Texte intégral
F. Laborde - Revenons d'abord sur la grippe aviaire, puisque cela vous concerne aussi : 43 pays ont décrété une restriction, un embargo à l'égard de ce qui relève de la filière volaille française, c'est bien cela ?
R - Tout à fait, 43 pays, dont certains avec un embargo total, d'autres avec un embargo partiel. Cela représente évidemment un certain nombre d'exportations pour la filière avicole...
Q - Sur quoi l'embargo partiel porte-t-il ? Sur une catégorie de produits ? Comment cela se passe-t-il ?
R - Ce peut être de la découpe, ce peut être surtout des produits traités thermiquement, c'est-à-dire essentiellement le foie gras.
Q - Pouvez-vous arriver à persuader ces pays d'être un peu plus souples sur l'embargo ou n'y a-t-il absolument rien à faire ?
R - Il y a deux choses. Il y a d'abord un principe, qui est le principe de la régionalisation, qui a été appliqué par les Etats-Unis : ils ont décrété un embargo mais ils l'ont fait de manière tout à fait restrictive, en faisant l'embargo sur les volailles qui viennent du département de l'Ain, ce qui parait assez légitime. En revanche, les autres pays l'ont fait de manière beaucoup plus générale, pour toute volaille provenant de France. Donc, ce que nous faisons, c'est que nos ambassades, en particulier les attachés agricoles auprès des ambassades, sont en alerte, ont un certain nombre d'argumentaires, expliquent la situation aux autorités des pays étrangers importateurs de nos volailles. D'abord leur expliquer où se trouve l'Ain, parce que tout le monde ne sait pas où se trouve l'Ain... Et pour leur dire que ce principe de régionalisation doit être appliqué.
Q - Comment cela se passe-t-il avec les autres pays européens ? Nous sommes les seuls à avoir un élevage touché. Est-ce la faute à pas de chance ou parce qu'ailleurs, on est peut-être moins transparent qu'en France sur ces questions ?
R - Non, je ne pense pas. Je pense que le fait que la France ait la plus grosse agriculture d'Europe justifie un peu statistiquement que cela se passe là. Il y a eu en plus des phénomènes météorologiques de grand froid dans les pays de l'Est, qui ont amené les oiseaux migrateurs à se déplacer probablement plus tôt que prévu, et dans des régions où l'on ne les attendait pas véritablement, puisque qu'on attendait les oiseaux migrateurs plutôt sur la façade atlantique.
Q - Un chat a été contaminé, peut-être en mangeant un animal mort. Cela veut dire qu'au niveau européen, entre les ministres, vous restez très informés les uns les autres, et sur une affaire comme cela, par exemple, vous savez que cela pourrait créer d'autres tensions ailleurs ?
R - Les ministres européens, entre eux, sont bien sûr en étroite coordination. D. Bussereau, mon collègue de l'Agriculture, est en veille systématique, et nous avons mis en place une cellule de crise qui est commune à l'agriculture, aux professionnels de la filière et au ministère de l'Economie et des Finances, en particulier le commerce extérieur, pour bien s'assurer que nous prenons toutes les mesures en temps réel, pour diffuser de l'information et pour limiter au maximum les effets de ces embargos.
Q - Abordons le dossier du rapprochement Suez-Gaz de France, ce patriotisme industriel d'ailleurs revendiquer par le Premier ministre, D. de Villepin, mais qui irrite un peu nos partenaires... Comment fait-on pour faire passer cette idée quand on est ministre du Commerce extérieur ? Cela fait peut-être plaisir en France, mais n'est pas forcément très bien vu à l'étranger...
R - Il y a un peu de communication dans toute cette affaire. Il faut regarder la politique qu'a menée l'Italie, notamment - je pense que c'est à ce pays-là que vous faisiez référence - : l'Italie n'a pas été la dernière à mettre en place un certain nombre de barrières et d'obstacles à la prise de contrôle, notamment par ABN-Amro, une société hollandaise, d'une banque italienne. Donc c'est une stratégie dans laquelle la plupart des pays européens, la plupart des pays du monde - les Etats-Unis, par exemple, en sont les grands champions - mènent le même type de politique de construction de sociétés, de groupes dans les secteurs stratégiques, qui seront forts. Je m'en réjouis pour les exportations. Le principe de l'exportation, c'est que plus on est gros et plus on exporte. C'est quasi statistique. Donc le fait que nous ayons un grand champion de plus dans le domaine énergétique me réjouit.
