Texte intégral
Q- La pression s'accentue sur les dirigeants d'EADS et notamment sur son coprésident, N. Forgeard, avec des dépôts de plaintes pour délit d'initié et l'appel de D. de Villepin à des décisions urgentes pour sortir de groupe européen de la crise. On le sait, l'avion géant, l'A380, ne sera pas livré dans les délais prévus. Quelque part, il y a eu de l'incompétence dans la direction..." Il y a des décisions urgentes à prendre. Elles le seront. ", a dit hier D. de Villepin à propos d'EADS, et il a précisé que vous préparez tout cela. Alors, quelles décisions et comment ?
R- D'abord, effectivement, c'est mon rôle. C'est mon rôle de suivre les entreprises françaises, et c'est mon rôle de suivre les entreprises françaises en particulier lorsque énormément d'emplois sont en cause et lorsque, par ailleurs, la France, l'Etat français, est actionnaire.
Q- Qu'est-ce qui va changer ?
R- Alors, d'abord, je voudrais remettre tout cela en perspective comme je l'ai fait hier et avant-hier à l'Assemblée nationale. Il s'agit, pardon, mais de la réalisation du plus grand porteur au monde. Jamais un avion commercial de cette taille n'avait été envisagé, n'avait été réalisé. Donc, je le dis moi-même qui ai été dans ma vie aussi industriel, des projets de cette nature sont des projets absolument gigantesques : des dizaines de milliers de personnes, des centaines de milliers même de sous-traitants qui travaillent pour ce projet. Je dirais que des retards, c'est hélas chose pas normale, mais fréquente, donc il faut le relativiser. Et j'ai souhaité précisément y voir clair, d'abord, parce que je suis le ministre de l'Economie et des Finances, mais aussi parce que je suis le ministre de l'Industrie et donc...
Q- Est-ce qu'il faut que l'Etat pèse davantage dans la stratégie d'EADS ? Ça c'est un autre sujet. D'abord y voir clair, et j'ai du reste demandé, je vais vous le dire, à A. Lagardère de venir me voir. Il est venu me voir il y a deux jours, on en a parlé. J'ai rencontré, du reste, N. Forgeard également hier. Je verrai aujourd'hui M. Bischoff qui vient me voir. On en parle entre nous et de façon sereine parce qu'il faut être serein dans des cas comme ceux-là. Il ne faut pas réagir à chaud.
Q- Quelles décisions ?
R- Alors, ensuite, on met les choses à plat. Il y a deux questions qui se posent. D'abord, est-ce que la gouvernance fonctionne bien ? Est-ce qu'elle a bien fonctionné ? Est-ce que les informations étaient bien remontées au bon moment ? Est-ce qu'on a pu prendre les bonnes décisions ?
Q- Votre opinion ?
R- C'est des questions que je pose, et vous voyez que je n'ai pas encore toutes les réponses puisque j'ai demandé à monsieur Bischoff de venir me voir aujourd'hui. Donc, je n'ai pas encore toutes les réponses, et on va en parler de façon équilibrée et de façon professionnelle.
Q- Mais il y a eu un problème.
R- Visiblement, à partir du moment où il y a des retards, il y a toujours un problème, et ce qui m'intéresse : la gouvernance fonctionne-t-elle bien ? Et si elle fonctionne bien, très bien, donc il y aura des conséquences qu'il faut tirer, c'est-à-dire qu'on ne change rien. Si jamais ensemble, ensemble... Nous sommes des partenaires, nous ne sommes pas des ennemis, nous sommes des partenaires, nous sommes alliés, nous avons un projet commun. Si jamais on voit qu'il faut améliorer et qu'on peut améliorer, on le proposera ensemble. Deuxième question qui se pose : est-ce que sur les aspects, la ligne managériale, c'est-à-dire tous ceux qui ont à leur charge l'exécution, est-ce que là encore ça fonctionne bien ? Est-ce qu'on peut réfléchir à ce que... Vous savez, le choix des hommes dans l'entreprise est toujours fondamental. Est-ce qu'on peut l'améliorer ? Est-ce qu'on est content comme ça ? On va en parler librement et sereinement. Troisième question, effectivement, vous y avez fait référence tout à l'heure, il y a une enquête de l'AMF, les enquêteurs de l'AMF sont allés à Toulouse, du reste, ils y ont passé plus de 48 heures, ils enquêtent. Moi, je fais confiance à l'AMF. Je voudrais également qu'on évite que les uns et les autres tirent des conséquences un peu hâtives. Il y a des institutions qui fonctionnement remarquablement bien, l'AMF en est une, elle est indépendante, elle rendra ses conclusions et trouvera... On verra.
