Texte intégral
Q- A. Fleury : Merci d'être avec nous pour cette interview croisée Radio Classique-L'Express. L'actualité ne maque pas : réforme de la loi Galland et loi sur les PME, ce sont vos deux principaux chantiers pour les mois à venir, plus la réforme de la taxe professionnelle. On va commencer par la loi Galland. J.-P. Raffarin a dit il y a dix jours : "Elle sera bien révisée mais sans précipitation". Cela n'équivaut-il pas à un enterrement de première classe ?
R- Tout d'abord, le terme de "loi Galland" n'est peut-être pas le mieux choisi. On a en France un Code général du commerce qui avait été amandé suite à des propositions faites par le parlementaire Galland à l'époque, et aujourd'hui, en fait, il faut que nous puissions regarder avec le temps. C'est pour cela que j'ai souhaité que l'on calme le jeu sur ce sujet ; que nous mettions autour de la table, à la fois, les patrons de PME, la grande distribution, le commerce de centre-ville, les producteurs agricoles, les grossistes etc. Et que l'on voie comment, dans les meilleures conditions, l'on peut encourager, dynamiser la consommation parce que l'objectif c'est celui-là.
Q- A. Fleury : Oui, mais le temps presse quand même. Les industriels s'estiment, eux, par exemple, les grands perdants face aux distributeurs ; ils estiment qu'ils perdent de Même les distributeurs, finalement, trouvent qu'il faut effectivement trancher avant l'été ?
R- Je crois précisément que les industriels étaient ravis que l'on calme un peu le jeu et que l'on n'aille pas dans la précipitation à coups de déclarations, comme cela a pu être fait à un certain moment, et que l'on prenne le temps de travailler sérieusement tous autour de la table. Donc, l'objectif est de rendre des propositions en tout début d'année ; on s'est fixé comme date butoir le 15-20 février ; rendre des propositions à J.-P. Raffarin. Et, à partir de là, on verra effectivement comment l'on doit apporter des modifications au plan législatif. Mais tout n'est pas législatif. Il y a aussi ce qui relève du bon accord équilibré entre différents partenaires. On n'est pas dans un système de prix administrés ; ce n'est pas l'Etat qui fixe les prix. Ce sont d'abord des distributeurs, des producteurs qui se mettent d'accord sur une charte globale. Et l'Etat est là pour veiller à ce que les équilibres soient respectés entre les uns et les autres.
Q- E. Scholl : Vous vous référez souvent au cas des Pays-Bas où une guerre des prix se serait traduite par une chute de l'emploi. Ces conséquences sont-elles transposables en France et les craignez vous ?
R- Il y a toujours un risque. La situation dans les Pays-Bas est la suivante : il y a eu une baisse des prix très forte, une guerre des prix, peut-on même dire, entre réseaux de distribution. Cela s'est traduit en dix mois par une baisse des prix en moyenne de 3 % et de 10 % sur les 1 000 premières références, c'est-à-dire, les 1 000 premiers produits les plus vendus. Et la conséquence de cela, a été 17 000 emplois supprimés, 10 000 équivalents temps plein. Sur un pays où, en gros, la grande distribution représente 100 000 emplois, 17 000 ont disparu en dix mois. Donc, cela mérite quand même qu'on s'y attarde un peu, et de regarder les conséquences dramatiques qu'il peut y avoir. C'est pour cela que j'ai souhaité que l'on aille voir sur place, donc j'y suis allé, avec les réseaux de la grande distribution, avec les grandes marques, avec les PME. On a écouté tous nos interlocuteurs là-bas qui nous ont dit : attention, faites attention ! Pour nous, les conséquences ont été dramatiques ! Donc voilà. Maintenant, de là à dire que le système est le même aux Pays-Bas et en France, c'est autre chose. Mais simplement, quand on a des conséquences comme celles-là, on supprime 17 000 emplois en dix mois, on prend le temps de réfléchir avant d'agir.
Q- A. Fleury : Mais pour revenir à ces marges arrière, quel serait en fait le bon compromis, en termes de pourcentage, entre distributeurs et industriels ? Jusqu'où pourrait-on aller décemment dans la baisse de ces marges arrière, selon vous ?
