Interview de M. Dominique Perben, ministre de la justice, RMC le 9 novembre 2004, sur l'éventuelle exprimentation d'un traitement chimique pour les délinquants sexuels et sur leur statut à leur libération, sur l'exécution des peines, l'incarcération des mineurs, la responsabilité des magistrats et la situation en Corse.

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Texte intégral

J.-J. Bourdin - D. Perben, la question que vous avez envie de poser aux Français, aux auditeurs de RMC ?
R - J'ai envie de leur poser une question que je me pose : faut-il, dans les affaires judiciaires compliquées, désigner deux juges d'instruction au lieu d'un ? Je me pose cette question après Outreau. Et au fond, je la leur pose pour, s'ils étaient garde des Sceaux, qu'est-ce qu'ils feraient ?
Q - Réponse des auditeurs de RMC tout à l'heure vers 9 heures moins 2. D. Perben, un chiffre vous a, vous aussi, interpellé : 22 % des détenus en France sont en prison pour des infractions sexuelles ! Les trois-quarts pour des viols sur mineur. C'est énorme. En 1980, par exemple, ces condamnés étaient 1100. 5 % seulement de la population carcérale. En 2004, leur nombre atteint 8200. Il fallait donc trouver des solutions, et vous allez mettre en place, un nouveau traitement, chimique - c'est cela, un traitement chimique ?
R - Oui, c'est un traitement, c'est se soigner, c'est-à-dire que, face à cette situation on ne peut pas rester comme cela. On ne peut pas laisser augmenter ce type de délinquance quand on pense à ces pauvres victimes, à ces gamins qui ensuite ont tant de mal à se reconstruire dans la vie après le choc psychologique qu'a pu être un viol ou même, sans aller jusqu'au viol, certaines violences sexuelles. Et donc, je crois qu'il faut tout faire pour l'empêcher cela. Alors, bien sûr, il y a les sanctions, bien sûr, il y la prison, bien sûr, il y a les jugements. Mais il me semble normal aussi que l'on cherche d'autres solutions. Et c'est la raison pour laquelle je m'intéresse aux recherches du professeur Stoléru, qui propose un traitement chimique, qui n'est pas exclusif du traitement psychothérapique, c'est-à-dire que, par ailleurs on peut bien travailler avec un psychiatre, mais un traitement chimique, à condition, bien sûr, que l'on puisse aller un peu plus loin dans la recherche. C'est la raison pour laquelle le ministère de la Justice, dont ce n'est franchement pas la vocation, va apporter une aide financière à l'expérimentation de quelques molécules qui semblent efficaces pour empêcher quelqu'un d'aller vers la pédophilie.
Q - Vous travaillez en relation étroite évidemment avec le ministère de la Santé. Début 2005, un test sera proposé, pendant 24 mois, à 48 volontaires. Ce sont d'anciens détenus ?
R - Ce seront d'anciens détenus, d'anciens condamnés, qui ressentent bien la difficulté à ne pas récidiver, à ne pas recommencer, et qui donc seront volontaires pour suivre ce traitement, prendre ce traitement chimique...

Q - Ils vont prendre deux médicaments...
R - ..."deux médicaments", et en même temps, ils seront suivis par des médecins psychiatres pour connaître l'évolution du traitement.
Q - Mais quelles sont les conséquences de la prise de ces médicaments ? On diminue la sécrétion de testostérone, c'est cela ?
R - Ecoutez, oui, je ne suis pas médecin, très sincèrement...
Q - C'est l'hormone qui agit sur l'érection et le désir...
R - Voilà. C'est-à-dire que ces personnes qui sont ce que l'on appelle "des hypersexuelles", sont calmées, voilà. Et pourront tenir face à pulsions, dont ils se disent souvent eux-mêmes complètement incapables de résister, auxquelles ils se disent incapables de résister. Avec ce type de traitement, c'est ce dont il faudra s'assurer. C'est une première en France. Et je crois qu'il faut aller vers ce type d'accompagnement. En effet, que se passe-t-il ? Quand quelqu'un est condamné, il fait sa peine de prison, mais s'il ressort et qu'il présente la même dangerosité qu'avant, on n'a rien réglé au fond par rapport aux victimes. Donc, bien sûr, il faut améliorer le suivi psychologique, psychiatrique, mais si nous pouvons disposer, si nous pouvons avoir à notre disposition des médicaments comme ceux-là, vous imaginez ce que cela signifie, à la fois en termes de protection des victimes et puis aussi, en termes de disparition de ce risque !
