Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
Michel Audiard a écrit que les Français se divisaient en deux catégories : ceux qui attendent le téléphone, et ceux qui attendent la tonalité.
Aujourd'hui, il y a ceux qui attendent le mobile et ceux qui attendent la troisième génération.
Il y a ceux qui attendent l'Internet, ceux qui attendent le haut débit, et même ceux qui attendent le très haut débit.
A défaut de tonalité, les Français ont eu droit en vingt ans à un big bang : Par un équilibre complexe de libéralisation, de privatisation, de globalisation, de numérisation, d'alliances, de nouveaux services, un nouvel univers des télécommunications est apparu.
Ce big bang résulte de trois mouvements de fonds :
1. D'abord, l'économie du secteur s'est métamorphosée : les évolutions technologiques ont bouleversé les conditions de production et engendré une multiplication des services.
2. Ensuite, la numérisation a favorisé une interpénétration croissante des technologies et des marchés, entre les télécommunications, l'informatique et l'audiovisuel.
3. Enfin, les activités de production et d'échange s'appuient chaque jour davantage sur les systèmes et les services de communication, et les "utilisateurs" disposent d'une capacité à influencer l'offre, voire à l'organiser.
D'une industrie mono-produit, dominée par le modèle du monopole géographique, nous sommes entrés dans un univers peuplé d'une multitude d'intervenants, desservant des marchés segmentés et hétérogènes.
Dans cet univers incertain, ce forum européen des télécommunications répond à un besoin évident de repère et d'éclairage.
Après trois années de déclin, l'année 2003 a confirmé les prémices d'une reprise. La progression du nombre de mobiles dans le monde a franchi la barre de 1,2 milliards, passant nettement devant le nombre de lignes fixes. Le renouveau du fixe est déjà commencé grâce notamment à la voix sur Internet côté entreprises et à l'ADSL côté particuliers. L'engouement pour les SMS et les services multimédia confortent l'optimisme ambiant. Les équipementiers retrouvent une stabilité.
Ce forum sera donc aussi l'occasion de faire le point sur les opportunités de croissance du marché des télécoms et les nouveaux équilibres économiques qui en découleront.
Je remercie donc la rédaction des Echos pour cette belle organisation, et pour son invitation.
Si vous me le permettez, je concentrerai mon intervention sur deux aspects de la politique des télécommunications que j'entends mener :
¢ D'une part, la mise en place d'un cadre réglementaire stable et clair, favorisant une concurrence durable au service du consommateur (A),
¢ D'autre part le lancement d'initiatives sectorielles, favorisant l'innovation, la compétitivité, la croissance et l'emploi, dans deux directions essentielles : les services mobiles d'une part (B1), l'Internet d'autre part (B2).
A. La mise en place d'un cadre réglementaire stable et clair, favorisant le développement d'une concurrence durable au bénéfice du consommateur, est le préalable de toute politique industrielle.
Avec la loi sur les communications électroniques, adoptée le 3 juin dernier, la loi pour la confiance dans l'économie numérique et la loi relative au service public des télécommunications et à France Télécom, c'est une vaste refonte du droit applicable aux communications électroniques et, plus généralement, à la société de l'information, qui vient d'être effectuée, en quelques mois seulement.
Les trois principes cardinaux de cette réforme sont :
" L'établissement d'une concurrence effective sur l'ensemble du marché des communications électroniques.
" La prise en compte de la convergence entre les secteurs de l'audiovisuel et des télécommunications.
" Le rapprochement des principes de la régulation sectorielle et de ceux du droit de la concurrence.
Permettez-moi aussi de mettre en avant quatre dispositions importantes du projet de loi que j'ai défendu devant le Parlement, et qui ont réuni un large consensus :
" Premièrement, la définition d'un cadre juridique harmonisé pour l'ensemble des réseaux de communications électroniques, y compris les réseaux câblés.
" Deuxièmement, la refonte de la régulation. Je suis satisfait en particulier de la solution dégagée par la commission mixte paritaire sur la question des marchés émergents, permettant à la fois de respecter les directives européennes et de favoriser l'innovation.
" Troisièmement, la protection du consommateur, avec les dispositions portant sur les annuaires, les contrats conclus entre opérateurs et consommateurs, et l'utilisation de l'information de localisation.
" Quatrièmement, le nouveau cadre d'attribution des fréquences, avec en particulier l'introduction de marchés secondaires des fréquences.
Le Gouvernement s'est aussi attaché à doter le régulateur de tous les pouvoirs nécessaires à l'exercice de ses nouvelles missions : enquêtes, règlement des litiges, sanctions. En contrepartie, la loi accroît certaines exigences relatives au fonctionnement de l'Autorité - avec en particulier une obligation de discrétion - ainsi que le contrôle du Parlement sur son activité, sans toutefois remettre en cause son indépendance.
