Déclaration de M. François Hollande, premier secrétaire du PS, sur le bilan de la politique gouvernementale, le calendrier des actions politiques pour la préparation de l'élection présidentielle et les priorités contenues dans le projet socialiste, Paris le 16 janvier 2006.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Voeux à la presse à Paris le 16 janvier 2006

Texte intégral


Bienvenue. Avant de prononcer mes v?ux pour cette nouvelle année, je voudrais adresser un message de félicitation à Michelle Bachelet. Sa victoire au Chili est à la fois historique, symbolique, et à bien des égards exemplaire. Elle est historique, parce que pour celles et ceux qui ont partagé - et j'en suis-, le combat des Chiliens au lendemain de la dictature, qui ont vu dans ce pays le pire et qui maintenant peuvent apprécier le meilleur, c'est-à-dire la démocratie. Le succès de Michelle Bachelet n'est pas seulement un succès pour les Chiliennes et les Chiliens mais pour tous les démocrates. C'est une victoire bien sûr symbolique parce que c'est un nouveau succès de la gauche, et celui de Michelle Bachelet, une femme. C'est également exemplaire. Gauche durable, gauche unie, gauche renouvelée? pour le parti socialiste français, qui se prépare à son tour à aller devant les électeurs l'année prochaine, c'est effectivement une belle référence.
Quand je regarde ce qui se passe dans d'autres pays, dans d'autres démocraties, en Finlande notamment, je me dis que là aussi les sociétés politiques bougent et qu'elles bougeront encore. En France aussi.
Mais j'en viens aux v?ux. C'est à toute la presse que je veux les adresser.
La presse en France ne va pas bien. Elle est concentrée, quoi qu'en dise un rapport officiel. Elle est fragile, elle manque de soutien et notamment de soutien public. Ses formes d'organisation sont à bien des égards dépassées. Elle n'est pas non plus indépendante, autant qu'il le faudrait. Et c'est pourquoi je fais aujourd'hui une proposition, que les sociétés de rédacteurs soient partout généralisées et que ces sociétés de rédacteurs puissent dans tous les organes de presse, écrites ou audiovisuelles, être représentées dans les lieux de décision de l'entreprise. Une proposition de loi sera prochainement déposée dans ce sens, c'est l'engagement que je prends au-delà de 2007.
Mais à travers cette rencontre, je veux m'adresser directement aux Français et leur souhaiter une année 2006 qui serve à préparer le choix essentiel de 2007. Mon seul objectif pour l'année 2007, c'est de faire gagner la gauche. Alors, dans cette perspective, 2006 doit être une année de vérité. Une année de vérité, d'abord pour la France. Nous ouvrons 2006 dans un climat de pessimisme, comme rarement nous l'avons connu, de peur et d'un sentiment, parfois réalité, de déclassement, de perte de repères, de perte de sens.
En 2005, la France a été confrontée à des défis qu'elle n'a pas toujours pu relever. D'abord, elle s'est interrogée sur son identité à l'occasion du référendum du 29 mai et faute d'ailleurs d'avoir pu elle-même maîtriser son identité, elle a refusé un choix qui lui était proposé, d'une Europe plus large et plus forte. Elle s'est posée aussi avec angoisse, cette même France, la nôtre, la question de sa cohésion et notamment lors des émeutes des banlieues. Le « Vivre ensemble » a été une nouvelle fois posé, à la fois comme principe, mais hélas détourné comme réalité. La France enfin, a été interpellée sur sa puissance même, sur son statut de grand pays, à travers la médiocrité de ses résultats économiques, son manque de leadership en Europe et le recul de sa présence dans le monde. La France a des atouts considérables, sa jeunesse, sa main d'?uvre, sa richesse, mais aussi sa capacité à se mobiliser sur les grandes causes, son message universel. La France n'est donc pas en déclin, elle est en de mauvaises mains et la droite voudrait faire passer ses échecs comme une crise d'un modèle français. Mettre de côté sa propre responsabilité dans les résultats que l'on connaît pour mettre en accusation le pacte social et le modèle républicain. Ce n'est pas la France qui est faible, c'est le pouvoir actuel qui l'affaiblit.
Ce n'est pas la France qui est faible, c'est le pouvoir actuel qui l'affaiblit.
