Texte intégral
Monsieur le président, cher Michel DELEBARRE,
Mesdames et messieurs les élus,
Mesdames et messieurs les présidents, directeurs et directeurs généraux d'organismes HLM,
Mesdames et messieurs,
Ce congrès de l'union nationale des fédérations d'organismes HLM est toujours un moment important pour moi. Je sais trop, comme militant, comme ancien député-maire, comme ministre aujourd'hui, la nature des enjeux de vie quotidienne, que comportent les questions à l'ordre du jour de votre congrès.
Je veux en commençant mon propos vous dire le plaisir qui est le mien d'être aujourd'hui parmi vous, à l'occasion de votre congrès annuel et de répondre ainsi à l'invitation du président Michel Delebarre et du comité directeur de l'union HLM. Le congrès de votre union est toujours l'occasion d'un échange entre le monde HLM et l'ensemble de ses partenaires que sont les élus, le monde économique, les administrations publiques et, naturellement, les locataires eux mêmes et je suis heureux de pouvoir y participer cette année, après Louis Besson qui est venu ouvrir votre congrès jeudi.
Je sais que l'organisation de ce congrès à connu des vicissitudes qui vous ont conduits à devoir le décaler au dernier moment, et je veux saluer tous ceux qui ont dû accomplir une deuxième fois un important travail de préparation. Je tenais donc tout particulièrement à être présent cette année pour vous témoigner tout l'attachement et tout le soutien du gouvernement au mouvement HLM. et faire le point, avec vous sur la situation du logement social et sur les principaux dossiers qui concernent vos organismes et les locataires HLM.
Et d'abord un constat : le logement social est confronté aujourd'hui à des enjeux décisifs pour son avenir. Son développement est allé de pair, dans les années d'après guerre, avec le développement de l'urbanisation, dans un contexte où les besoins de logement étaient à la fois importants et urgents. Il a ensuite fait face aux évolutions de la demande sociale pendant la période difficile des années 80 et 90. Depuis quelques années, il est l'un des acteurs majeurs pour une ville durable et équilibrée que chacun appelle de ses vux.
Voilà la réalité, quoiqu'en disent ceux qui s'adonnent à la caricature comme nous l'avons vu lors des débats autour de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains. Nous avons bien sûr réagi avec la plus grande vigueur, car nous savons tous, que les programmes que vous construisez répondent à des objectifs de qualité égale sinon supérieure à ceux du secteur privé, que les demandes affluent lorsque ces logements sont mis en service, que ceux qui habitent s'y trouvent parfaitement bien, et que les élus qui les accueillent sont extrêmement satisfaits de leur intégration dans leur ville. C'est cette image, c'est cette réalité qu'il nous faut ancrer dans l'esprit de nos concitoyens.
Renouveler l'offre de logements, maintenir dans l'ancien et dans le neuf un niveau de loyer réellement accessible aux familles modestes -ce qui suppose parfois un réel effort- renforcer la qualité du service rendu aux locataires, voici trois axes de travail.
Nul n'a de solution miracle, mais je veux vous dire avec force ma conviction que nous pouvons faire beaucoup si tous les acteurs unissent leurs efforts.
Le premier de ces partenaires, celui vers qui d'ailleurs on se tourne le plus volontiers (et pas seulement en matière de logement social !) c'est l'État. Sa responsabilité en matière de logement social est double. Il lui revient, d'abord, en application des orientations définies par le Parlement, d'être le garant du droit au logement de chacun, dans des conditions égales et sans discrimination, du maintien d'une offre de logements de qualité permettant une vraie mixité sociale et urbaine; de l'application concrète de la solidarité nationale, en particulier pour aider chacun à se loger dignement.
Sa seconde mission, qui découle directement de la première, lui impose une responsabilité particulière en matière de financement du logement social.
Au cours des dernières années, je crois pouvoir dire que l'État a fait beaucoup en ce domaine. Sans prétendre à l'exhaustivité, je ne peux manquer de citer quelques unes des décisions prises depuis moins de 18 mois, que Louis Besson a rappelé devant vous avant hier et qui visent à donner aux organismes les moyens de répondre aux enjeux actuels.
Les conditions de financement du logement social ont été, réaménagées et unifiées, comme d'ailleurs vous le souhaitiez, par la création du PLUS, porteur par lui-même de mixité sociale à l'intérieur de chaque programme. Il constitue une avancée indéniable permettant d'envisager des perspectives plus hardies pour la construction neuve comme pour les acquisitions dans l'ancien.
