Texte intégral
Monsieur le Président,
Madame la déléguée,
Mesdames, messieurs,
Je suis heureux d'être parmi vous cet après midi pour évoquer le rôle des entreprises dans les quartiers de la politique de la ville.
Je me réjouis que cette invitation lancée conjointement avec votre équipe nationale, ait recueilli un tel succès. La diversité à la fois des entreprises qui participent à ces rencontres et des expériences que nous venons d' entendre, en témoignent.
J'ai souhaité m'inscrire dans le cadre d'une rencontre d'hommes et de femmes de terrain, pour parler de l'entreprise et de ses rapports avec la politique de la ville. Il ne s'agit pas ici en effet d'un enième colloque et d'une série de déclarations, seraient elles pieuses, mais d'une confrontation d'expériences concrètes.
Elles sont donc nombreuses et permettent au réseau que vous constituez depuis près de 10 ans maintenant, de tirer des leçons particulièrement intéressantes.
C'est ce que traduit le cahier n° 2 que vous présentez aujourd'hui publiquement à vos partenaires et que vous souhaitez mieux faire connaître. J'espère que cette journée y contribuera.
On y voit très clairement que l'engagement des entreprises dans les quartiers est une affaire de professionnels. Elle ne s'improvise pas. Grâce au travail que vous menez dans les clubs locaux, vous montrez qu' un investissement peut être rentable économiquement pour une entreprise dans un quartier.
C'est cette réalité, désormais vérifiée grâce à vous, que je veux mieux faire connaître, à toutes celles et tous ceux qui pourraient nous rejoindre, pour transformer la vie dans les quartiers.
Le renouveau de nos quartiers en crise ne se fera pas sans les entreprises. Car les entreprises apportent tout à la fois l'emploi, des biens et des services pour satisfaire les besoins des habitants et de nouvelles activités, à ces quartiers trop souvent réduits à la seule fonction de logement. Elles sont dans la vie au quotidien des quartiers. Elles sont donc au cur du développement d'un territoire.
C'est pourquoi, je fais de la question du développement économique un axe essentiel de ma politique.
Permettez-moi de vous la présenter, en insistant sur certains de ses traits les plus novateurs.
La situation aujourd'hui n'est plus celle d'hier.
Hier l'Etat s' adressait aux entreprises dans une période de récession, de crise économique durable, de chômage de masse.
L'Etat a alors aidé les entreprises à traverser ces difficultés, en agissant comme amortisseur social. C'est ainsi que les politiques d'emploi ont pris une place, justifiée, importante : plus de 120 milliards de francs au budget du ministère de l' emploi en 1998. Ainsi se sont multipliés les contrats de travail aidés (CES, CEC, CIE), les différentes formes de retrait du marché du travail. Une politique d'abaissement du coût du travail s'est aussi mise en place, pour rendre l'emploi plus compétitif, par des exonérations sociales importantes, en particulier sur les bas salaires.
Pour ce qui concerne la politique de la ville, le pacte de relance de 1996, est allé plus loin encore, avec la création de zones franches, indemnes de toutes charges et de tout compte à rendre. A situation d'urgence répondait une politique dans l'urgence, pour une poignée de territoires.
Les entreprises étaient en difficulté, il fallait les aider de manière dérogatoire.
A certains moments cependant, un autre discours a été tenu à l'intention des entreprises, tant la société était embarquée dans le même bateau, sans grandes perspectives. Les entreprises (les plus grosses surtout) ont été sollicitées en faisant appel à leur conscience citoyenne. Loin de moi l'idée de rejeter ces attitudes. La solidarité devait s'exercer. Et je remercie celles qui ont répondu aux appels des pouvoirs publics. Vous en faites partie. Si dans de nombreux quartiers, la situation ne s 'est pas davantage dégradée, nous vous le devons bien souvent.
Nous avons ainsi appris à nous connaître les uns et les autres, dans une conjoncture particulière, dans ce que l'on peut appeler, un environnement de gestion de crise.
