Interview de M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre, à France 2 le 17 mai 2005, sur les enjeux du référendum sur la Constitution européenne, le climat social de la campagne, le bilan de la journée travaillée du lundi de Pentecôte, et la popularité du Premier ministre.

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Média : Emission Question ouverte - France 2 - Télévision

Texte intégral

GILLES LECLERC - Bonsoir, monsieur le Premier ministre. Merci d'avoir répondu à notre invitation. Nous sommes ce soir à Bordeaux puisque dans quelques minutes vous allez tenir un meeting pour le 'oui' à la constitution. Pour ce référendum du 29 mai prochain, vous militez pour le 'oui'. Evidemment, on va parler de cette constitution. Auparavant peut-être une question d'actualité : nous sommes mardi 17 mai, hier c'était ce lundi de Pentecôte. Comment vous pourriez le qualifier ? C'était quoi ? C'était un jour travaillé, une journée pagaille, une journée de solidarité ? En tous cas, un peu de confusion quand même, non ?
JEAN-PIERRE RAFFARIN - D'abord bonsoir, et je voudrais vous dire que je suis heureux de retrouver les téléspectateurs, notamment à partir de Bordeaux, dans cette belle ville à laquelle Alain JUPPE a donné un nouveau souffle. Cette journée d'hier, cette journée nationale de solidarité, a permis de dégager 2 milliards d'euros. Aujourd'hui, je dis : " Le résultat est là ". Cessons toute polémique : le résultat est là. Les Français ont pu ainsi donner à la France par leur travail 2 milliards d'euros pour les personnes âgées, pour les personnes handicapées, 2 milliards d'euros qui viennent s'ajouter. Pour les maisons de retraite, on va créer ainsi une maison de retraite de plus par an et par département. On va créer 30 000 emplois dont 6 000 pour les soins infirmiers à domicile. Donc un résultat est là : 2 milliards d'euros, 9 milliards pour la période 2004 / 2008. Bravo pour ce résultat, merci pour ce résultat, pas de polémiques. Maintenant, faisons en sorte que cet argent arrive le plus vite possible auprès de ceux qui en ont besoin.
GILLES LECLERC - Sans faire de la polémique, tous les Français ne vous ont pas suivi quand même avec beaucoup d'enthousiasme. Es-ce qu'il n'y a pas quand même eu un problème tout simplement d'autorité ? Il y avait une loi et tous les Français hier n'ont pas tous travaillé. Il y avait même des grévistes.
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Ecoutez, la loi disait l'accord d'entreprise, l'accord des partenaires, et s'il n'y a pas accord c'est le lundi 16 mai. Donc la loi prévoyait la diversité et c'était dans l'hypothèse où il n'y avait pas d'accord qu'il y avait le lundi 16 mai. Alors je suis franc avec vous : il y a des choses qui ont bien marché, il y a des choses qui n'ont pas bien marché. L'essentiel est qu'on fasse une évaluation honnête et transparente. J'ai demandé à un parlementaire de constituer un groupe d'experts qui va faire une évaluation.
GILLES LECLERC - Ce sera fin juin.
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Cette évaluation - à la mi-juin nous aurons une évaluation. Je consulterai... Le gouvernement consultera les partenaires sociaux et nous définirons les modalités de l'année 2006.
GILLES LECLERC - Qu'est-ce que vous sentez tout de même ? Par exemple, pour 2006...
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Je ne veux pas préjuger des résultats de l'évaluation. Ce que je peux dire, c'est que je suis déterminé pour la solidarité et ouvert sur les modalités.
GILLES LECLERC - Il n'y avait pas un moyen plus simple, tout simplement, un moyen un petit peu plus souple en disant : " Chacun donnera une journée ", une journée de RTT par exemple. Ce n'était pas plus facile ?
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Vous voyez, cette idée-là elle est très utile, mais vous savez qu'il y a beaucoup de gens qui n'ont pas de RTT ? Et c'est bien pour cela qu'on était dans cette difficulté. On a au parlement beaucoup débattu, beaucoup discuté, donc si on est arrivé à cette solution, ce n'est pas sans réflexion, ce n'est pas sans consultation. C'est que c'était difficile et donc je dis aujourd'hui de cette difficulté, nous sommes sortis avec un résultat concret : 2 milliards d'euros pour les personnes âgées, pour les personnes handicapées. Jusqu'à maintenant, la France n'avait pas regardé en face la réalité de son vieillissement.