C'est pourquoi 2006 doit être une année de vérité sur la droite. Jacques Chirac achève son interminable fin de règne et la majorité sortante entame sa dernière année de législature. Le temps des bilans est donc venu, et c'est en 2006 qu'il faudra le dresser. C'est en 2007 que viendra le jugement. Il nous revient donc, parti socialiste, gauche, de mettre en avant ce qui est l'évidence, c'est-à-dire un échec gouvernemental.
- D'abord sur l'emploi. Un chiffre : zéro création nette d'emplois depuis 2002. Le chômage peut baisser statistiquement à travers les départs en retraite plus nombreux que les arrivées sur le marché du travail, les emplois aidés, notamment dans cette année budgétaire 2006 et enfin les radiations qui hélas transforment des chômeurs en Rmistes. En revanche l'emploi lui ne progresse pas. Et cela veut dire que pour les Français, il n'y a aucune amélioration sur le front de l'emploi et sur l'accès de tous au travail.
- Deuxième pilier, la sécurité qui était un engagement nous disait-on du Président de la République et du Ministre de l'Intérieur. Les chiffres maintenant sont là. Depuis 2002, les violences faites aux personnes n'ont cessé de progresser. Pour l'année 2005, il y a eu 5 % d'augmentation de ces violences et plus de 110.000 faits de violences urbaines dont seulement un quart, si je puis dire, 1/4 est imputable au mois de novembre. Ce qui veut dire que les violences urbaines sont un phénomène qui s'est structuré tout au long de ces derniers mois avec la droite aux responsabilités.
- Troisième pilier d'une action gouvernementale qui là encore s'écroule. C'est la situation des finances publiques et le niveau record de la dette. Là encore deux chiffres simples : fin 2001, la dette représentait 59 % de la richesse nationale, fin 2006, ce sera 68 %, près de 9 points de plus. Voilà là encore le bilan.
- Dernier pilier, celui de la compétitivité des entreprises. Jamais le déficit commercial de la France n'aura été aussi élevé, 25 milliards d'euros de solde négatif. À partir de là, nous avons une situation grave et un gouvernement que j'appellerais le gouvernement des « auto satisfaits ». Autosatisfaction de Jacques Chirac au prétexte qu'il faudrait refuser l'auto-flagellation. Il faut bien dire que l'auto-flagellation n'est pas dans sa culture et même le moindre examen de conscience. S'il avait fallu le juger par rapport aux promesses non tenues, c'est vrai que le bilan et l'acte d'accusation auraient été graves. Mais il recherche à ce point l'impunité, y compris par rapport au verdict du suffrage universel, qu'il en a oublié une promesse, que je veux rappeler, celle de la réforme du statut pénal du chef de l'Etat. Cette promesse, il l'avait formulée comme candidat en 2002, elle devait être honorée dans la première année de son quinquennat. Il n'en est rien aujourd'hui. Comme il ne reste plus qu'un an avant la fin de son mandat, je demande au nom du parti socialiste qu'un projet de loi soit déposé avant l'élection présidentielle pour que le statut pénal du chef de l'Etat puisse être adopté par le Parlement avant l'échéance présidentielle de l'année prochaine.
L'annonce, comme critère de l'action
Le Premier ministre a trouvé une nouvelle méthode qu'il pratique encore à l'instant où je parle : l'annonce comme critère de l'action. Les mesures se succèdent aux déclarations, les incantations aux décisions sans que jamais preuve soit apportée de leurs effectivités. Et sans qu'on soit sûr qu'il en assurera lui-même la conduite et la maîtrise car la plupart de ses annonces portent sur une période qui est généralement au-delà de 2007, ce qui laisse supposer que le délai de péremption de son propre gouvernement sera largement dépassé.
Ainsi en est-il de la lutte contre l'endettement du pays, de la réforme fiscale, de la cohésion sociale et même de l'égalité des chances. Je crois qu'il faut évoquer cette situation la prendre sans humour et sans tendresse. Car une telle pratique par rapport à tant de difficultés pour les Français n'est pas acceptable, comme est inacceptable la dureté de son gouvernement à l'égard des plus modestes de nos concitoyens. Je ne sais ce que sera l'annonce d'un nouveau contrat pour les jeunes. Ce que je sais, c'est que ce sera de toute manière un contrat dérogatoire aux droits communs, c'est-à-dire un sous-contrat avec un sous-salaire, avec une sous-sécurité, c'est-à-dire une vraie précarité. Est ce que ce sera la généralisation du contrat nouvel embauche qui n'a pas crée un emploi de plus ? Est ce que ce sera encore des allègements de charge qui représentent 20 milliards d'euros ? Est ce que ce sera un contrat spécifique pour les jeunes comme on fera un contrat aussi pour les seniors ? Ce qui est en cause, c'est l'éclatement du droit du travail selon les catégories et les âges.
