Déclaration de M. Bernard Accoyer, président du groupe parlementaire UMP à l'Assemblée nationale, sur les violences urbaines, le recours au couvre-feu et l'accélération des mesures de cohésion sociale et de rénovation urbaine, à l'Assemblée nationale le 8 novembre 2005.

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Circonstance : Débat sur les violences urbaines à l'Assemblée nationale le 8 novembre 2005

Texte intégral

Monsieur le Président, Monsieur le Premier ministre, Monsieur le Ministre d'Etat, Ministre de l'Intérieur, Mesdames les Ministres, Messieurs les Ministres, Mes chers collègues
Depuis douze jours, notre pays est confronté à des violences urbaines d'une ampleur jusque là inconnue. Rien ne saurait les justifier.
Ce qui est en cause, c'est le respect de notre Pacte Républicain.
Ce qui est en cause, c'est la liberté des habitants de ces villes, de ces quartiers, premières victimes de ces violences.
Les victimes pour lesquelles j'ai déjà demandé au gouvernement au nom des députés UMP qu'au-delà de leurs malheurs, elles ne soient pas obligées d'en payer les conséquences.
Ce qui est en cause, c'est leur sécurité, leur liberté d'aller et de venir, leur liberté de travailler, leur droit de propriété.
Nous, députés de la Nation, nous nous exprimons pour cet homme battu à mort à Epinay sur Seine devant sa famille, pour cet habitant de Stains froidement assassiné à la porte de son immeuble, pour cette femme handicapée, gravement brûlée à Sevran, pour tous ces habitants des quartiers victimes des comportements d'une infime minorité de délinquants, de criminels, de chefs de bandes qui manipulent sans scrupule aucun, des jeunes en désespérance.
Ce qui est bafoué, par les dégradations, par ces incendies, par les destructions de commerces, de commissariats, d'écoles, de transports en commun, e bibliothèques, de gymnases, de bureaux de poste, de perceptions, c'est l'Etat, ce sont les services publics, les services pour tous.
Tout cela est inacceptable. Inacceptable car les habitants de ces quartiers n'aspirent, comme tous les Français, qu'au respect de leurs droits, c'est-à-dire au respect des lois de la République.
La démocratie ne peut s'accommoder de zones de non-droit.
L'ordre républicain et la paix publique doivent s'appliquer sur tout le territoire national. Rien ne saurait justifier un quelconque renoncement, un quelconque abandon républicain. Car ainsi que l'a rappelé le Président de la République, le dernier mot doit revenir à la loi.
Seule la République peut garantir la justice, seule la justice peut déterminer les responsabilités, en toutes circonstances, y compris les plus tragiques, telle que la mort accidentelle de deux jeunes à Clichy Sous Bois.
Le courage, le calme, le professionnalisme avec lesquels les forces de l'ordre assurent sans relâche leur mission difficile appellent la plus grande reconnaissance de la Nation, dont nous sommes ici les représentants.
Monsieur le Ministre d'Etat, Ministre de l'Intérieur, vous voudrez bien être notre interprète, et remercier, au nom de tous les Français, les fonctionnaires de la Police et aux militaires de la Gendarmerie Nationale.
Nous voulons également ici témoigner de notre gratitude et de notre admiration d'abord à nos courageux Sapeurs-Pompiers, ainsi qu'à tous les agents de l'Etat, des collectivités territoriales qui sont la cible de ces violences contre les transports publics, contre les écoles. Tous ces hommes et ces femmes qui ne veulent pas renoncer à leur mission.
Monsieur le Garde des Sceaux, avec la promptitude des réponses de vos services, le recours à la procédure de comparution immédiate, les actes de délinquances sont rapidement punis. Il faut qu'ils le soient sévèrement comme vous l'avez demandé.
Le témoignage sous anonymat voté ici même par la majorité avec la loi du 9 septembre 2002 permet l'interpellation des meneurs, des fauteurs de troubles. Ils sont presque toujours connus des habitants des quartiers dont ils pourrissent la vie quotidienne.
A l'avenir, les mesures de placement en centre éducatif fermé prises à l'encontre des mineurs de moins de 16 ans, prévu par cette même loi, permettront d'éviter une dérive vers des actions de plus en plus violentes mettant en danger leur propre vie.
Car, certains parents ont aussi leur responsabilité quand de très jeunes mineurs, livrés à eux-mêmes en pleine nuit participent à ces violences.
Si la République accorde des droits financiers aux parents, elle attend en retour l'exercice de l'autorité parentale.
Monsieur le Premier Ministre, Mes chers collègues,
