Conférence de presse de Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée aux affaires européennes, notamment sur la lutte contre le terrorisme et le rôle de l'Union européenne dans le règlement du conflit au Proche-Orient, à Luxembourg le 11 octobre 2004.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Conseil affaires générales et relations extérieures, à Luxembourg le 11 octobre 2004

Texte intégral

Je suis heureuse de vous retrouver aujourd'hui à Luxembourg. Vous savez que le Conseil Affaires générales et Relations extérieures a un ordre du jour très chargé, je ne serai donc pas très longue mais je répondrai volontiers à vos questions.
Je voudrais évoquer les principaux points concernant le CAG.
Concernant le Conseil européen de novembre, nous avons eu une première discussion sur l'ordre du jour annoté du Conseil européen des 4 et 5 novembre, où deux grands thèmes seront abordés. Tout d'abord l'adoption d'un nouveau programme pluriannuel, cinq ans après le Sommet de Tampere, en vue d'un espace de liberté, de sécurité et de justice ; ensuite la révision de la stratégie de Lisbonne après la présentation du rapport Kok au tout début novembre. Il s'agira d'une première discussion, vous savez que les décisions interviendront au Conseil européen du printemps 2005. Le Conseil reviendra plus précisément sur la préparation du Conseil européen lors de sa session du 2 novembre.
Concernant la lutte contre le terrorisme, nous avons fait le point sur la mise en oeuvre du programme de travail adopté par le Conseil européen en juin dernier et notamment sur les aspects extérieurs de la lutte contre le terrorisme. C'est un sujet bien sûr essentiel, qui est au coeur du dialogue politique de l'Union européenne avec les États tiers. A cette occasion, j'ai marqué le souhait de la France que soit accélérée la mise en uvre effective des décisions prises par le Conseil européen et par le Conseil, en rappelant notamment celles relatives au mandat d'arrêt européen et à la capacité de renseignement sur la menace terroriste. J'ai également souligné et bien sûr je n'étais pas la seule, l'appui de la France au rôle de coordination de M. de Vries et aux missions qu'il réalise à l'extérieur. Il doit notamment contribuer à intensifier notre coopération avec la Russie dans ce domaine, après la tragédie de Beslan. M. de Vries ira en Russie très rapidement.
J'ai également rappelé dans le domaine de la lutte contre le terrorisme notre désir de renforcer l'action contre tous les vecteurs de financement du terrorisme et d'intensifier le dialogue avec le monde musulman, y compris avec les communautés présentes à l'intérieur de l'Union européenne. Ce doit être aussi un point important dans le processus de Barcelone dans le dialogue entre Europe et Méditerranée.
Concernant l'élargissement, le Conseil a entendu une présentation par le commissaire Verheugen des rapports qui ont été adoptés par la Commission le 6 octobre et qui constituent une base de travail précise et objective pour préparer les décisions du Conseil européen de décembre. Il n'y a pas eu de long débat à ce stade.
Concernant les perspectives financières, le Conseil a permis de faire un point sur l'état des discussions. Il s'agit d'un dossier très important puisqu'il engage l'avenir des politiques communes et leur financement pour l'après 2006. L'objectif fixé par le Conseil européen est d'aboutir au printemps 2005. Nous en sommes donc aux tout premiers échanges. Si nous pouvons parvenir à un accord dans l'année 2005 ce serait bien mais la négociation est longue et complexe. J'ai rappelé notre souci de concilier la discipline budgétaire, l'ambition sur les projets que l'Union européenne veut porter pendant cette période et le respect des décisions qui ont déjà été prises, en particulier celles qui concernent l'agriculture.
Cet après-midi nous allons aborder de nombreux sujets dans le cadre du Conseil Relations extérieures. Il y a un point en cours sur la Libye au cours duquel sera prise la décision de lever l'embargo militaire européen à l'encontre de ce pays. En effet, nous admettons qu'une série de gestes significatifs ont été faits. Cette levée d'embargo est pour nous un tournant dans la relation entre la Libye et l'Union européenne. De nouveaux axes de coopération peuvent être maintenant envisagés. De même, cette levée de l'embargo ouvre la voie à la participation de la Libye au processus de Barcelone. Je vais retourner sur ce point en session et dire également que nous restons vigilants sur l'affaire des infirmières bulgares et du médecin palestinien pour aboutir à une mesure de grâce qui conduirait à la libération de ce personnel médical. Le ministre des Affaires étrangères, Michel Barnier, était récemment en Libye, le 6 octobre, et il a abordé cette question avec les autorités libyennes.