Q - Mais qui va contrôler que ces anciens détenus, libérés, prennent bien leur médicament ?
R - Bien entendu, cela se fait comme dans tous les tests préalables à la mise sur le marché des médicaments. Donc, le professeur Stoléru, qui travaille à l'INSERM, va appliquer les règles habituelles en matière de recherche scientifique et médicale, et chacun de ces hommes sera, bien entendu, suivi très précisément par quelqu'un qui vérifiera la prise de médicament et qui suivra le comportement de ces personnes.
Q - Et ces personnes prendront ces médicaments à vie ?
R - Alors, là encore, très probablement. Enfin, il faut déjà voir pendant 24 mois l'efficacité de ces médicaments. Et je pense que ces médicaments, si l'expérience est concluante, cela devrait aussi stimuler la recherche et peut-être arriver à des médicaments encore plus pointus et plus efficaces.
Q - On ne parle pas de "castration chimique", parce que cela n'a pas de caractère irréversible ?
R - Voilà. "La castration", cela veut dire, on voit bien l'image : cela veut dire définitivement quelque chose qui disparaît. Alors que là, il s'agit d'un traitement réversible.
Q - Cela existe-t-il dans d'autres pays ?
R - Ca existe sous des formes diverses, en particulier aux Etats-Unis. Mais aux Etats-Unis, on va parfois jusqu'à "la castration chimique".
Q - J. Chirac était à Nîmes hier. Il a parlé évidemment du suivi des auteurs de crimes sexuels, et il a parlé de la création d'un nouveau type d'établissement, à mi-chemin entre la prison et l'hôpital psychiatrique. Avez-vous des précisions ?
R - Oui, nous réfléchissons actuellement à la manière de faire face à quelque chose qui devient intolérable, compte tenu de ce que nous savons maintenant, que l'on ne savait peut-être pas il y a 20 ou 30 ans. Certains criminels dangereux, même après 20 ou 30 ans de prison, s'ils sont encore jeunes, peuvent rester tout aussi dangereux qu'au moment du crime qu'ils ont commis. Et là, cela nous pose une question. Car la question n'est plus seulement : à quelle peine doivent-ils être condamnés pour payer leur dette vis-à-vis de la société ? Mais, comment faire en sorte qu'ils ne récidivent pas ? Et vous imaginez bien que je pense en particulier, par exemple, à un homme comme Bodin, qui a tué trois petites filles, en Alsace, il y a, semble-t-il, enfin...deux sans doute, trois peut-être. Et là, maintenant que nous savons qu'un certain nombre d'hommes restent dangereux, je dirais, quelle soit par ailleurs la sanction qu'ils ont subie, nous ne pouvons pas ne pas nous poser cette question : ne faut-il pas créer un statut juridique nouveau qui ne serait pas la prison, qui ne serait sans doute pas l'hôpital, mais qui serait un endroit où on pourrait placer ce type de personnes, pour les empêcher de nuire ? Alors qu'a-t-on fait jusqu'ici ? J'ai demandé, avec Douste-Blazy, à M. Burgelin, l'ancien procureur général près la Cour de cassation, de travailler sur ce sujet, avec un certain nombre d'experts, ce qu'il est en train de faire. Il devrait nous proposer d'ici à la fin de l'année, des dispositifs. Tous les grands pays d'aujourd'hui, qui sont confrontés à cette réalité absolument terrifiante, réfléchissent à des solutions. Car à partir du moment où l'on sait que l'on risque de libérer quelqu'un de vraiment dangereux, nous n'avons pas le droit, je crois, vis-à-vis de nos concitoyens, de continuer à les libérer dans ces conditions.
Q - Donc placer ces anciens détenus, libérés, sous surveillance, dans des endroits où ils seraient tenus de revenir régulièrement ?
R - Oui, voire même dans certains cas, dans des endroits où ils seraient privés de liberté totale.
Q - Que disait J. Chirac hier à Nîmes ? Je cite : "aucun acte de délinquance ne doit être laissée sans réponse ; il faut empêcher la récidive des crimes les plus odieux. De tous les crimes. Requérir systématiquement la prison ferme contre les récidivistes condamnés une première fois avec sursis". Cela veut dire que si on est condamné une première fois avec sursis, et puis si on est condamné une deuxième fois, on ne risque toujours pas la prison ferme ?