Je me suis engagé à ce que les décrets d'application de cette loi soient publiés avant la fin de l'année 2004. Mes services ont déjà commencé la préparation de la plupart de ces textes. J'ai demandé à mes services qu'une consultation des acteurs économiques soit lancée sur l'ensemble des projets de décrets avant le mois d'août.
Afin de compléter ce nouveau cadre réglementaire, je souhaite aussi que les analyses de marché conduites par l'ART aboutissent aussi rapidement que possible.
Parallèlement, l'adoption de la loi pour la confiance dans l'économie numérique crée un environnement juridique plus adapté pour l'ensemble des acteurs de la société de l'information : prestataires de services Internet, commerçants électroniques, fournisseurs d'outils de sécurité.
Parmi les dispositions de cette loi, je rappellerai en particulier le régime de responsabilité des prestataires techniques (hébergeurs, fournisseurs d'accès, fournisseurs de cache), la possibilité pour les collectivités locales de devenir opérateurs de réseaux de communication, et la tarification à la seconde des communications téléphoniques.
La charte des prestataires techniques contre les contenus illicites, signée hier matin à Bercy, constitue un signe encourageant de bonne volonté de la part de la profession.
Mais le rôle de l'Etat ne saurait se limiter à fixer un cadre réglementaire, aussi efficace soit-il, et à assurer son application.
Quelle peut donc être la fonction de l'Etat dans le secteur des télécommunications, au-delà de la réglementation ?
L'Etat n'a certainement pas vocation à y exercer des fonctions de régulateur. L'ART a été créée pour cela.
Dans un tel secteur, où les entreprises concurrentes atteignent de bons niveaux de rentabilité, l'Etat a encore moins vocation à exercer un rôle d'actionnaire.
Ce rôle que je souhaite pour l'Etat, c'est celui de la stratégie industrielle. Comme vous le savez, nous souhaitons, avec Nicolas Sarkozy, réhabiliter dans notre pays la politique industrielle.
Les télécommunications constituent, justement, un domaine d'excellence de l'industrie française et européenne.
Les succès comme la commutation électronique, le GSM, l'ADSL, les fibres optiques, sont les résultats d'une politique avisée, conduite au niveau européen, permettant d'obtenir un marché de taille suffisante pour s'imposer à l'échelle planétaire, avec des standards incontournables.
Mais ces positions européennes sont menacées, principalement par les acteurs asiatiques mais aussi, dans le domaine des données, par les industriels nord-américains.
L'Asie-Pacifique représente désormais 40 % du marché mondial des équipements, contre moins de 30 % en 2000. Le marché chinois, en plein développement, est le principal foyer de croissance. Le parc de mobiles y atteint 260 millions. Plus de 5 millions de portables y sont vendus chaque mois. Ce développement offre des débouchés importants pour les équipementiers occidentaux. Mais il renforce le mouvement de délocalisation de leur production vers ces pays. Il a aussi permis l'émergence de grands équipementiers chinois, qui deviennent des concurrents redoutables.
Nous ne devons pas craindre ces délocalisations et cette concurrence. Elles seront finalement bénéfiques, si elles nous poussent à rechercher l'innovation.
B. Je voudrais vous proposer deux directions pour cette nouvelle politique industrielle :
¢ Les nouveaux services mobiles d'une part (B1),
¢ La généralisation du haut débit d'autre part (B2).
B.1. Avec le succès des systèmes cellulaires de deuxième génération, essentiellement basé sur les services vocaux, les services mobiles ont pris une place centrale dans l'industrie mondiale des télécoms.
Le mobile est un fait de société. Selon un sondage IFOP, le téléphone portable est, juste après ses clés, l'objet dont on vérifie le plus souvent la présence sur soi avant de quitter son domicile.
Le nombre d'abonnés mobiles dans le monde a désormais dépassé le nombre de lignes fixes et s'accroît trois fois plus vite.
Dans les grands pays émergents, la croissance du mobile repose essentiellement sur la conquête de nouveaux abonnés.
Dans les pays développés, dont les marchés sont matures, elle repose sur le développement des nouveaux services de données mobiles et la fidélisation de la clientèle.
Le marché français, vous le savez, apparaît plutôt en retard par rapport aux marchés européens, tant en termes de pénétration que de diversification des services.
Le taux de pénétration du mobile en France reste le plus faible en Europe. Il était de 62 % contre 75 % en moyenne européenne il y a un an. Il est de 70 % contre 85 % en moyenne européenne aujourd'hui. Je sais que certains sont gênés par ces chiffres. Mais leurs explications ne sont pas toutes convaincantes.
Certaines m'apparaissent même un peu téléphonées
Je citerai en particulier celle du relief de la France, qui serait un obstacle à la pénétration du mobile. Cet argument ne résiste pas à l'observation que les plus faibles taux de pénétration sont atteints dans des régions qui ne sont pas les plus accidentées. Les monts d'Arrée expliquent-ils à eux seuls que la pénétration de la Bretagne ne dépasse pas 50 % ? Les Pays de Loire doivent-ils aux coteaux ligériens leur très modeste 55 % de taux de pénétration ?