Aujourd'hui, nous franchissons une nouvelle étape. Les relations entre l'Etat et les entreprises doivent évoluer.
En effet la croissance économique que connaît notre pays depuis trois ans se confirme. Les prévisionnistes annoncent sa poursuite pour plusieurs années encore.
Il s'agit désormais pour moi de m'adresser aux entreprises qui ont retrouvé confiance dans l'avenir, qui se développent , qui cherchent à embaucher et qui parfois disent avoir du mal à recruter.
Les entreprises s'inscrivent désormais dans une dynamique positive. Je veux les inviter à considérer les quartiers de la politique de la ville différemment, comme des lieux possibles d'implantation, de développement de leur activité, comme des lieux ressources aussi pour la main d'uvre dont ils ont besoin.
Le ministère de la ville a les moyens aujourd'hui d'accompagner les entreprises dans leur développement et dans la réussite de leur projet d'entreprises.
J'en donnerai plusieurs preuves :
D'abord, nous avons engagé un programme très important de transformation des quartiers, de renouvellement urbain, pour agir sur l'aspect, l'image, la performance de ces quartiers.
Un tabou est tombé : des immeubles vétustes ou dégradés sont et seront détruits. D'autres seront transformés et modernisés. Des espaces publics plus adaptés à la vie des ménages, des consommateurs, des entreprises seront aménagés (places, parkings, voiries). La desserte de ces quartiers sera améliorée, la sécurité de ces territoires sera renforcée et, je sais qu'il s'agit d'un point particulièrement sensible, pour vous entrepreneurs qui avez besoin d'un environnement de qualité pour développer vos activités. Personne ne peut imaginer vivre et travailler dans un quartier où la sécurité des personnes et des biens n'est pas assurée.
Ainsi, nous nous sommes concrètement engagés, en priorité, sur 50 grands projets de ville. Sur les crédits du ministère de la ville, 6,2 milliards de francs seront mobilisés pour ces projets ; mais ce chiffre est à multiplier au moins par 4, dans la mesure où les communes, les autres collectivités publiques, la Caisse des dépôts et consignations et l'Europe, abonderont les efforts de l'Etat sur ces territoires.
Les investisseurs privés peuvent donc venir dans les quartiers, puisque des investissements publics massifs vont être entrepris. Le temps du cosmétique est révolu.
Les quartiers doivent retrouver une valeur marchande. L'Etat et ses partenaires vont s'employer à offrir à ces quartiers un environnement propice au développement.
Je souhaite également accompagner les entreprises nouvelles qui veulent s'implanter dans ces quartiers.
Il ne s'agit plus de limiter cette implantation à seulement 44 zones franches, mais d'élargir ces possibilités favorables à l'essentiel de notre territoire urbain, les 416 zones de redynamisation urbaine.
Cependant nous n'abandonnerons pas brutalement les entreprises (et les communes) qui ont fait des efforts en venant s 'installer dans les zones franches. Nous leur garantissons même une aide complémentaire, sur trois nouvelles années, mais de manière dégressive, pour qu'elles retrouvent progressivement le droit commun.
D'une manière générale, sur tous les territoires prioritaires des contrats de villes, j'ai le souci de préserver le tissu économique existant. Ainsi le nouveau fonds de revitalisation économique permettra de prendre en charge les surcoûts de fonctionnement qui peuvent exister dans les quartiers. Je pense aux primes d'assurance parfois exorbitantes ou à certains travaux de sécurisation, parfois lourds pour les commerces de proximité.
Mais nous voulons aujourd'hui faire surtout porter notre effort sur les entreprises qui se créent.