Enfin, Nicolas Sarkozy n'a de tolérance que pour lui-même et un curieux usage des mathématiques politiques. Parce que quand il y avait 25.000 véhicules qui brûlaient en 2001, c'était la faute de la gauche mais quand aujourd'hui il y a 45.000 voitures qui brûlent, ce serait une réussite de Nicolas Sarkozy parce que nous dit-il, cela aurait pu être pire. Chaque fait dramatique, et il y en a de nombreux, donne l'occasion à opération de communication. Aujourd'hui nous dit-on il est dans le train. Mais où étaient les forces de police dans le train Nice Lyon le 1er janvier, où était le ministre de l'Intérieur les 2 et 3 janvier quand on attendait une explication ? On ne peut pas avoir une politique de sécurité qui réponde simplement par une communication ou par l'annonce de forces supplémentaires de police ou de lois supplémentaires qui viendraient s'ajouter aux autres. Dois-je rappeler que sur l'ordonnance de 45 en matière de jeunesse, il y a déjà eu depuis 2002, trois modifications législatives. On nous annonce une 4e, il y a déjà eu une loi sur l'immigration qui a introduit le contrat d'intégration et aujourd'hui il faudrait une deuxième loi pour appliquer le contrat. Avec ce gouvernement, avec Nicolas Sarkozy en particulier, c'est l'inflation politique, l'inflation législative, l'inflation médiatique mais hélas c'est la stagnation pour beaucoup de nos concitoyens et le recul.
2006 : une année de vérité pour toute la gauche
Nous sommes devant une France où les inégalités n'ont jamais été aussi profondes et c'est le défi qui est lancé à la gauche. Redonner confiance à la France, redonner force à l'égalité, redonner grandeur à la République et c'est pourquoi je veux faire de l'année 2006, une année de vérité aussi et d'abord pour la gauche. Pour le parti socialiste, l'année 2005 a été consacrée à nos débats internes, commencée dans la division sur le référendum européen, terminée dans l'unité avec le congrès du Mans qui nous a permis de dépasser ce qui nous avait séparé, le oui, le non, qui nous a uni sur l'essentiel , notre projet et qui nous permet aujourd'hui de faire de ce projet pour la France le message de l'année 2006. Nous aurons d'autres rendez vous au-delà du projet : je veux parler de la désignation des candidats, j'y viendrais. Mais en ce début d'année et par rapport au mandat qui m'a été donné par le congrès du Mans, je veux tenir le cap, faire respecter les règles et donner à notre parti la force nécessaire. Je ne me laisserai pas détourner par d'autres considérations, d'autres circonstances ou d'autres précipitations. Un calendrier a été choisi, un temps a été fixé, un objectif a été ensemble arrêté. Cet objectif, ce calendrier, cette méthode, j'en fais aujourd'hui ma priorité.
D'abord sur le projet. L'élection présidentielle de 2007 opposera deux conceptions de la France et c'est bien qu'il en soit ainsi. C'est la France qui sera l'enjeu de la confrontation. Une première conception fondée sur la réussite individuelle, le mérite récompensé et qui en définitive mettent les Français en conflit avec eux mêmes, c'est-à-dire une France divisée, une France séparée, une France éclatée, une France fracturée, une France fragmentée. Nous n'en voulons pas. A cette conception-là, nous voulons opposer une conception fondée sur l'harmonie et la réconciliation. Ce que nous voulons, c'est une ambition pour la France fondée sur le dépassement de nos diversités, sur une sortie collective de la crise de confiance qui frappe notre pays. Ce que nous voulons, c'est une France rassemblée et une France juste, qui donne en définitive une identité à chacune et à chacun mais aussi une identité à la France. Nous ne séparons pas le projet pour la France du projet pour chacun.
