Déclaration de M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, sur le projet de révision des lois de bioéthique, Angers le 30 janvier 2004.

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Circonstance : 2èmes Assises nationales de génétique humaine et médicale à Angers du 30 janvier au 1er février 2004

Texte intégral

Monsieur le président,
Mesdames, Messieurs, chers amis,
Vous qui représentez la communauté de la génétique humaine et médicale française, vous savez le plaisir qui est le mien de me trouver à nouveau parmi vous, puisque vous êtes ma famille.
J'ai choisi de faire le point avec vous sur la révision des lois de bioéthique de 1994 tant il est vrai qu'elle a pris du retard et que de nombreux sujets sont venus ajouter à la réflexion au fil du temps.
I ) Ce qu'il est important de noter tout d'abord, c'est la très longue période que ce texte vient conclure : 16 ans depuis le premier rapport du Conseil d'État en 1988 : " de l'éthique au droit ". Mais aussi 10 ans depuis les premiers textes qui prévoyaient pourtant leur propre révision cinq ans après !
C'est dire la difficulté, c'est dire la gravité de certains choix au regard de l'avenir et des générations futures.
Nous sommes, vous comme moi, bien placés pour savoir
- que les chercheurs ont continuellement offert à l'homme de nouveaux services de plus en plus achevés ;
- que grâce à eux, l'homme jouit d'une meilleure qualité de vie et peut aspirer à des conditions d'existence et de travail plus humaines
- pour savoir, aussi, que la science n'est pas une activité neutre et que l'entreprise scientifique ne peut échapper au jugement critique, en tant qu'instrument du progrès illimité dans lequel l'humanité serait entraînée.
Le centre du problème aujourd'hui consiste à distinguer le véritable progrès du progrès apparent. Les évolutions techniques et scientifiques récentes en matière de sciences du vivant posent en effet sous un jour radicalement nouveau la question des relations entre le progrès médical et les repères de la conscience :
- les biotechnologies opèrent non plus sur le monde extérieur, mais sur l'homme lui-même ;
- elles ne permettent plus seulement à l'homme de se faire "maître et possesseur de la nature" au sens où Descartes l'entendait, puisque cette entreprise de domination risque de se retourner contre l'homme lui-même.
Avec la médecine de la reproduction, les techniques de clonage cellulaire, les perspectives ouvertes depuis l'achèvement du décryptage du génome humain, l'homme devient de plus en plus capable de s'approprier sa nature pour la modeler à son goût, sans vraiment connaître l'impact que cela aura sur l'humanité de demain.
La tâche actuelle consiste donc à distinguer,
- ce qui personnalise l'homme de ce qui le dépersonnalise,
- ce qui le rend plus libre de ce qui le rend plus esclave.
C'est une vieille histoire - la science, pour avancer, se heurte aux repères moraux de chacun ; grâce à elle, ces repères évoluent. Songeons à l'opposition qu'ont rencontré des pratiques telles que la dissection, l'anesthésie ou même, plus récemment, la vaccination !
Je crois toutefois qu'avec les sujets et les techniques qui nous occupent aujourd'hui, nous touchons à une frontière, et que nos concitoyens ont une conscience aiguë de ce que le développement des sciences biomédicales appelle des limites, faute de quoi il n'est pas en accord avec la dignité de chaque homme et ne procure ainsi qu'un progrès apparent. C'est dans ce contexte que s'est développée l'idée de bioéthique, c'est-à-dire de l'éthique de la vie.
La bioéthique a aujourd'hui une histoire suffisamment longue pour que l'on puisse mesurer le chemin parcouru. A l'origine, la part prise par les chercheurs, notamment en biologie, dans la réflexion sur les limites de la science et les questions d'éthique posées par l'essor des sciences biomédicales, a été très importante. En 1963, au cours d'un colloque organisé par la fondation Ciba, le prix Nobel J. Lederberg exprima une position assez répandue dans l'assemblée, en affirmant le principe d'une responsabilité nouvelle des biologistes pour assurer un nouveau développement de l'humanité.