Quand le Pacte Républicain est en cause, c'est par un élan de cohésion, un élan d'unité nationale que le Gouvernement et les élus ont le devoir de répondre. L'heure n'est pas aux polémiques politiciennes. Comment les Français pourraient-ils l'accepter ?
Le retour à l'ordre républicain est le préalable indispensable. Nous faisons confiance à votre Gouvernement Monsieur le Premier Ministre, pour le rétablir.
En décrétant l'état d'urgence, en appliquant la loi de 1955, en établissant là ou cela est nécessaire un couvre-feu, vous avez pris une décision d'exception, répondant à une situation elle-même exceptionnelle, puisque force doit toujours rester à la loi républicaine. C'est ce qu'attendaient tous nos compatriotes et plus encore les victimes de ces violences dans les cités, dans les quartiers, dans les villes. Monsieur le Premier Ministre, Mes Chers Collègues,
C'est sur le socle de la paix civile retrouvée que nous pourrons ensemble débattre des causes profondes qui ont conduit à cet embrasement.
Certes, les gouvernements successifs, ont tenté depuis plusieurs décennies beaucoup de choses, investi beaucoup d'argent dans les politiques de la ville, les politiques de l'intégration.
Le travail inlassable des maires et des élus locaux à qui nous devons rendre hommage, celui des services de l'Etat, des associations a été considérable.
Les maires sont en première ligne dans ce combat. Vous avez raison, Monsieur le Premier Ministre, de vouloir renforcer leur capacité d'action, de proximité pour la prévention, l'insertion et la sécurité.
En effet, comment avons-nous pu en arriver là ? Alors que les zones d'éducation prioritaire, les 85 zones franches urbaines et les 85 000 emplois salariés ainsi créés, ont apporté des réponses concrètes pour remédier à l'échec éducatif et lutter contre le développement de l'économie souterraine. Elles sont pourtant restées insuffisantes.
Aujourd'hui avec le plan de rénovation urbaine adopté en 2003, les cités se rénovent grâce à des efforts financiers historiques, déjà 15 milliards d'euros engagés dans 239 quartiers pour 30 milliards prévus au total.
L'ampleur de la tâche, ses délais de réalisation ne rendent pas encore suffisamment lisibles les effets de ce plan. C'est pourquoi vous avez également raison, Monsieur le Premier ministre, d'avoir demandé à Jean-Louis Borloo l'accélération de sa mise en uvre.
Le Plan de cohésion sociale, cible avec pertinence et, répond aux besoins d'éducation, de formation en alternance, d'apprentissage, d'accès à l'emploi, d'accès au logement, bref, à l'insertion indispensable pour nourrir l'égalité des chances, l'appartenance à la communauté nationale et le refus de toute discrimination.
L'effort de construction de logements sociaux : 100 000 en 2005 au lieu de 40 000 en 2000 est, lui aussi, d'une ampleur à la hauteur des besoins. Mes Chers Collègues,
Les violences urbaines ne doivent pas caricaturer la réalité des cités, la réalité de l'intégration réussie d'innombrables familles qui ont choisi la France et adhèrent aux valeurs de la République. Ces hommes, ces femmes, ces jeunes qui cherchent un emploi, qui travaillent, qui étudient et qui, plus souvent qu'on ne le dit, réussissent.
Ce sont eux que nous souhaiterions voir et entendre à la télévision plutôt que certaines images de violence qui contribuent à allumer d'autres feux et que relayent complaisamment les télévisions étrangères.
Nous ne faisons aucun amalgame entre ces hommes, ces femmes, ces jeunes et les quelques délinquants, de petits caïds à l'uvre ces derniers jours.
En vérité le problème, ce sont les échecs de l'intégration. C'est sur eux que nous devons agir avec détermination. Aucune politique, si généreuse soit-elle, ne peut répondre efficacement au-delà de ses limites, c'est-à-dire de nos capacités d'accueil et d'intégration.
Pour mieux intégrer les populations immigrées et leurs enfants, la France doit porter une attention encore plus grande aux flux migratoires. Veiller à ce que le droit d'asile, le regroupement familial, le mariage, notre générosité sanitaire ne soient pas dévoyés. Veiller à ce que notre générosité humanitaire ne soit pas galvaudée.
Monsieur le Premier Ministre, mes Chers Collègues,
De l'épreuve que traverse notre pays, la Nation doit ressortir renforcée pour offrir un message d'espoir et d'avenir à la communauté nationale. Tel a d'ailleurs été souvent le cas au cours de notre histoire.
Fermeté, justice, respect, nous permettront de retrouver tous ensemble quelles que soient nos origines, les fondements de la République. Liberté, Egalité, Fraternité.
(Source http://www.ump.assemblee-nationale.fr, le 15 novembre 2005)