Texte intégral
Q- Plusieurs responsables socialistes, cités anonymement, s'inquiètent du passage à vide, du "trou d'air" dans votre campagne présidentielle. Ressentez-vous les choses comme cela, S. Royal ?
R- Cités anonymement, c'est déjà significatif.
Q- Significatif aussi d'un sentiment qui existe...
R- Non, je ne crois pas. Je pense que la campagne que j'ai choisie de conduire en appui sur l'ensemble des comités de soutien sur tous les départements, toutes les régions de France, mais aussi en appui sur le Parti socialiste et les deux autres partis de gauche qui me soutiennent également, est le révélateur de la prise de conscience d'une crise de la politique. Et je crois qu'il faut tenir ce rythme que j'ai imprimé sur cette campagne ; et nous le tiendrons. Pourquoi ? Parce qu'aujourd'hui, si la Politique est en crise, c'est parce que d'abord, il y a une crise du résultat. On voit des responsables politiques promettre aujourd'hui ce qu'ils n'ont pas fait hier et moi, je ne veux pas être la présidente de la République qui va promettre des choses qu'elle ne fera pas. La seconde chose, c'est que les Français veulent participer aux décisions qui les concernent. Et le choix que j'ai fait, c'est d'associer les Français au projet présidentiel, à la plate forme présidentielle qui sera présentée, le moment venu, sans céder aux pressions, aux précipitations parce que je veux que la parole politique retrouve toute sa valeur. Et c'est le sens de cette démarche.
Q- Comment analysez-vous ce sentiment, ces propos - certes anonymes - mais qui existent aujourd'hui dans les journaux ? Comment vous les analysez ? On veut vous nuire, S. Royal ?
R- Pas du tout. Je crois que cette démarche politique est très nouvelle.
Q- Et mal comprise !
R- Et donc, elle surprend, peut-être ceux qui n'ont pas l'habitude de la conduire. Et ce que j'observe, et nous l'avons dit et je l'ai constaté une nouvelle fois, hier, dans les réunions que vous évoquiez tant au groupe socialiste où tous les parlementaires socialistes étaient présents que dans mon conseil politique qui est le Bureau national du Parti socialiste, que plusieurs responsables politiques ont témoigné de la force du déploiement des débats participatifs sur le territoire. Alors, ça ne se voit pas dans le petit milieu parisien ce qui se passe dans les départements et dans les régions. J'ai choisi une campagne décentralisée parce que je crois aussi que la France, demain, se remettra en mouvement si l'on peut s'appuyer sur la dynamique des régions. Et je peux vous annoncer, J.-M.l Aphatie...
Q- Je suis tout ouï !
R- ... qu'il y a, aujourd'hui, plus de 2.000 débats participatifs qui se sont déjà déroulés sur l'ensemble des territoires. Et moi, je veux que l'on respecte cela. Je veux construire la République du respect, donc je veux que l'on respecte les citoyens qui font l'effort de venir dans ces débats participatifs dont nous allons bientôt rendre compte. Et vous verrez...
Q- Et donc votre programme, on le connaîtra fin février, début mars comme vous l'avez annoncé. Vous ne changerez pas de calendrier ?
R- Voilà. Les premières pistes de ce programme seront données à ce moment-là, c'est-à-dire lorsqu'il y a le retour des débats participatifs. Il y en a encore un certain nombre. J'en tiens un prochainement sur le logement et la vie chère. Le prochain, sur les questions de la jeunesse, l'environnement et l'agriculture. Donc, tous ces débats vont converger vers une restitution ; et à ce moment-là, ma prise de parole sur le projet présidentiel aura de la crédibilité et ne bougera pas. Moi, je ne change pas au gré du vent ou au gré des humeurs. J'ajoute qu'il y a déjà un certain nombre de propositions qui sont clairement exprimées, que j'ai clairement exprimées, je vous le rappelle : dans le domaine de l'emploi, par exemple. J'ai fait dix-sept propositions sur l'emploi et en particulier, une qui sera dans le projet présidentiel et qui consiste à s'engager à ce qu'aucun jeune, dans notre pays, ne reste au chômage ou sans revenus pendant plus de six mois. Au bout de six mois, si un jeune est au chômage ou sans revenu, il aura obligatoirement soit un "emploi tremplin", puisque je vais en créer 500.000 sur la durée des cinq ans, comme je l'ai dit à Strasbourg dans le débat participatif sur l'emploi ; soit une formation rémunérée parce que s'il ne trouve pas d'emploi, c'est peut-être parce que sa formation n'est pas adaptée à l'emploi ; soit un travail d'utilité collective qui sera rémunéré en tant que tel ; soit une allocation d'autonomie s'il fait ses études et s'il n'a pas les moyens de subvenir à ses besoins...
