Déclaration de M. Xavier Darcos, ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie, sur les efforts de la France en faveur de la biodiversité et du développement durable, à Paris le 28 janvier 2005.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Clôture de la conférence internationale "Biodiversité : science et gouvernance", à Paris le 28 janvier 2005

Texte intégral

Monsieur le Président,
Messieurs les Ministres,
Monsieur le Commissaire,
Messieurs les Directeurs,
Mesdames et Messieurs les Scientifiques,
Mesdames et Messieurs les Responsables d'associations,
Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureux et très honoré d'ouvrir cette séance de clôture de la Conférence internationale sur la biodiversité. Comme vous le savez, la France est à l'initiative de cette conférence, et l'important discours prononcé lundi par le président Jacques Chirac est le reflet de l'engagement très concret de notre pays dans ce domaine.
Nous voulons donner un nouvel élan à la préservation de la diversité des ressources vivantes. Nous voulons relever ce défi écologique majeur qui exige, ici et ailleurs, de mobiliser toutes les énergies, toutes les volontés. Nous devons faire en sorte que la parole des experts, que la voix de la communauté scientifique mais aussi celle des associations et des organisations qui oeuvrent sans relâche pour la préservation de la nature soit mieux écoutée et plus largement entendue.
Vous êtes plus d'un millier, scientifiques, entrepreneurs, diplomates, membres des organisations non gouvernementales, représentants des gouvernements et des collectivités locales, à être venus du monde entier pour participer à ces travaux. Je vous remercie très sincèrement, Mesdames et Messieurs, de votre présence et de votre engagement. Je tiens à souhaiter tout particulièrement la bienvenue aux participants les plus persévérants, ceux qui nous honorent de leur présence aujourd'hui ! Je tiens à saluer les ministres venus de très nombreux pays, les commissaires européens et l'ensemble des personnalités éminentes qui ont accepté de clore cette conférence avec nous.
Mais je vous remercie surtout d'avoir répondu à l'invitation de notre pays, car pour la France, la préservation de la diversité biologique n'est pas seulement une composante essentielle de notre politique nationale et internationale d'environnement. Elle s'inscrit plus largement dans le choix qu'à fait notre pays en faveur d'un développement que nous voulons durable.
En témoignent l'adoption, l'an dernier, des orientations de la stratégie nationale pour la biodiversité, mais aussi plus largement celle de la Charte de l'Environnement, qui reconnaît aux principes écologiques une valeur constitutionnelle, au même titre que les Droits de l'Homme proclamés en 1789, ou les droits économiques et sociaux adoptés en 1946.
En tant que ministre de la Coopération et du Développement, je voudrais ajouter que la France attache aussi une importance toute particulière aux questions d'environnement et plus particulièrement à la biodiversité, dans sa politique de coopération internationale. Je souhaite souligner à cet égard que la stratégie sectorielle qui sera proposée à la prochaine réunion du Comité interministériel français qui s'occupe du développement, le CICID, devrait accorder des moyens financiers renforcés à nos politiques de gestion durable et de protection de la biodiversité, notamment au niveau des aires protégées et des écosystèmes forestiers humides.
Cette orientation en faveur d'une aide accrue à la biodiversité me semble fondamentale. Car, ne nous le cachons pas, la responsabilité écologique est d'abord celle des pays les plus riches : à l'échelle du monde, la fracture des sociétés accompagne et aggrave la dégradation de l'environnement. Aujourd'hui même, plus d'un milliard de personnes vivent avec moins d'un dollar par jour. Un milliard - et ce sont souvent les mêmes - n'ont pas accès à l'eau potable et deux milliards et demi n'ont pas accès à l'assainissement.
C'est donc une évidence : les défis écologiques et de réduction de la pauvreté sont étroitement liés. Sans solidarité internationale, nous ne pourrons construire les bases solides d'une croissance durable et équitable. Sans une augmentation massive de l'aide publique au développement, les pays du Sud, en particulier les pays africains, ne pourront enclencher le cercle vertueux du développement économique et de la bonne gouvernance.
Face à ces défis, la France et l'Union européenne ont choisi d'encourager les modèles de développement durable. A Rio, à Monterrey, à Johannesburg, à Evian, nous avons défendu l'idée d'une logique de l'intérêt général mondial : celle d'un contrat international plus équitable, qui encourage les pays du Sud sur le chemin de la bonne gouvernance, tout en leur apportant les ressources nécessaires à leur développement. C'est dans cet esprit que notre pays a décidé d'augmenter le niveau de son aide publique au développement à 0,5 % du PNB en 2007, pour atteindre 0,7 % en 2012.
Mais au-delà de l'action d'un seul pays, les défis du changement global et du développement durable appellent des réponses collectives, des réponses multilatérales qui engagent l'ensemble des Etats nations. Voilà pourquoi la France a présenté, en septembre dernier à New York, une proposition visant à garantir un financement suffisant au Programme des Nations unies pour l'Environnement, afin de le transformer, dans un second temps, en agence spécialisée des Nations unies pour l'environnement (ONUE).