Q - Les Belges semblent un peu agacés. Il faut rappeler que Suez est une compagnie franco-belge, qu'elle distribue notamment l'électricité en Belgique. Au fond, c'est Gaz de France qui va fournir l'électricité eux Belges demain, on comprend qu'ils soient un peu agacés...
R - Suez avait acquis Electrabel, qui était un des grands producteurs et distributeurs d'électricité en Belgique. Je pense que leur service ne va pas changer et que toutes les garanties d'usage seront consenties aux consommateurs d'électricité.
Q - Cela veut-il dire que c'est une façon de fonctionner qui va se perpétuer en France, que ce patriotisme industriel va être de plus en plus revendiqué ? On a vu, par exemple, lors de la tentative de Mittal Steel sur Arcelor, une petite réaction franco-française...
R - Une stratégie industrielle qui consisterait à développer de grands groupes capables d'opérer sur un plan mondial, en face notamment de grands groupes américains ou de grands groupes chinois ou indiens ou autres, qui se développeront puisque c'est le mouvement inéluctable actuel - on est dans une situation et de mondialisation et de consolidation -, je crois que c'est une très bonne chose pour l'Europe. Il faut le mettre en place de la façon la plus concertée et la plus conforme aux dispositions et des lois nationales et du traité européen...
Q - Vous revenez d'une tournée en Asie, et tout dernièrement du Japon. Vous voudriez que les entreprises françaises s'implantent davantage au Japon, ce n'est pas facile...
R - Ce n'est pas facile et, en même temps, il y a une espèce de connexité et de complicité entre les entreprises françaises et les entreprises japonaises, lorsqu'elles ont établi des partenariats, qui est extraordinaire. J'ai participé au salon des nanotechnologies à Tokyo, et il était réjouissant de voir des sociétés à la pointe de la recherche dans le domaine des nanotechnologies, celles qui travaillent autour du pôle de compétitivité de Grenoble, travailler avec des spécialistes japonais des nanotechnologies et vraiment communiquer d'une façon totalement fluide, avec un grand respect de la parole des Japonais pour les technologies françaises. Donc je pense qu'il y a beaucoup à faire. Il faut avoir le temps, la patience, il faut toujours être excellent. Les Japonais, qu'il s'agisse de produits de mode, de parfum, de technologie, ont le souci de l'excellence. Et de l'excellence, de la prise de commande jusqu'au recouvrement de la créance, en passant par le papier d'emballage. Donc il faut impérativement que nos technologies...
Q - Que l'on tienne compte de la culture du pays où l'on va...
R - Voilà, tout à fait, il faut d'abord regarder ce que demande les partenaires, ce que demande les clients. On a tout à fait les moyens de s'y adapter. J'étais à une session organisée pour les vins d'Alsace et les vins des Cotes du Rhône : il fallait voir les milliers d'importateurs et de sommeliers japonais goûter, cracher du vin français, connaissant cela sur le bout des doigts et prêts à importer.
Q - Les derniers chiffres du commerce extérieur dont on a eu connaissance n'étaient pas bons. Est-ce décourageant pour le ministre du Commerce extérieur que vous êtes ? Et voyez-vous quand même dans ces résultats quelques raisons d'espérer mieux ?
R - Je vous mille raisons d'espérer mieux, d'abord parce que ce que nous avons comme indicateur, le volume des grands contrats, est le double de l'année dernière. Deuxièmement, parce que de plus en plus de PME décident d'exporter. Pour la première fois depuis 2000, on a un renversement de tendance : plus d'entreprises abordent l'exportation. Enfin, les entreprises exportent plus maintenant vers les pays lointains et les grands émergents, c'est-à-dire l'Inde, la Chine et les Etats-Unis, marchés tout à fait différents mais où les perspectives de croissance et les chances des produits français sont considérables.
Q - Et si la balance est déficitaire, est-ce à cause de la facture pétrolière essentiellement ?
R - Beaucoup pour la facture pétrolière : l'augmentation du prix du baril en 2005 a été considérable, à peu près 60 % d'augmentation de la facture globale. Et puis le fait que la croissance existe en France, probablement plus que dans d'autres pays européens, et que l'on consomme. Donc on consomme des produits importés et les consommateurs français sont assez contents de trouver des produits...
Q - Vous n'allez pas faire une campagne "Acheter français" ?