Q- Voilà, ça c'est votre proposition pour l'emploi...
R- ... Mais l'engagement que je prends, c'est qu'en France, plus aucun jeune ne sera sans emploi ou sans stage rémunéré ou sans soutien pendant plus de six mois. Mais c'est très important parce que ça sera l'un des coeurs de mon projet. Je crois que si l'on remet les jeunes au travail ou dans la prise de conscience de leur utilité, alors on remet aussi la France debout.
Q- F. Hollande, premier secrétaire du Parti socialiste, a, lui, de son côté déjà fait des propositions en matière fiscale. Il avait notamment annoncé, la semaine dernière, que les salariés de plus de 4.000 euros connaîtraient des augmentations d'impôts. Vous a-t-il consultée avant de faire ces propositions, S. Royal ?
R- Non mais ça ne me choque pas.
Q- C'est un problème ?
R- Pas du tout. Il est premier secrétaire du Parti socialiste. Il est responsable politique. D'autres responsables politiques avancent des propositions dans les différents débats. Les siennes ont plus d'impact parce qu'il est premier secrétaire du Parti socialiste.
Q- C'est étonnant qu'il ne vous consulte pas avant de faire ce type de propositions ?
R- Non, pas du tout. Pas du tout. Et en même temps, je vous le dis, ça n'est pas ma façon de voir les choses. Je crois que la fiscalité...
Q- Ses propositions ne vous engagent pas ?
R- Elles ne m'engagent pas au sens où je crois que la fiscalité est un outil au service du développement économique ou du progrès social ou de la lutte contre les injustices. Et donc, il faut d'abord préciser quel est cet objectif en terme de développement économique, social et environnemental et voir comment la fiscalité peut permettre la création de la valeur ajoutée.
Q- F. Hollande a-t-il été maladroit en formulant des propositions comme il l'a fait. Les a-t-il mal présentées ?
R- Non. Pas du tout. Je crois qu'il pense vraiment ce qu'il dit et ce qu'il avance. Et c'est un fin connaisseur de ces sujets et qui sera extrêmement précieux pour finaliser mon projet présidentiel.
Q- Considérez-vous que ceci a perturbé votre campagne, S. Royal ?
R- Je ne crois pas. Je vais vous dire : nous, nous ne sommes pas à gauche dans l'illusion de l'unité factice. Ma volonté c'est de rassembler des personnalités avec leur autonomie, avec leur originalité ; et donc, c'est cette force-là aussi qui fait la gauche : c'est que tout le monde ne pense pas la même chose. Après, ensuite, il faut, en effet, une autorité juste et légitime qui décide dans quelle direction la France va aller et comment la France va pouvoir se redresser. Et je considère que la priorité de la politique économique, c'est l'investissement massif dans l'innovation, dans la recherche, dans la formation professionnelle, dans la qualité du dialogue social, dans la compétitivité des entreprises pour conquérir les marchés extérieurs comme je l'ai dit en Chine. Et la fiscalité doit être au service de ces objectifs, sans parler du volet écologique car j'entends faire une réforme fiscale profonde sur la question écologique pour que la France s'engage avec beaucoup de force dans la création d'emplois liés à l'écologie industrielle.
Q- Vous avez fait connaître, hier, S. Royal, votre situation fiscale par l'intermédiaire de votre avocat. On a ainsi appris que depuis deux ans, vous acquittiez l'impôt Sur la Fortune. Qu'est-ce qui vous a poussé, S. Royal, à faire cette clarification ?
R- Je ne l'ai pas rendue publique via mon avocat. Je l'ai rendue publique directement à la demande - bizarre - de nombreux journaux et journalistes ...
Q- Pourquoi demande "bizarre" ?
