Conférence de presse de M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, sur le bilan 2005 de la campagne de contrôles des chantiers de désamiantage et les mesures envisagées pour l'année 2006, Paris le 16 novembre 2005.

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Comme l'année dernière à la même époque, j'ai voulu rendre publics les résultats de la campagne 2005 de contrôle des chantiers de désamiantage. Cette campagne de contrôle s'est déroulée pendant l'été. Elle a été conduite par plusieurs centaines d'agents du ministère du travail et de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés avec l'appui technique de l'Institut national de recherche et de sécurité (INRS). Les directeurs de ces institutions sont à mes côtés pour répondre tout à l'heure à vos questions.
Cette mobilisation était nécessaire. Le drame que représente l'amiante pour des milliers de salariés ne s'est pas clos avec l'interdiction générale de l'utilisation de ce produit le 1er janvier 1997. Plusieurs dizaines de millions de mètres carrés de bâtiments contiennent de l'amiante dont il faut réduire les risques. L'amiante demeure donc une priorité du gouvernement et une priorité de mon ministère et de ses services de contrôle.
Comme l'a relevé le récent rapport de la mission commune d'information du Sénat sur le bilan et les conséquences de la contamination par l'amiante, une extrême vigilance s'impose pour assurer la stricte application de la réglementation sur l'amiante. Rien ne sert en effet d'avoir des réglementations performantes si l'on ne va pas contrôler sur le terrain leur application.
C'est avec cette conviction, que dès mon arrivée au ministère du travail en 2004, j'ai inscrit dans les actions prioritaires nationales de la politique du travail l'organisation d'une campagne de contrôle de chantier de désamiantage.
Une première campagne de contrôle des chantiers de désamiantage a été menée en mars 2004. Cette campagne ciblée, d'une durée très courte (15 jours), concernait les chantiers de retrait d'amiante friable. 72 chantiers avaient alors été contrôlés et d'importantes irrégularités avaient été constatées. Ces résultats n'étaient pas satisfaisants. C'est pourquoi j'ai souhaité renouveler en 2005 cette campagne conjointe, sur une durée plus longue et en l'étendant à tous les types de chantiers de désamiantage (retrait d'amiante friable et non friable ainsi que chantiers de démolition).
Au total, 780 chantiers ont été contrôlés en 2 mois représentant environ 370 entreprises, soit dix fois plus de chantiers qu'en 2004. Toutes les régions métropolitaines ont été couvertes. Dans certaines régions, 90 % des chantiers déclarés ont été contrôlés en moins de 2 mois. Vous trouverez dans le dossier la répartition des contrôles entre les régions.
A travers ces chiffres éloquents, je veux ici d'une part remercier la CNAMTS et l'INRS pour leur collaboration active à cette campagne ainsi que la DRT pour l'avoir organisée. Mais je souhaite aussi souligner tout particulièrement la forte mobilisation des agents de l'inspection du travail dont je tiens à saluer l'action.
Un grand nombre de chantiers a certes été contrôlé, mais un grand nombre de non conformités à la réglementation continue hélas à être relevé : dans 67 % des cas, des anomalies plus ou moins graves ont été constatées, donnant lieu notamment à : 41 procès verbaux, 84 arrêts de chantiers, 6 injonctions et 390 courriers d'observation.
Cela signifie que seulement 33 % des chantiers contrôlés ne présentaient aucune anomalie. Cela montre tout le chemin qui reste encore à parcourir en matière de prévention.
Vous avez dans le dossier une présentation détaillée des résultats. Je souhaite attirer votre attention sur les principaux constats :
- le repérage des matériaux amiantés des bâtiments voués à la démolition n'est pas toujours transmis aux entreprises qui effectuent des chantiers de démolition ;
- sur beaucoup de chantiers, la signalétique est insuffisante, l'accès n'est pas interdit au public, l'empoussièrement est mal maîtrisé par l'absence de travail en atmosphère humide ;
- les mesures de confinement des chantiers (tunnel de décontamination, mise en dépression) mériteraient d'être améliorées ;
- enfin, dans deux tiers des chantiers, il a été relevé l'absence d'équipements de protection respiratoire adaptés alors qu'ils sont rendus obligatoires par la réglementation.