Grâce aux investissements que nous réalisons en matière de rénovation urbaine, nous voulons donner envie aux entreprises nouvelles de venir s' installer dans nos quartiers. D'ores et déjà, nous avons décidé d'aider en 2001 les plus petites d'entre elles à concrétiser leur projet. Nous créons une aide au démarrage de 20 000F. Cette aide s'inscrit dans le programme national d'aide à la création d'entreprises, encouragé par Monsieur le Premier Ministre lors des Etats généraux de la création d'entreprises le 11 avril 2000.
Nous subventionnerons également dès cette année l'investissement, par la prise en charge de 15% du montant de cet investissement dans les quartiers.
Nous proposerons enfin au 1/1/2002 à toutes les entreprises nouvelles, à la fois un régime simple et unique d'exonérations fiscales, mais surtout des avantages sociaux. A cet effet j'ai choisi de privilégier les entreprises qui embaucheront des demandeurs d'emploi des quartiers, en leur offrant une prime pour ces embauches de 24 000 F par an, pendant deux ans. Ce nouveau régime d'aides se substituera donc au régime dit des zones franches urbaines. Sur un territoire plus large, il privilégie les entreprises nouvelles et celles qui créent des emplois en particulier pour les demandeurs d'emploi issus des quartiers.
La croissance retrouvée doit bénéficier aussi aux habitants des quartiers populaires. Nombreux sont, parmi eux, les demandeurs d'emploi qualifiés et donc directement employables et utiles aux entreprises. Mais souvent ces qualifications sont ignorées. Il faut donc que la mise en relation entre employeur et salarié potentiel se fasse plus rapidement, et plus efficacement, grâce à un service public de l'emploi plus réactif. C'est le but des 150 équipes locales emploi insertion, qui depuis le 1er octobre se mettent en place dans les quartiers.
Les entreprises doivent pouvoir facilement trouver la main d'uvre dont ils ont besoin, et à proximité de leur implantation. Le recours, invoqué par certaines entreprises, à un nouveau flux de main d'uvre étrangère, est une réponse de facilité, pour une part irresponsable. Irresponsable à double titre : pour les demandeurs d'emploi présents en France, qui ne comprendraient pas que l'on ne fasse pas appel à eux ; pour les pays d'immigration, une fois de plus vidés de leur main d'uvre qualifiée.
Je sais aussi que certaines pratiques de discrimination à l'embauche se sont développées. Vous les connaissez comme moi et comme moi vous les dénoncez. Très tôt d'ailleurs, la fondation FACE, avec ses clubs, a su innover pour faciliter la rencontre entre employeurs et demandeurs d'emploi, issus de culture étrangère. Avec les expériences d'accompagnement dans l'entreprise et de parrainage, vous avez su répondre à ces situations intolérables et avez permis l'insertion de tous dans l'emploi. Je sais que c'est un sujet sur lequel vous travaillez encore. Le guide pratique de lutte contre les discriminations que nous avons publié cet automne, doit beaucoup à certaines de vos expériences.
Les quartiers disposent donc de ressources en main d'uvre, jeune et bien formée et nous devons mieux le faire savoir.
Pour autant, je n'oublie pas les personnes en très grandes difficultés, que la crise a profondément affectées et qui ne peuvent retrouver le chemin de l'emploi du jour au lendemain.
L'amélioration de la conjoncture ne peut pas nous faire oublier le sort de celle et ceux qui vivent actuellement des situations de grande exclusion. La loi de lutte contre les exclusions de 1998 leur offre un filet de sécurité. Il est de notre devoir, au nom de la solidarité nationale, de leur permettre désormais, à leur rythme, de trouver toute leur place dans le monde du travail. Ce champ est celui de l'insertion par l'économique, où là encore, FACE s'est beaucoup engagée et doit continuer bien sûr à le faire, dans un partenariat transparent entre milieu ordinaire et milieu protégé.
Les entreprises peuvent donc s'investir avec profit dans les quartiers. Elles peuvent aussi y investir.
J'ajouterai enfin un dernier argument à mon plaidoyer, celui du marché, de son fonctionnement ordinaire, qui est celui sur lequel je concentre aujourd'hui mes propos.
