Interview de M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, à "RTL" le 26 juillet 2006, sur les mesures prises pendant la période de canicule, sur l'assistance aux personnes évacuées du Liban, et sur la candidature de Nicolas Sarkozy à l'élection présidentielle 2007.

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Richard Arzt : Bonjour, Dominique Perben. Le gouvernement a examiné, mardi, avec les professionnels du bâtiment, les précautions à prendre sur les chantiers, en cette période de canicule, notamment des aménagements d'horaires. Alors, vous, en tant que ministre des Transports, avez-vous des recommandations particulières pour ceux qui circulent sur les routes ?
Dominique Perben : Oui. Et, d'abord, s'agissant des professionnels que vous venez d'évoquer - transporteurs routiers - j'ai demandé à l'inspection du travail des transports, qui est une inspection du travail spécialisée, de passer les messages aux responsables d'entreprises, aux chefs d'entreprise, de manière qu'ils adaptent éventuellement les horaires de travail - comme la loi leur fait l'obligation, sur le principe - et qu'on tienne compte de la réalité pour éviter tout accident.
Richard Arzt : C'est-à-dire qu'en cas de retard, que l'on ne soit pas sévère. Quelque chose comme cela ?
Dominique Perben : Oui. Et puis, qu'éventuellement, on adapte la journée de travail. C'est-à-dire, l'idée simple, c'est de travailler sans doute plus tôt le matin, d'éviter les heures chaudes et, éventuellement, de reprendre le soir. Ce qui est dangereux, c'est le coup de chaleur, c'est-à-dire, l'excès thermique, qui peut provoquer des troubles sanitaires très graves pouvant aller jusqu'au décès. S'agissant des particuliers - des gens qui partent en vacances - c'est la même chose. Outre les conseils habituels sur la vitesse, le conseil c'est d'essayer de rouler en-dehors des heures les plus chaudes, de suivre les indications que nous donnons, en particulier à travers les radios spécialisées et aussi les panneaux variables sur les autoroutes. Il faut emporter de l'eau dans la voiture. C'est tout bête, mais il faut y penser, et beaucoup d'eau, puisque l'on dit que c'est un litre, un litre et demi par demi-journée et par personne. Et puis, bien sûr, essayer d'éviter, grâce aux indications routières, tout ce qui est bouchons.
Richard Arzt : Les camions qui transportent des bouteilles d'eau ont été autorisés, par dérogation, à circuler le dimanche. C'était le cas, dimanche dernier. Ca va être généralisé ?
Dominique Perben : Oui. Je l'avais décidé, pour le week-end dernier. Et j'ai décidé de le refaire cette semaine, pour ce week-end ci, pour éviter, effectivement, qu'il y ait des blocages, des ruptures de stock. D'ailleurs, par exemple, les sociétés autoroutières distribuent des bouteilles d'eau. La S.N.C.F le fait aussi dans les gares. Je crois que c'est important.
Richard Arzt : De façon générale, vous pouvez dire que cette canicule, si elle dure, sera mieux maîtrisée que celle d'il y a 3 ans ?
Dominique Perben : L'expérience sert toujours, et en particulier l'expérience pour anticiper. Je crois que c'est un point important. On s'y est tous mis, aussi bien les pouvoirs publics que tous les responsables privés. Un exemple où l'expérience a porté : les salles rafraîchies dans les maisons de retraite. Il y a 3 ans, il y en avait très peu. Aujourd'hui, c'est 95% des établissements qui disposent de salles rafraîchies, qui sont bien utiles pour les personnes âgées.
Richard Arzt : Le ministère des Transports et de l'Equipement est concerné par l'aide humanitaire qui va partir vers le Liban, parce que c'est sur des bateaux civils, n'est-ce pas ?
Dominique Perben : Oui. Nous sommes concernés par l'aide humanitaire et de ce point de vue-là, je voudrais dire, sur votre antenne, que, rencontrant le patron de C.M.A-C.G.M, monsieur Saadé, la semaine dernière.
Richard Arzt : Qui possède donc des bateaux.
Dominique Perben : Qui est un des très grands armateurs mondiaux, en matière de fret. Il m'a proposé de mettre à disposition un porte-conteneurs, qui nous sera sans doute bien utile pour acheminer l'aide humanitaire. Et puis, le ministère était concerné jusqu'ici par les opérations d'évacuation puisque - vous le savez - il y a eu un système, qui continue, où les bateaux vont chercher les Français, ou un certain nombre d'étrangers.
Richard Arzt : Et les amène à Chypre. Ce sont des bateaux militaires, en général.
Dominique Perben : Des bateaux civils et militaires. Compte-tenu de la situation à Chypre qui devient un peu compliquée - compte-tenu du nombre de personnes qui y transitent - nous allons aussi utiliser, maintenant, le port de Mersin, sur la côte sud de la Turquie. Et, à partir de ces deux ports, nous avons un système quasiment de pont aérien avec Air France, et des compagnies affrétées par le ministère des Affaires Etrangères, pour amener ces personnes à Roissy où, là, elles sont pris en charge par des structures d'Aéroport de Paris et du ministère de l'Intérieur avec la Croix-Rouge, etc., pour les aider à rentrer sur le territoire national dans des conditions acceptables.