R- Il faudrait que l'on aille tout simplement dans de la clarification déjà. Rappelons ce que c'est que les marges arrière : c'est un service, une action, qui est menée par...enfin... Quel est le seuil de revente à perte en France quand on achète un produit 100 il est interdit, et c'est une des bases de la loi Galland, de le revendre en dessous de 100, c'est ce qui est plutôt sain, ce qui évite des opérations de dumping. Là-dessus, la grande distribution a mis en place une système de marges arrière, c'est à- dire, qui facture par ailleurs des services aux producteurs, aux PME, aux producteurs agricoles dans certains cas. Ce que je souhaite, c'est qu'il y ait de la transparence, c'est-à-dire que l'on sache ce qui relève du rôle de la grande distribution et ce qui est de la responsabilité d'une PME, c'est-à-dire, mettre un produit dans un rayon, la grande distribution n'a pas à le facturer aux PME. C'est bien de sa responsabilité. Quand on est distributeur, on est là pour mettre les produits sur les étagères. Et on ne le fait pas payer à d'autres. Et c'est pour cela qu'il faut mettre davantage de clarification. La coopération commerciale en tant telle ne me gêne pas ; quand un producteur et un distributeur se disent : ensemble, on va mener une campagne de promotion, c'est un acte normal de commerce. En revanche, que le distributeur dise : le fait de placer votre produit en tête de gondole ou de le mettre à un mètre dans les étagères plutôt que de le mettre à 20 cm ou 1,80 mètre de haut, c'est-à-dire, plus ou moins accessible, cela, je le refacture au producteur. Là, je ne suis pas d'accord.
Q- A. Fleury : Pour la loi Galland, on estime en gros, que c'est, en gros 33 %, le tiers du tarif net facturé par les industriels qui...
R- Ce sont des moyennes.
Q- A. Fleury : En moyenne effectivement.... Pourrait-on arriver à 25 %. Est-ce quelque chose de crédible ?
R- Je pense que la coopération commerciale en la définissant avec précision, on s'apercevrait très vite que l'on peut très largement diminuer ces systèmes de marges arrière. Je ne vais pas rentrer dans les discussions de pourcentages, parce que cela fait l'objet des travaux, entre autres, du groupe de travail qui se réunit maintenant depuis un mois chaque semaine, et qui va se réunir jusqu'au 15-20 février ; donc, on verra avec eux comment on peut arriver à une proposition qui ne sera jamais consensuelle mais qui sera le plus possible.
Q- A. Fleury : Pensez-vous, par exemple, que les industriels pourraient jouer le jeu ? En ce moment, il y a la renégociation des conditions tarifaires entre les industrielles et la grande distribution pour l'année à venir. Avez-vous l'impression que les industriels pourraient jouer le jeu dans ces cas-là, et une modération ?
R- Moi, je pense que les industriels jouent le jeu ; tout le monde a intérêt à relancer la consommation. Et à partir de là, il faut rester raisonnable dans les prix et puis raisonnable aussi dans les pratiques commerciales. Personne n'a intérêt à lancer des opérations de dumping commercial, tout simplement, parce que le premier élément de consommation c'est le pouvoir d'achat, et le pouvoir d'achat, c'est d'abord avoir un travail et un salaire. Donc, c'est pour cela que je dis : attention à ce qui s'est passé aux Pays-Bas, attention aux suppressions d'emplois, parce que c'est la suppression de tout pouvoir d'achat.
Q- E. Scholl : Après les fêtes de fin d'année, peut-on s'attendre à des fortes campagnes de baisse des prix et d'offres promotionnelles très importantes ? Vous y attendez-vous, le redoutez-vous ?
R- Après la période des fêtes, on aura la période, entre autres, des soldes. Et puis, on verra à ce moment-là. Il est trop tôt pour le dire, mais il y a toujours effectivement une période de baisse de prix après la fin d'année.
Q- A. Fleury : N'avez-vous pas l'impression quand même, que vous donnez l'impression de mettre la pédale douce alors que c'est un sujet important pour les Français ? Un sondage est paru ce matin : les deux personnalités économiques pour les Français, ce sont N. Sarkozy, numéro 1, et M.-E. Leclerc, numéro 2, les deux hérauts, les deux défenseurs d'une baisse des prix dans la distribution. Ne jouez-vous pas un peu à contretemps ?