R- ... qui m'ont, depuis huit jours, harcelée pour que je rende public mon patrimoine. Ce qui ne me gêne aucunement. Tous les candidats à l'élection présidentielle comme tous les candidats aux élections législatives doivent faire une déclaration de patrimoine auprès du Conseil constitutionnel, normalement ...
Q- ... qui n'est pas publique.
R- ... qui n'est pas publique. Il y a eu une polémique, une diffamation lancée sur Internet à plusieurs millions de destinataires. Donc, il y a une puissance de nuisance assez forte du côté de l'UMP puisque ceci a été relié...
Q- Pour vous, c'est l'UMP ?
R- Ah, c'est Monsieur Godfrain qui a repris cette déclaration à partir de laquelle tout a été repris, je le répète, à plusieurs millions. Aujourd'hui, Internet est un outil assez - disons, comme dirais-je- spectaculaire.
Q- F. Hollande est plus précis que ça dans Libération. Il évoque même l'entourage de N. Sarkozy.
R- Attendez ! Attendez ! Attendez ! Mais Monsieur Godfrain fait partie de l'entourage de N. Sarkozy.
Q- Donc, selon vous, c'est l'entourage de N. Sarkozy qui est à l'origine de cette campagne ?
R- L'enquête le démontrera puisqu'il y a une plainte en diffamation. Donc, écoutez-moi : moi, je n'ai pas l'intention ni de me laisser faire par ces méthodes d'intimidation, ni de les imiter. Je considère que la politique doit être propre. Et moi qui ai été élevée -à la dure- vous le savez, dans une enfance que vous connaissez, j'ai appris ce qu'était l'honnêteté et la vérité de la parole. Et en même temps, la transparence ne me gêne absolument pas. Donc, j'ai donc rendu public mon patrimoine. J'espère que les organes de presse qui m'ont demandé cela le demanderont à tous les candidats. Mon patrimoine est donc de 355.000 euros, voilà. Et donc les choses sont extrêmement claires. Et la copie de ma déclaration est à la disposition de la presse puisque je lui ai envoyée.
Q- Vous acquittez donc l'impôt Sur la Fortune, S. Royal...
R- Non. A titre personnel, je n'atteins pas le seuil de l'impôt Sur la Fortune mais c'est en cumulant mon patrimoine avec celui de mon conjoint qui nous met effectivement au seuil ...
Q- Considérez-vous que vous êtes riche, S. Royal ?
R- Je suis aisée. Et je pense normal de payer l'impôt sur la Fortune et je ne tolère pas qu'il y ait des insinuations qui ont laissé croire que je fraudais l'ISF. J'ai acheté un bien en 86, bien sûr dont la valeur a augmenté aujourd'hui, un autre en 90 dont je possède une partie. Comme les emprunts ont été remboursés et que vous connaissez la valeur immobilière telle qu'elle a évoluée, nous avons donc franchi le seuil de l'impôt Sur la Fortune depuis l'année dernière. Et c'est tout à fait normal de payer cet ISF.
Q- Est-ce un problème de vouloir représenter la gauche et d'acquitter l'impôt Sur la Fortune ?
R- Je ne crois pas. Je pense, au contraire, que payer l'impôt et payer l'impôt de solidarité, c'est quelque chose qui est tout à fait normal. Je pense également qu'au bout de 30 années de vie professionnelle, avoir constitué un patrimoine en ne partant de rien - j'ai commencé ma vie en n'ayant rien, donc c'est le fruit de mon travail et en même temps, c'était plus facile à cette époque que maintenant. Et la vraie question, aujourd'hui, c'est que des jeunes dans la situation dans laquelle j'étais, c'est-à-dire diplômée de l'enseignement supérieur avec un bon salaire de départ, aujourd'hui, auront beaucoup plus de difficultés à se constituer un patrimoine, et même à être propriétaire de leur logement à cause, justement, du prix de l'immobilier. Et c'est cela aussi que je veux changer. Je veux que les Français et les familles soient propriétaires de leur logement. Aujourd'hui, un Français sur deux est propriétaire de son logement. Mon objectif, je l'ai déjà dit, c'est que 80 % des Français puissent réussir à acquérir leur logement, et je mettrai en place des dispositifs notamment de crédits très peu chers pour permettre aux familles d'accéder à leur logement quel que soit leur niveau de revenus. Je veux aussi que les familles qui habitent des logements sociaux et qui paient bien leur loyer, qui font leurs efforts pour payer leur loyer durablement, puissent devenir, au bout de 15 ans, propriétaire du logement qu'ils habitent.