Concernant le processus de paix au Proche-Orient, le Conseil va discuter de la dégradation, très préoccupante, de la situation dans la région et des conséquences pour le processus de paix. Nous sommes particulièrement préoccupés par l'escalade de la violence à Gaza. Nul ne conteste le droit d'Israël d'assurer sa sécurité, et notamment de mettre fin aux tirs de roquettes palestiniennes, mais l'opération "jours de pénitence" au nord de Gaza est disproportionnée. Elle a causé, vous le savez, trop de victimes civiles et elle fragilise l'espoir de paix qui était apparu avec le plan de retrait de Gaza. Il est important à nos yeux que l'Autorité palestinienne renforce son contrôle sur les groupes armés palestiniens. L'Union européenne doit se mobiliser fortement. Le représentant spécial de l'Union européenne, Marc Otte, se rendra sur le terrain dans les prochains jours. Seule la reprise du dialogue tracera une perspective politique permettant de déboucher sur la création de deux États vivant dans la paix et la sécurité. Le plan de retrait israélien de Gaza doit constituer un point de départ, dans le cadre de la mise en oeuvre de la Feuille de route. Il ne doit pas, bien sûr, être considéré comme solde de tout compte pour les Palestiniens. L'Union européenne doit faire des propositions pour appuyer le retrait de Gaza. Nous avons défini lors du Conseil européen des 25 et 26 mars dernier les conditions qui assureraient la réussite du retrait israélien de Gaza. Il faut également appuyer le plan de soutien à la police palestinienne présenté par le Représentant spécial de l'Union européenne.
Concernant l'Iran, nous avons fait un point comme nous le faisons régulièrement dans le contexte actuel. Vous savez que nous sommes très préoccupés par les annonces faites par Téhéran d'une reprise de certaines activités liées à l'enrichissement de l'uranium. A l'occasion de la réunion des gouverneurs de l'AIEA du 18 septembre, la communauté internationale a de nouveau demandé à l'Iran la suspension complète et vérifiée de toutes ces activités d'enrichissement. Nous entrons désormais dans une phase décisive. La France demeure persuadée que d'ici la prochaine réunion du Conseil des gouverneurs du 25 novembre, il faut poursuivre dans la voie du dialogue avec l'Iran et explorer toutes les possibilités permettant d'éviter une crise.
Concernant la Chine, nous avons eu une discussion sur ses relations avec l'Union européenne et, plus précisément, sur la levée de l'embargo européen sur les armes. Vous connaissez, cela a déjà été exprimé devant vous, le sentiment général sur le caractère dépassé de cet embargo. Le président de la République qui est actuellement en visite en Chine, a souligné son caractère anachronique. L'objectif de lever cet embargo est une décision politique - et non pas commerciale - qui s'inscrit logiquement dans l'approfondissement du partenariat stratégique noué entre l'Union européenne et la Chine. Je peux dire qu'il y a une certaine évolution des esprits dans le sens de la levée de l'embargo mais que plusieurs États ont fait état de leur sensibilité au contexte dans lequel une telle décision de levée de l'embargo pourrait intervenir. En termes de calendrier, il y a un moment fort qui sera le sommet Union européenne-Chine au mois de décembre. La France souhaite qu'une évolution positive intervienne au moment de cette réunion.
Voilà les points sur lesquels je souhaitais appeler votre attention.
Q - Sur la Turquie, je voulais savoir si la France a une position sur une date précise
R - Vous savez que nous venons de recevoir le rapport de la Commission. Nous sommes devant un rapport très complet et précis, que nous devons analyser. Le Conseil européen en décembre prendra une décision politique sur une ouverture éventuelle des négociations, sur le calendrier et les modalités de cette ouverture et du processus de négociation.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 octobre 2004)