R- Qui a financé ce sondage ?
Q- A. Fleury : ... Un institut de sondage. Ne jouez-vous pas un petit peu à contretemps ?
R- Non. J'ai l'impression de jouer dans le registre qui est le mien, celui du sérieux et du travail, avec l'ensemble des interlocuteurs. D'ailleurs, vous savez, si tous - à l'exception de M.-E. Leclerc qui préfère faire les déclarations de son côté -, si tous ont choisi de se rassembler dans ces réunions toutes les semaines puisque l'ensemble de la grande distribution, les patrons de grande marques, les réseaux de PME, les producteurs, les grossistes, tout le monde est ensemble tous les mercredis pour faire ce travail sérieux, eh bien c'est que chacun a le souci d'avancer vers, encore une fois, ce qui ne sera pas un consensus général, mais ma foi, je pense un bon accord.
Q- A. Fleury : Après la loi Galland, votre grande actualité, c'est donc en janvier ou en février - vous allez nous préciser le calendrier -, la loi sur les PME, la loi sur les entreprises que vous allez présenter. Pouvez-vous nous en rappeler les grandes lignes ?
R- Il y a quatre objectifs dans cette "loi entreprises". Tout d'abord, dire que le paysage s'est éclairci sur le monde de l'entreprise. Il suffit de regarder les chiffres de créations d'entreprises. Il y a deux ans, nous étions à moins de 200 000 entreprises créées chaque année en France, en net, c'est-à-dire, après avoir décompté celles qui meurent. Nous allons finir l'année à 230 000 créations d'entreprises, donc on est vraiment dans une période où les choses vont mieux. Ceci étant, il convient maintenant d'accompagner dans les meilleures conditions ces entreprises. Et donc, quatre priorités ont été retenues : l'accès au financement - trop de projets aujourd'hui intéressants ne trouvent pas de financeurs, et donc ce sont des entreprises qui pourraient se créer et qui ne se créent pas - ; le statut des personnes - celui des conjoints, des gérants, de tous les intervenants au sein de l'entreprise - ; troisième axe : la transmission - beaucoup d'entreprises dynamiques ne trouvent pas ou n'arrivent pas à se transmettre - ; quatrième point : celui de la simplification administrative.
Q- E. Scholl : Sera-t-il question d'impôt sur la fortune, ISF, dans votre projet ?
R- Aujourd'hui, il n'y a rien d'écrit sur ce sujet. Je pense d'abord que le terme d'Impôt sur la fortune n'est peut-être pas le mieux approprié. Je préfèrerais que l'on parle d'impôt sur la patrimoine, ce qui est un peu plus juste, parce que le côté "fortune" est connoté et a un côté un peu indu qui ne correspond pas toujours à la réalité. Parce que nous avons des gens qui, aujourd'hui, sont taxés et on ne peut pas dire que cela leur soit tombé du ciel. Donc, il faut à mon avis mieux approcher les choses peut-être - mais cela fera l'objet je pense d'un autre débat - sous l'angle du patrimoine plutôt que sur la fortune.
Q- A. Fleury : Qu'est-ce qui est prévu quand même, vous nous l'expliquiez pour le conjoint de l'entrepreneur, et puis, peut-être, la famille de l'entrepreneur. Sera-t-il possible d'avoir des déductions fiscales si on investit dans l'entreprise familiale par exemple ?