GILLES LECLERC - Ca suffira les 2 milliards d'euros honnêtement ?
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Pour la période 2004 / 2008, avec 2 milliards d'euros par an, nous allons mobiliser ainsi 9 milliards puisque nous avons commencé au 1er juillet 2004. Donc avec un plan de 9 milliards, nous pourrons créer, je vous le disais tout à l'heure, de nombreuses maisons de retraite. On va créer 30 000 emplois, on va créer des postes d'infirmières pour, notamment, permettre aux personnes de rester à domicile ; et puis surtout on va pouvoir donner une réalité financière à ce qu'a voulu le président de la République : ce droit de compensation pour les personnes handicapées. Cette compensation du handicap, cette justice à laquelle les personnes handicapées ont droit, on pourra le financer. Nous avons regardé la réalité de la société en face et courageusement la France s'est donné les moyens de faire face à son vieillissement.
GILLES LECLERC - Alors on passe à la constitution. Apparemment, des sondages aujourd'hui notent un progrès du 'non', même s'il faut rester évidemment très prudent. Est-ce que cette montée du 'non' vous inquiète, monsieur le Premier ministre ?
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Je pense que le résultat sera serré. Vous savez, dans un pays qui a voté pour Maastricht, pour l'euro, à 50 / 50, le résultat est naturellement serré. Ca veut dire une chose d'abord : ça veut dire que chaque Française et chaque Français tient dans sa main un bulletin de vote historique parce que si le résultat est serré, ça veut dire que chaque voix comptera. Et je voudrais dire que chaque voix des Français va compter en Europe. Il y a aujourd'hui 450 millions d'Européens qui vont regarder la France, qui attendent la France le 29 mai, pour savoir ce que va dire la France. Et puis il y a le monde. Il y a tous ceux qui, aujourd'hui, veulent savoir si l'Europe va avancer, si la France va faire passer l'Europe au feu vert ou si la France va stopper l'Europe au feu rouge. Ca, c'est très important : l'ensemble du monde va regarder la France. Le vote de chacun sera historique. Il sera serré mais c'est une responsabilité qui est entre les mains de chaque Française et de chaque Français.
GILLES LECLERC - Il y a encore beaucoup de Français qui s'interrogent et par exemple dans le camp du 'oui', quand on entend d'un côté, par exemple, le président de la République qui sur FRANCE2 disait au fond cette constitution, ce traité constitutionnel, protège en quelque sorte un peu, je dirais, les Français. Il disait même que cela porte les valeurs de 1789. Et puis en même temps, on entend un discours un peu nuancé, un peu différent par exemple de l'UMP, Nicolas SARKOZY, qui dit qu'il faut voter 'oui' parce que comme ça ce sera un déclic et un bon outil pour le changement puisque notre modèle social ne donne pas, vous le savez bien, un résultat qui n'est pas non plus formidable, quand on regarde par exemple tout simplement les chiffres du chômage. Qui est-ce qui a raison et comment la personne qui a envie de voter 'oui' peut donner vraiment son avis ? Il y a une incertitude.
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Le président de la République a raison de dire que c'est l'Europe qui nous protège. Pourquoi ? Dans le passé, la frontière était notre protection. Aujourd'hui, c'est le continent, le continent européen qui est notre protection. Pourquoi ? Parce que les grandes forces économiques mondiales sont organisées de manière continentale. La force continentale américaine, la force continentale chinoise, la force continentale indienne. Les grandes forces continentales attendent de savoir si la force européenne va s'organiser et aujourd'hui, croyez-vous qu'on peut résister à la Chine, la seule France, sans les autres ? Seule l'Europe unie, l'Europe rassemblée peut équilibrer la chaîne. Si on veut éviter la guerre des emplois, et nous voyons bien que le grand sujet de demain qui commence déjà aujourd'hui dans le textile, dans un certain nombre de domaines, à être le sujet d'aujourd'hui, c'est la guerre des emplois. Comment éviter la guerre des emplois ?
GILLES LECLERC - Ce sera plus facile avec la constitution ?