Q- Je rappelle que l'AMF enquête. N. Forgeard a cédé, je le rappelle, pour deux millions et demi d'euros de stock-options trois mois avant que le titre EADS ne s'effondre en raison des retards sur la livraison des A380. Des petits actionnaires français ont déposé plainte pour délit d'initié. M. Breton, vous, ce matin, vous avez toujours la confiance en N. Forgeard ?
R- Moi, encore une fois, s'il y a une structure en laquelle j'ai confiance, c'est l'AMF, et c'est mon rôle de ministre. Mon rôle de ministre n'est pas donner des satisfecit aux uns et aux uns et aux autres. Mon rôle de ministre est de saisir s'il le faut ou de vérifier, lorsque les institutions se sont saisies elles-mêmes, ce qui est le cas de l'AMF, que les choses se passent normalement, sereinement et rapidement.
Q- Vous n'êtes pas choqué, M. Breton, par le comportement de N. Forgeard ? Il annonce il y a quelques mois brutalement la fermeture du site de la Sogerma, plus de 1.000 emplois supprimés, mais quand il s'agit de ses intérêts, de sa famille, là...
R- Si j'ai des commentaires à faire...
Q- Attendez, je termine. Il s'occupe plutôt bien de lui, de sa famille. Est-ce que ce n'est pas politiquement dévastateur ?
R- Je comprends votre question. Je comprends l'émotion que vous mettez derrière, mais, moi, je suis ministre, et en tant que ministre, si j'ai des interrogations ou des commentaires, je les réserve à mes partenaires et aux actionnaires.
Q- Et pas à ceux qui nous écoutent ce matin sur une affaire politique, quand même.
R- Pas à ce stade, pas à ce stade, évidemment, par respect des personnes et des institutions et de la gouvernance, même si je comprends votre question.
Q- La fusion SUEZ-GDF. Alors, vous êtes formel : la fusion complète sera finalisée en décembre. Il y aura un débat parlementaire en septembre. Vous vous donnez deux mois pour convaincre les députés UMP quand même très réticents. Vous savez que beaucoup de députés UMP disent que le Gouvernement doit revoir sa copie.
R- Là, voyez-vous, voilà un sujet qui est un sujet sur lequel j'ai adopté depuis le début une démarche d'abord d'humilité, une démarche de sérénité, mais aussi une très forte détermination. Humilité d'abord parce que c'est un sujet très compliqué qui concerne beaucoup de monde, qui concerne des salariés d'abord d'entreprises, de SUEZ, de GDF, et il faut savoir les écouter, il faut savoir les respecter. Et quand on approche ce type de problématique, il faut avoir une humilité parce qu'on n'a pas la science infuse. Moi, lorsque le Premier ministre m'a demandé de mener ce projet, je vous le dis très simplement, je n'étais pas, je ne savais pas si c'était vraiment un projet qui était bon pour la France. C'était le projet qui était proposé par les entreprises, pas par le Gouvernement, proposé par les entreprises. Je n'étais pas sûr qu'il n'y aurait pas d'impact sur les prix, et donc je me suis posé ces questions. Maintenant, j'ai les réponses. Un, il n'y aura aucun impact dans la fusion, impact négatif dans la fusion, sur les prix du gaz, au contraire, on va pouvoir les baisser à cause de ça. C'est mon intime conviction. Je vous le dis, j'ai mené pendant quatre mois des centaines d'heures de concertation. Deux, j'ai réuni les organisations syndicales, 37 réunions d'organisations syndicales. Vous savez, on en a mené, mais je n'ai jamais fait une concertation aussi vaste. Le résultat, il faut quand même le dire, c'est que, hier, il y avait une journée de débrayage à GDF pour manifester son mécontentement contre cette fusion. Vous savez combien il y a eu de salariés qui ont débrayé ? 