Afin d'encourager chaque organisme dans la voie du renouvellement urbain, le PLUS-Construction-Démolition a été conforté et les crédits existent pour financer en 2000 plus de 10000 logements par ce biais ; cet effort sera poursuivi en 2001.
Par ailleurs, dans le souci de permettre un allégement des charges pesant sur les locataires sans surcoût pour les organismes, je veux rappeler que le régime de la TVA à taux réduit a été étendu dès 2000 aux travaux d'entretien et que la suppression du droit au bail est d'ores et déjà appliquée pour tous les loyers inférieurs à 3 000 francs, et qu'elle sera en 2001 totalement réalisée.
Enfin -et je sais qu'il s'agissait là d'une demande à la fois des associations de locataires et des organismes HLM- le gouvernement a engagé la réforme, à mes yeux très importante compte tenu de son impact, des aides au logement, annoncée par le Premier ministre le 21 juin dernier à l'issue de la conférence de la famille.
Cette réforme, qui constitue une harmonisation par le haut et un effort de solidarité sans précédent en faveur des bénéficiaires d'aides personnelles au logement, sera mise en oeuvre sur deux exercices à compter de 2001. Elle n'épuise certes pas l'ensemble des questions touchant aux aides au logement, mais constitue une avancée majeure vers une plus grande égalité de traitement entre bénéficiaires d'aides au logement.
L'État assume ses responsabilités et il continuera à le faire, tant en matières d'aides au logement -en mettant en uvre les orientations que je viens d'indiquer- qu'en veillant aux conditions de montage des opérations. Ce sera en particulier le cas en ce qui concerne les conséquences pour les organismes de la hausse récente du taux du livret A, qui répond au souci justifié de maintenir la rémunération normale de l'épargne populaire.
Nous nous trouvons en effet devant la première hausse du taux du livret A en 19 ans ; elle survient à un moment où le mouvement HLM s'est engagé dans un gel des loyers sur les années 2000 et 2001 ! C'est là une situation exceptionnelle qui appelle en effet un examen attentif.
Le gouvernement attache, vous le savez, une importance toute particulière à ce que le gel des loyers, qui concerne plusieurs millions de nos concitoyens parmi les plus modestes, soit bien garanti jusqu'à fin 2001. Sa réflexion politique a porté sur la manière de tenir compte de cette donne nouvelle, et au delà sur les modalités envisageables à partir de 2002, en un mot sur la manière de réenclencher et de consolider, sur ce point essentiel des loyers, le partenariat engagé en 1999 avec le mouvement HLM.
Il lui a paru que pour garantir cet acquis, compte tenu par ailleurs de l'effet de l'allégement de la taxe foncière sur la propriété bâtie qui a été évoqué avant hier, il convenait de faire en plus, un effort exceptionnel de plusieurs centaines de millions de francs, près d'un milliard, correspondant à la neutralisation complète des charges nettes supplémentaires constatées en 2001 dans vos comptes du fit de la hausse du livret A.
Le gouvernement souhaite donc, Monsieur le président, pouvoir entériner cette mesure comme élément majeur d'une convention avec le mouvement HLM, qui viendrait consolider le gel des loyers et réfléchir à des conditions de sortie tenant compte, comme vous le disiez, de la réalité des aides personnelles et des ressources des habitants.
Vous le voyez, l'État a bien l'intention de pleinement jouer son rôle dans l'action collective qu'il faut engager pour assurer l'avenir du logement social.
Le deuxième partenaire important dans cette action, ce sont, naturellement, les collectivités locales. Dans notre système institutionnel, plus rien d'important, on le sait et c'est un bien, ne peut se faire sans la participation ou au moins l'accord des collectivités locales et avant tout des communes ou -dans le cadre prévu par la loi "Chevènement"- des intercommunalités. En matière de logement social, il en va naturellement de même : par les choix en matière d'urbanisme, par le niveau des investissements publics qu'elles consentent, les collectivités locales influent en positif ou en négatif sur le développement du logement social.