En France, médecins et biologistes avaient, avant 1994, défini des règles déontologiques, des garanties éthiques ; le législateur s'est ainsi largement inspiré en 1994 des règles éthiques et sanitaires définies par les CECOS pour réglementer le don de gamètes.
Cependant, la bioéthique ne peut être du ressort exclusif des praticiens, parce que l'éthique n'est pas un prolongement naturel de la science. Sont en cause, en effet, des pratiques qui mettent en jeu les représentations même de la société et qui dépassent largement l'exercice de la médecine: qu'est-ce que la personne humaine ? Jusqu'où le respect lui est-il dû ? De quoi peut-il être fait commerce ? Quelles sont les implications de la médecine prédictive ou de la possibilité de concevoir un enfant avec un tiers donneur ?
La bioéthique, on le voit, éprouve notre édifice juridique dans ce qu'il a de plus central, le statut des personnes, le droit de la filiation et de la famille ou encore le droit des contrats.
On n'attend donc pas du législateur dans le champ de la bioéthique qu'il concilie tous les contraires mais qu'il dise les limites, c'est-à-dire donne, avec humanité, un cadre permettant à la créativité et à la liberté de chacun de s'exprimer, dans le respect de l'intérêt collectif.
J'en finis avec ces rapides réflexions générales en vous disant l'une de mes préoccupations : le débat bioéthique est désormais, du fait d'évolutions récentes, un débat international. Dans ce débat, la France doit oeuvrer afin de parvenir, sinon à une régulation commune encore utopique, du moins à une concertation aussi riche que possible au plan mondial. Or elle fera entendre sa voix d'une manière d'autant plus convaincante qu'elle pourra s'appuyer sur un arsenal législatif interne amélioré et actualisé, adopté d'une manière aussi consensuelle que possible.
Je voudrais à présent m'arrêter quelques instants sur des points forts qui nous intéressent particulièrement.
II ) D'abord, la recherche sur l'embryon humain.
Ce sujet très difficile nourrit vraisemblablement en chacun de nous une délicate délibération intérieure.. Il a été choisi de prendre pour fondement essentiel l'article 16 du code civil, qui prévoit que : "La loi () garantit le respect de l'être humain dès le commencement de sa vie". Dire que ce principe est premier, c'est n'admettre que des atteintes lui soient portées qu'à la condition qu'elles soient nécessaires à la sauvegarde de principes jugés également essentiels.
C'est bien cette ligne qui a toujours inspiré le législateur jusqu'à aujourd'hui. Seules des exceptions précises et strictement encadrées permettent de porter atteinte à l'embryon : il en va ainsi de l'interruption volontaire de grossesse et, plus récemment, du diagnostic pré-implantatoire.
Le texte adopté reste dans cette logique d'exception par rapport à cet interdit fondateur qui nous enjoint le respect de l'embryon.
La recherche sur l'embryon demeure interdite, mais, dans des conditions strictes et pour une durée limitée, il est permis que certaines recherches soient menées sur certains embryons.
Cette position de principe rejoint le bon sens scientifique. Les techniques utilisant des cellules souches ont le potentiel de transformer des branches entières de la médecine. Mais les perspectives thérapeutiques liées à l'utilisation des cellules souches embryonnaires ne sont encore qu'un pari qui n'a pas commencé vraiment d'être validé ; il faudra des années, au mieux, pour que des applications cliniques puissent être envisagées.
Par ailleurs, et c'est essentiel, des cellules souches existent aussi dans les tissus adultes; des travaux récents ont mis en évidence le fort potentiel régénératif de ces cellules et leur grande plasticité.
On aurait même pu espérer faire l'économie de la recherche sur les cellules issues d'embryons. Mais la réalité des exigences de la recherche, j'en ai été convaincu, impose qu'on l'autorise : il est indispensable de mener de front, pendant quelques années au moins, des recherches sur les cellules embryonnaires et sur des cellules souches adultes, afin de comparer leurs potentialités, mais aussi leur innocuité pour l'homme.