13 % chez GDF, du jamais vu dans l'histoire syndicale française, et moins de 10 % chez EDF. Ça veut dire que les salariés ont voté pour la fusion. Par ailleurs, les salariés de SUEZ, eux, ils ont voté très majoritairement puisque toutes les organisations syndicales le soutiennent. Donc, la concertation a payé. Il faut que je continue maintenant. Vous avez raison. Donc, je continue, j'ai encore à convaincre quelques députés. C'est normal, ils se posent des questions, je les respecte, je l'ai dit. Nous sommes encore dans le temps de la concertation, mais attention, le Gouvernement a pris la décision de présenter mercredi prochain au Conseil des ministres un texte de loi, un projet de loi, qui autorisera la fusion totale de GDF, maintenant, l'Etat à 34 % avec deux droits de veto sur des actifs stratégiques, les terminaux méthaniers et les strates stratégiques, deuxièmement, de transposer la directive européenne sur l'énergie qui donnera plus de pouvoir aux consommateurs et les protégera sur les coûts. C'est un formidable projet pour la France, un formidable projet pour les Français, et donc, oui, je le soutiens et j'irai jusqu'au bout. Je suis déterminé.
Q- Qu'est-ce que vous répondez à certains députés UMP qui disent : " Il faut que l'Etat conserve 51 % du capital de GDF. " Le reniement serait moins fort. Je rappelle qu'il y a deux ans une loi disait : " Il ne descend pas sous 70 % du capital de GDF. " Et là, virage à 180 %. Vous dites : " On perd 35 %. " ?
R- Je leur réponds une chose très simple : en 2000, alors qu'on était à la veille d'une bulle - on est à la veille d'une bulle de l'énergie aujourd'hui, les consommateurs le voient - en 2000, alors qu'on était à la veille d'une bulle technologique, pour des raisons idéologiques, on n'a pas voulu bouger le capital de France Télécom, elle a dû s'endetter pour faire des acquisitions, pour ne pas rester de côté. C'était l'acquisition d'Orange. Ça a coûté 70 milliards d'euros de dettes dont 30 milliards sont partis en fumée parce qu'on n'a pas voulu bouger. Voilà ce que je leur réponds. Vivons avec notre temps...
Q- La politique. Lorsqu'on fait une loi il y a deux ans et puis on change tout deux ans après...
R- C'était pareil en 2000. Il y avait aussi une loi qui disait que France Télécom ne serait pas privatisée en dessous de 50 % et puis, pour pouvoir donner les moyens d'aller de l'avant, on a dû bouger. La vie, M. Weill, c'est de s'adapter, mais toujours en écoutant les uns et les autres, toujours en concertation et toujours en essayant de convaincre. Oui, je suis déterminé à essayer de convaincre. C'est ma responsabilité, c'est ma mission, je l'exercerai jusqu'au bout sans laisser personne au bord de la route. Je passerai donc mon été à essayer d'aller voir les uns et les autres pour leur expliquer le bien fondé cette fusion.
Q- Deux questions brèves. Y aura-t-il un coup de pouce au SMIC le 1er juillet ? On dit que D. de Villepin ne veut pas de coup de pouce.
R- D'abord, vous savez que G. Larcher - et je le redis parce que, ça aussi, c'est en concertation qu'on le fait - G. Larcher va voir les partenaires sociaux la semaine prochaine pour parler de ces sujets. Je voudrais vous rappeler que la simple application de la loi permettrait d'ores et déjà, d'ores et déjà, de faire une progression de plus de 2,5 %, donc c'est au Gouvernement, au Premier ministre, à G. Larcher et aux partenaires sociaux de tomber d'accord...