R - Mais moi, j'achète français, je mange du poulet français et je bois du vin français !Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 1er mars
R - Tout à fait, 43 pays, dont certains avec un embargo total, d'autres avec un embargo partiel. Cela représente évidemment un certain nombre d'exportations pour la filière avicole...
Q - Sur quoi l'embargo partiel porte-t-il ? Sur une catégorie de produits ? Comment cela se passe-t-il ?
R - Ce peut être de la découpe, ce peut être surtout des produits traités thermiquement, c'est-à-dire essentiellement le foie gras.
Q - Pouvez-vous arriver à persuader ces pays d'être un peu plus souples sur l'embargo ou n'y a-t-il absolument rien à faire ?
R - Il y a deux choses. Il y a d'abord un principe, qui est le principe de la régionalisation, qui a été appliqué par les Etats-Unis : ils ont décrété un embargo mais ils l'ont fait de manière tout à fait restrictive, en faisant l'embargo sur les volailles qui viennent du département de l'Ain, ce qui parait assez légitime. En revanche, les autres pays l'ont fait de manière beaucoup plus générale, pour toute volaille provenant de France. Donc, ce que nous faisons, c'est que nos ambassades, en particulier les attachés agricoles auprès des ambassades, sont en alerte, ont un certain nombre d'argumentaires, expliquent la situation aux autorités des pays étrangers importateurs de nos volailles. D'abord leur expliquer où se trouve l'Ain, parce que tout le monde ne sait pas où se trouve l'Ain... Et pour leur dire que ce principe de régionalisation doit être appliqué.
Q - Comment cela se passe-t-il avec les autres pays européens ? Nous sommes les seuls à avoir un élevage touché. Est-ce la faute à pas de chance ou parce qu'ailleurs, on est peut-être moins transparent qu'en France sur ces questions ?
R - Non, je ne pense pas. Je pense que le fait que la France ait la plus grosse agriculture d'Europe justifie un peu statistiquement que cela se passe là. Il y a eu en plus des phénomènes météorologiques de grand froid dans les pays de l'Est, qui ont amené les oiseaux migrateurs à se déplacer probablement plus tôt que prévu, et dans des régions où l'on ne les attendait pas véritablement, puisque qu'on attendait les oiseaux migrateurs plutôt sur la façade atlantique.
Q - Un chat a été contaminé, peut-être en mangeant un animal mort. Cela veut dire qu'au niveau européen, entre les ministres, vous restez très informés les uns les autres, et sur une affaire comme cela, par exemple, vous savez que cela pourrait créer d'autres tensions ailleurs ?
R - Les ministres européens, entre eux, sont bien sûr en étroite coordination. D. Bussereau, mon collègue de l'Agriculture, est en veille systématique, et nous avons mis en place une cellule de crise qui est commune à l'agriculture, aux professionnels de la filière et au ministère de l'Economie et des Finances, en particulier le commerce extérieur, pour bien s'assurer que nous prenons toutes les mesures en temps réel, pour diffuser de l'information et pour limiter au maximum les effets de ces embargos.
Q - Abordons le dossier du rapprochement Suez-Gaz de France, ce patriotisme industriel d'ailleurs revendiquer par le Premier ministre, D. de Villepin, mais qui irrite un peu nos partenaires... Comment fait-on pour faire passer cette idée quand on est ministre du Commerce extérieur ? Cela fait peut-être plaisir en France, mais n'est pas forcément très bien vu à l'étranger...
R - Il y a un peu de communication dans toute cette affaire. Il faut regarder la politique qu'a menée l'Italie, notamment - je pense que c'est à ce pays-là que vous faisiez référence - : l'Italie n'a pas été la dernière à mettre en place un certain nombre de barrières et d'obstacles à la prise de contrôle, notamment par ABN-Amro, une société hollandaise, d'une banque italienne. Donc c'est une stratégie dans laquelle la plupart des pays européens, la plupart des pays du monde - les Etats-Unis, par exemple, en sont les grands champions - mènent le même type de politique de construction de sociétés, de groupes dans les secteurs stratégiques, qui seront forts. Je m'en réjouis pour les exportations. Le principe de l'exportation, c'est que plus on est gros et plus on exporte. C'est quasi statistique. Donc le fait que nous ayons un grand champion de plus dans le domaine énergétique me réjouit.
