Conseil des ministres du 21 août 2003. Point sur les événements météorologiques exceptionnels de l'été et sur l'action du Gouvernement.

Texte intégral

  • II. Les mesures prises et les nouvelles actions prévues

1. Tout au long de cette période de canicule, les personnels des hôpitaux, des services d'urgences et de secours, des SAMU, ont fait preuve de leur engagement et de leur compétence. Les hôpitaux ont su faire face à la situation et, compte tenu du nombre et de l'état de santé des personnes arrivées aux urgences, les soins utiles ont été prodigués. Une majorité des décès sont survenus hors de l'hôpital.
Il importe qu'un tel drame humain ne se reproduise pas. Une mission d'expertise et d'évaluation d'ores et déjà mise en place examine les conditions dans lesquelles les systèmes d'information, de veille et d'alerte ont fonctionné. Cette mission est également chargée de faire toute proposition de nature à renforcer l'efficacité de notre dispositif.
Parallèlement, une mission d'estimation précise du nombre des décès supplémentaires liés à la canicule, composée d'épidémiologistes de l'INSERM, a été mise en place et rendra ses conclusions dans le délai d'un mois.
Pour faire face aux difficultés rencontrées par les services funéraires, des dispositions ont été prises pour accroître, dans le respect de la dignité des personnes, la capacité d'accueil des dépouilles. En outre, des instructions ont été données pour que les familles ne supportent pas les conséquences financières de cette situation.
Pour l'avenir, l'intégration de la dimension climatique dans la définition de la politique de risque sanitaire s'impose afin de mieux anticiper et prévenir ces phénomènes. La situation actuelle s'inscrit en effet dans le cadre du changement climatique qui accroît l'intensité et la fréquence des vagues de chaleur et, par là, augmente les risques de décès, en particulier dans les agglomérations.
Enfin, cette crise impose une réflexion approfondie sur le rôle, la place et l'organisation des urgences au sein du système hospitalier et plus largement du système de santé, au vu des profondes mutations que reflète l'évolution de l'activité et du rôle des services d'urgence dans la société.

2. Au-delà, la surmortalité causée par la vague de chaleur du mois d'août a mis en lumière les effets du vieillissement de la population, sa concentration dans les villes et l'isolement social croissant de certaines catégories de population.
Ce constat incite à conduire une politique visant à retisser le lien social avec les personnes âgées, en institution ou à domicile, afin de remédier à leur isolement dans la vie de tous les jours et plus encore au moment des congés. Le développement des liens intergénérationnels et une meilleure coordination en réseau des acteurs du secteur seront privilégiés.
Le maillage du système sanitaire autour des personnes âgées doit aussi être renforcé en coordonnant médecine de proximité, soins spécialisés et système hospitalier pour une population de plus en plus âgée.
Un dispositif de veille et d'alerte en cas de crise sanitaire pouvant aboutir au déclenchement d'un plan d'urgence spécifiquement adapté aux personnes âgées doit être mis au point. Le Gouvernement présentera ses propositions dès l'automne. Une stratégie globale de prévention est également à définir et à mettre en oeuvre.
La crise a constitué un révélateur de l'impact du vieillissement pour notre société. Les conséquences économiques, sociales et culturelles doivent en être tirées. Un travail de réflexion mobilisant l'ensemble des collectivités territoriales et des acteurs de l'accompagnement et de l'hébergement des personnes âgées dépendantes sera mené pour définir les éléments d'une mobilisation nationale contre l'isolement social des personnes âgées et les voies d'amélioration de l'organisation et du fonctionnement de leurs établissements et, plus généralement, des conditions de prise en charge des besoins des personnes âgées les plus fragiles.

3. Dans le domaine de l'environnement, des mesures immédiates ont été prises pour faire face à la canicule (réduction de la vitesse des véhicules, arrêtés de restriction d'eau...).
Le plan climat 2003 renforcera et accélérera la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre pour une division par quatre des émissions en 2050. Le plan " véhicules propres ", qui sera présenté dès septembre, permettra à la France et à son industrie d'être à la pointe des technologies propres et économes dans le domaine des transports d'ici 2010.
Pour accélérer la réparation des dommages causés par les incendies de forêts, le Premier ministre a écrit au Président de la Commission pour demander le bénéfice pour la France du fonds de solidarité de l'Union européenne ; il se rendra à Bruxelles le 27 août prochain pour appuyer cette demande. Des contrats de restauration écologique seront proposés aux propriétaires et collectivités concernés.
Des plans de prévention des risques incendies de forêts seront mis en chantier dès l'automne dans le Var.