R - Dans les faits, jusqu'à aujourd'hui, c'est souvent le cas. Il y a une répétition de sursis un peu inefficaces. Donc, dans le cadre des discussions que nous avons au sein du Gouvernement sur la prévention de la récidive, nous réfléchissons effectivement à ce qu'a évoqué le Président de la République, hier soir, c'est-à-dire de créer une gradation logique, normale, entre le premier fait répréhensible, le second, le troisième et le quatrième, avoir une échelle de peines qui débouche, s'il y a récidive, en particulier s'il y a deux ou trois récidives, sur la prison ferme, quelle que soit par ailleurs la nature du délit.
Q - Ce qui veut dire rendre la justice plus sévère ?
R - Plus sévère, oui, et puis l'autre idée que le président de la République a exprimée hier à Nîmes, qui est très importante, c'est d'accélérer l'exécution de la peine, c'est-à-dire faire en sorte qu'on n'attende pas six mois pour faire exécuter un jugement, qu'on l'exécute beaucoup plus vite, ce à quoi nous travaillons, là, maintenant depuis deux mois, et on a des résultats intéressants, de façon à ce que la peine, même si elle est modeste, soit dissuasive, ait un effet pédagogique. Aller plus vite et puis créer cette gradation de peine.
Q - Vous allez remplir les prisons, qui sont déjà pleines.
R - Elles sont déjà pleines... Il faut aussi savoir à quoi sert la justice. Elle sert à assurer la sécurité de nos concitoyens, elle sert à réprimer les délits, elle sert à faire en sorte que dans une société, quand quelqu'un se comporte mal, il y a une sanction décidée par cette société, ce qui n'empêche pas d'améliorer le fonctionnement des prisons, et d'améliorer la préparation à la sortie de nos établissements pénitentiaires, c'est aussi un chantier qui est ouvert aujourd'hui.
Q - Il y a de plus en plus de mineurs en prison.
R - Non, de moins en moins.
Q - Ah bon ! C'est bon.
R - C'est un point très important. La politique que j'ai menée depuis deux ans et demi a consisté justement à développer d'autres peines que la seule prison pour les mineurs. J'ai également créé, à la demande du président de la République, les centres éducatifs fermés, et le résultat, c'est qu'on est passé, en termes de jeunes en prison, de mineurs en prison, de 925 à moins de 600 aujourd'hui. Ce qui prouve que quand on fait des efforts dans une direction, on y arrive, à condition d'avoir la volonté.
Q - La scolarité des mineurs en prison.
R - C'est un point auquel je crois beaucoup. Je serai, dans quelques minutes, à la prison de Villepinte, justement au quartier des mineurs, avec A. Jardin qui m'a fait soutenir une initiative que je trouve merveilleuse, qui est l'opération des Mille mots. De quoi il s'agit ? Quand on connaît soi-même des jeunes délinquants, on sait que bien souvent, ils ont cette espèce d'enfermement psychologique qui fait qu'ils ne s'expriment qu'avec la violence, qu'avec leurs poings, qu'avec une agressivité, des mots durs. Et ils ont deux cents - trois cents mots de vocabulaire, en réalité. Et ils s'expriment par la force. Mille mots, cela veut dire essayons de donner à des jeunes, par la lecture, par la découverte de la lecture, mille mots de vocabulaire, et on s'aperçoit, à ce moment, qu'ils vont exprimer autre chose que leur violence et leur refus de la société. C'est un projet qui m'avait complètement fasciné, quand A. Jardin, il y a deux ans, est venu m'en parler. Eh bien, cela marche, et je vais à Villepinte tout à l'heure pour voir des éducateurs qui font cela depuis maintenant dix-huit mois, avec des jeunes mineurs. Le but c'est quoi ? C'est qu'un jeune, quand il vient en prison, il n'en sorte pas plus mauvais, qu'il n'en sorte pas en ayant appris des choses qu'il n'aurait pas dû en prison, mais qu'au contraire, il sorte de prison en étant mieux que quand il y est entré.
Q - Les OGM. Le tribunal de Toulouse a reconnu le caractère collectif de l'action - collectif, j'insiste - de l'action des faucheurs. Le procureur a fait appel. C'est un camouflet pour vous, c'est ce que dit J. Bové.
R - Oh ! J. Bové, il dit beaucoup de choses. Comme vous le savez, et vous venez de le rappeler, nous sommes dans une procédure, le procès est en cours. Le parquet a fait appel. En tant que ministre, je ne peux pas intervenir dans une procédure qui est en cours. Je veux simplement dire que l'appel du parquet permettra à la cour, je pense, dans quelques jours, de se prononcer sur la méthode dans laquelle est engagée...