Une autre explication serait la faible densité de la population. Cet argument ne résiste pas non plus à l'observation que les plus faibles taux de pénétration sont atteints dans des régions qui ne sont pas les moins denses. L'Auvergne et le Limousin ont des taux de pénétration supérieurs à la Bretagne et aux Pays de Loire.
Un argument serait tiré du plus faible taux de double ou triple abonnement que dans quelques autres pays européens. Mais pourquoi le surcroît de pénétration lié aux doubles et triples abonnements devrait-il être considéré comme négatif ? Un abonnement actif est un abonnement payé, qui génère un chiffre d'affaires, des revenus, de la croissance et de l'emploi.
Une dernière explication serait la faiblesse des prépayés sur le marché français. Mais un faible nombre de prépayés devrait aussi conduire à un plus grand nombre d'abonnements.
En réalité, aucune des ces explications ne suffit.
J'observe seulement que ce faible taux de pénétration se conjugue avec un nombre d'opérateurs lui aussi le plus faible des pays européens et l'absence totale, jusqu'à vendredi dernier, d'opérateurs sans réseau.
Dans mes discussions de ces dernières semaines en vue du lancement du premier opérateur sans réseau français, je remarque d'ailleurs que chacun s'est accordé pour considérer qu'il existe bien matière pour améliorer la pénétration de la téléphonie mobile en France, en développant des services et des tarifs plus attractifs.
Les opérateurs sans réseau, ces fameux MVNO, sont l'un des moyens au service de la diversification des services et des prix. Je continuerai donc à favoriser leur arrivée sur le marché français. J'ai fixé un objectif réaliste de trois MVNO avant la fin de l'année 2004. Je suis persuadé que la place ne manque pas pour les accueillir. Je citerai trois types de créneaux :
- le créneau régional, le MVNO concentrant son action sur une région à faible taux de pénétration, comme la Bretagne ;
- le créneau des nouveaux services, le MVNO répondant à l'attente particulière de catégories de consommateurs, dans les domaines du multimédia et de l'audiovisuel par exemple. Un tel MVNO permettrait en particulier de contribuer à l'offre musicale légale et payante dans le nouveau contexte numérique ;
- le créneau des petits budgets, compte tenu en particulier du faible taux de prépayés sur le marché français.
Mais méfions-nous des contrefaçons. Un MVNO qui n'apporterait qu'une marque et un réseau de distribution ne serait pas beaucoup plus qu'une société de commercialisation de services. Le MVNO commence à mon avis avec la propriété de la clientèle et la capacité de développer ses propres offres de services et options tarifaires.
Car retard de pénétration et retard de diversification sont liés.
Le retard de diversification des services peut se lire dans la part des services non-voix en France, qui est une des plus faibles des pays européens. Or c'est bien le marché des services de données mobiles, et en particulier le SMS, qui a permis aux opérateurs de stabiliser leurs revenus. Cette croissance est actuellement en cours de ralentissement, notamment dans les pays où le niveau d'usage est déjà élevé. Le relais de croissance est probablement basé sur les réseaux de type GPRS, intermédiaires entre 2ième et 3ième génération. Le virage est déjà bien entamé, avec l'accroissement très rapide actuellement des ventes de terminaux multimédias et le développement de nouveaux services de messagerie comme les MMS, qui sont des SMS avec des images en plus.
Mais la diversification des services, c'est tout d'abord, bien sûr, la transition vers les services de troisième génération. Les premiers lancements ont eu lieu depuis le début de l'année dans plusieurs agglomérations. Je souhaite que ce déploiement se poursuive et s'accélère.
Les enjeux, en termes de retombées pour le secteur, de dynamisme de l'offre de services mobiles innovants, et de diffusion de ces services dans les entreprises et chez les particuliers, sont en effet essentiels. A cet égard, je vous annonce que la France soutiendra, dans la préparation du 7e Programme Commun de Recherche et Développement européen, l'émergence d'un volet relatif aux communications mobiles. Cet effort de Recherche et Développement bénéficierait tant aux opérateurs qu'aux équipementiers.
La diversification des services pourrait aussi venir de la télévision numérique terrestre. Je souhaite que le dispositif de la TNT préserve un espace suffisant pour le développement de services de réception mobile, au format DVB-H. Je compte prochainement organiser sur ce thème une table ronde réunissant industriels et groupes audiovisuels.
Une dernière voie pour la diversification des services pourrait naître des perspectives de paiement mobile. Les paiements réalisés avec un terminal mobile constituent en effet, à mon sens, un axe de développement majeur pour les années à venir. L'une des clés de ce marché réside dans le partenariat à établir entre acteurs des télécoms et acteurs de la finance. Je suis prêt à m'investir pour favoriser ce partenariat.