Q- Pas de réponse donc ?
R- Il y aura donc, je l'ai dit, la simple application de la loi, ce sera déjà au moins2,5 %, mais j'ajoute aussi que, pour la première fois, la Prime pour l'emploi aujourd'hui est appliquée notamment pour tous ceux qui touchent le SMIC, par exemple, et qui travaillent 35 heures, ils auront d'ores et déjà, grâce à l'application de la prime pour l'emploi dès cette année, 300 euros de plus, hors l'augmentation à laquelle je viens de faire référence.
Q- La croissance en France : 2 % en 2006 selon l'Institut national de la statistique. Monsieur Breton, assez rapidement, on est quand même loin de l'Amérique et de l'Asie.
R- Vous voyez quand même les titres des journaux aujourd'hui : " Croissance, le rebond se confirme ", je tourne, " La reprise économique s'installe en 2006 ", je tourne... Bon. Ça me fait plaisir. Ça me fait plaisir parce que, avec mes collaborateurs, depuis des mois et des mois on le dit, ça arrive là aussi. Je suis heureux, je ne peux pas vous le cacher parce que c'est mon pays, c'est notre pays, parce qu'on progresse vite, parce que tous les indicateurs sont au vert : le chômage, c'est l'INSEE qui le dit, va retomber en dessous de la barre des 9 % cette année, parce qu'on va créer plus de 200.000 emplois cette année donc 170.000 dans le secteur marchand, c'est l'INSEE qui le dit, parce que l'investissement redémarre formidablement à plus 2,4 %, parce que les exportations, enfin, commencent à contribuer significativement - plus 7,4 % - à la croissance. Ça me fait plaisir...
Q- Mais on est loin de la croissance mondiale.
R- Ça me fait plaisir, mais vous avez raison. Moi, je suis exigent, et donc je pense qu'on peut faire mieux, qu'on doit faire mieux. En tout cas, honnêtement, on est mieux parti et, honnêtement, vous savez, le fait de voir que mes collaborateurs me disent que l'INSEE dit désormais qu'on va franchir la barre des 9 %, qu'il y aura donc 200.000 familles qui vont retrouver un emploi cet année, oui, c'est vrai que ça me fait plaisir et ça me donne envie de me battre encore plus fort.
Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 22 juin 2006
R- D'abord, effectivement, c'est mon rôle. C'est mon rôle de suivre les entreprises françaises, et c'est mon rôle de suivre les entreprises françaises en particulier lorsque énormément d'emplois sont en cause et lorsque, par ailleurs, la France, l'Etat français, est actionnaire.
Q- Qu'est-ce qui va changer ?
R- Alors, d'abord, je voudrais remettre tout cela en perspective comme je l'ai fait hier et avant-hier à l'Assemblée nationale. Il s'agit, pardon, mais de la réalisation du plus grand porteur au monde. Jamais un avion commercial de cette taille n'avait été envisagé, n'avait été réalisé. Donc, je le dis moi-même qui ai été dans ma vie aussi industriel, des projets de cette nature sont des projets absolument gigantesques : des dizaines de milliers de personnes, des centaines de milliers même de sous-traitants qui travaillent pour ce projet. Je dirais que des retards, c'est hélas chose pas normale, mais fréquente, donc il faut le relativiser. Et j'ai souhaité précisément y voir clair, d'abord, parce que je suis le ministre de l'Economie et des Finances, mais aussi parce que je suis le ministre de l'Industrie et donc...
Q- Est-ce qu'il faut que l'Etat pèse davantage dans la stratégie d'EADS ? Ça c'est un autre sujet. D'abord y voir clair, et j'ai du reste demandé, je vais vous le dire, à A. Lagardère de venir me voir. Il est venu me voir il y a deux jours, on en a parlé. J'ai rencontré, du reste, N. Forgeard également hier. Je verrai aujourd'hui M. Bischoff qui vient me voir. On en parle entre nous et de façon sereine parce qu'il faut être serein dans des cas comme ceux-là. Il ne faut pas réagir à chaud.