Q - Cela pourrait faire jurisprudence. Le tribunal de Toulouse a peut-être reconnu le droit à la désobéissance civile ?
R - Attendons la décision de la cour d'appel.
[...]
Q - [La "promotion" du juge d'Outreau, le juge Burgot, évoquée par l'auditeur] me conduit quand même à vous poser une question : comment se fait-il qu'en France, les magistrats ne soient jamais sanctionnés, ou très rarement ?
R - Deux ou trois remarques : c'est un sujet très compliqué que celui de la responsabilité personnel du magistrat. Parce qu'il ne faut pas non plus que le magistrat soit susceptible ... qu'on puisse faire pression sur lui en le menaçant. Il faut faire attention à ce que le juge en particulier, c'est-à-dire celui qui juge, puisse le faire en toute liberté. Comment se prémunir contre une erreur de jugement ? D'abord, il y a l'appel. C'est la règle pour toute affaire importante. Deuxièmement, il y a un pouvoir disciplinaire, qui était jusqu'ici réservé au ministre en tant que déclenchement du pouvoir disciplinaire. Aujourd'hui, depuis 2001, les chefs de cour, c'est-à-dire les premiers présidents de cour d'appel, les procureurs généraux peuvent déclencher le processus. C'est vrai, sans doute pas suffisamment souvent, et certaines affaires récentes ont montré qu'on avait un peu tardé à déclencher ce processus disciplinaire. J'ajoute enfin que l'Etat, par ailleurs, mais ce n'est plus le magistrat lui-même, peut être déclaré responsable de certains errements de la justice ou de certaines décisions inacceptables.
Q - La Corse, j'avais envie d'en parler, parce qu'il y a des attentats, ces derniers temps, qui se sont succédés. Le dernier en date, l'attentat qui a visé la maison d'E. Zuccarelli. Le Gouvernement n'a pas beaucoup réagi à cet acte inexcusable. Les attentats se sont multipliés aussi contre les gendarmeries en Corse, et là encore, on n'arrête jamais les coupables.
R - Si, si. Moi j'en ai. J'ai cent personnes qui sont dans des procédures, en prison, originaires de l'île, et dans des procédures pour terrorisme. Donc, on en arrête puisqu'ils sont chez moi. Moi, j'ai en tout cas ce moyen statistique de le savoir. Le Gouvernement, s'agissant des questions corses, est tout à fait déterminé à restaurer l'Etat de droit. Et donc, avec D. de Villepin, nous menons, pour ce qui nous concerne, les affaires de police et gendarmerie et les affaires de justice, une politique de fermeté, c'est très clair. Par ailleurs, comme l'a rappelé le Premier ministre, il y a deux jours, il y a tout un effort de développement économique, et donc, faire en sorte que cette île, que ces deux départements, se développent mieux pour éviter de s'enfermer dans cette impasse de la violence. Je crois qu'il nous faut de la ténacité, aussi de la durée pour réussir. Et puis, il faut que les services publics fonctionnent bien. Je serai le 22 novembre prochain en Corse pour rencontrer les magistrats, pour visiter les établissements dépendant du ministère de la Justice, et pour passer ce message de fermeté en direction de celles et ceux qui, là-bas, représentent la justice de notre pays.
Q - Mais dans tous les cas, les gendarmes attendent, à propos des derniers attentats, de savoir qui a posé les bombes, et on ne le sait toujours pas.
R - Bien sûr, leurs collègues gendarmes et policiers mènent les enquêtes. Je peux vous dire que nous sommes décidés, D. de Villepin et moi, à restaurer l'Etat de droit dans cette région française.
Q - C'est D. de Villepin qui a reçu un petit message appuyé du président de la république, hier.
R - Ah oui !
Q - C'était une pierre dans le jardin de N. Sarkozy ?
R - Je ne sais pas, moi. Croyez-vous qu'il faut toujours sonder les reins et les curs ?
Q - Michèle, auditrice : Pourquoi il n'y a pas de cumul de peines en France par rapport à des personnes qui commettent des crimes successifs ?
R - Il peut y avoir cumul de peines, il peut y avoir conjonction des peines, c'est le tribunal qui décide de cela. Alors, effectivement, on n'arrive pas au système américain qui, entre nous, parfois devient grotesque. On n'a pas envie d'avoir quelqu'un à cent quarante ans de prison devant lui. Mais sans en arriver là, il peut y avoir des cumuls de peines, le tribunal peut décider de confondre les peines, c'est-à-dire de ne pas les additionner.