Des attitudes qui procéderaient d'un refus égoïste visant à interdire l'accès du territoire à certains ménages ou à certaines personnes ne sont pas admissibles, car elles conduisent à amplifier les phénomènes de ségrégation sociale et spatiale que nous voulons au contraire combattre. C'est d'ailleurs l'un des objectifs de la loi "SRU" que de lutter contre ces tendances, par l'institution d'un objectif à terme de 20 % de logements locatifs sociaux dans chaque commune urbaine, le cas échéant en faisant appel à l'arbitrage -voire à l'intervention directe- de l'État.
Quant à ceux qui disposent déjà d'une offre conséquente et qui craignent que le développement de nouveaux programmes n'accroisse les difficultés dans leur parc ancien, ils doivent être persuadés que l'effort progressif de renouvellement urbain passe par la création d'une offre nouvelle, de qualité, attractive et à même de modifier l'image du logement social. La construction d'une offre nouvelle, appréciée des anciens locataires comme des nouveaux, est dans bien des cas un préalable pour engager la restructuration urbaine de zones actuellement trop monolithiques et dans lesquelles il faut diversifier les formes d'habitat. Je pense notamment à ce parcours résidentiel auquel chacun à droit. Ce que nous voulons donc, c'est que le logement social se développe partout, sous les formes adaptées à chaque cas, car c'est un atout pour l'équilibre de nos villes et la cohésion de notre société.
Si l'État doit se mobiliser -et il le fait- si les collectivités locales doivent soutenir cette action, il reste que l'essentiel repose sur ceux dont c'est la mission même : les organismes HLM dont vous êtes ici les représentants. Vous en serez les fers de lance en portant sur le terrain, les dynamiques qui sont aujourd'hui nécessaires. Et permettez-moi de saluer les propos forts que vous avez tenus à l'instant.
Dans un contexte qui n'est plus celui des décennies passées, votre mission est double, et certains diraient également, doublement difficile -mais c'est pour cela aussi qu'elle est si importante : il s'agit de bâtir le logement social de demain, tout en gérant et en adaptant celui d'aujourd'hui- qui constituera, pendant de longues années encore, la majorité de l'offre.
Bâtir, gérer, adapter les logements sociaux, être les premiers à engager le vaste effort de renouvellement urbain dont la France a aujourd'hui besoin, c'est être à la jonction de l'aménagement, de la construction et des problèmes humains et de vie quotidienne de nos concitoyens ; c'est allier compétences techniques et professionnelles à un engagement militant au service de tous et d'abord des plus modestes.
Notre pays a besoin de vous, car, notre pays a besoin de logements de qualité, correctement situés, réalisés à un coût raisonnable pour loger temporairement ou durablement une partie importante de la population. Parce que les logements sociaux ont largement contribué à façonner les villes telles qu'elles sont, ils devront également contribuer à faire ce qu'elles seront demain. Les investisseurs privés, aussi utiles soient-ils, ne répondront jamais à tous ces besoins. Pour augmenter et diversifier l'offre, renouveler progressivement le parc, mais aussi pour imposer une autre image du logement social, vous savez bien qu'il faut construire, et acquérir ! Nous devons donc nous battre pour que la production de logement social atteigne, dans les mois et années à venir, le niveau nécessaire pour faire face aux besoins, et pour lequel les moyens existent dès aujourd'hui. Je sais pouvoir compter sur vous pour qu'ensemble nous surmontions les obstacles qui subsistent. Vous avez les compétences nécessaires et, je le sais, la volonté politique.
Certes, construire n'est pas toujours simple, en particulier en période de forte demande, qui pèse sur les prix. Dorénavant pour construire, accroître, diversifier le parc de logements il faut naturellement des opportunités foncières, mais aussi de plus en plus, rechercher des acquisitions d'immeubles anciens pour réaliser des petites opérations bien réparties sur le territoire. Adapter la production nécessite donc de s'adapter à ce nouveau contexte, tant en ce qui concerne la maîtrise d'ouvrage que la gestion locative. De nombreux organismes ont lancé des projets d'établissement ou d'entreprise pour accélérer ces mutations et il faut les en féliciter. Je crois qu'il y a là un enjeu important pour l'avenir.
Moderniser le logement social, transformer son image, c'est aussi organiser les conditions du meilleur service possible aux usagers, aux locataires et aux demandeurs de logement. La société évolue, les exigences des habitants évoluent aussi. Je sais que, dans les quartiers, les agents des organismes d'HLM sont quotidiennement au contact des réalités sociales et des difficultés de vie de nombre d'habitants. Assurer à chacun de ces locataires des prestations de bon niveau permettra que le logement social reste synonyme de qualité et qu'il préserve ainsi autant sa légitimité que son attractivité. La encore, je sais pouvoir compter sur vous.