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Ce sera beaucoup plus facile et pourquoi ? Parce que pour éviter la guerre des emplois, il faut équilibrer les échanges. Comment équilibrer les échanges avec la Chine ? Comment équilibrer les échanges avec l'Amérique ? Seulement par une puissance de 450 millions d'habitants. C'est ça cette force continentale. Je crois à la force continentale de l'Europe dans l'avenir, la paix mais aussi l'emploi, mais aussi la lutte contre le terrorisme, mais aussi la défense de l'environnement. C'est une alliance des continents.
GILLES LECLERC - Je note que vous dites plus ce soir " protection " que " changement ".
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Je pense que l'Europe est une protection. Les institutions vont nous permettre de changer ce qui ne va pas c'est pour cela que je souris quelquefois quand je vois des gens mécontents voter 'non', car voter 'non' c'est voter pour garder le sujet de son mécontentement. Mais ce qui est très important, c'est que ce n'est plus la frontière ancienne qui nous limite aujourd'hui dans notre expansion, c'est le continent qui nous protège parce que le continent équilibre les forces avec les autres. Donc donnons à nos idées, donnons à nos projets la force... Regardez Airbus, force continentale, regardez cette énergie des étoiles, cette énergie post-nucléaire que nous irons installer à Cadarache, ITER.
GILLES LECLERC - Mais ça, ça pourrait se faire quand même parce que ceux qui se réclament du 'non' disent qu'ils sont quand même Européens.
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Mais si nous ne sommes pas capables de donner la force continentale européenne à de tels projets, si nous restons isolés parce que le jour où la France vote 'non', elle descend du train. Le jour où la France vote 'non', elle stoppe l'Union européenne. Moi je voudrais dire que ceux qui disent qu'il y a un plan B, qu'il y a une alternative...
GILLES LECLERC - Justement, voilà, vous savez par exemple que Jacques DELORS il y a quelques jours a commencé à dire " On peut le faire ", ensuite il a démenti.
JEAN-PIERRE RAFFARIN - C'est un mensonge.
GILLES LECLERC - Laurent FABIUS explique, par exemple, qu'on peut renégocier. Alors qui est-ce qui a raison ?
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Je crois que c'est un mensonge de dire qu'il y a un plan B et je crois que...
GILLES LECLERC - Même si c'est difficile, compliqué et long, on ne pourra rien faire ? Ce sera vraiment un drame ?
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Nous avons un traité qui a mis beaucoup de temps à être décidé, négocié, signé et qui doit maintenant être ratifié. Ce sont des processus très longs à 25. Il faut se mettre d'accord pour avoir un traité accepté par tous les gouvernements. Nous avons un traité qui est proposé. Si nous refusons ce traité, l'Europe sera assommée, l'Europe devra se retourner vers elle-même, discuter entre les différents gouvernements, pour d'abord décider si on fait un nouveau traité et le jour où on aura décidé de faire un nouveau traité, il faudra se poser la question combien de temps et de quelle manière ferons-nous ce traité, et ensuite il faudra se mettre d'accord. Et ce n'est pas...
GILLES LECLERC - Pardon de vous interrompre : 62 % des Français - c'est un sondage IPSOS ce matin paru dans Le Figaro - qui disent 62 % des Français croient possible, justement, une renégociation. Ils se trompent ?
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Je voudrais leur dire, en tant que Premier ministre, je ne peux pas jouer avec mon pays. Je veux le dire avec la plus grande des sincérités : je suis un Européen de toujours, mais je veux dire que c'est très difficile de construire un traité européen, surtout un traité européen comme celui que nous allons avoir à ratifier, qui est un traité d'inspiration française, qui prend notre grande déclaration. Le plus beau texte de l'humanisme européen, c'est la Déclaration des Droits de l'Homme. Eh bien la charte des droits fondamentaux, elle s'inspire de cette culture française et je dis à mes compatriotes, si demain - mais dans 10 ans, peut-être dans plus - il y avait un nouveau traité, nous ne serions pas forcément en mesure d'inspirer ce traité de nos valeurs comme nous avons inspiré celui-ci. Alors non seulement il n'y a pas de traité alternatif, mais si un jour on devait s'engager dans cette démarche, on n'est pas sûr du tout qu'elle serait aussi favorable à la culture de la France, à l'histoire de la France, aux valeurs de la France.
GILLES LECLERC - Il y en a certains, vous savez, Jean-Pierre RAFFARIN, qui disent que quand le Premier ministre s'exprime, ça fait monter le 'non'. Comment vous ressentez ces critiques ? On les entend à gauche, on les entend un peu aussi dans votre camp.