Je ne souhaite pas pour autant masquer que cela représente un bouleversement ontologique. Aussi la levée de l'interdiction posée en 1994 par le législateur ne va-t-elle pas de soi et doit-elle être assortie de conditions très précises.
Le but de ces recherches doit être précisément défini. Ce but est double.
La recherche sur l'embryon est avant tout une recherche pour l'embryon, pour permettre à l'embryon d'entrer dans le champ de la médecine. Or, il est évident que cette progression de la médecine vers les tous premiers stades de la vie ne pourra se réaliser sans l'aide de la recherche.
Nous sommes, à cet égard, dans une situation d'urgence. On ne peut en effet qu'être préoccupé du fort décalage entre les progrès réalisés pour diagnostiquer les problèmes du ftus et, plus récemment, de l'embryon, et les moyens dont on dispose pour les traiter. Le biais qui en résulte en faveur de l'élimination plutôt que du traitement alimente un discours récurrent mais aussi, peut-être, de moins en moins irréaliste, sur le tri eugénique des êtres humains et sur la décence ou l'acceptabilité plus grandes de ces pratiques, devenues plus indolores. Pour éviter cette dérive, on ne peut que tout mettre en oeuvre pour faire accéder le ftus et l'embryon au statut de patient.
Un seul autre but doit être assigné à la recherche sur l'embryon : celui d'évaluer les perspectives thérapeutiques apparemment très prometteuses liées à l'utilisation de cellules souches embryonnaires. Comme je l'ai dit, la route sera certainement fort longue jusqu'à la validation thérapeutique, mais il faut se mettre en ordre de marche.
Dans le même temps, il faut explorer d'autres voies telles que la recherche sur les cellules souches adultes et les cellules de sang de cordon.
Ces recherches doivent être strictement encadrées.
C'est pourquoi le texte prévoit que seuls pourront être affectés à la recherche les embryons in vitro conçus dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation dont les parents ne veulent pas demander le transfert et qui n'auront pas été donnés à un autre couple.
Toute recherche sur l'embryon humain sera soumise à autorisation après une évaluation scientifique et éthique de son protocole.
Enfin, l'ouverture de la recherche sur l'embryon a un caractère transitoire :
son bien fondé sera réexaminé dans cinq ans, notamment parce qu'il n'est pas exclu que les progrès de la science conduisent à vider le débat de son contenu ou du moins à en atténuer la vivacité. Il sera temps de faire un point précis à la lumière de l'expérience et de la reconduire si la nécessité s'impose.
En bref, il s'agit d'ouvrir une "fenêtre d'action" strictement délimitée en respectant les principes et le souci d'équilibre qui inspirent la législation actuelle.
Naturellement, la création d'embryons humains à des fins de recherche demeure fermement exclue ; elle est d'ailleurs contraire à l'article 18 de la convention d'Oviedo.
Quant au clonage dit thérapeutique qui demeure interdit, je me bornerai à rappeler qu'il nous expose à deux dangers majeurs : premièrement, le risque de contournement de l'interdiction de faire naître un enfant cloné, à partir du moment où la première étape peut être réalisée ; deuxièmement, la nécessité d'obtenir en grand nombre des ovocytes prélevés chez les femmes après un traitement fort lourd et, à n'en pas douter, des tractations financières peu compatibles avec le principe de non-commercialité du corps humain, inscrit dans le code civil. J'ajoute que l'on peut y voir une forme de création d'embryons à des fins de recherche, contraire à nos engagements internationaux.
III ) Le clonage reproductif
Concernant le clonage reproductif le législateur a souhaité que l'interdiction du clonage d'embryons humains à des fins de reproduction soit assortie d'une sanction à la hauteur de l'enjeu, qui fasse référence à ce qu'il s'agit de garantir, à savoir la dignité de l'homme et la survie de l'espèce.
On peut certes condamner la pratique du clonage comme totalement irresponsable du point de vue scientifique : elle bafoue les principes les plus élémentaires de la déontologie en matière de recherche, puisqu'on créerait sciemment un être qui aurait toutes les chances soit de mourir prématurément, soit d'être atteint de diverses malformations.