Q- Quelles décisions ?
R- Alors, ensuite, on met les choses à plat. Il y a deux questions qui se posent. D'abord, est-ce que la gouvernance fonctionne bien ? Est-ce qu'elle a bien fonctionné ? Est-ce que les informations étaient bien remontées au bon moment ? Est-ce qu'on a pu prendre les bonnes décisions ?
Q- Votre opinion ?
R- C'est des questions que je pose, et vous voyez que je n'ai pas encore toutes les réponses puisque j'ai demandé à monsieur Bischoff de venir me voir aujourd'hui. Donc, je n'ai pas encore toutes les réponses, et on va en parler de façon équilibrée et de façon professionnelle.
Q- Mais il y a eu un problème.
R- Visiblement, à partir du moment où il y a des retards, il y a toujours un problème, et ce qui m'intéresse : la gouvernance fonctionne-t-elle bien ? Et si elle fonctionne bien, très bien, donc il y aura des conséquences qu'il faut tirer, c'est-à-dire qu'on ne change rien. Si jamais ensemble, ensemble... Nous sommes des partenaires, nous ne sommes pas des ennemis, nous sommes des partenaires, nous sommes alliés, nous avons un projet commun. Si jamais on voit qu'il faut améliorer et qu'on peut améliorer, on le proposera ensemble. Deuxième question qui se pose : est-ce que sur les aspects, la ligne managériale, c'est-à-dire tous ceux qui ont à leur charge l'exécution, est-ce que là encore ça fonctionne bien ? Est-ce qu'on peut réfléchir à ce que... Vous savez, le choix des hommes dans l'entreprise est toujours fondamental. Est-ce qu'on peut l'améliorer ? Est-ce qu'on est content comme ça ? On va en parler librement et sereinement. Troisième question, effectivement, vous y avez fait référence tout à l'heure, il y a une enquête de l'AMF, les enquêteurs de l'AMF sont allés à Toulouse, du reste, ils y ont passé plus de 48 heures, ils enquêtent. Moi, je fais confiance à l'AMF. Je voudrais également qu'on évite que les uns et les autres tirent des conséquences un peu hâtives. Il y a des institutions qui fonctionnement remarquablement bien, l'AMF en est une, elle est indépendante, elle rendra ses conclusions et trouvera... On verra.
Q- Je rappelle que l'AMF enquête. N. Forgeard a cédé, je le rappelle, pour deux millions et demi d'euros de stock-options trois mois avant que le titre EADS ne s'effondre en raison des retards sur la livraison des A380. Des petits actionnaires français ont déposé plainte pour délit d'initié. M. Breton, vous, ce matin, vous avez toujours la confiance en N. Forgeard ?
R- Moi, encore une fois, s'il y a une structure en laquelle j'ai confiance, c'est l'AMF, et c'est mon rôle de ministre. Mon rôle de ministre n'est pas donner des satisfecit aux uns et aux uns et aux autres. Mon rôle de ministre est de saisir s'il le faut ou de vérifier, lorsque les institutions se sont saisies elles-mêmes, ce qui est le cas de l'AMF, que les choses se passent normalement, sereinement et rapidement.
Q- Vous n'êtes pas choqué, M. Breton, par le comportement de N. Forgeard ? Il annonce il y a quelques mois brutalement la fermeture du site de la Sogerma, plus de 1.000 emplois supprimés, mais quand il s'agit de ses intérêts, de sa famille, là...
R- Si j'ai des commentaires à faire...
Q- Attendez, je termine. Il s'occupe plutôt bien de lui, de sa famille. Est-ce que ce n'est pas politiquement dévastateur ?
R- Je comprends votre question. Je comprends l'émotion que vous mettez derrière, mais, moi, je suis ministre, et en tant que ministre, si j'ai des interrogations ou des commentaires, je les réserve à mes partenaires et aux actionnaires.
Q- Et pas à ceux qui nous écoutent ce matin sur une affaire politique, quand même.