R- Pour le conjoint, tout d'abord, quand on est sur les très petites entreprises - un commerce, une entreprise artisanale - c'est à peu près deux tiers des conjoints qui travaillent dans l'entreprise familiale et seulement 10 % d'entre eux ont des droits sociaux ouverts. Donc, l'objectif est d'avoir une reconnaissance sociale complète, mais aussi accès à des fonds de formation, une reconnaissance de l'expérience qui est la leur. Tous les maires de communes ou les parlementaires ou conseillers généraux ont pour habitude de recevoir dans leur permanence des conjoints d'artisan ou de commerçant, qui ont travaillé 20, 25, 30 ans de leur vie. Et puis, parce que les aléas de la vie sont ainsi, suite à un veuvage, à un divorce ou à une difficulté économique, il y a des gens qui se retrouvent avec rien, aucune reconnaissance ; on leur dit "vous êtes conjoints d'artisan ou conjoint de commerçant. Eh bien, c'est de leur donner un vrai statut et de les reconnaître complètement pour le travail qui a été le leur.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 21 décembre 2004)
R- Tout d'abord, le terme de "loi Galland" n'est peut-être pas le mieux choisi. On a en France un Code général du commerce qui avait été amandé suite à des propositions faites par le parlementaire Galland à l'époque, et aujourd'hui, en fait, il faut que nous puissions regarder avec le temps. C'est pour cela que j'ai souhaité que l'on calme le jeu sur ce sujet ; que nous mettions autour de la table, à la fois, les patrons de PME, la grande distribution, le commerce de centre-ville, les producteurs agricoles, les grossistes etc. Et que l'on voie comment, dans les meilleures conditions, l'on peut encourager, dynamiser la consommation parce que l'objectif c'est celui-là.
Q- A. Fleury : Oui, mais le temps presse quand même. Les industriels s'estiment, eux, par exemple, les grands perdants face aux distributeurs ; ils estiment qu'ils perdent de Même les distributeurs, finalement, trouvent qu'il faut effectivement trancher avant l'été ?
R- Je crois précisément que les industriels étaient ravis que l'on calme un peu le jeu et que l'on n'aille pas dans la précipitation à coups de déclarations, comme cela a pu être fait à un certain moment, et que l'on prenne le temps de travailler sérieusement tous autour de la table. Donc, l'objectif est de rendre des propositions en tout début d'année ; on s'est fixé comme date butoir le 15-20 février ; rendre des propositions à J.-P. Raffarin. Et, à partir de là, on verra effectivement comment l'on doit apporter des modifications au plan législatif. Mais tout n'est pas législatif. Il y a aussi ce qui relève du bon accord équilibré entre différents partenaires. On n'est pas dans un système de prix administrés ; ce n'est pas l'Etat qui fixe les prix. Ce sont d'abord des distributeurs, des producteurs qui se mettent d'accord sur une charte globale. Et l'Etat est là pour veiller à ce que les équilibres soient respectés entre les uns et les autres.
Q- E. Scholl : Vous vous référez souvent au cas des Pays-Bas où une guerre des prix se serait traduite par une chute de l'emploi. Ces conséquences sont-elles transposables en France et les craignez vous ?
R- Il y a toujours un risque. La situation dans les Pays-Bas est la suivante : il y a eu une baisse des prix très forte, une guerre des prix, peut-on même dire, entre réseaux de distribution. Cela s'est traduit en dix mois par une baisse des prix en moyenne de 3 % et de 10 % sur les 1 000 premières références, c'est-à-dire, les 1 000 premiers produits les plus vendus. Et la conséquence de cela, a été 17 000 emplois supprimés, 10 000 équivalents temps plein. Sur un pays où, en gros, la grande distribution représente 100 000 emplois, 17 000 ont disparu en dix mois. Donc, cela mérite quand même qu'on s'y attarde un peu, et de regarder les conséquences dramatiques qu'il peut y avoir. C'est pour cela que j'ai souhaité que l'on aille voir sur place, donc j'y suis allé, avec les réseaux de la grande distribution, avec les grandes marques, avec les PME. On a écouté tous nos interlocuteurs là-bas qui nous ont dit : attention, faites attention ! Pour nous, les conséquences ont été dramatiques ! Donc voilà. Maintenant, de là à dire que le système est le même aux Pays-Bas et en France, c'est autre chose. Mais simplement, quand on a des conséquences comme celles-là, on supprime 17 000 emplois en dix mois, on prend le temps de réfléchir avant d'agir.
Q- A. Fleury : Mais pour revenir à ces marges arrière, quel serait en fait le bon compromis, en termes de pourcentage, entre distributeurs et industriels ? Jusqu'où pourrait-on aller décemment dans la baisse de ces marges arrière, selon vous ?