Permettez moi d'être très direct : il y a des affaire à faire dans les quartiers.
Je le redis, avec les importants travaux qui vont débuter dans le cadre du renouvellement urbain, de nombreuses entreprises vont trouver là de quoi remplir leur carnet de commande.
Et avec la reprise de l'emploi, du pouvoir d'achat revient dans les cités. Une récente enquête du CREDOC l'a montré, les cités sont aussi des lieux de consommation et d'émergence de nouveaux produits. Pensons à la mode, aux loisirs, aux sports. Certaines entreprises ont aussi intérêt à se rapprocher de celles et ceux qui sont leurs clients, voir même celles et ceux qui font les tendances et sont d'une certaines manières leurs donneurs d'ordre.
Aujourd'hui les intérêts convergent, pour que nous puissions tous tirer profit de la croissance.
Pour ce faire, il faut peut être des facilitateurs, des passeurs. Nous travaillons tous, les uns et les autres, chefs d'entreprises, élus locaux, urbanistes, travailleurs sociaux etc.. dans des mondes complexes, qui nécessitent une grande technicité et qui nous enferment dans nos logiques.
Or l'avenir d'un territoire, son développement, appelle au décloisonnement, à la transversalité. Telle est d'ailleurs une des raisons d'être de la politique de la ville.
Mais il faut dépasser le slogan ou l'incantation. Il faut organiser, permettre cette transversalité, dont chacun doit bien s'approprier les effets bénéfiques. Il ne s'agit pas d'y adhérer par principe, mais bien de savoir quel intérêt on y trouve.
C'est pourquoi, je crois à l'utilité de lieux, d'équipes, de missions, de réseaux, de partenaires locaux pour fabriquer du projet territorial.
Les clubs FACE pour une part sont engagés dans cette dynamique, quand ils font, à partir d'un problème à résoudre, le lien entre entreprises, anpe, école, quartier par exemple.
Mais les clubs FACE et leurs adhérents sont sans doute encore trop enfermés dans l'insertion et la réparation sociale. On ne les sollicite pas assez pour leur cur de métier, celui de la vie de l'entreprise. Il me semble qu'aujourd'hui il est temps de franchir ensemble cette nouvelle étape. Les pouvoirs publics, l'Etat et les collectivités publiques ont besoin que vous vous exprimiez, que vous fassiez connaître votre point de vue, votre analyse des enjeux du territoire sur lesquels vous êtes. Vous devez aussi nous interpeller plus directement sur vos besoins. Nous en discuterons. L'avenir d'un territoire ne peut se concevoir sans vous. Or, force est de constater qu'encore trop de contrats de ville, voire certains Grands projets de ville, en cours d'élaboration, ne laissent qu'une portion congrue au milieu économique, à la problématique de développement économique.
Je souhaite que dans un avenir très proche, demain, les projets de développement urbains associent plus étroitement, l 'économie, le social et l'aménagement. Aussi je lance un appel pour que se constituent, dans les territoires urbains sensibles, des groupes de projets locaux. Il ne s'agit pas de discourir encore, mais de monter ensemble des projets pour un développement global harmonieux de la cité. Pour ce faire, les préfets disposent, dans le cadre du Fonds de revitalisation économique , des crédits nécessaires pour appuyer toute démar che allant dans ce sens. Je serai heureux que certains clubs FACE puissent répondre à cet appel et soient à l'initiative de ces groupes projets.
La convention, que nous allons signer avec votre Président, rappelle votre expérience et salue votre implication. Elle appelle aussi à des évolutions, rendues possibles, j'espère vous l'avoir démontré, grâce à la conjoncture et à la volonté politique de tout le gouvernement.
Je compte sur vous, et vous remercie encore de votre action pour des villes plus riches et solidaires, où chacun ayant sa place, pourra mieux vivre et se développer.