4. En matière énergétique, le dispositif d'alerte et de régulation électrique a bien fonctionné dès le début de la canicule, permettant d'éviter, dans le respect des équilibres environnementaux, une rupture dans la fourniture d'électricité qui aurait eu des répercussions dommageables pour les particuliers comme pour les entreprises.
Il a d'abord été demandé aux producteurs de mobiliser l'ensemble des possibilités de production électrique accessibles pour faire face à la demande (achat d'électricité sur les marchés, reports des maintenances de certaines unités, recours à de nouvelles capacités de génération). Alors que les maximas réglementaires d'élévation de température étaient atteints, le Gouvernement a accordé une dérogation temporaire autorisant de légers dépassements aux centrales thermiques concernées (aussi bien nucléaires que classiques), tout en limitant son usage aux stricts besoins pour éviter des coupures d'électricité.
Parallèlement, un appel au civisme visant à réduire la consommation d'électricité a été lancé dès le 10 août. Il en est résulté une économie qui peut être chiffrée entre 200 et 300 MW, soit l'équivalent de l'alimentation d'une ville de 300 000 habitants. Il a en outre été demandé à EDF et aux producteurs d'électricité d'assurer un suivi renforcé des écosystèmes en aval des centrales afin de détecter toute anomalie notable due à ces dérogations. Par ailleurs, un comité national chargé d'apprécier les éventuels impacts sur l'environnement, placé auprès de la ministre de l'écologie et du développement durable, est installé ce jeudi 21 août.
A moyen terme, il a été demandé à EDF et à RTE, en liaison étroite avec les administrations concernées, d'établir avant la fin de l'année un plan " canicule ", symétrique du plan " grand froid " qui existe déjà. L'objectif est de renforcer la prévention et la gestion de ce type de situation climatique extrême au travers d'une programmation adaptée des moyens de production et des procédures nécessaires pour y faire face.
La loi d'orientation sur l'énergie, que le Gouvernement présentera au Parlement à l'automne, devra également intégrer les enseignements complémentaires de cet été afin de garantir dans l'avenir aux Français un bouquet énergétique équilibré et capable de répondre à leurs besoins en toutes circonstances, même les plus exceptionnelles.

5. Pour lutter contre les conséquences de la sécheresse, des mesures de soutien à l'agriculture ont été prises ou obtenues de Bruxelles dès le mois de juillet : la mise en pâture des jachères, une aide exceptionnelle au transport de fourrage, le report au 15 décembre 2003 du paiement des cotisations sociales dues à partir du 1er août, le paiement anticipé des aides européennes animales et végétales ou encore la mobilisation des stocks d'intervention de céréales de l'Union européenne pour compléter l'alimentation du bétail.
Une cellule de coordination réunit chaque semaine au ministère chargé de l'agriculture les représentants de la profession agricole et des services de l'Etat pour examiner en détail l'évolution de la situation de chaque production, pour ajuster, si nécessaire, la mise en oeuvre des dispositifs d'aide et pour anticiper les conséquences de la sécheresse. Le Premier ministre recevra demain, avec Hervé Gaymard, le Conseil de l'Agriculture française pour évaluer l'ampleur des dommages agricoles déjà causés par cette sécheresse exceptionnelle et adapter le dispositif mis en place pour y faire face. La première réunion de la commission nationale des calamités agricoles se tiendra, par anticipation, le 29 août pour examiner les dossiers des 55 départements qui ont, à ce jour, demandé une indemnisation.

6. Dans le cadre de la lutte contre les incendies, l'Etat a engagé des moyens sans précédent : plus de 2 500 sapeurs-pompiers, dont 600 militaires de la sécurité civile et 400 des armées. L'activité aérienne des bombardiers d'eau a été intense avec plus de 8200 heures de vol contre 7000 en moyenne annuelle. Ces moyens ont d'ailleurs été renforcés par l'appel à la coopération internationale. Au total, les moyens nationaux de l'Etat ont été présents sur plus d'un départ de feu sur deux, bien au delà de son engagement habituel.
Une programmation quinquennale, prévue dans la prochaine loi sur la modernisation de la sécurité civile, permettra de donner plus de cohérence au dispositif de sécurité civile, de renforcer les moyens d'intervention de l'Etat et de mieux répondre aux catastrophes naturelles.
[UD 5]