B.2. Avec la diversification des services, la convergence des télécommunications et de l'Internet est inéluctable.
Le nombre d'internautes dans le monde dépasse aujourd'hui 700 millions, en croissance annuelle de 16 %. Derrière les Etats-Unis, qui concentrent plus du quart de la population d'internautes, la Chine arrive désormais en second, avec déjà 83 millions d'internautes.
En pénétration Internet, comme en pénétration mobile, la France reste mal classée. Avec 20 % seulement de la population convertie au Net, elle ne se classe que quinzième des pays de l'OCDE. En matière de haut débit, la France, avec 7 % de pénétration, arrive quatorzième. Ce retard tend cependant à se réduire. La France connaît cette année, avec un taux annuel de 110 %, la plus forte progression de l'Union européenne.
A ce rythme, l'objectif affiché par le Gouvernement de 10 millions d'abonnés au haut débit en 2007 sera dépassé.
J'ajouterai que cet objectif me paraît même dépassé en lui-même, tant il est vrai que le haut débit sera bientôt, j'en suis persuadé, aussi indispensable que le téléphone mobile. C'est donc le haut débit pour tous qui constitue mon objectif.
Trois moyens seront employés pour atteindre cet objectif :
1. L'aide des collectivités locales. L'adoption définitive de la loi pour la confiance dans l'économie numérique donnera aux collectivités locales la possibilité de se substituer aux opérateurs privés en cas de défaillance. La présence de haut, voire de très haut débit, sera un facteur déterminant dans la construction de pôles de compétitivité industrielle sur le territoire national, quel que soit le secteur d'activité.
2. L'appui aux solutions technologiques alternatives pour l'accès haut débit :
a. Les courants porteurs en ligne, qui permettent d'utiliser le réseau de distribution d'électricité pour transmettre un signal numérique à haut débit font actuellement l'objet d'une étude de faisabilité spécifique, dont les résultats seront publiés avant la fin du mois ;
b. Un appel à projet " technologies alternatives " a été lancé par le Gouvernement, permettant en particulier d'aider des projets d'Internet haut débit par satellite dans des zones enclavées.
3. Le maintien d'une régulation efficace :
C'est surtout la baisse des tarifs de l'ADSL, le développement du dégroupage - je vous rappelle que le cap des 500 000 lignes dégroupées a été franchi le 1er mai dernier contre 4 000 seulement début 2003 -, et la concurrence accrue des fournisseurs d'accès Internet, qui permettent aujourd'hui de réduire la fracture numérique sur le territoire.
Le développement du haut débit est en train de transformer en profondeur l'économie des télécommunications, et je ne suis pas sûr que nous en ayons déjà mesuré toutes les conséquences.
Le haut débit a déjà conduit à une forte croissance du commerce électronique. En un an les acheteurs en ligne sont passés de 5,4 à 8,3 millions, soit une hausse de 54 %, alors que sur cette même période, le nombre d'internautes n'a progressé que de 21 %, de 18 à 21,8 millions.
Le haut débit engendre la banalisation, notamment chez les jeunes, de la consommation de musique téléchargée. Je souhaite d'ailleurs qu'un plan national de lutte contre la piraterie audiovisuelle soit mis en uvre, après concertation entre fournisseurs d'accès et ayants droits. Ce plan pourrait comporter trois volets : Premièrement, l'information et la sensibilisation aux risques de la piraterie. Deuxièmement, le suivi des actions judiciaires engagées contre des pirates particulièrement remarqués. Troisièmement, la promotion de l'offre audiovisuelle légale et payante.
Le haut débit autorise aujourd'hui la distribution par Internet de bouquets de télévision, même s'il ne faut pas en attendre un transfert brutal des modes de diffusion au détriment de l'hertzien, du câble ou du satellite.
Le haut débit permet le succès de la norme Wi-Fi, avec des possibilités d'interconnexion multiples dont disposera le consommateur entre sa téléphonie fixe et mobile, ses équipements d'électronique numérique audio et vidéo à la maison, ses objets nomades et son bureau.
Le haut débit aboutit aujourd'hui à la multiplication des formules " triple-play " : voix, données, et vidéo, qui donnent un sens concret, pour le grand public, au concept de convergence.
Je suis convaincu, pour conclure, que la révolution Internet ne se situe pas dans les stratégies hâtives qui ont conduit à l'éclatement de la bulle au printemps 2000, mais bien dans cette transformation profonde et durable de nos industries et de nos modes de consommation.
Ce forum, à sa manière, nous permettra, comme le disait Auguste Comte, de "savoir pour prévoir afin de pouvoir".
Je vous remercie de votre attention.