Réaliser la promesse de la République
Ce que nous voulons comme perspective, au-delà de 2007, ce n'est pas simplement d'affirmer le modèle républicain, c'est de réaliser la promesse de la république, c'est-à-dire permettre à chaque individu de choisir et de réussir sa vie. C'est pourquoi chacun doit disposer de ressources, des chances nécessaires pour sa promotion personnelle. C'est ce qui fonde la légitimité de la puissance publique et de l'Etat. Et c'est pourquoi notre projet aura quatre grandes priorités.
Première priorité : donner à chacune et à chacun au début de sa vie l'assurance que le droit au travail sera reconnu, à travers deux grandes propositions que nous affinerons au cours des prochains mois. D'abord sur la formation professionnelle qui sera à la fois un droit individuel et une forme de gestion collective. Chacun doit pouvoir avoir d'autant plus de droits à la formation professionnelle qu'il n'a pas eu de chances pour sa formation initiale. Un même temps de formation doit être offert à chacune et à chacun. Et il faut aussi gérer différemment les fonds de la formation professionnelle. C'est une masse financière considérable, qui doit être maintenant affectée là où les besoins sont les plus évidents et tout au long de la vie. La deuxième proposition que nous faisons, c'est le contrat de reclassement. Toute personne victime d'un plan social ou d'un licenciement économique doit pouvoir signer un contrat avec le service public de l'emploi permettant d'aller de l'emploi vers l'emploi sans passer par la case chômage et en ayant en plus, une formation, une qualification, un accompagnement et la recherche d'un emploi. Voilà la première priorité sans laquelle il ne peut pas y avoir retour de la confiance au-delà de la politique de croissance que nous mettrons en ?uvre.
La deuxième priorité : l'éducation. C'est le choix majeur, pas simplement au nom de l'égalité, mais au nom de l'excellence, au nom de la réussite individuelle et collective, au nom dans la bataille dans la mondialisation, au nom de la citoyenneté et c'est pourquoi toutes les mesures que nous prendronsau-delà de 2007 seront concentrées sur la jeunesse. Tout doit être fait aujourd'hui pour que les jeunes puissent devenir des citoyens et des travailleurs avec toutes les dimensions qui s'attachent à ces droits.
Troisième priorité : la justice fiscale. Je l'ai dit, il n'y aura pas de France rassemblée s'il n'y a pas de société juste. Nous faisons trois propositions : la fusion de l'impôt sur le revenu avec la contribution sociale généralisée pour la progressivité de l'impôt ; le changement des règles de la fiscalité locale à travers une nouvelle fiscalité liée aux revenus qui se substituera à la taxe d'habitation ; et enfin un changement des modalités du financement de la protection sociale. J'ai été d'ailleurs ravi de voir que sur ces terrains-là, nous étions repris. Vous étiez presque compatissants, c'est rare, disant : « on vient prendre les idées de la gauche ». C'est donc que l'on avait des idées. Merci de cette reconnaissance. Nous serons donc vigilants sur le financement de la protection sociale. S'il s'agit comme nous le proposons, de faire en sorte que tous les facteurs de production travail comme capital, soient appelés au financement de la maladie et de la retraite, alors c'est l'orientation qu'il faut choisir et elle prendra du temps, on le sait. Mais s'il s'agit à travers cette récupération des mots (souvent la droite prend les mots de la gauche pour prendre ensuite des actes et des mesures de droite), à travers cette réforme des cotisations sociales, de faire une TVA sociale alors très peu pour nous. Car il s'agirait à ce moment-là, de faire payer aux consommateurs l'allègement des charges et des cotisations des entreprises.
Quatrième priorité : la démocratie politique, sociale et participative. Et là aussi sur la démocratie politique, nous voulons des changements des institutions. Nous voulons à la fois un président responsable, c'est bien le moins, et j'ai fait une proposition tout à l'heure, nous voulons un président actif puisqu'il est élu au suffrage universel, mais ce que nous voulons, c'est d'un Parlement qui dispose de plus d'initiatives, de capacité de contrôle, de maîtrise de son ordre du jour, qu'il ne soit pas empêché d'intervenir par le vote bloqué ou l'article 49-3. Ce que nous voulons aussi, c'est la limitation du cumul des mandats. Il est vrai que certains sont peut-être moins qualifiés que d'autres pour aller dans cette direction. Démocratie politique mais je dirais surtout, démocratie sociale et participative. Nous ferons la proposition d'un changement des règles de représentation des syndicats, nous ferons la proposition d'un financement public des syndicats, nous ferons la proposition que les salariés à travers des élections dans chaque entreprise, au-delà d'un certain seuil d'effectifs puissent avoir une représentation dans les conseils d'administration ou les conseils de surveillance.