(Source http://www.ville.gouv.fr, le 5 février 2001)
Madame la déléguée,
Mesdames, messieurs,
Je suis heureux d'être parmi vous cet après midi pour évoquer le rôle des entreprises dans les quartiers de la politique de la ville.
Je me réjouis que cette invitation lancée conjointement avec votre équipe nationale, ait recueilli un tel succès. La diversité à la fois des entreprises qui participent à ces rencontres et des expériences que nous venons d' entendre, en témoignent.
J'ai souhaité m'inscrire dans le cadre d'une rencontre d'hommes et de femmes de terrain, pour parler de l'entreprise et de ses rapports avec la politique de la ville. Il ne s'agit pas ici en effet d'un enième colloque et d'une série de déclarations, seraient elles pieuses, mais d'une confrontation d'expériences concrètes.
Elles sont donc nombreuses et permettent au réseau que vous constituez depuis près de 10 ans maintenant, de tirer des leçons particulièrement intéressantes.
C'est ce que traduit le cahier n° 2 que vous présentez aujourd'hui publiquement à vos partenaires et que vous souhaitez mieux faire connaître. J'espère que cette journée y contribuera.
On y voit très clairement que l'engagement des entreprises dans les quartiers est une affaire de professionnels. Elle ne s'improvise pas. Grâce au travail que vous menez dans les clubs locaux, vous montrez qu' un investissement peut être rentable économiquement pour une entreprise dans un quartier.
C'est cette réalité, désormais vérifiée grâce à vous, que je veux mieux faire connaître, à toutes celles et tous ceux qui pourraient nous rejoindre, pour transformer la vie dans les quartiers.
Le renouveau de nos quartiers en crise ne se fera pas sans les entreprises. Car les entreprises apportent tout à la fois l'emploi, des biens et des services pour satisfaire les besoins des habitants et de nouvelles activités, à ces quartiers trop souvent réduits à la seule fonction de logement. Elles sont dans la vie au quotidien des quartiers. Elles sont donc au cur du développement d'un territoire.
C'est pourquoi, je fais de la question du développement économique un axe essentiel de ma politique.
Permettez-moi de vous la présenter, en insistant sur certains de ses traits les plus novateurs.
La situation aujourd'hui n'est plus celle d'hier.
Hier l'Etat s' adressait aux entreprises dans une période de récession, de crise économique durable, de chômage de masse.
L'Etat a alors aidé les entreprises à traverser ces difficultés, en agissant comme amortisseur social. C'est ainsi que les politiques d'emploi ont pris une place, justifiée, importante : plus de 120 milliards de francs au budget du ministère de l' emploi en 1998. Ainsi se sont multipliés les contrats de travail aidés (CES, CEC, CIE), les différentes formes de retrait du marché du travail. Une politique d'abaissement du coût du travail s'est aussi mise en place, pour rendre l'emploi plus compétitif, par des exonérations sociales importantes, en particulier sur les bas salaires.
Pour ce qui concerne la politique de la ville, le pacte de relance de 1996, est allé plus loin encore, avec la création de zones franches, indemnes de toutes charges et de tout compte à rendre. A situation d'urgence répondait une politique dans l'urgence, pour une poignée de territoires.
Les entreprises étaient en difficulté, il fallait les aider de manière dérogatoire.
A certains moments cependant, un autre discours a été tenu à l'intention des entreprises, tant la société était embarquée dans le même bateau, sans grandes perspectives. Les entreprises (les plus grosses surtout) ont été sollicitées en faisant appel à leur conscience citoyenne. Loin de moi l'idée de rejeter ces attitudes. La solidarité devait s'exercer. Et je remercie celles qui ont répondu aux appels des pouvoirs publics. Vous en faites partie. Si dans de nombreux quartiers, la situation ne s 'est pas davantage dégradée, nous vous le devons bien souvent.
Nous avons ainsi appris à nous connaître les uns et les autres, dans une conjoncture particulière, dans ce que l'on peut appeler, un environnement de gestion de crise.