Mais l'objection essentielle au clonage, c'est-à-dire au photocopiage génétique, est d'ordre éthique : il s'agit de programmer un humain comme un objet fabriqué en fonction d'une commande ; il s'agit de le transformer en un objet calculable, manipulable et prédéterminé dans toutes ses caractéristiques physiques, quand la personne, subtil mélange de hasard et de choix, est une et est libre grâce à la part d'indétermination dont elle procède; il s'agit enfin et surtout d'annuler l'altérité naturelle qui constitue le support biologique de la personne.
Quelles que soient les motivations que l'on peut prêter aux partisans du clonage, et sans se laisser aller à nourrir des fantasmes, il est impossible, dans tous les cas, de souhaiter être cet enfant-là. Cela ne signifie aucunement, que sa dignité ne serait pas la même que celle de tout autre individu - la dignité est liée, à l'existence, et non à une certaine qualité de vie ; elle est un attribut ontologique de la personne et ne varie pas au gré des circonstances de l'existence. Cela n'empêche pas que l'on doive élever une digue aussi solide que possible pour se garder d'une telle éventualité.
Aussi la loi s'inscrit-elle fermement contre cette possibilité, en rappelant que le propre de toute personne est d'être indéterminable. Il réprime fermement toute tentative de reproduction par clonage, qui fait l'objet d'une nouvelle incrimination, baptisée "crime contre l'espèce humaine" ; incrimination qui vise aussi les pratiques eugéniques tendant à l'organisation de la sélection des personnes.
IV ) Bébé médicament
Le sujet est tragique, puisqu'il s'agit, d'un côté, d'un enfant condamné et, d'un autre côté, d'un enfant expressément conçu pour soigner ce malade.
Le choix est donc tragique, et la possibilité technique existe. Le bonheur retrouvé d'une famille dont l'enfant est sauvé ne peut se discuter mais, il faut le savoir, cette disposition marque une rupture dans les comportements, puisqu'elle autorise à choisir un embryon en fonction de ce qu'on attend de lui.
Je ne suis pas certain que nous disposions du recul suffisant pour légiférer, ni d'ailleurs, qu'il faille légiférer pour un très petit nombre de cas. Toutefois, l'amendement a été minutieusement rédigé, pour éviter tous les débordements, et l'on ne peut se prononcé en fonction des incertitudes qui demeurent, car le technique évoluera.
Par ce choix, extrêmement difficile, je veux simplement souligner que l'on s'écarte singulièrement de l'assistance médicale à la procréation, car il s'agit de bien autre chose que de simple procréation.
V ) Je voudrais encore dire quelques mots sur la brevetabilité des gènes humains.
Au moment où des dizaines de milliers de brevets revendiquant des séquences de gènes étaient déposés, la France a porté au niveau international le message qu'une telle appropriation, contraire aux principes de notre code civil, était éthiquement inacceptable et pouvait avoir un effet négatif sur l'efficacité tant de la recherche fondamentale que de l'innovation pharmaceutique.
L'esprit et la lettre de la loi française et ceux de la directive européenne sont incompatibles : la première exclut les gènes de la brevetabilité, la seconde les y inclut en assimilant leur connaissance à l'invention d'une molécule chimique ; elle permet ainsi la prise de droits sur l'utilisation d'éléments du monde naturel. Mais cette directive a été adoptée et elle s'impose désormais à nous.
Aujourd'hui, comme le mentionne un récent rapport de l'INSERM, de nombreux analystes s'interrogent sur les conséquences de la multiplication des brevets sur les gènes y compris pour les biotechnologies. L'information génétique pourrait, en raison de son unicité, être sous utilisée parce que les détenteurs de brevets sur les séquences seraient en mesure de s'en interdire mutuellement l'accès.