Q - Jacques, auditeur, avocat à Paris : Je suis l'avocat d'une petite fille qui a été violée quand elle avait six ans. Le criminel a reconnu les faits... La cour d'assises est saisie. Mais entre le moment où elle est saisie et le moment où il sera jugé, il va s'écouler un délai de trois années. [Faut-il mettre en cause la fameuse] lenteur de la justice ? [Quant au] manque de moyens, en tous cas c'est certain. Quand la personne qui a commis les faits va passer devant la justice, ce sera une autre personne... On ne pourra plus la sanctionner en fonction de la réalité des faits qu'il a commis. De la même façon, pour la victime, c'est un déni de justice car pour elle, la sanction qui sera prononcée tiendra compte de l'évolution postérieure de cette personne, mais pas de la réalité des faits qu'il a commis. Est-ce qu'on ne peut accélérer le traitement ?
R - Il faut accélérer le déroulement de la justice. C'est à cela que je m'emploie depuis deux ans et demi, à la demande du président de la République. Je le fais de quelle façon ? D'une part, en augmentant les moyens de la justice, c'est-à-dire le nombre de magistrats, le nombre de greffiers, les crédits de fonctionnement, etc. Deuxièmement, en simplifiant les procédures, pour faire en sorte que nous ayons le temps de traiter convenablement les affaires les plus compliquées, mais de le faire plus vite qu'aujourd'hui, et en accélérant les processus judiciaires pour les affaires simples. Lorsque j'ai institué le plaider coupable, ou développé la composition pénale - puisque vous êtes avocat, vous savez bien de quoi je veux parler - pour les affaires simples, c'est parce que, si nous voulons traiter l'ensemble des affaires pénales, et c'est une obligation, le président de la république l'a rappelé à juste titre, hier, mais il ne faut qu'on soit obligé pour chacune de mettre en route tout le processus judiciaire le plus sophistiqué. Il faut avoir les procédures simples - c'est ce que je développe, avec le plaider coupable, avec le développement de la composition pénale, avec la comparution immédiate -, et pour qu'on ait, à ce moment-là, davantage de moyens de traiter aussi plus vite les affaires compliquées, c'est-à-dire les affaires criminelles, comme le dit notre interlocuteur. Mais vous avez raison de dire que trois ans pour une affaire de ce type, où les faits sont reconnus, ce n'est pas normal, et nous devons nous donner les moyens et avoir la volonté d'aller plus vite. Je crois que c'est aussi une affaire de culture judiciaire en France, de la part bien sûr des magistrats, mais aussi des avocats. Il y a une espèce de goût pour une certaine lenteur, c'est un peu une habitude, qui est d'ailleurs très souvent critiquée à Strasbourg, à la Cour européenne des droits de l'homme.

Q - Votre chauffeur, il conduit toujours ? A-t-il été sanctionné ?
R - Il conduit toujours, il n'a pas été sanctionné, parce que cette affaire est étonnante - il ne faut pas en faire un fromage - mais il n'y a eu ni flash, ni PV, ni constat. Simplement, il y a eu un gendarme qui a bavardé avec un journaliste. Qu'est-ce qu'il a vu dans ses jumelles, qu'est-ce qu'il n'a pas vu ? Je n'en sais rien. En tous cas, il n'a fait la démonstration de rien du tout. Comme quoi, une petite injustice, cela peut arriver, même à un ministre.
Q - La réponse des Français à la question de D. Perben : Dans les affaires graves et complexes, faut-il nommer plusieurs juges d'instruction ?
Marc, de Gironde, nous dit : "Pourquoi pas. De toute façon, nous n'avons jamais assez de moyens déployés pour la justice. Cela pourrait permettre de faire mener des enquêtes par deux personnes différentes, et de recouper ensuite les informations".
Luc, de l'Hérault : "j'y suis favorable. Il faut savoir que la justice est trop lente. Bien trop, ce n'est pas nouveau, mais si on met deux juges ou plusieurs, cela permettrait de faire le travail beaucoup plus rapidement, et d'accélérer le cours de la justice."
Evelyne, de Seine Saint-Denis, elle nous dit : "est-ce que vous pensez que cela va vraiment améliorer les choses ? Il faut plus de moyens pour tout le monde, pas seulement des juges sur des affaires complexes. Il faut que les gendarmes et les policiers aient plus de temps pour s'occuper des affaires qui pourrissent notre quotidien".
J.-J. Bourdin : Voilà la réponse.
R - Beaucoup de bon sens.
(Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 9 novembre 2004)