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Moi, je suis un Européen de cur, donc je veux faire exister cet enthousiasme que j'ai, cette volonté de participer à l'avenir de mon pays, ce vote historique. Je crois qu'on a des enfants les uns et les autres, il faut penser à eux. Le problème n'est pas de savoir qui gouvernera la France demain, le problème n'est pas de savoir quel est l'objet de notre débat de politique intérieure. C'est que la petite fille aujourd'hui qui a 10 ans, le petit garçon qui a 10 ans, il aura 18 ans, il aura sa majorité quand ce traité viendra à maturité. C'est pour eux que nous devons donner la force continentale, c'est pour eux que nous devons faire en sorte que l'Europe soit le moyen, comme disait le général DE GAULLE, d'avoir un levier d'Archimède pour la France.
GILLES LECLERC - Il n'empêche tout de même, monsieur le Premier ministre, que le 30 mai au matin, quel que soit d'ailleurs le résultat, on a bien vu pendant toute cette campagne qu'il y a une grogne sociale, il y a un mécontentement et cette question-là, visiblement, est au cur tout de même de la campagne électorale. Comment vous pourriez le prendre en compte, d'ailleurs quel que soit le résultat ? Est-ce qu'on pourrait imaginer qu'il y ait une nouvelle étape après et qu'il y ait, par exemple, une inflexion sociale ? Jacques CHIRAC déjà l'avait dit après les régionales. Est-ce que ce schéma-là est quelque chose qui vous irait bien ?
JEAN-PIERRE RAFFARIN - D'abord soyons très clairs, l'enjeu du 29 mai n'est pas un enjeu de politique intérieure. Ce n'est pas le gouvernement qui serait sanctionné par un vote Non. De même, le Oui ne serait pas le succès du gouvernement, mais celui de tous les Français. Si c'est Non c'est la France qui supportera le Non. SI c'est Oui, c'est les Français qui auront une chance supplémentaire. Ce n'est pas un débat de politique intérieure, c'est un enjeu européen. Mais alors bien sûr...
GILLES LECLERC - Il y a un contexte tout de même.
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Il y a un contexte dont il faut tenir compte. J'écoute les Français, le président de la République écoute les Français. Nous avons engagé des réformes importantes ; il a fallu engager des réformes de nécessité pour sauver notre pacte républicain. Vous savez, la réforme des retraites avait été retardée, la réforme de l'assurance maladie ; les moyens nécessaires pour la sécurité, la justice, tout cela était nécessaire. Je l'ai fait. Ca a été difficile.
GILLES LECLERC - Et puis il y a le plan, il y a le plan de cohésion sociale.
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Et puis il y a la priorité que le chef de l'Etat a fixée au gouvernement. Après ces réformes pour notre pacte social, le chef de l'Etat a dit : priorité sur l'emploi et c'est pour cela que nous avons fait un plan de cohésion sociale.
GILLES LECLERC - Pour l'instant... pardon, on n'a pas l'impression de voir des résultats pour l'instant. C'est trop tôt ?
JEAN-PIERRE RAFFARIN - On a signé les premiers contrats au mois de mars, les contrats d'avenir. Mais sur l'apprentissage et sur... sur le logement par exemple, nous battons le record depuis vingt ans : 373.000 permis de construire pour le logement ont été délivrés dans les douze derniers mois. C'est-à-dire vraiment une relance du logement. Donc ça c'est le plan de cohésion.
GILLES LECLERC - Sur l'emploi, tout de même...
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Alors, le plan de cohésion sociale, l'agence pour l'innovation industrielle, la loi pour la recherche, le président de la République a engagé toute une série d'initiatives que le gouvernement met en uvre pour l'emploi. C'est la priorité...
GILLES LECLERC - Vous savez que la question majeure c'est l'emploi. Ici même, à Question Ouverte vous vous étiez engagé pour qu'en 2005 on re-franchisse la barre de 10 %. Est-ce que ce soir encore vous tenez, vous allez tenir cet engagement, que le chômage va redescendre sous la barre des 10 % en 2005 ?
