Pour conclure, nous travaillons donc dores et déjà dans le domaine du parc privé : les textes réglementaires attendus sont prêts ; nous engageons la préparation de la loi Habitat pour tous et nous sommes prêts à nous concerter avec vous à cet effet.
Les objectifs qui guident notre action sont de résoudre la grave crise de l'offre que nous connaissons, de favoriser l'égalité des chances et l'ascension sociale par le logement. Les trois volets de notre politique traduisent ces objectifs.
(Source http://www.logement.gouv.fr, le 26 octobre 2004)