Q - Les Belges semblent un peu agacés. Il faut rappeler que Suez est une compagnie franco-belge, qu'elle distribue notamment l'électricité en Belgique. Au fond, c'est Gaz de France qui va fournir l'électricité eux Belges demain, on comprend qu'ils soient un peu agacés...
R - Suez avait acquis Electrabel, qui était un des grands producteurs et distributeurs d'électricité en Belgique. Je pense que leur service ne va pas changer et que toutes les garanties d'usage seront consenties aux consommateurs d'électricité.
Q - Cela veut-il dire que c'est une façon de fonctionner qui va se perpétuer en France, que ce patriotisme industriel va être de plus en plus revendiqué ? On a vu, par exemple, lors de la tentative de Mittal Steel sur Arcelor, une petite réaction franco-française...
R - Une stratégie industrielle qui consisterait à développer de grands groupes capables d'opérer sur un plan mondial, en face notamment de grands groupes américains ou de grands groupes chinois ou indiens ou autres, qui se développeront puisque c'est le mouvement inéluctable actuel - on est dans une situation et de mondialisation et de consolidation -, je crois que c'est une très bonne chose pour l'Europe. Il faut le mettre en place de la façon la plus concertée et la plus conforme aux dispositions et des lois nationales et du traité européen...
Q - Vous revenez d'une tournée en Asie, et tout dernièrement du Japon. Vous voudriez que les entreprises françaises s'implantent davantage au Japon, ce n'est pas facile...
R - Ce n'est pas facile et, en même temps, il y a une espèce de connexité et de complicité entre les entreprises françaises et les entreprises japonaises, lorsqu'elles ont établi des partenariats, qui est extraordinaire. J'ai participé au salon des nanotechnologies à Tokyo, et il était réjouissant de voir des sociétés à la pointe de la recherche dans le domaine des nanotechnologies, celles qui travaillent autour du pôle de compétitivité de Grenoble, travailler avec des spécialistes japonais des nanotechnologies et vraiment communiquer d'une façon totalement fluide, avec un grand respect de la parole des Japonais pour les technologies françaises. Donc je pense qu'il y a beaucoup à faire. Il faut avoir le temps, la patience, il faut toujours être excellent. Les Japonais, qu'il s'agisse de produits de mode, de parfum, de technologie, ont le souci de l'excellence. Et de l'excellence, de la prise de commande jusqu'au recouvrement de la créance, en passant par le papier d'emballage. Donc il faut impérativement que nos technologies...
Q - Que l'on tienne compte de la culture du pays où l'on va...
R - Voilà, tout à fait, il faut d'abord regarder ce que demande les partenaires, ce que demande les clients. On a tout à fait les moyens de s'y adapter. J'étais à une session organisée pour les vins d'Alsace et les vins des Cotes du Rhône : il fallait voir les milliers d'importateurs et de sommeliers japonais goûter, cracher du vin français, connaissant cela sur le bout des doigts et prêts à importer.
Q - Les derniers chiffres du commerce extérieur dont on a eu connaissance n'étaient pas bons. Est-ce décourageant pour le ministre du Commerce extérieur que vous êtes ? Et voyez-vous quand même dans ces résultats quelques raisons d'espérer mieux ?
R - Je vous mille raisons d'espérer mieux, d'abord parce que ce que nous avons comme indicateur, le volume des grands contrats, est le double de l'année dernière. Deuxièmement, parce que de plus en plus de PME décident d'exporter. Pour la première fois depuis 2000, on a un renversement de tendance : plus d'entreprises abordent l'exportation. Enfin, les entreprises exportent plus maintenant vers les pays lointains et les grands émergents, c'est-à-dire l'Inde, la Chine et les Etats-Unis, marchés tout à fait différents mais où les perspectives de croissance et les chances des produits français sont considérables.
Q - Et si la balance est déficitaire, est-ce à cause de la facture pétrolière essentiellement ?
R - Beaucoup pour la facture pétrolière : l'augmentation du prix du baril en 2005 a été considérable, à peu près 60 % d'augmentation de la facture globale. Et puis le fait que la croissance existe en France, probablement plus que dans d'autres pays européens, et que l'on consomme. Donc on consomme des produits importés et les consommateurs français sont assez contents de trouver des produits...
Q - Vous n'allez pas faire une campagne "Acheter français" ?
R - Mais moi, j'achète français, je mange du poulet français et je bois du vin français !Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 1er mars