Dans ce vaste effort collectif, l'État, les collectivités, les organismes HLM ne peuvent pas tout et je veux dire ici ma conviction: rien de ce dont nous parlons ne sera possible sans les premiers intéressés, c'est à dire les habitants. Le mouvement du logement social a toujours, dans les périodes difficiles -et il en a connu par le passé- puisé sa force dans le lien très fort qui l'unit à ceux pour qui il a été créé. Le mouvement coopératif illustre naturellement, par son histoire, ce lien. La présence des représentants des locataires dans les conseils d'administration des offices et des sociétés anonymes d'HLM traduit également l'importance de ce lien : un bailleur HLM n'est pas, de ce point de vue là non plus, tout à fait comme un autre.
Engager le renouvellement urbain, adapter les logements, moderniser le service rendu, c'est aussi et j'allais dire d'abord, l'affaire des locataires. Il faut faire en sorte, par le dialogue et la concertation, que les choix qui seront faits correspondent au mieux aux attentes des habitants. C'est avec à l'esprit ces quelques principes que le gouvernement a souhaité introduire, dans le projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains, des mesures fortes favorisant une meilleure concertation au sein des organismes HLM.
Bien sûr, engager et conduire une vraie concertation exige des moyens et c'est pourquoi, afin de permettre aux représentants élus des locataires d'exercer convenablement leur mandat, le gouvernement a accepté plusieurs amendements parlementaires prévoyant obligatoirement l'indemnisation des administrateurs. Enfin, il considère qu'il serait légitime que les fonds reçus par la nouvelle caisse de garantie du logement social puissent contribuer aux dépenses des fédérations nationales représentatives des locataires comme ils contribuent déjà à ceux du mouvement HLM.
Monsieur le président, nous avons bien d'autres chantiers devant nous, et vous en avez évoqués vous-même à l'instant : l'accélération du renouvellement urbain, la lutte contre la discrimination, qui passe aussi par la lutte contre le communautarisme. J'ai bien noté aussi votre suggestion d'un fonds spécifique, ainsi que le nécessaire examen du financement des nouveaux "plus" !...
Je veux vous dire, pour conclure mon propos déjà long, la volonté du gouvernement de soutenir fortement le logement social face aux véritables défis qui se présentent aujourd'hui à lui et de le faire avec vous, organismes HLM; avec votre Union, avec le mouvement social que vous représentez. Nous devons et nous pouvons avoir confiance en l'avenir, dès lors que nous sommes capables d'uvrer ensemble dans le même sens : État, collectivités locales, organismes, locataires. Je trouve ici, dans ce congrès et dans les orientations qui ont été définies à l'instant par le Président Delebarre, la marque d'une volonté réelle d'avancer, dans un partenariat renouvelé entre tous les acteurs. Je veux, à cette tribune, en prendre acte et vous dire, en réponse, le souhait du gouvernement, de travailler avec vous en ce sens. Dans plusieurs domaines, des contrats d'objectifs peuvent être passés, dès maintenant, au plan local et impliquant l'État, les organismes HLM et les collectivités locales : sur la relance de la production locative, sur les attributions, sur les conditions de la sortie, à la fin de l'année 2001, du gel des loyers.
Voici, mesdames et messieurs, autant de dossiers qui nous attendent dans l'année qui vient, et nous serons bien sûr appelés à nous revoir pour les mener ensemble.
Je sais pouvoir compter sur vous comme vous pouvez compter sur moi ; car nous partageons les mêmes objectifs : offrir à tous nos concitoyens, quelle que soit leur situation sociale, des conditions d'habitat de qualité ; leur permettre de vivre dignement et de s'épanouir dans leur quartier, dans leur ville, c'est-à-dire dans un cadre urbain équilibré et accueillant ; et par là même défendre de manière décisive ces deux valeurs fondamentales que sont, pour la démocratie, la solidarité et la justice sociale.
Plein succès à cette nouvelle politique sociale du logement, solidaire, ouverte, équilibrée et ambitieuse, plein succès et au mouvement HLM.
Merci de votre attention.
(source http://www.equipement.gouv.fr, le 29 septembre 2000)