Aujourd'hui, nous franchissons une nouvelle étape. Les relations entre l'Etat et les entreprises doivent évoluer.
En effet la croissance économique que connaît notre pays depuis trois ans se confirme. Les prévisionnistes annoncent sa poursuite pour plusieurs années encore.
Il s'agit désormais pour moi de m'adresser aux entreprises qui ont retrouvé confiance dans l'avenir, qui se développent , qui cherchent à embaucher et qui parfois disent avoir du mal à recruter.
Les entreprises s'inscrivent désormais dans une dynamique positive. Je veux les inviter à considérer les quartiers de la politique de la ville différemment, comme des lieux possibles d'implantation, de développement de leur activité, comme des lieux ressources aussi pour la main d'uvre dont ils ont besoin.
Le ministère de la ville a les moyens aujourd'hui d'accompagner les entreprises dans leur développement et dans la réussite de leur projet d'entreprises.
J'en donnerai plusieurs preuves :
D'abord, nous avons engagé un programme très important de transformation des quartiers, de renouvellement urbain, pour agir sur l'aspect, l'image, la performance de ces quartiers.
Un tabou est tombé : des immeubles vétustes ou dégradés sont et seront détruits. D'autres seront transformés et modernisés. Des espaces publics plus adaptés à la vie des ménages, des consommateurs, des entreprises seront aménagés (places, parkings, voiries). La desserte de ces quartiers sera améliorée, la sécurité de ces territoires sera renforcée et, je sais qu'il s'agit d'un point particulièrement sensible, pour vous entrepreneurs qui avez besoin d'un environnement de qualité pour développer vos activités. Personne ne peut imaginer vivre et travailler dans un quartier où la sécurité des personnes et des biens n'est pas assurée.
Ainsi, nous nous sommes concrètement engagés, en priorité, sur 50 grands projets de ville. Sur les crédits du ministère de la ville, 6,2 milliards de francs seront mobilisés pour ces projets ; mais ce chiffre est à multiplier au moins par 4, dans la mesure où les communes, les autres collectivités publiques, la Caisse des dépôts et consignations et l'Europe, abonderont les efforts de l'Etat sur ces territoires.
Les investisseurs privés peuvent donc venir dans les quartiers, puisque des investissements publics massifs vont être entrepris. Le temps du cosmétique est révolu.
Les quartiers doivent retrouver une valeur marchande. L'Etat et ses partenaires vont s'employer à offrir à ces quartiers un environnement propice au développement.
Je souhaite également accompagner les entreprises nouvelles qui veulent s'implanter dans ces quartiers.
Il ne s'agit plus de limiter cette implantation à seulement 44 zones franches, mais d'élargir ces possibilités favorables à l'essentiel de notre territoire urbain, les 416 zones de redynamisation urbaine.
Cependant nous n'abandonnerons pas brutalement les entreprises (et les communes) qui ont fait des efforts en venant s 'installer dans les zones franches. Nous leur garantissons même une aide complémentaire, sur trois nouvelles années, mais de manière dégressive, pour qu'elles retrouvent progressivement le droit commun.
D'une manière générale, sur tous les territoires prioritaires des contrats de villes, j'ai le souci de préserver le tissu économique existant. Ainsi le nouveau fonds de revitalisation économique permettra de prendre en charge les surcoûts de fonctionnement qui peuvent exister dans les quartiers. Je pense aux primes d'assurance parfois exorbitantes ou à certains travaux de sécurisation, parfois lourds pour les commerces de proximité.
Mais nous voulons aujourd'hui faire surtout porter notre effort sur les entreprises qui se créent.