Notre calendrier a sa logique
Voilà le sens de ce que nous voulons faire. Le calendrier est connu. Une commission du projet s'est déjà réunie avant les vacances de Noël, elle s'est de nouveau réunie la semaine dernière, elle continuera son travail jusqu'au mois de mai. Pendant ce temps-là, les Etats généraux du projet qui ont été confiés à Henri Emmanuelli se tiendront. De grandes réunions thématiques se feront, de manière décentralisée permettant la rencontre avec les forces vives et les Français. Il s'agit de confronter nos propositions avec tous ceux qui le voudront et aussi de faire en sorte de promouvoir nos idées. Enfin, au mois de juin sera adopté le projet par l'ensemble des militants dans le cadre d'une Convention nationale.
Projet pour le premier semestre, désignation aussi pour les élections législatives. Nous aurons à désigner nos candidats avant l'été aux Législatives. Nous ferons en sorte que la parité et la diversité soient respectées. C'est un engagement que j'ai pris, il y aura autant de candidates que de candidats aux élections législatives. Au mois de mars, ces circonscriptions réservées à des femmes seront connues et nul ne pourra dire qu'une femme a moins de chance qu'un homme de gagner une élection. En juin, l'ensemble de nos candidats sera désigné. Pour l'élection présidentielle, là aussi le calendrier est connu et a été arrêté par notre dernier congrès. C'est en novembre 2006, -et pour beaucoup c'est déjà trop tôt , pour d'autres c'est déjà trop tard-, que nous désignerons notre candidate ou notre candidat. Ce calendrier a sa logique, son utilité et sa légitimité. La logique, c'est que nous ne pouvons désigner l'une ou l'un d'entre nous qu'une fois le projet adopté car notre candidate ou notre candidat sera forcément candidate ou candidat du projet des socialistes. Il portera les idées socialistes, il pourra ajouter les siennes, mais c'est par le projet socialiste que nous nous retrouverons tous. Et au-delà du choix qui sera le nôtre, le moment venu, nous serons derrière celui ou celle qui aura été choisi-e et derrière le projet des socialistes.
C'est la logique aussi de savoir dans quelle configuration nous allons désigner notre candidat, quel est l'état des forces en présence, l'état de la gauche, l'état de la droite. Là encore si nous voulons avoir un accord, la moindre des choses, c'est de laisser vivre cet accord pour ensuite désigner nous-même notre candidat. C'est la logique. Il y a aussi une utilité. C'est mon rôle de Premier secrétaire de protéger les candidats à la candidature. A quoi servirait-il de s'exposer trop tôt au risque de s'affaiblir, avant même que la campagne ne commence ? Pour cette raison-là, je pense que le calendrier est le bon. Il sera tenu. Enfin, c'est la légitimité du vote des militants. Il y aura une désignation par les militants. Je suis le Premier secrétaire du respect du vote des militants et cela vaut aussi pour les décisions de congrès. Alors d'ici novembre, il y a beaucoup de talents au Parti socialiste et tant mieux. Tavaillons collectivement. Il y a une émulation, c'est normal, il y a de la patience aussi, c'est nécessaire.
D'ici là, nous engagerons une campagne d'adhésion dès le mois de février, pour offrir à la gauche le grand parti dont elle a besoin. Nous n'avons pas là-dessus, réussi autant qu'on l'avait espéré ? C'est vrai qu'il y a eu des tentatives, c'est vrai qu'elles n'ont pas toujours abouti. C'est vrai aussi qu'il y a dans d'autres partis d'autres formules d'adhésion parfois virtuelles à des partis eux-mêmes virtuels. Mais nous avons le devoir d'ouvrir plus largement nos portes et c'est pourquoi ces nouveaux adhérents, que j'espère nombreux, pourront choisir à la fois le projet des socialistes et le candidat des socialistes.