(source http://www.industrie.gouv.fr, le 16 juin 2004)
Michel Audiard a écrit que les Français se divisaient en deux catégories : ceux qui attendent le téléphone, et ceux qui attendent la tonalité.
Aujourd'hui, il y a ceux qui attendent le mobile et ceux qui attendent la troisième génération.
Il y a ceux qui attendent l'Internet, ceux qui attendent le haut débit, et même ceux qui attendent le très haut débit.
A défaut de tonalité, les Français ont eu droit en vingt ans à un big bang : Par un équilibre complexe de libéralisation, de privatisation, de globalisation, de numérisation, d'alliances, de nouveaux services, un nouvel univers des télécommunications est apparu.
Ce big bang résulte de trois mouvements de fonds :
1. D'abord, l'économie du secteur s'est métamorphosée : les évolutions technologiques ont bouleversé les conditions de production et engendré une multiplication des services.
2. Ensuite, la numérisation a favorisé une interpénétration croissante des technologies et des marchés, entre les télécommunications, l'informatique et l'audiovisuel.
3. Enfin, les activités de production et d'échange s'appuient chaque jour davantage sur les systèmes et les services de communication, et les "utilisateurs" disposent d'une capacité à influencer l'offre, voire à l'organiser.
D'une industrie mono-produit, dominée par le modèle du monopole géographique, nous sommes entrés dans un univers peuplé d'une multitude d'intervenants, desservant des marchés segmentés et hétérogènes.
Dans cet univers incertain, ce forum européen des télécommunications répond à un besoin évident de repère et d'éclairage.
Après trois années de déclin, l'année 2003 a confirmé les prémices d'une reprise. La progression du nombre de mobiles dans le monde a franchi la barre de 1,2 milliards, passant nettement devant le nombre de lignes fixes. Le renouveau du fixe est déjà commencé grâce notamment à la voix sur Internet côté entreprises et à l'ADSL côté particuliers. L'engouement pour les SMS et les services multimédia confortent l'optimisme ambiant. Les équipementiers retrouvent une stabilité.
Ce forum sera donc aussi l'occasion de faire le point sur les opportunités de croissance du marché des télécoms et les nouveaux équilibres économiques qui en découleront.
Je remercie donc la rédaction des Echos pour cette belle organisation, et pour son invitation.
Si vous me le permettez, je concentrerai mon intervention sur deux aspects de la politique des télécommunications que j'entends mener :
¢ D'une part, la mise en place d'un cadre réglementaire stable et clair, favorisant une concurrence durable au service du consommateur (A),
¢ D'autre part le lancement d'initiatives sectorielles, favorisant l'innovation, la compétitivité, la croissance et l'emploi, dans deux directions essentielles : les services mobiles d'une part (B1), l'Internet d'autre part (B2).
A. La mise en place d'un cadre réglementaire stable et clair, favorisant le développement d'une concurrence durable au bénéfice du consommateur, est le préalable de toute politique industrielle.
Avec la loi sur les communications électroniques, adoptée le 3 juin dernier, la loi pour la confiance dans l'économie numérique et la loi relative au service public des télécommunications et à France Télécom, c'est une vaste refonte du droit applicable aux communications électroniques et, plus généralement, à la société de l'information, qui vient d'être effectuée, en quelques mois seulement.
Les trois principes cardinaux de cette réforme sont :
" L'établissement d'une concurrence effective sur l'ensemble du marché des communications électroniques.
" La prise en compte de la convergence entre les secteurs de l'audiovisuel et des télécommunications.
" Le rapprochement des principes de la régulation sectorielle et de ceux du droit de la concurrence.
Permettez-moi aussi de mettre en avant quatre dispositions importantes du projet de loi que j'ai défendu devant le Parlement, et qui ont réuni un large consensus :
" Premièrement, la définition d'un cadre juridique harmonisé pour l'ensemble des réseaux de communications électroniques, y compris les réseaux câblés.
" Deuxièmement, la refonte de la régulation. Je suis satisfait en particulier de la solution dégagée par la commission mixte paritaire sur la question des marchés émergents, permettant à la fois de respecter les directives européennes et de favoriser l'innovation.
" Troisièmement, la protection du consommateur, avec les dispositions portant sur les annuaires, les contrats conclus entre opérateurs et consommateurs, et l'utilisation de l'information de localisation.
" Quatrièmement, le nouveau cadre d'attribution des fréquences, avec en particulier l'introduction de marchés secondaires des fréquences.
Le Gouvernement s'est aussi attaché à doter le régulateur de tous les pouvoirs nécessaires à l'exercice de ses nouvelles missions : enquêtes, règlement des litiges, sanctions. En contrepartie, la loi accroît certaines exigences relatives au fonctionnement de l'Autorité - avec en particulier une obligation de discrétion - ainsi que le contrôle du Parlement sur son activité, sans toutefois remettre en cause son indépendance.