Grâce aux investissements que nous réalisons en matière de rénovation urbaine, nous voulons donner envie aux entreprises nouvelles de venir s' installer dans nos quartiers. D'ores et déjà, nous avons décidé d'aider en 2001 les plus petites d'entre elles à concrétiser leur projet. Nous créons une aide au démarrage de 20 000F. Cette aide s'inscrit dans le programme national d'aide à la création d'entreprises, encouragé par Monsieur le Premier Ministre lors des Etats généraux de la création d'entreprises le 11 avril 2000.
Nous subventionnerons également dès cette année l'investissement, par la prise en charge de 15% du montant de cet investissement dans les quartiers.
Nous proposerons enfin au 1/1/2002 à toutes les entreprises nouvelles, à la fois un régime simple et unique d'exonérations fiscales, mais surtout des avantages sociaux. A cet effet j'ai choisi de privilégier les entreprises qui embaucheront des demandeurs d'emploi des quartiers, en leur offrant une prime pour ces embauches de 24 000 F par an, pendant deux ans. Ce nouveau régime d'aides se substituera donc au régime dit des zones franches urbaines. Sur un territoire plus large, il privilégie les entreprises nouvelles et celles qui créent des emplois en particulier pour les demandeurs d'emploi issus des quartiers.
La croissance retrouvée doit bénéficier aussi aux habitants des quartiers populaires. Nombreux sont, parmi eux, les demandeurs d'emploi qualifiés et donc directement employables et utiles aux entreprises. Mais souvent ces qualifications sont ignorées. Il faut donc que la mise en relation entre employeur et salarié potentiel se fasse plus rapidement, et plus efficacement, grâce à un service public de l'emploi plus réactif. C'est le but des 150 équipes locales emploi insertion, qui depuis le 1er octobre se mettent en place dans les quartiers.
Les entreprises doivent pouvoir facilement trouver la main d'uvre dont ils ont besoin, et à proximité de leur implantation. Le recours, invoqué par certaines entreprises, à un nouveau flux de main d'uvre étrangère, est une réponse de facilité, pour une part irresponsable. Irresponsable à double titre : pour les demandeurs d'emploi présents en France, qui ne comprendraient pas que l'on ne fasse pas appel à eux ; pour les pays d'immigration, une fois de plus vidés de leur main d'uvre qualifiée.
Je sais aussi que certaines pratiques de discrimination à l'embauche se sont développées. Vous les connaissez comme moi et comme moi vous les dénoncez. Très tôt d'ailleurs, la fondation FACE, avec ses clubs, a su innover pour faciliter la rencontre entre employeurs et demandeurs d'emploi, issus de culture étrangère. Avec les expériences d'accompagnement dans l'entreprise et de parrainage, vous avez su répondre à ces situations intolérables et avez permis l'insertion de tous dans l'emploi. Je sais que c'est un sujet sur lequel vous travaillez encore. Le guide pratique de lutte contre les discriminations que nous avons publié cet automne, doit beaucoup à certaines de vos expériences.
Les quartiers disposent donc de ressources en main d'uvre, jeune et bien formée et nous devons mieux le faire savoir.
Pour autant, je n'oublie pas les personnes en très grandes difficultés, que la crise a profondément affectées et qui ne peuvent retrouver le chemin de l'emploi du jour au lendemain.
L'amélioration de la conjoncture ne peut pas nous faire oublier le sort de celle et ceux qui vivent actuellement des situations de grande exclusion. La loi de lutte contre les exclusions de 1998 leur offre un filet de sécurité. Il est de notre devoir, au nom de la solidarité nationale, de leur permettre désormais, à leur rythme, de trouver toute leur place dans le monde du travail. Ce champ est celui de l'insertion par l'économique, où là encore, FACE s'est beaucoup engagée et doit continuer bien sûr à le faire, dans un partenariat transparent entre milieu ordinaire et milieu protégé.
Les entreprises peuvent donc s'investir avec profit dans les quartiers. Elles peuvent aussi y investir.
J'ajouterai enfin un dernier argument à mon plaidoyer, celui du marché, de son fonctionnement ordinaire, qui est celui sur lequel je concentre aujourd'hui mes propos.