R- Il faudrait que l'on aille tout simplement dans de la clarification déjà. Rappelons ce que c'est que les marges arrière : c'est un service, une action, qui est menée par...enfin... Quel est le seuil de revente à perte en France quand on achète un produit 100 il est interdit, et c'est une des bases de la loi Galland, de le revendre en dessous de 100, c'est ce qui est plutôt sain, ce qui évite des opérations de dumping. Là-dessus, la grande distribution a mis en place une système de marges arrière, c'est à- dire, qui facture par ailleurs des services aux producteurs, aux PME, aux producteurs agricoles dans certains cas. Ce que je souhaite, c'est qu'il y ait de la transparence, c'est-à-dire que l'on sache ce qui relève du rôle de la grande distribution et ce qui est de la responsabilité d'une PME, c'est-à-dire, mettre un produit dans un rayon, la grande distribution n'a pas à le facturer aux PME. C'est bien de sa responsabilité. Quand on est distributeur, on est là pour mettre les produits sur les étagères. Et on ne le fait pas payer à d'autres. Et c'est pour cela qu'il faut mettre davantage de clarification. La coopération commerciale en tant telle ne me gêne pas ; quand un producteur et un distributeur se disent : ensemble, on va mener une campagne de promotion, c'est un acte normal de commerce. En revanche, que le distributeur dise : le fait de placer votre produit en tête de gondole ou de le mettre à un mètre dans les étagères plutôt que de le mettre à 20 cm ou 1,80 mètre de haut, c'est-à-dire, plus ou moins accessible, cela, je le refacture au producteur. Là, je ne suis pas d'accord.
Q- A. Fleury : Pour la loi Galland, on estime en gros, que c'est, en gros 33 %, le tiers du tarif net facturé par les industriels qui...
R- Ce sont des moyennes.
Q- A. Fleury : En moyenne effectivement.... Pourrait-on arriver à 25 %. Est-ce quelque chose de crédible ?
R- Je pense que la coopération commerciale en la définissant avec précision, on s'apercevrait très vite que l'on peut très largement diminuer ces systèmes de marges arrière. Je ne vais pas rentrer dans les discussions de pourcentages, parce que cela fait l'objet des travaux, entre autres, du groupe de travail qui se réunit maintenant depuis un mois chaque semaine, et qui va se réunir jusqu'au 15-20 février ; donc, on verra avec eux comment on peut arriver à une proposition qui ne sera jamais consensuelle mais qui sera le plus possible.
Q- A. Fleury : Pensez-vous, par exemple, que les industriels pourraient jouer le jeu ? En ce moment, il y a la renégociation des conditions tarifaires entre les industrielles et la grande distribution pour l'année à venir. Avez-vous l'impression que les industriels pourraient jouer le jeu dans ces cas-là, et une modération ?
R- Moi, je pense que les industriels jouent le jeu ; tout le monde a intérêt à relancer la consommation. Et à partir de là, il faut rester raisonnable dans les prix et puis raisonnable aussi dans les pratiques commerciales. Personne n'a intérêt à lancer des opérations de dumping commercial, tout simplement, parce que le premier élément de consommation c'est le pouvoir d'achat, et le pouvoir d'achat, c'est d'abord avoir un travail et un salaire. Donc, c'est pour cela que je dis : attention à ce qui s'est passé aux Pays-Bas, attention aux suppressions d'emplois, parce que c'est la suppression de tout pouvoir d'achat.
Q- E. Scholl : Après les fêtes de fin d'année, peut-on s'attendre à des fortes campagnes de baisse des prix et d'offres promotionnelles très importantes ? Vous y attendez-vous, le redoutez-vous ?
R- Après la période des fêtes, on aura la période, entre autres, des soldes. Et puis, on verra à ce moment-là. Il est trop tôt pour le dire, mais il y a toujours effectivement une période de baisse de prix après la fin d'année.
Q- A. Fleury : N'avez-vous pas l'impression quand même, que vous donnez l'impression de mettre la pédale douce alors que c'est un sujet important pour les Français ? Un sondage est paru ce matin : les deux personnalités économiques pour les Français, ce sont N. Sarkozy, numéro 1, et M.-E. Leclerc, numéro 2, les deux hérauts, les deux défenseurs d'une baisse des prix dans la distribution. Ne jouez-vous pas un peu à contretemps ?
R- Qui a financé ce sondage ?
Q- A. Fleury : ... Un institut de sondage. Ne jouez-vous pas un petit peu à contretemps ?
