Déclaration de M. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur, sur la nécessité de soutenir l'internationalisation des PME françaises et de développer la coopération économique et industrielle avec les PME norvégiennes, Paris, le 2 mars 2000.

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Circonstance : Symposium des organisations patronales norvégiennes et françaises : "Développement des PME et mondialisation" à Paris, le 2 mars 2000

Texte intégral

Madame la Ministre, Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureux d'ouvrir ce matin ce séminaire qui en choisissant d'engager la discussion sur la place des PME dans la mondialisation, viendra, j'en suis convaincu, apporter une dynamique nouvelle aux relations de la Norvège et de la France en matière économique et commerciale.
Un trait commun de nos deux pays, en effet, est la prégnance dans le tissu économique des petites et moyennes entreprises. En France les PME-PMI emploient plus de 16 millions de salariés, et représentent la très grande majorité des 2, 4 millions d'entreprises présentes sur le territoire. Or, nos exportations restent concentrées sur un petit nombre de grandes entreprises. Il suffit d'une centaine de groupes pour réaliser la moitié des exportations françaises. Renault, Airbus Industries, Peugeot et Citroën ont une contribution plus forte au commerce extérieur français que nos cent mille plus petits exportateurs.
Alors que l'intégration économique internationale, porteuse de nouvelles perspectives de croissance, s'accélère, nos gouvernements sont confrontés à un même défi : faire en sorte que ces opportunités soient captées par l'ensemble des acteurs économiques ou par le plus grand nombre, et pas seulement par une fraction d'entre eux.
C'est un enjeu d'intérêt général, pour les PME, pour l'emploi dans les régions, mais aussi pour les grandes entreprises car c'est de l'ensemble des acteurs économiques qu'émane la compétitivité : il n'y pas de compétitivité partielle.
La France a donc développé un certain nombre d'instruments de soutien à l'internationalisation des petites et moyennes entreprises qui veulent vendre leurs produits ou investir à l'étranger. Les travaux de ce séminaire permettront sans doute d'échanger des idées sur les bonnes pratiques en la matière.
Plus globalement, la conception du commerce international que nous défendons dans les négociations multilatérales, et que nous partageons avec nos amis norvégiens, celle d'une mondialisation régulée, concerne à titre égal, les PME et les grandes entreprises. La logique qui doit prévaloir à l'OMC est à la fois une logique de libéralisation réciproque et de soumission à une discipline multilatérale. Nous ne souhaitons pas qu'il y soit seulement question d'abaissement des tarifs. Nous voulons aussi que soient améliorées les disciplines relatives à l'égalité de traitement, et que soient instaurées des règles communes en matières de concurrence, d'investissements et de marchés publics afin garantir aux entreprises des stratégies d'internationalisation durables. Cet environnement régulé est d'autant plus précieux pour les entreprises de taille modeste qui ne disposent ni des ressources financières, ni des capacités techniques et juridiques qui permettent aux grands groupes de faire face à l'imprévu ou de négocier des réglementations sur mesure.
L'objectif de l'internationalisation des PME doit aussi investir les relations bilatérales.
Je suis convaincu que cette attention portée au développement des PME doit également enrichir nos relations économiques bilatérales, et à cet égard plusieurs pistes pourraient être explorées.
Si nos grands groupes industriels ont largement contribué au mouvement d'intégration régionale, dans le cadre du marché commun, mais plus largement dans le cadre de l'espace économique européen, les PME PMI, indépendantes, prises dans leur ensemble ne semblent pas avoir autant bénéficié de cette dynamique.
L'espace économique européen reste pour les PME un ensemble de marchés nationaux très différenciés, qu'elles abordent de manière séquentielle, par cercles concentriques. Sur le plan, bilatéral les Etats ont semble-t-il un rôle à jouer pour élargir leur horizon. Dans cette perspective, les accords de réciprocité qui lient les grands contrats entre Etats à des perspectives commerciales réciproques sont une première piste à explorer.
Toutes les PME n'ont pas vocation à exporter directement et leur internationalisation passe largement par les liens qu'elles établissent avec les entreprises directement impliquées dans la compétition internationale.
En France, le partenariat industriel, forme la plus aboutie de ce type de collaboration, lie désormais, plus de huit entreprises sur dix. La sous-traitance est ainsi particulièrement développée dans les secteurs à forte valeur ajoutée tournés vers l'international comme la construction aéronautique.
Il y a là de véritables opportunités pour nos PME, qui pourraient être renforcées si de tels partenariats existaient sous une forme croisée, associant des grandes entreprises norvégiennes et des PME françaises et inversement, dans une démarche qui favorise à la fois les transferts de technologies et les gains de productivité.
De ce point de vue, le développement du commerce électronique offre des possibilités nouvelles. Je pense surtout au commerce inter-entreprises ou business to business, actuellement en pleine croissance.
Prenons un exemple qui intéresse évidemment la Norvège.
La dernière conférence annuelle du Cambridge Energy Research Associates a mis en lumière le rôle que jouent aujourd'hui les nouvelles technologies dans l'organisation et la gestion de la production, dans les secteurs du pétrole, du gaz et de l'électricité. A titre d'illustration, on peut citer les joint-venture entre Shell et Commerce One ou entre Ariba et Chevron pour le développement de sites de commerce électronique de biens et de services entre entreprises.
Ces mutations engendrées par les nouvelles technologies pourraient renforcer la tendance à l'externalisation que l'on constate dans le secteur pétrolier et para-pétroliers. La réorganisation de la production dans le secteur des hydrocarbures pourraient ainsi fournir de nouvelles perspectives aux entreprises de taille modestes, qu'il s'agisse des fournisseurs et équipementiers classiques ou d'entreprises spécialisées dans les nouvelles technologies de l'information et de la communication.
Mais ce n'est qu'un exemple, car vous savez que les annonces récentes en matière de commerce électronique, dans le domaine de l'automobile ou de la distribution, vont aussi offrir de nouvelles opportunités.
Enfin, il faut réfléchir également à la manière dont nos PME pourraient sur nos marchés respectifs, en France et en Norvège, sur le marché communautaire et plus largement dans l'espace économique européen, ou sur les marchés éloignés mettre en uvre des alliances stratégiques et pratiquer des investissements communs.
Ces quelques propositions n'ont pas un caractère exhaustif, mais dessinent une approche pragmatique des relations entre les Etats et les acteurs économiques privés, pour favoriser leur internationalisation .
La globalisation, qui fait le thème de cette table ronde, se caractérise par une nouvelle organisation où l'essentiel pour l'entreprise est de s'insérer dans un ou plusieurs réseaux, qui conditionnent notamment son accès à l'information, aux financements, à la coopération technologique, aux circuits de distributions, et permettent de fonder son développement sur des stratégies viables.
Dans ce contexte, l'action du Commerce Extérieur revêt une nouvelle dimension : au delà de la promotion des ventes de produits et de services des entreprises sur les marchés étrangers, il lui appartient d'aider les entreprises à accéder aux réseaux de l'économie internationale, à leur fournir des moyens d'insertion dans ces réseaux.
Je sais, Madame la Ministre, et nous en avons encore parlé ce matin, que vous partagez cette volonté d'améliorer la place des PME dans la coopération économique entre nos deux pays, entre nos deux gouvernements, mais aussi, évidemment, entre les acteurs économiques privés français et norvégiens, qui aujourd'hui s'associent à notre ambition.
(Source http://www.commerce-exterieur.gouv.fr, le 9 mars 2000)