Je me suis engagé à ce que les décrets d'application de cette loi soient publiés avant la fin de l'année 2004. Mes services ont déjà commencé la préparation de la plupart de ces textes. J'ai demandé à mes services qu'une consultation des acteurs économiques soit lancée sur l'ensemble des projets de décrets avant le mois d'août.
Afin de compléter ce nouveau cadre réglementaire, je souhaite aussi que les analyses de marché conduites par l'ART aboutissent aussi rapidement que possible.
Parallèlement, l'adoption de la loi pour la confiance dans l'économie numérique crée un environnement juridique plus adapté pour l'ensemble des acteurs de la société de l'information : prestataires de services Internet, commerçants électroniques, fournisseurs d'outils de sécurité.
Parmi les dispositions de cette loi, je rappellerai en particulier le régime de responsabilité des prestataires techniques (hébergeurs, fournisseurs d'accès, fournisseurs de cache), la possibilité pour les collectivités locales de devenir opérateurs de réseaux de communication, et la tarification à la seconde des communications téléphoniques.
La charte des prestataires techniques contre les contenus illicites, signée hier matin à Bercy, constitue un signe encourageant de bonne volonté de la part de la profession.
Mais le rôle de l'Etat ne saurait se limiter à fixer un cadre réglementaire, aussi efficace soit-il, et à assurer son application.
Quelle peut donc être la fonction de l'Etat dans le secteur des télécommunications, au-delà de la réglementation ?
L'Etat n'a certainement pas vocation à y exercer des fonctions de régulateur. L'ART a été créée pour cela.
Dans un tel secteur, où les entreprises concurrentes atteignent de bons niveaux de rentabilité, l'Etat a encore moins vocation à exercer un rôle d'actionnaire.
Ce rôle que je souhaite pour l'Etat, c'est celui de la stratégie industrielle. Comme vous le savez, nous souhaitons, avec Nicolas Sarkozy, réhabiliter dans notre pays la politique industrielle.
Les télécommunications constituent, justement, un domaine d'excellence de l'industrie française et européenne.
Les succès comme la commutation électronique, le GSM, l'ADSL, les fibres optiques, sont les résultats d'une politique avisée, conduite au niveau européen, permettant d'obtenir un marché de taille suffisante pour s'imposer à l'échelle planétaire, avec des standards incontournables.
Mais ces positions européennes sont menacées, principalement par les acteurs asiatiques mais aussi, dans le domaine des données, par les industriels nord-américains.
L'Asie-Pacifique représente désormais 40 % du marché mondial des équipements, contre moins de 30 % en 2000. Le marché chinois, en plein développement, est le principal foyer de croissance. Le parc de mobiles y atteint 260 millions. Plus de 5 millions de portables y sont vendus chaque mois. Ce développement offre des débouchés importants pour les équipementiers occidentaux. Mais il renforce le mouvement de délocalisation de leur production vers ces pays. Il a aussi permis l'émergence de grands équipementiers chinois, qui deviennent des concurrents redoutables.
Nous ne devons pas craindre ces délocalisations et cette concurrence. Elles seront finalement bénéfiques, si elles nous poussent à rechercher l'innovation.
B. Je voudrais vous proposer deux directions pour cette nouvelle politique industrielle :
¢ Les nouveaux services mobiles d'une part (B1),
¢ La généralisation du haut débit d'autre part (B2).
B.1. Avec le succès des systèmes cellulaires de deuxième génération, essentiellement basé sur les services vocaux, les services mobiles ont pris une place centrale dans l'industrie mondiale des télécoms.
Le mobile est un fait de société. Selon un sondage IFOP, le téléphone portable est, juste après ses clés, l'objet dont on vérifie le plus souvent la présence sur soi avant de quitter son domicile.
Le nombre d'abonnés mobiles dans le monde a désormais dépassé le nombre de lignes fixes et s'accroît trois fois plus vite.
Dans les grands pays émergents, la croissance du mobile repose essentiellement sur la conquête de nouveaux abonnés.
Dans les pays développés, dont les marchés sont matures, elle repose sur le développement des nouveaux services de données mobiles et la fidélisation de la clientèle.
Le marché français, vous le savez, apparaît plutôt en retard par rapport aux marchés européens, tant en termes de pénétration que de diversification des services.
Le taux de pénétration du mobile en France reste le plus faible en Europe. Il était de 62 % contre 75 % en moyenne européenne il y a un an. Il est de 70 % contre 85 % en moyenne européenne aujourd'hui. Je sais que certains sont gênés par ces chiffres. Mais leurs explications ne sont pas toutes convaincantes.
Certaines m'apparaissent même un peu téléphonées
Je citerai en particulier celle du relief de la France, qui serait un obstacle à la pénétration du mobile. Cet argument ne résiste pas à l'observation que les plus faibles taux de pénétration sont atteints dans des régions qui ne sont pas les plus accidentées. Les monts d'Arrée expliquent-ils à eux seuls que la pénétration de la Bretagne ne dépasse pas 50 % ? Les Pays de Loire doivent-ils aux coteaux ligériens leur très modeste 55 % de taux de pénétration ?