R- Pas à ce stade, pas à ce stade, évidemment, par respect des personnes et des institutions et de la gouvernance, même si je comprends votre question.
Q- La fusion SUEZ-GDF. Alors, vous êtes formel : la fusion complète sera finalisée en décembre. Il y aura un débat parlementaire en septembre. Vous vous donnez deux mois pour convaincre les députés UMP quand même très réticents. Vous savez que beaucoup de députés UMP disent que le Gouvernement doit revoir sa copie.
R- Là, voyez-vous, voilà un sujet qui est un sujet sur lequel j'ai adopté depuis le début une démarche d'abord d'humilité, une démarche de sérénité, mais aussi une très forte détermination. Humilité d'abord parce que c'est un sujet très compliqué qui concerne beaucoup de monde, qui concerne des salariés d'abord d'entreprises, de SUEZ, de GDF, et il faut savoir les écouter, il faut savoir les respecter. Et quand on approche ce type de problématique, il faut avoir une humilité parce qu'on n'a pas la science infuse. Moi, lorsque le Premier ministre m'a demandé de mener ce projet, je vous le dis très simplement, je n'étais pas, je ne savais pas si c'était vraiment un projet qui était bon pour la France. C'était le projet qui était proposé par les entreprises, pas par le Gouvernement, proposé par les entreprises. Je n'étais pas sûr qu'il n'y aurait pas d'impact sur les prix, et donc je me suis posé ces questions. Maintenant, j'ai les réponses. Un, il n'y aura aucun impact dans la fusion, impact négatif dans la fusion, sur les prix du gaz, au contraire, on va pouvoir les baisser à cause de ça. C'est mon intime conviction. Je vous le dis, j'ai mené pendant quatre mois des centaines d'heures de concertation. Deux, j'ai réuni les organisations syndicales, 37 réunions d'organisations syndicales. Vous savez, on en a mené, mais je n'ai jamais fait une concertation aussi vaste. Le résultat, il faut quand même le dire, c'est que, hier, il y avait une journée de débrayage à GDF pour manifester son mécontentement contre cette fusion. Vous savez combien il y a eu de salariés qui ont débrayé ? 13 % chez GDF, du jamais vu dans l'histoire syndicale française, et moins de 10 % chez EDF. Ça veut dire que les salariés ont voté pour la fusion. Par ailleurs, les salariés de SUEZ, eux, ils ont voté très majoritairement puisque toutes les organisations syndicales le soutiennent. Donc, la concertation a payé. Il faut que je continue maintenant. Vous avez raison. Donc, je continue, j'ai encore à convaincre quelques députés. C'est normal, ils se posent des questions, je les respecte, je l'ai dit. Nous sommes encore dans le temps de la concertation, mais attention, le Gouvernement a pris la décision de présenter mercredi prochain au Conseil des ministres un texte de loi, un projet de loi, qui autorisera la fusion totale de GDF, maintenant, l'Etat à 34 % avec deux droits de veto sur des actifs stratégiques, les terminaux méthaniers et les strates stratégiques, deuxièmement, de transposer la directive européenne sur l'énergie qui donnera plus de pouvoir aux consommateurs et les protégera sur les coûts. C'est un formidable projet pour la France, un formidable projet pour les Français, et donc, oui, je le soutiens et j'irai jusqu'au bout. Je suis déterminé.
Q- Qu'est-ce que vous répondez à certains députés UMP qui disent : " Il faut que l'Etat conserve 51 % du capital de GDF. " Le reniement serait moins fort. Je rappelle qu'il y a deux ans une loi disait : " Il ne descend pas sous 70 % du capital de GDF. " Et là, virage à 180 %. Vous dites : " On perd 35 %. " ?
R- Je leur réponds une chose très simple : en 2000, alors qu'on était à la veille d'une bulle - on est à la veille d'une bulle de l'énergie aujourd'hui, les consommateurs le voient - en 2000, alors qu'on était à la veille d'une bulle technologique, pour des raisons idéologiques, on n'a pas voulu bouger le capital de France Télécom, elle a dû s'endetter pour faire des acquisitions, pour ne pas rester de côté. C'était l'acquisition d'Orange. Ça a coûté 70 milliards d'euros de dettes dont 30 milliards sont partis en fumée parce qu'on n'a pas voulu bouger. Voilà ce que je leur réponds. Vivons avec notre temps...