R- Non. J'ai l'impression de jouer dans le registre qui est le mien, celui du sérieux et du travail, avec l'ensemble des interlocuteurs. D'ailleurs, vous savez, si tous - à l'exception de M.-E. Leclerc qui préfère faire les déclarations de son côté -, si tous ont choisi de se rassembler dans ces réunions toutes les semaines puisque l'ensemble de la grande distribution, les patrons de grande marques, les réseaux de PME, les producteurs, les grossistes, tout le monde est ensemble tous les mercredis pour faire ce travail sérieux, eh bien c'est que chacun a le souci d'avancer vers, encore une fois, ce qui ne sera pas un consensus général, mais ma foi, je pense un bon accord.
Q- A. Fleury : Après la loi Galland, votre grande actualité, c'est donc en janvier ou en février - vous allez nous préciser le calendrier -, la loi sur les PME, la loi sur les entreprises que vous allez présenter. Pouvez-vous nous en rappeler les grandes lignes ?
R- Il y a quatre objectifs dans cette "loi entreprises". Tout d'abord, dire que le paysage s'est éclairci sur le monde de l'entreprise. Il suffit de regarder les chiffres de créations d'entreprises. Il y a deux ans, nous étions à moins de 200 000 entreprises créées chaque année en France, en net, c'est-à-dire, après avoir décompté celles qui meurent. Nous allons finir l'année à 230 000 créations d'entreprises, donc on est vraiment dans une période où les choses vont mieux. Ceci étant, il convient maintenant d'accompagner dans les meilleures conditions ces entreprises. Et donc, quatre priorités ont été retenues : l'accès au financement - trop de projets aujourd'hui intéressants ne trouvent pas de financeurs, et donc ce sont des entreprises qui pourraient se créer et qui ne se créent pas - ; le statut des personnes - celui des conjoints, des gérants, de tous les intervenants au sein de l'entreprise - ; troisième axe : la transmission - beaucoup d'entreprises dynamiques ne trouvent pas ou n'arrivent pas à se transmettre - ; quatrième point : celui de la simplification administrative.
Q- E. Scholl : Sera-t-il question d'impôt sur la fortune, ISF, dans votre projet ?
R- Aujourd'hui, il n'y a rien d'écrit sur ce sujet. Je pense d'abord que le terme d'Impôt sur la fortune n'est peut-être pas le mieux approprié. Je préfèrerais que l'on parle d'impôt sur la patrimoine, ce qui est un peu plus juste, parce que le côté "fortune" est connoté et a un côté un peu indu qui ne correspond pas toujours à la réalité. Parce que nous avons des gens qui, aujourd'hui, sont taxés et on ne peut pas dire que cela leur soit tombé du ciel. Donc, il faut à mon avis mieux approcher les choses peut-être - mais cela fera l'objet je pense d'un autre débat - sous l'angle du patrimoine plutôt que sur la fortune.
Q- A. Fleury : Qu'est-ce qui est prévu quand même, vous nous l'expliquiez pour le conjoint de l'entrepreneur, et puis, peut-être, la famille de l'entrepreneur. Sera-t-il possible d'avoir des déductions fiscales si on investit dans l'entreprise familiale par exemple ?
R- Pour le conjoint, tout d'abord, quand on est sur les très petites entreprises - un commerce, une entreprise artisanale - c'est à peu près deux tiers des conjoints qui travaillent dans l'entreprise familiale et seulement 10 % d'entre eux ont des droits sociaux ouverts. Donc, l'objectif est d'avoir une reconnaissance sociale complète, mais aussi accès à des fonds de formation, une reconnaissance de l'expérience qui est la leur. Tous les maires de communes ou les parlementaires ou conseillers généraux ont pour habitude de recevoir dans leur permanence des conjoints d'artisan ou de commerçant, qui ont travaillé 20, 25, 30 ans de leur vie. Et puis, parce que les aléas de la vie sont ainsi, suite à un veuvage, à un divorce ou à une difficulté économique, il y a des gens qui se retrouvent avec rien, aucune reconnaissance ; on leur dit "vous êtes conjoints d'artisan ou conjoint de commerçant. Eh bien, c'est de leur donner un vrai statut et de les reconnaître complètement pour le travail qui a été le leur.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 21 décembre 2004)