Ainsi, outre les problèmes éthiques soulevés par ce qui peut apparaître comme une appropriation du génome humain, la multiplication de brevets concurrents portant sur des résultats de plus en plus fondamentaux et fragmentaires, la confusion entre découverte et invention, risquent de bloquer le développement des produits de santé en aval. Le temps et l'argent dépensés à négocier avec tous les détenteurs de brevets pèsent et pèseront de plus en plus lourdement sur l'efficacité de la recherche tant académique que pharmaceutique et clinique.
Un équilibre entre critères économiques, exigences académiques, besoins de santé publique et respect de principes éthiques doit pouvoir être trouvé ; mais il impose que ne soit pas bloqué l'accès à la connaissance des séquences génétiques.
Aussi nous faut-il, pour sortir enfin de cette impasse, trouver une formule qui préserve nos principes tout en constituant une interprétation de la directive qui puisse être ensuite plaidée auprès de la Commission européenne.
Le texte retenu n'assure certes pas une transposition de la directive qui serait inattaquable mais il est défendable : il signifie que le gène, toujours breveté "en tant que", c'est-à-dire par son lien avec une application scientifique ou thérapeutique particulière, n'est jamais réellement couvert par le brevet ; le brevet de méthode nomme le gène, le mentionne formellement, mais n'étend pas en pratique sa protection à celui-ci.
VI ) Enfin, sur un sujet qui hante très souvent le conseil génétique, à savoir les conséquences familiales éventuelles de certains diagnostics et la responsabilité du médecin entre secret médical et non-assistance à personne en danger, le parlement et le gouvernement ont longuement débattu.
Il apparaît en définitive que le secret médical doive s'imposer. Mais la loi explicite désormais l'obligation faite aux médecins d'informer le patient concerné de sa responsabilité s'il ne transmettait par les renseignements nécessaires à ses proches concernés. Cette information s'accompagnera d'un document explicite signé par le médecin et dont le patient attestera de la remise.
VII ) Pour terminer tout à fait, je veux vous confirmer la création dans la loi de santé publique d'une nouvelle profession de santé, celle de conseiller en génétique. Réel besoin, souhaitée par tous, cette création doit beaucoup au travail de Marc Jean-Pierre et Nicole Philip.
L'ouverture de la formation n'est désormais qu'une question de mois, le temps pour les textes réglementaires de valider et organiser les décisions législatives.
En conclusion :
Si l'on me demandait de trouver un seul mot pour résumer la disposition d'esprit fondamentale qui, selon moi, doit présider à l'élaboration des nouvelles lois de bioéthique, j'utiliserais celui de prudence. Entendons-nous bien : la prudence n'est pas l'inverse de l'audace et de la prise de risque. On peut prendre des risques au nom de la prudence ; c'est ce que fait par exemple, l'automobiliste qui franchit la ligne blanche en plein virage pour éviter de percuter un cycliste défaillant. La prudence ne s'oppose pas à la prise de risque ; elle s'oppose à la démesure.
Etre prudent, c'est résister à la tentation de la démesure ; nous pouvons y parvenir si, comme nous y invitait déjà Aristote en son temps, nous cherchons ensemble un point d'équilibre entre deux manières de s'égarer, l'une par excès, l'autre par défaut. Etre prudent consiste à viser un juste milieu entre deux extrêmes opposés, ou - pour reprendre une métaphore utilisée par ce philosophe - "une ligne de crête entre deux abîmes".
Parce que nous vivons une époque où se profile le spectre de la manipulation de l'homme par sa marchandisation, sa sélection prénatale et même sa fabrication programmée, la prudence s'impose comme le repère le plus assuré de l'éthique et du droit. Les avancées spectaculaires de notre science, ébranlée par la double menace du dévoiement et du fourvoiement, ont fait naître autant d'angoisses que de fantasmes dans la conscience de nos contemporains. Nous avons le devoir d'y répondre de façon rationnelle et raisonnable, en restant animés par le souci, lorsque nous sommes en situation d'incertitude, d'explorer tous les possibles, d'anticiper tous les scénarios imaginables.
(source http://www.sante.gouv.fr, le 9 février 2004)