Q- La politique. Lorsqu'on fait une loi il y a deux ans et puis on change tout deux ans après...
R- C'était pareil en 2000. Il y avait aussi une loi qui disait que France Télécom ne serait pas privatisée en dessous de 50 % et puis, pour pouvoir donner les moyens d'aller de l'avant, on a dû bouger. La vie, M. Weill, c'est de s'adapter, mais toujours en écoutant les uns et les autres, toujours en concertation et toujours en essayant de convaincre. Oui, je suis déterminé à essayer de convaincre. C'est ma responsabilité, c'est ma mission, je l'exercerai jusqu'au bout sans laisser personne au bord de la route. Je passerai donc mon été à essayer d'aller voir les uns et les autres pour leur expliquer le bien fondé cette fusion.
Q- Deux questions brèves. Y aura-t-il un coup de pouce au SMIC le 1er juillet ? On dit que D. de Villepin ne veut pas de coup de pouce.
R- D'abord, vous savez que G. Larcher - et je le redis parce que, ça aussi, c'est en concertation qu'on le fait - G. Larcher va voir les partenaires sociaux la semaine prochaine pour parler de ces sujets. Je voudrais vous rappeler que la simple application de la loi permettrait d'ores et déjà, d'ores et déjà, de faire une progression de plus de 2,5 %, donc c'est au Gouvernement, au Premier ministre, à G. Larcher et aux partenaires sociaux de tomber d'accord...
Q- Pas de réponse donc ?
R- Il y aura donc, je l'ai dit, la simple application de la loi, ce sera déjà au moins2,5 %, mais j'ajoute aussi que, pour la première fois, la Prime pour l'emploi aujourd'hui est appliquée notamment pour tous ceux qui touchent le SMIC, par exemple, et qui travaillent 35 heures, ils auront d'ores et déjà, grâce à l'application de la prime pour l'emploi dès cette année, 300 euros de plus, hors l'augmentation à laquelle je viens de faire référence.
Q- La croissance en France : 2 % en 2006 selon l'Institut national de la statistique. Monsieur Breton, assez rapidement, on est quand même loin de l'Amérique et de l'Asie.
R- Vous voyez quand même les titres des journaux aujourd'hui : " Croissance, le rebond se confirme ", je tourne, " La reprise économique s'installe en 2006 ", je tourne... Bon. Ça me fait plaisir. Ça me fait plaisir parce que, avec mes collaborateurs, depuis des mois et des mois on le dit, ça arrive là aussi. Je suis heureux, je ne peux pas vous le cacher parce que c'est mon pays, c'est notre pays, parce qu'on progresse vite, parce que tous les indicateurs sont au vert : le chômage, c'est l'INSEE qui le dit, va retomber en dessous de la barre des 9 % cette année, parce qu'on va créer plus de 200.000 emplois cette année donc 170.000 dans le secteur marchand, c'est l'INSEE qui le dit, parce que l'investissement redémarre formidablement à plus 2,4 %, parce que les exportations, enfin, commencent à contribuer significativement - plus 7,4 % - à la croissance. Ça me fait plaisir...
Q- Mais on est loin de la croissance mondiale.
R- Ça me fait plaisir, mais vous avez raison. Moi, je suis exigent, et donc je pense qu'on peut faire mieux, qu'on doit faire mieux. En tout cas, honnêtement, on est mieux parti et, honnêtement, vous savez, le fait de voir que mes collaborateurs me disent que l'INSEE dit désormais qu'on va franchir la barre des 9 %, qu'il y aura donc 200.000 familles qui vont retrouver un emploi cet année, oui, c'est vrai que ça me fait plaisir et ça me donne envie de me battre encore plus fort.
Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 22 juin 2006