Richard Arzt : S'il faut faire plus d'évacuations, vous êtes prêts ?
Dominique Perben : Oui. Nous pouvons monter en puissance encore davantage. Il y a 6.400 Français qui ont été, d'ores et déjà, évacués du Liban. Il semble que les demandes, à l'ambassade, à Beyrouth, diminuent. On a probablement passé le plus gros. Mais comme on ne sait pas, exactement, quelle sera la situation sur le terrain, on est prêt à faire encore davantage. J'ajoute que, une fois à Paris - comme cela avait été le cas au moment de la Côte d'Ivoire, aussi bien la S.N.C.F qu'Air France proposent - pour un acheminement jusqu'au domicile de ces personnes ou de leur famille, sur le territoire national - des réductions pour le transport aérien et pour la S.N.C.F.
Richard Arzt : Parlons un peu politique et des rapports de force dans la majorité. Est-il possible, à votre avis, maintenant, de contrer la toute-puissance de Nicolas Sarkozy, dans sa course vers la candidature ?
Dominique Perben : Je ne sais pas s'il faut parler de toute-puissance. Ce que j'observe, c'est que Nicolas Sarkozy développe sa démarche de façon très méthodique, et de façon très structurée, très organisée. Au début de cet été, je crois qu'il fait un certain nombre d'opérations de communication, de présentation, de proximité : son livre, le travail qui est fait par l'U.M.P sur les plages. Tout cela, je crois, est une étape intéressante, dans la construction de sa campagne, de sa candidature, même s'il n'a pas officiellement annoncé sa candidature. Mais on voit bien que cette candidature a un côté un peu inévitable, qui est en train de se construire.
Richard Arzt : Il n'y en n'aura pas d'autres, à l'U.M.P ?
Dominique Perben : Aujourd'hui, il est difficile de le dire, puisque l'U.M.P votera en janvier. Les candidatures seront présentées d'ici là. S'il y en a d'autres, on verra.
Richard Arzt : Dans son livre, Nicolas Sarkozy dit qu'entre Chirac et lui, il y a une filiation. Vous les connaissez bien tous les deux. Cela vous paraît juste ?
Dominique Perben : Je ne sais pas ce que veut dire "filiation". Ce sont deux grandes personnalités politiques qui ont le même goût, très fort, de la politique, du contact avec les gens, de cette manière d'aller vers le public, vers les électeurs, vers les concitoyens. Il y a une même façon - comment dire - charnelle, un peu, de vivre la politique. Mais quand on est vraiment politique, on ne peut pas vivre la politique autrement que de façon charnelle.
Richard Arzt : Il y en a certains qui ont moins cette qualité.
Dominique Perben : Il y a des gens plus froids, oui.
Richard Arzt : On a dit cela pour le Premier ministre. Dans le livre de Nicolas Sarkozy, il propose aussi - pour qu'il y ait une vraie politique de l'environnement - de confier au ministère de l'Ecologie les vrais leviers de l'action, notamment la politique des transports et de l'équipement. Est-ce une bonne idée ?
Dominique Perben : Alors, c'est vrai - je le vis depuis un an que je suis au ministère de l'Equipement - le ministère du Développement Durable, avec des moyens, c'est, effectivement le ministère de l'Equipement. Alors, rapprocher les deux, je trouve cela intéressant.
Richard Arzt : A gauche, vous faites le pari que Ségolène Royal sera désignée par les socialistes ?
Dominique Perben : Il y a un côté un peu inéluctable qui est en train de se dérouler. Je ne suis pas sûr que monsieur Jospin, monsieur Fabius ou monsieur Strauss-Kahn puissent rattraper le retard dans lequel ils sont aujourd'hui. Je ne suis pas sûr que tout cela soit extraordinairement positif pour l'avenir de la gauche, sa pensée profonde et la richesse de son programme.
Richard Arzt : Arnaud Montebourg - qui a longtemps été votre voisin de circonscription - soutient Ségolène Royal. Vous le connaissez bien ?
Dominique Perben : Oui, alors Montebourg soutient Ségolène Royal ! Je ne sais pas si c'est un vrai cadeau pour Ségolène Royal, connaissant le personnage. Elle devrait se méfier.
Richard Arzt : A Lyon, vous allez passer à une autre phase de votre campagne ? C'est-à-dire plus offensive, dit-on ?
Dominique Perben : Oui. La politique, c'est le calendrier et donc, plus l'échéance se rapproche, plus il faut monter en puissance. Et c'est ce que je vais faire à Lyon.
Richard Arzt : Merci, Dominique Perben.
source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 26 juillet 2006