Q- Une dernière question sur G. Frêche, il l'a annoncé hier qu'il se mettait en retrait durant deux ou trois mois du Parti socialiste pour ne pas vous gêner, a-t-il dit, S. Royal. Souhaitez-vous malgré tout que la procédure devant un tribunal des conflits du Parti Socialiste qui peut aboutir à son exclusion, se poursuive ?
R- Je pense que ce qu'il a fait est bien et qu'on peut en rester là ; et que pour le reste, c'est à lui de voir comment... ou s'il peut continuer, je crois, à exprimer des excuses pour des mots qui ont profondément blessé, avec lequel je suis en désaccord.
Q- Mais on peut en rester là sur G. Frêche ?
R- Je le crois.
S. Royal qui va, donc, poursuivre le dialogue tout à l'heure avec les
auditeurs.
Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 17 janvier 2007
R- Cités anonymement, c'est déjà significatif.
Q- Significatif aussi d'un sentiment qui existe...
R- Non, je ne crois pas. Je pense que la campagne que j'ai choisie de conduire en appui sur l'ensemble des comités de soutien sur tous les départements, toutes les régions de France, mais aussi en appui sur le Parti socialiste et les deux autres partis de gauche qui me soutiennent également, est le révélateur de la prise de conscience d'une crise de la politique. Et je crois qu'il faut tenir ce rythme que j'ai imprimé sur cette campagne ; et nous le tiendrons. Pourquoi ? Parce qu'aujourd'hui, si la Politique est en crise, c'est parce que d'abord, il y a une crise du résultat. On voit des responsables politiques promettre aujourd'hui ce qu'ils n'ont pas fait hier et moi, je ne veux pas être la présidente de la République qui va promettre des choses qu'elle ne fera pas. La seconde chose, c'est que les Français veulent participer aux décisions qui les concernent. Et le choix que j'ai fait, c'est d'associer les Français au projet présidentiel, à la plate forme présidentielle qui sera présentée, le moment venu, sans céder aux pressions, aux précipitations parce que je veux que la parole politique retrouve toute sa valeur. Et c'est le sens de cette démarche.
Q- Comment analysez-vous ce sentiment, ces propos - certes anonymes - mais qui existent aujourd'hui dans les journaux ? Comment vous les analysez ? On veut vous nuire, S. Royal ?
R- Pas du tout. Je crois que cette démarche politique est très nouvelle.
Q- Et mal comprise !
R- Et donc, elle surprend, peut-être ceux qui n'ont pas l'habitude de la conduire. Et ce que j'observe, et nous l'avons dit et je l'ai constaté une nouvelle fois, hier, dans les réunions que vous évoquiez tant au groupe socialiste où tous les parlementaires socialistes étaient présents que dans mon conseil politique qui est le Bureau national du Parti socialiste, que plusieurs responsables politiques ont témoigné de la force du déploiement des débats participatifs sur le territoire. Alors, ça ne se voit pas dans le petit milieu parisien ce qui se passe dans les départements et dans les régions. J'ai choisi une campagne décentralisée parce que je crois aussi que la France, demain, se remettra en mouvement si l'on peut s'appuyer sur la dynamique des régions. Et je peux vous annoncer, J.-M.l Aphatie...
Q- Je suis tout ouï !
R- ... qu'il y a, aujourd'hui, plus de 2.000 débats participatifs qui se sont déjà déroulés sur l'ensemble des territoires. Et moi, je veux que l'on respecte cela. Je veux construire la République du respect, donc je veux que l'on respecte les citoyens qui font l'effort de venir dans ces débats participatifs dont nous allons bientôt rendre compte. Et vous verrez...
Q- Et donc votre programme, on le connaîtra fin février, début mars comme vous l'avez annoncé. Vous ne changerez pas de calendrier ?