Le risque amiante reste insuffisamment maîtrisé. Je reste donc plus que jamais déterminé à faire respecter la réglementation sur les chantiers de désamiantage.
Cette détermination va se traduire par l'envoi ce jour d'une circulaire aux préfets. Je leur demande tout d'abord d'assurer un suivi des sanctions et lettres d'observations adressées aux chefs d'entreprise concernés par des chantiers non-conformes. Je leur demande ensuite de ne pas relâcher la pression sur les chantiers de désamiantage tout au long de l'année. Cette mobilisation portera en particulier sur l'identification des chantiers non déclarés, des contrôles le cas échéant et sur la sensibilisation des entreprises à leurs obligations réglementaires.
Cette détermination va également se traduire par le renouvellement de la campagne de contrôle en 2006. Cette campagne s'inscrira cette fois dans le cadre d'une campagne européenne des inspections du travail, organisée par la Commission européenne, qui aura lieu simultanément dans les 25 Etats membres au cours du second semestre 2006. C'est une innovation : ce sera la première campagne européenne sur l'amiante. La Commission européenne est en effet soucieuse de l'effectivité des directives communautaires et en particulier de celle du 26 juillet 1999 qui a interdit l'amiante dans toute l'Union européenne le 1er janvier 2005.
Cette détermination va enfin se traduire par le renforcement de la réglementation sur l'amiante. Un projet de décret est en cours de consultation et devrait être signé début 2006. Ce texte visera à :
- améliorer la transmission des repérages des matériaux contenant de l'amiante dans des bâtiments aux entreprises qui y interviennent en responsabilisant les maîtres d'ouvrage ;
- renforcer la qualification des entreprises qui effectuent des travaux de retrait ou de confinement présentant des risques particuliers ;
- rendre obligatoire la formation des travailleurs exerçant des activités de retrait ou de confinement quel que soit le type d'amiante ;
- introduire un temps d'habillage et de déshabillage ainsi qu'un temps de pause après le port ininterrompu d'un équipement de protection respiratoire individuelle.
Ce projet de décret intègrera ainsi les propositions du Sénat visant à réduire les plages horaires journalières de ces salariés et à améliorer leur qualification en particulier vis-à-vis du traitement de l'amiante non friable.
Le ministère du travail avec l'aide de la CNAMTS et de l'INRS est donc pleinement mobilisé et déterminé à faire appliquer dans les chantiers de désamiantage la réglementation. Je le dis solennellement : les résultats de la campagne de contrôle menée cet été ne sont pas bons. Je lance un appel aux organismes professionnels du désamiantage et aux entreprises de ce secteur pour réagir rapidement et remédier à cette situation. Nous devons, tous ensemble, trouver les moyens d'améliorer rapidement la situation des salariés exposés à ce risque. C'est un enjeu majeur de santé publique.
Au-delà des chantiers de désamiantage, sur la base du rapport sur l'amiante de la mission d'information du Sénat d'octobre 2005 et de celui attendu pour début 2006 de l'Assemblée nationale, le Gouvernement élabore en ce moment un plan d'actions interministériel qui vise notamment à mieux repérer l'amiante dans les bâtiments -en particulier publics-, ou à améliorer les procédures judiciaires ou l'indemnisation des victimes de l'amiante. Dans ce cadre, je devrais être amené début 2006 en étroite collaboration avec le ministre de la santé à présenter une réforme particulièrement attendue du fonds de cessation anticipée des travailleurs exposés à l'amiante. Ce dispositif de préretraites qui bénéficie aujourd'hui à environ 30 000 personnes est en effet décrié comme injuste, coûteux et lourd. L'IGAS doit me remettre des propositions à la fin de ce mois.
(Source http://www.travail.gouv.fr, le 17 novembre 2005)