JEAN-PIERRE RAFFARIN - J'ai eu l'occasion de dire au début de l'année que nous avions souffert du choc pétrolier. Vous avez vu la flambée du prix du baril, vous avez vu la baisse du dollar et donc la parité eurodollar qui était défavorable aux exportations de l'Europe. Nous nous sommes trouvés dans un premier trimestre qui a été un trimestre dans lequel l'économie internationale a retardé la baisse du chômage dans notre pays. Je crois aujourd'hui, quand je regarde l'évolution du dollar, quand je regarde l'évolution qui est celle du prix du baril, quand je regarde la mise en uvre du plan de cohésion sociale, quand je vois l'ensemble des décisions, notamment les décisions que nous prenons pour l'industrie, l'agence industrielle, pour relancer notre industrie, pour développer des nouveaux projets, les Ariane, les Airbus du futur, tous ces grands projets-là ; notre loi pour la recherche mais aussi les pôles de compétitivité - 105 pôles ont été proposés en France - tout ceci nous permet de dire que : oui, l'année 2005 sera une année de baisse significative du chômage. Et dès le mois de juin, je compte discuter avec les partenaires sociaux pour voir les mesures complémentaires pour atteindre cet objectif. Nous voulons vraiment faire baisser le chômage, c'est la priorité des priorités. Nous avons fait le plus dur...
GILLES LECLERC - Pardon de vous interrompre... est-ce qu'on peut atteindre cet objectif avec un Premier ministre, vous le savez, qui n'est pas très populaire et qui est quand même un peu fragilisé ? Les symboles, ça compte en politique, Jean-Pierre RAFFARIN.
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Fragilisé, je suis sorti de l'hôpital, ça a été difficile...
GILLES LECLERC - Quand on regarde les sondages...
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Mais je suis en pleine forme. Quant aux sondages, bon, c'est vrai, franchement, je voyais le Premier secrétaire du Parti socialiste dans votre émission hier, il est plus facile de promettre un jour de vacances qu'un jour de travail. Donc la popularité, je sais que ce n'est pas toujours facile quand on est aux responsabilités. Je voudrais vous dire que j'ai assez de courage et j'ai aussi assez de prudence pour ne pas craindre l'avenir. J'assume. Je suis là pour servir mon pays. Je suis là parce qu'il a fallu faire des réformes...
GILLES LECLERC - En même temps, vous avez dit récemment : je suis content à Matignon mais pas très heureux. Vous n'avez pas envie aujourd'hui, si par exemple le Oui passe, de sortir un peu la tête haute et de retrouver un peu, je dirais, de retrouver un peu plus de bonheur ?
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Je m'efface, personnellement, par rapport à ma mission, donc je vous dis clairement : je suis au travail, mais je ne suis pas accroché au pouvoir. Je n'ai jamais été accroché au pouvoir. Donc je suis là pour servir. La priorité c'est l'emploi. Il y avait des réformes très importantes à faire, j'ai engagé ces réformes, c'est une fierté. Maintenant il faut mobiliser la cohésion nationale, faire en sorte qu'on puisse recoudre bien le tissu social français de manière à ce qu'on soit mieux rassemblé, moins divisés. Il y a beaucoup de choses à faire. Le président de la République a engagé un grand nombre d'initiatives ; je donne le meilleur de moi-même dans cette action.
GILLES LECLERC - Dernière question. Votre ami Dominique BUSSEREAU déclarait récemment dans LE FIGARO que votre présence se fera fortement sentir en 2007. Ca voulait dire quoi ?
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Sans doute qu'il répondait à tous ceux qui depuis le jour où je suis arrivé à Matignon, parlaient de mon départ. Moi, ce qui compte pour moi, c'est l'action au service des Français et je voudrais leur dire de soir qu'ils peuvent compter sur moi pour agir. Ce n'est pas toujours facile...
GILLES LECLERC - Pour agir encore longtemps ?
JEAN-PIERRE RAFFARIN - Pour agir tant que le président de la République le voudra ; tant que la majorité parlementaire le souhaitera, pour agir dans l'intérêt du pays. Mon avenir personnel ne me concerne pas. Quand j'étais sur mon lit d'hôpital, quelques heures seulement presque, vous savez, je ne pensais pas à mon avenir, je pensais à l'avenir de mon pays et l'avenir de mon pays dans la France. Et dans cette France européenne que je souhaite.
GILLES LECLERC - Merci Jean-Pierre RAFFARIN, bonsoir à tous.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 18 mai 2005)