R- Voilà. Les premières pistes de ce programme seront données à ce moment-là, c'est-à-dire lorsqu'il y a le retour des débats participatifs. Il y en a encore un certain nombre. J'en tiens un prochainement sur le logement et la vie chère. Le prochain, sur les questions de la jeunesse, l'environnement et l'agriculture. Donc, tous ces débats vont converger vers une restitution ; et à ce moment-là, ma prise de parole sur le projet présidentiel aura de la crédibilité et ne bougera pas. Moi, je ne change pas au gré du vent ou au gré des humeurs. J'ajoute qu'il y a déjà un certain nombre de propositions qui sont clairement exprimées, que j'ai clairement exprimées, je vous le rappelle : dans le domaine de l'emploi, par exemple. J'ai fait dix-sept propositions sur l'emploi et en particulier, une qui sera dans le projet présidentiel et qui consiste à s'engager à ce qu'aucun jeune, dans notre pays, ne reste au chômage ou sans revenus pendant plus de six mois. Au bout de six mois, si un jeune est au chômage ou sans revenu, il aura obligatoirement soit un "emploi tremplin", puisque je vais en créer 500.000 sur la durée des cinq ans, comme je l'ai dit à Strasbourg dans le débat participatif sur l'emploi ; soit une formation rémunérée parce que s'il ne trouve pas d'emploi, c'est peut-être parce que sa formation n'est pas adaptée à l'emploi ; soit un travail d'utilité collective qui sera rémunéré en tant que tel ; soit une allocation d'autonomie s'il fait ses études et s'il n'a pas les moyens de subvenir à ses besoins...
Q- Voilà, ça c'est votre proposition pour l'emploi...
R- ... Mais l'engagement que je prends, c'est qu'en France, plus aucun jeune ne sera sans emploi ou sans stage rémunéré ou sans soutien pendant plus de six mois. Mais c'est très important parce que ça sera l'un des coeurs de mon projet. Je crois que si l'on remet les jeunes au travail ou dans la prise de conscience de leur utilité, alors on remet aussi la France debout.
Q- F. Hollande, premier secrétaire du Parti socialiste, a, lui, de son côté déjà fait des propositions en matière fiscale. Il avait notamment annoncé, la semaine dernière, que les salariés de plus de 4.000 euros connaîtraient des augmentations d'impôts. Vous a-t-il consultée avant de faire ces propositions, S. Royal ?
R- Non mais ça ne me choque pas.
Q- C'est un problème ?
R- Pas du tout. Il est premier secrétaire du Parti socialiste. Il est responsable politique. D'autres responsables politiques avancent des propositions dans les différents débats. Les siennes ont plus d'impact parce qu'il est premier secrétaire du Parti socialiste.
Q- C'est étonnant qu'il ne vous consulte pas avant de faire ce type de propositions ?
R- Non, pas du tout. Pas du tout. Et en même temps, je vous le dis, ça n'est pas ma façon de voir les choses. Je crois que la fiscalité...
Q- Ses propositions ne vous engagent pas ?
R- Elles ne m'engagent pas au sens où je crois que la fiscalité est un outil au service du développement économique ou du progrès social ou de la lutte contre les injustices. Et donc, il faut d'abord préciser quel est cet objectif en terme de développement économique, social et environnemental et voir comment la fiscalité peut permettre la création de la valeur ajoutée.
Q- F. Hollande a-t-il été maladroit en formulant des propositions comme il l'a fait. Les a-t-il mal présentées ?
R- Non. Pas du tout. Je crois qu'il pense vraiment ce qu'il dit et ce qu'il avance. Et c'est un fin connaisseur de ces sujets et qui sera extrêmement précieux pour finaliser mon projet présidentiel.
Q- Considérez-vous que ceci a perturbé votre campagne, S. Royal ?
R- Je ne crois pas. Je vais vous dire : nous, nous ne sommes pas à gauche dans l'illusion de l'unité factice. Ma volonté c'est de rassembler des personnalités avec leur autonomie, avec leur originalité ; et donc, c'est cette force-là aussi qui fait la gauche : c'est que tout le monde ne pense pas la même chose. Après, ensuite, il faut, en effet, une autorité juste et légitime qui décide dans quelle direction la France va aller et comment la France va pouvoir se redresser. Et je considère que la priorité de la politique économique, c'est l'investissement massif dans l'innovation, dans la recherche, dans la formation professionnelle, dans la qualité du dialogue social, dans la compétitivité des entreprises pour conquérir les marchés extérieurs comme je l'ai dit en Chine. Et la fiscalité doit être au service de ces objectifs, sans parler du volet écologique car j'entends faire une réforme fiscale profonde sur la question écologique pour que la France s'engage avec beaucoup de force dans la création d'emplois liés à l'écologie industrielle.