Une autre explication serait la faible densité de la population. Cet argument ne résiste pas non plus à l'observation que les plus faibles taux de pénétration sont atteints dans des régions qui ne sont pas les moins denses. L'Auvergne et le Limousin ont des taux de pénétration supérieurs à la Bretagne et aux Pays de Loire.
Un argument serait tiré du plus faible taux de double ou triple abonnement que dans quelques autres pays européens. Mais pourquoi le surcroît de pénétration lié aux doubles et triples abonnements devrait-il être considéré comme négatif ? Un abonnement actif est un abonnement payé, qui génère un chiffre d'affaires, des revenus, de la croissance et de l'emploi.
Une dernière explication serait la faiblesse des prépayés sur le marché français. Mais un faible nombre de prépayés devrait aussi conduire à un plus grand nombre d'abonnements.
En réalité, aucune des ces explications ne suffit.
J'observe seulement que ce faible taux de pénétration se conjugue avec un nombre d'opérateurs lui aussi le plus faible des pays européens et l'absence totale, jusqu'à vendredi dernier, d'opérateurs sans réseau.
Dans mes discussions de ces dernières semaines en vue du lancement du premier opérateur sans réseau français, je remarque d'ailleurs que chacun s'est accordé pour considérer qu'il existe bien matière pour améliorer la pénétration de la téléphonie mobile en France, en développant des services et des tarifs plus attractifs.
Les opérateurs sans réseau, ces fameux MVNO, sont l'un des moyens au service de la diversification des services et des prix. Je continuerai donc à favoriser leur arrivée sur le marché français. J'ai fixé un objectif réaliste de trois MVNO avant la fin de l'année 2004. Je suis persuadé que la place ne manque pas pour les accueillir. Je citerai trois types de créneaux :
- le créneau régional, le MVNO concentrant son action sur une région à faible taux de pénétration, comme la Bretagne ;
- le créneau des nouveaux services, le MVNO répondant à l'attente particulière de catégories de consommateurs, dans les domaines du multimédia et de l'audiovisuel par exemple. Un tel MVNO permettrait en particulier de contribuer à l'offre musicale légale et payante dans le nouveau contexte numérique ;
- le créneau des petits budgets, compte tenu en particulier du faible taux de prépayés sur le marché français.
Mais méfions-nous des contrefaçons. Un MVNO qui n'apporterait qu'une marque et un réseau de distribution ne serait pas beaucoup plus qu'une société de commercialisation de services. Le MVNO commence à mon avis avec la propriété de la clientèle et la capacité de développer ses propres offres de services et options tarifaires.
Car retard de pénétration et retard de diversification sont liés.
Le retard de diversification des services peut se lire dans la part des services non-voix en France, qui est une des plus faibles des pays européens. Or c'est bien le marché des services de données mobiles, et en particulier le SMS, qui a permis aux opérateurs de stabiliser leurs revenus. Cette croissance est actuellement en cours de ralentissement, notamment dans les pays où le niveau d'usage est déjà élevé. Le relais de croissance est probablement basé sur les réseaux de type GPRS, intermédiaires entre 2ième et 3ième génération. Le virage est déjà bien entamé, avec l'accroissement très rapide actuellement des ventes de terminaux multimédias et le développement de nouveaux services de messagerie comme les MMS, qui sont des SMS avec des images en plus.
Mais la diversification des services, c'est tout d'abord, bien sûr, la transition vers les services de troisième génération. Les premiers lancements ont eu lieu depuis le début de l'année dans plusieurs agglomérations. Je souhaite que ce déploiement se poursuive et s'accélère.
Les enjeux, en termes de retombées pour le secteur, de dynamisme de l'offre de services mobiles innovants, et de diffusion de ces services dans les entreprises et chez les particuliers, sont en effet essentiels. A cet égard, je vous annonce que la France soutiendra, dans la préparation du 7e Programme Commun de Recherche et Développement européen, l'émergence d'un volet relatif aux communications mobiles. Cet effort de Recherche et Développement bénéficierait tant aux opérateurs qu'aux équipementiers.
La diversification des services pourrait aussi venir de la télévision numérique terrestre. Je souhaite que le dispositif de la TNT préserve un espace suffisant pour le développement de services de réception mobile, au format DVB-H. Je compte prochainement organiser sur ce thème une table ronde réunissant industriels et groupes audiovisuels.
Une dernière voie pour la diversification des services pourrait naître des perspectives de paiement mobile. Les paiements réalisés avec un terminal mobile constituent en effet, à mon sens, un axe de développement majeur pour les années à venir. L'une des clés de ce marché réside dans le partenariat à établir entre acteurs des télécoms et acteurs de la finance. Je suis prêt à m'investir pour favoriser ce partenariat.