Voilà pourquoi nous continuerons d'agir en faveur de nouvelles avancées de la gouvernance internationale, pour lesquelles nous devrons trouver des modalités de financement adéquates et suffisantes. Il faut tout faire pour atteindre les Objectifs du Millénaire, et en premier lieu identifier des mécanismes de financement innovants qui seront, comme le souligne le rapport Landau, économiquement rationnels, techniquement faisables et socialement justes.
Je crois pouvoir dire, au terme de cette semaine de débats et d'échanges, que cette Conférence, par la très haute qualité des personnalités qui y sont intervenues, par la richesse des réflexions, des propositions ou des annonces auxquelles elle a donné lieu, enfin par son impact médiatique, a constitué un événement particulièrement important. Elle a pleinement atteint ses objectifs. Ils étaient clairs, et vous les connaissez mieux que quiconque, vous qui animerez et ferez vivre ses conclusions dans vos travaux respectifs.
Le premier de ces objectifs était sans doute l'évaluation de nos besoins et de nos connaissances, du développement des recherches sur la biodiversité. Il nous incombait d'identifier les priorités de notre recherche, de proposer un agenda international sur la biodiversité et de définir les bases d'un mécanisme international de coordination de l'expertise.
J'ai pris bonne note des recommandations et des propositions que vos travaux ont fait apparaître sur ce point. Je veux vous assurer que la France, avec tous les pays qui souhaitent se joindre à elle, continuera à soutenir le processus de consultation qui devrait permettre d'en définir les modalités opérationnelles.
Mais il nous incombait aussi de sensibiliser l'opinion publique et les entreprises. Car la biodiversité et ses enjeux restent encore trop peu connus du grand public, au contraire du réchauffement climatique. Pallier ce déficit d'opinion, faire oeuvre de pédagogie auprès du grand public et des décideurs, auprès des parlementaires également, était un impératif sans doute aussi important que le développement de la connaissance scientifique.
C'est d'ailleurs dans cette même perspective d'information, d'échange et de débat, que j'ai participé en début de semaine à un entretien parlementaire qui a réuni, sur le thème du développement durable, des députés, des sénateurs, des députés européens de toutes sensibilités autour de plusieurs invités prestigieux. Leur notoriété, leur action exemplaire et reconnue en faveur de l'environnement, sont des vecteurs de diffusion essentiels, indispensables auprès du grand public ; tout comme, permettez-moi de le répéter, votre action quotidienne.
Mais je tiens aussi à vous assurer que j'ai bien entendu les appels à un effort rapide et important pour aider les pays du Sud à renforcer leurs capacités scientifiques et institutionnelles dans le champ de la biodiversité, diversité biologique souvent très riche dans les pays du Sud. Cet appel a été particulièrement souligné lors de la séance d'ouverture de ce lundi.
Je constate également que la Conférence a mis en évidence l'insuffisance des modalités d'un dialogue multilatéral sur ces questions. Pour sa part, la France a depuis longtemps témoigné son attachement à un tel dialogue, dialogue dans lequel les pays du Sud doivent pouvoir trouver toute leur place et être en mesure d'exprimer leurs positions, leurs préoccupations et leurs besoins.
Vous connaissez l'attachement que la France a toujours affirmé pour l'idée d'équité dans l'accès aux ressources biologiques et celle d'un partage équitable des bénéfices. La France est prête à accueillir, en concertation avec les pays qui le souhaiteraient et notamment ceux du Sud, une réunion à haut niveau sur cette question - ce avant la réunion du deuxième groupe de travail de la Convention qui aura lieu en Espagne en février 2006.
Dans le même esprit, la France continuera à oeuvrer activement pour mieux faire prendre en compte les savoirs locaux dans le droit international.
Notre pays a toujours considéré comme essentiel que tous les pays, y compris les pays les moins avancés, les PMA, soient en mesure de participer activement à la gouvernance internationale de l'environnement et de le biodiversité. Ils doivent, pour cela, disposer de capacités scientifiques et techniques propres.
En ce qui le concerne, le ministère des Affaires étrangères a donc toujours accordé, et continuera à le faire, une place importante à la coopération scientifique et à la formation universitaire et professionnelle dans ses actions sur les crédits de l'aide publique au développement. Les thématiques liées à la conservation et à la gestion durable de la biodiversité doivent y trouver une place accrue. Ainsi, dans les mois qui viennent, nous pourrions engager de nouveaux fonds - plus de 10 millions d'euros - pour renforcer la coopération scientifique entre des équipes du Sud, des équipes françaises de l'Institut de recherche pour le développement (IRD), du Centre de coopération internationale en recherche agronomique (CIRAD), du CNRS et du Muséum national d'histoire naturelle dans ce domaine.
Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que je tenais à vous dire brièvement. Soyez assurés que les actes de cette Conférence internationale constitueront pour moi un outil de travail primordial. Comme le soulignait le président Jacques Chirac avant-hier, lors du Sommet de Davos, se manifeste aujourd'hui "l'affirmation d'une conscience planétaire, d'un sentiment de citoyenneté mondiale. A l'heure du monde ouvert, l'humanité, dans sa diversité, mesure combien elle partage une même destinée". La protection et la sauvegarde de la biodiversité sont à l'évidence les manifestations les plus essentielles de cette prise de conscience
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 1e février 2005)