Déclaration de Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable, pour la journée mondiale de la biodiversité et sur les mesures prises en France pour la protéger, Paris le 22 mai 2006.

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Intervenant(s) : 
  • Nelly Olin - Ministre de l'écologie et du développement durable

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Présidents ;
Mesdames et Messieurs les Directeurs ;
Mesdames et Messieurs les Déléguées généraux ;
Monsieur le Député ;
Mesdames et Messieurs les élus ;
Mesdames et Messieurs ;

Pour la première fois ce 22 mai, la France marque la journée mondiale de la biodiversité, initiée par les Nations-Unies pour célébrer l'anniversaire de la convention de Rio sur la diversité biologique, adoptée en 1992.
Je suis personnellement extrêmement heureuse d'inaugurer cette journée accompagnée non pas de nos seuls interlocuteurs habituels (élus, associations, professions agricoles et forestières, etc.), mais en présence des Présidents et Directeurs généraux de quelques-unes des plus grandes entreprises françaises.
C'est beaucoup plus qu'un symbole et beaucoup plus qu'une célébration.
C'est un constat encourageant mais plus encore une promesse.

Comme nous le savons tous désormais, depuis les prises de position remarquées du Président de la République sur la scène internationale, la diversité du vivant sur la planète est gravement menacée :

  • menacée la diversité des espèces sauvages dont des milliers sont aujourd'hui en voie d'extinction ;
  • menacée la diversité des milieux naturels, résultat de leur adaptation, sur plusieurs millions d'années, à une multitude de situations bio-géographiques différentes à travers le globe ;
  • menacé le patrimoine génétique dont nous ne saurons jamais reconstituer les richesses disparues.

Menacés donc les multiples services que rend la nature à la société humaine : production de nourriture et de matière première nécessaires dans de multiples processus industriels, production de molécules chimiques complexes que la nature seule est capable de synthétiser, protection contre les catastrophes naturelles, protection de la fertilité à long terme des sols, protection contre l'extension incontrôlée des maladies animales, végétales et humaines, etc.
La visite que nous venons d'effectuer sur le site de la boucle de Guernes démontre que l'indispensable et urgente prise de conscience de tous les citoyens et leur indispensable mobilisation sont, sans que nous le sachions encore, déjà traduites en actes dans de nombreuses entreprises Françaises.
Je voudrais remercier, Monsieur Bertrand COLLOMB, Président de LAFARGE et Président de l'Association Française des Entreprises Privées ainsi que vous Messieurs les Présidents, Directeurs Généraux et responsables des entreprises ASF, EDF, SUEZ, TOTAL, VEOLIA qui êtes aujourd'hui présents d'en témoigner aujourd'hui auprès de moi.
Car les actions que vous avez mises en oeuvre dans chacune de vos sociétés en faveur de la biodiversité démontrent que le monde économique n'est pas resté indifférent aux préoccupations de nos concitoyens et s'est déjà engagé sur ce domaine a priori totalement étranger au monde de l'entreprise.
Cependant vos entreprises font encore, en France, figure de pionnières. Autant les questions liées à la qualité de l'eau et à sa nécessaire préservation constituent aujourd'hui une problématique bien connue des entreprises.
Autant les questions, objectifs, moyens et méthodes relatifs à la préservation de la biodiversité apparaissent moins connues et beaucoup moins largement prises en compte.
Je suis, comme vous, chefs d'entreprises, une pragmatique.
C'est pourquoi j'ai demandé à mes services de réfléchir avec l'AFEP à quelque chose de concret que nous puissions mettre en place rapidement, dans le cadre de la stratégie nationale pour la biodiversité et qui permettrait de progresser en suscitant l'adhésion d'un nombre croissant d'entreprises.
La brochure que nous publions ensemble aujourd'hui, intitulée "La biodiversité, un atout pour votre entreprise" représente ainsi un premier pas destiné à sensibiliser les chefs d'entreprises, leurs équipes de management, les directeurs de sites, à l'intérêt d'ouvrir une réflexion sur ce sujet et à leur démontrer le caractère très pratique, très opérationnel des initiatives qui peuvent être engagées.
Des initiatives mêmes modestes peuvent être efficaces. Elles constituent rapidement un tremplin pour aller plus loin. C'est la philosophie pragmatique qui nous anime tous.
Les expériences récentes montrent des succès importants pour la biodiversité, où le gestionnaire sait tirer partie des atouts et fonctions des écosystèmes qui l'entourent et assure leur maintien et leur développement pour son propre bénéfice.
Je vous remercie de donner, avec moi, ce signal et cette orientation au monde économique aujourd'hui.
Votre présence montre également que la prise en compte de la biodiversité, pour porter ses fruits, doit être une décision stratégique portée par le niveau exécutif de l'entreprise.
A cet égard, je ne saurais conclure sans évoquer devant vous un sujet d'actualité au moment où sur un dossier important la France vient de remplir ses obligations : la gestion des sites Natura 2000.
Pour les entreprises comme pour les autres activités économiques ou les activités de loisir, la désignation, aujourd'hui achevée, du réseau de sites au titre des deux directives « habitats-faune-flore » et « oiseaux » ne doit pas être vue comme une menace mais, au contraire comme une opportunité.
C'est en particulier ce que démontrent les quelques centaines de sites sur lesquels le document d'objectifs est achevé ou en cours.
Opportunité de réunir les représentants de toutes les activités présentes sur un site aux fins de définir ensemble, dans le respect des uns et des autres et dans le respect de ses qualités environnementales, les orientations de gestion pour les 6 années à venir.
C'est un moyen, bien plus que de simplement remplir nos obligations au titre des directives européennes, de bâtir une vision partagée de l'avenir d'un site et de prévenir les conflits.
Cette approche originale, que la France a inventée, est observée avec beaucoup d'intérêt par de nombreux autres Etats membres qui sont preneurs aujourd'hui de connaître notre expérience en la matière.
Par ailleurs, s'il y a un message essentiel que les échelons exécutifs des entreprises doivent bien intégrer et transmettre à tous les niveaux opérationnels : c'est, lorsque l'entreprise projette un développement nouveau, une implantation nouvelle dans ou à proximité d'un site Natura 2000, de prendre très en amont la question de l'impact sur ce site.
C'est la qualité de cette approche, la qualité du document d'incidence qui sera produit, la pertinence et la juste proportionnalité des mesures compensatrices éventuelles qui garantira le respect par la France, sur chacun des sites, des deux directives.
C'est ainsi que nous éviterons tout contentieux et toute jurisprudence restrictive.
Gardons à notre niveau, le niveau national, la liberté de trouver les solutions les mieux adaptées, gardons notre liberté d'innovation, d'imagination de solutions originales.
C'est facile : faisons des études d'incidence de qualité. Sachons discuter suffisamment en amont. Ne prenons plus l'environnement, comme cela a été trop longtemps fait par beaucoup dans notre pays comme la variable d'ajustement.
Je sais que depuis longtemps maintenant les entreprises ici présentes ont complètement abandonné de tels comportements. C'est sur leur réussite en ce domaine au contraire que nous avons bâti le document.
Et le signal que nous donnons aujourd'hui est bien un message de confiance que nous adressons au monde économique, un message de responsabilité, un ferment d'innovation.
Je vous remercie.

Source http://www.ecologie.gouv.fr, le 24 mai 2006