B.2. Avec la diversification des services, la convergence des télécommunications et de l'Internet est inéluctable.
Le nombre d'internautes dans le monde dépasse aujourd'hui 700 millions, en croissance annuelle de 16 %. Derrière les Etats-Unis, qui concentrent plus du quart de la population d'internautes, la Chine arrive désormais en second, avec déjà 83 millions d'internautes.
En pénétration Internet, comme en pénétration mobile, la France reste mal classée. Avec 20 % seulement de la population convertie au Net, elle ne se classe que quinzième des pays de l'OCDE. En matière de haut débit, la France, avec 7 % de pénétration, arrive quatorzième. Ce retard tend cependant à se réduire. La France connaît cette année, avec un taux annuel de 110 %, la plus forte progression de l'Union européenne.
A ce rythme, l'objectif affiché par le Gouvernement de 10 millions d'abonnés au haut débit en 2007 sera dépassé.
J'ajouterai que cet objectif me paraît même dépassé en lui-même, tant il est vrai que le haut débit sera bientôt, j'en suis persuadé, aussi indispensable que le téléphone mobile. C'est donc le haut débit pour tous qui constitue mon objectif.
Trois moyens seront employés pour atteindre cet objectif :
1. L'aide des collectivités locales. L'adoption définitive de la loi pour la confiance dans l'économie numérique donnera aux collectivités locales la possibilité de se substituer aux opérateurs privés en cas de défaillance. La présence de haut, voire de très haut débit, sera un facteur déterminant dans la construction de pôles de compétitivité industrielle sur le territoire national, quel que soit le secteur d'activité.
2. L'appui aux solutions technologiques alternatives pour l'accès haut débit :
a. Les courants porteurs en ligne, qui permettent d'utiliser le réseau de distribution d'électricité pour transmettre un signal numérique à haut débit font actuellement l'objet d'une étude de faisabilité spécifique, dont les résultats seront publiés avant la fin du mois ;
b. Un appel à projet " technologies alternatives " a été lancé par le Gouvernement, permettant en particulier d'aider des projets d'Internet haut débit par satellite dans des zones enclavées.
3. Le maintien d'une régulation efficace :
C'est surtout la baisse des tarifs de l'ADSL, le développement du dégroupage - je vous rappelle que le cap des 500 000 lignes dégroupées a été franchi le 1er mai dernier contre 4 000 seulement début 2003 -, et la concurrence accrue des fournisseurs d'accès Internet, qui permettent aujourd'hui de réduire la fracture numérique sur le territoire.
Le développement du haut débit est en train de transformer en profondeur l'économie des télécommunications, et je ne suis pas sûr que nous en ayons déjà mesuré toutes les conséquences.
Le haut débit a déjà conduit à une forte croissance du commerce électronique. En un an les acheteurs en ligne sont passés de 5,4 à 8,3 millions, soit une hausse de 54 %, alors que sur cette même période, le nombre d'internautes n'a progressé que de 21 %, de 18 à 21,8 millions.
Le haut débit engendre la banalisation, notamment chez les jeunes, de la consommation de musique téléchargée. Je souhaite d'ailleurs qu'un plan national de lutte contre la piraterie audiovisuelle soit mis en uvre, après concertation entre fournisseurs d'accès et ayants droits. Ce plan pourrait comporter trois volets : Premièrement, l'information et la sensibilisation aux risques de la piraterie. Deuxièmement, le suivi des actions judiciaires engagées contre des pirates particulièrement remarqués. Troisièmement, la promotion de l'offre audiovisuelle légale et payante.
Le haut débit autorise aujourd'hui la distribution par Internet de bouquets de télévision, même s'il ne faut pas en attendre un transfert brutal des modes de diffusion au détriment de l'hertzien, du câble ou du satellite.
Le haut débit permet le succès de la norme Wi-Fi, avec des possibilités d'interconnexion multiples dont disposera le consommateur entre sa téléphonie fixe et mobile, ses équipements d'électronique numérique audio et vidéo à la maison, ses objets nomades et son bureau.
Le haut débit aboutit aujourd'hui à la multiplication des formules " triple-play " : voix, données, et vidéo, qui donnent un sens concret, pour le grand public, au concept de convergence.
Je suis convaincu, pour conclure, que la révolution Internet ne se situe pas dans les stratégies hâtives qui ont conduit à l'éclatement de la bulle au printemps 2000, mais bien dans cette transformation profonde et durable de nos industries et de nos modes de consommation.
Ce forum, à sa manière, nous permettra, comme le disait Auguste Comte, de "savoir pour prévoir afin de pouvoir".
Je vous remercie de votre attention.
(source http://www.industrie.gouv.fr, le 16 juin 2004)