Pour un accord de gouvernement
Enfin, il faut que 2006 soit une année de vérité pour le rassemblement de la gauche. Je suis heureux qu'une date ait été trouvée, le 8 février, pour ce premier rassemblement de la gauche, qui est une première étape. Ma conception du rassemblement est simple. Toutes les initiatives pour s'opposer à la droite sont nécessaires :sur l'emploi, il y a matière, sur la protection sociale et on l'a fait pas toujours avec le succès espéré, sur les libertés ou encore plus récemment sur l'article 4 de la loi de février 2005. Il ne peut y avoir dans ce rassemblement contre la droite aucune exclusive et c'est peut-être ainsi que se préparent les désistements pour 2007 et en tout cas la différenciation entre la gauche et la droite, c'est une évidence. Mais le rassemblement de la gauche, ce n'est pas simplement l'addition de tous ceux qui combattent la droite, sans autre perspective que de contester ou de résister. C'est pourquoi, l'objectif que je propose, avec le parti socialiste et avec toutes les forces de gauche qui le voudront, c'est la recherche d'un accord de gouvernement autour de propositions communes permettant de diriger ensemble le pays. Nous verrons bien si nous y parvenons. Il ne s'agit pas de forcer quiconque à une alliance programmatique ou à une participation à l'exercice du pouvoir. C'est à chaque parti de gauche de dire ce qu'il veut et au moment où il en décidera librement. Mais je le dis aussi avec force, il n'y aura de dynamique que dans l'unité et de confiance dans l'alternance que dans la cohérence et le respect. L'union, c'est une condition de la crédibilité. Le contrat du gouvernement n'est pas simplement un contrat entre les familles de la gauche, c'est un contrat avec les Français et c'est ce que j'appelle la gauche durable. La gauche durable, c'est ce qui, au nom du contrat de gouvernement, permet de conclure des accords électoraux avec les partenaires qui voudront aller dans ce sens. Tel est pour moi, l'objet de la réunion du 8 février, vérifier que nous sommes contre la droite (c'est une évidence) et ensuite rechercher la voie d'un accord permettant de gouverner ensemble le pays.
Mais pour que nous donnions toute notre énergie à ce combat-là, faut-il aussi que le parti socialiste montre l'exemple. Il veut des accords programmatiques, il doit être prêt à des accords électoraux dès le premier tour. Je le dis ici, le PS ne veut pas gouverner seul s'il gagne en 2007. Il doit donc assurer la représentation de la diversité de la gauche à l'Assemblée nationale. Je prends ici l'engagement au nom des socialistes que nous changerons le mode de scrutin au-delà de 2007 pour y introduire une part de proportionnelle. Puisque cela ne se fera pas d'ici 2007, puisque la droite s'y refuse, alors nous les socialistes, nous devons rechercher des accords électoraux permettant la représentation de la diversité de la gauche. Enfin, si le moment venu, après avoir conclu l'accord de gouvernement, après avoir scellé nos accords électoraux liés à l'accord de gouvernement, l'idée d'une candidature commune de la gauche peut émerger, alors il faudra ouvrir le processus des primaires associant les électeurs de la gauche au choix de leur candidat dans l'esprit de ce qui s'est fait en Italie, mais dans un cadre institutionnel différent. D'ici là, les socialistes auront choisi leur propre candidat.
Pour tout dire, cette année 2006, année de vérité, est une année pleine. Il n'y a pas de temps à perdre. C'est en 2006, que nous devons proposer aux Français une espérance, offrir à la gauche un cadre de rassemblement, sceller les alliances nécessaires et surtout convaincre. En 2006, beaucoup sont dans l'attente, parfois avec impatience, parfois avec retenue et pourtant 2006 est l'année décisive. C'est en 2006 que se décide le changement de 2007. Respecter le temps, et en même temps ne pas nous laisser détourner de nos objectifs, être tenaces, être présents, être du côté des Français, de ceux qui souffrent et ils sont aujourd'hui une majorité à souffrir, pas simplement les jeunes, pas simplement ceux qui sont privés d'emplois mais aussi les salariés privés de pouvoir d'achat, ceux qui sont mal-logés, dans toutes les catégories sociales. Nous devons être à leurs côtés. Voilà ce que doit être à mon sens le v?u du parti socialiste. Sortir d'abord de nos propres frontières, nous socialistes, ouvrir nos portes, rassembler la gauche, donner un espoir crédible et porter un message tout simple, élémentaire aux Français : oui, en 2007, le changement est possible et ce changement passe et doit passer par la gauche. Merci.
Source http://www.parti-socialiste.fr, le 17 janvier 2006