Permettez moi d'être très direct : il y a des affaire à faire dans les quartiers.
Je le redis, avec les importants travaux qui vont débuter dans le cadre du renouvellement urbain, de nombreuses entreprises vont trouver là de quoi remplir leur carnet de commande.
Et avec la reprise de l'emploi, du pouvoir d'achat revient dans les cités. Une récente enquête du CREDOC l'a montré, les cités sont aussi des lieux de consommation et d'émergence de nouveaux produits. Pensons à la mode, aux loisirs, aux sports. Certaines entreprises ont aussi intérêt à se rapprocher de celles et ceux qui sont leurs clients, voir même celles et ceux qui font les tendances et sont d'une certaines manières leurs donneurs d'ordre.
Aujourd'hui les intérêts convergent, pour que nous puissions tous tirer profit de la croissance.
Pour ce faire, il faut peut être des facilitateurs, des passeurs. Nous travaillons tous, les uns et les autres, chefs d'entreprises, élus locaux, urbanistes, travailleurs sociaux etc.. dans des mondes complexes, qui nécessitent une grande technicité et qui nous enferment dans nos logiques.
Or l'avenir d'un territoire, son développement, appelle au décloisonnement, à la transversalité. Telle est d'ailleurs une des raisons d'être de la politique de la ville.
Mais il faut dépasser le slogan ou l'incantation. Il faut organiser, permettre cette transversalité, dont chacun doit bien s'approprier les effets bénéfiques. Il ne s'agit pas d'y adhérer par principe, mais bien de savoir quel intérêt on y trouve.
C'est pourquoi, je crois à l'utilité de lieux, d'équipes, de missions, de réseaux, de partenaires locaux pour fabriquer du projet territorial.
Les clubs FACE pour une part sont engagés dans cette dynamique, quand ils font, à partir d'un problème à résoudre, le lien entre entreprises, anpe, école, quartier par exemple.
Mais les clubs FACE et leurs adhérents sont sans doute encore trop enfermés dans l'insertion et la réparation sociale. On ne les sollicite pas assez pour leur cur de métier, celui de la vie de l'entreprise. Il me semble qu'aujourd'hui il est temps de franchir ensemble cette nouvelle étape. Les pouvoirs publics, l'Etat et les collectivités publiques ont besoin que vous vous exprimiez, que vous fassiez connaître votre point de vue, votre analyse des enjeux du territoire sur lesquels vous êtes. Vous devez aussi nous interpeller plus directement sur vos besoins. Nous en discuterons. L'avenir d'un territoire ne peut se concevoir sans vous. Or, force est de constater qu'encore trop de contrats de ville, voire certains Grands projets de ville, en cours d'élaboration, ne laissent qu'une portion congrue au milieu économique, à la problématique de développement économique.
Je souhaite que dans un avenir très proche, demain, les projets de développement urbains associent plus étroitement, l 'économie, le social et l'aménagement. Aussi je lance un appel pour que se constituent, dans les territoires urbains sensibles, des groupes de projets locaux. Il ne s'agit pas de discourir encore, mais de monter ensemble des projets pour un développement global harmonieux de la cité. Pour ce faire, les préfets disposent, dans le cadre du Fonds de revitalisation économique , des crédits nécessaires pour appuyer toute démar che allant dans ce sens. Je serai heureux que certains clubs FACE puissent répondre à cet appel et soient à l'initiative de ces groupes projets.
La convention, que nous allons signer avec votre Président, rappelle votre expérience et salue votre implication. Elle appelle aussi à des évolutions, rendues possibles, j'espère vous l'avoir démontré, grâce à la conjoncture et à la volonté politique de tout le gouvernement.
Je compte sur vous, et vous remercie encore de votre action pour des villes plus riches et solidaires, où chacun ayant sa place, pourra mieux vivre et se développer.
(Source http://www.ville.gouv.fr, le 5 février 2001)