Q- Vous avez fait connaître, hier, S. Royal, votre situation fiscale par l'intermédiaire de votre avocat. On a ainsi appris que depuis deux ans, vous acquittiez l'impôt Sur la Fortune. Qu'est-ce qui vous a poussé, S. Royal, à faire cette clarification ?
R- Je ne l'ai pas rendue publique via mon avocat. Je l'ai rendue publique directement à la demande - bizarre - de nombreux journaux et journalistes ...
Q- Pourquoi demande "bizarre" ?
R- ... qui m'ont, depuis huit jours, harcelée pour que je rende public mon patrimoine. Ce qui ne me gêne aucunement. Tous les candidats à l'élection présidentielle comme tous les candidats aux élections législatives doivent faire une déclaration de patrimoine auprès du Conseil constitutionnel, normalement ...
Q- ... qui n'est pas publique.
R- ... qui n'est pas publique. Il y a eu une polémique, une diffamation lancée sur Internet à plusieurs millions de destinataires. Donc, il y a une puissance de nuisance assez forte du côté de l'UMP puisque ceci a été relié...
Q- Pour vous, c'est l'UMP ?
R- Ah, c'est Monsieur Godfrain qui a repris cette déclaration à partir de laquelle tout a été repris, je le répète, à plusieurs millions. Aujourd'hui, Internet est un outil assez - disons, comme dirais-je- spectaculaire.
Q- F. Hollande est plus précis que ça dans Libération. Il évoque même l'entourage de N. Sarkozy.
R- Attendez ! Attendez ! Attendez ! Mais Monsieur Godfrain fait partie de l'entourage de N. Sarkozy.
Q- Donc, selon vous, c'est l'entourage de N. Sarkozy qui est à l'origine de cette campagne ?
R- L'enquête le démontrera puisqu'il y a une plainte en diffamation. Donc, écoutez-moi : moi, je n'ai pas l'intention ni de me laisser faire par ces méthodes d'intimidation, ni de les imiter. Je considère que la politique doit être propre. Et moi qui ai été élevée -à la dure- vous le savez, dans une enfance que vous connaissez, j'ai appris ce qu'était l'honnêteté et la vérité de la parole. Et en même temps, la transparence ne me gêne absolument pas. Donc, j'ai donc rendu public mon patrimoine. J'espère que les organes de presse qui m'ont demandé cela le demanderont à tous les candidats. Mon patrimoine est donc de 355.000 euros, voilà. Et donc les choses sont extrêmement claires. Et la copie de ma déclaration est à la disposition de la presse puisque je lui ai envoyée.
Q- Vous acquittez donc l'impôt Sur la Fortune, S. Royal...
R- Non. A titre personnel, je n'atteins pas le seuil de l'impôt Sur la Fortune mais c'est en cumulant mon patrimoine avec celui de mon conjoint qui nous met effectivement au seuil ...
Q- Considérez-vous que vous êtes riche, S. Royal ?
R- Je suis aisée. Et je pense normal de payer l'impôt sur la Fortune et je ne tolère pas qu'il y ait des insinuations qui ont laissé croire que je fraudais l'ISF. J'ai acheté un bien en 86, bien sûr dont la valeur a augmenté aujourd'hui, un autre en 90 dont je possède une partie. Comme les emprunts ont été remboursés et que vous connaissez la valeur immobilière telle qu'elle a évoluée, nous avons donc franchi le seuil de l'impôt Sur la Fortune depuis l'année dernière. Et c'est tout à fait normal de payer cet ISF.
Q- Est-ce un problème de vouloir représenter la gauche et d'acquitter l'impôt Sur la Fortune ?
R- Je ne crois pas. Je pense, au contraire, que payer l'impôt et payer l'impôt de solidarité, c'est quelque chose qui est tout à fait normal. Je pense également qu'au bout de 30 années de vie professionnelle, avoir constitué un patrimoine en ne partant de rien - j'ai commencé ma vie en n'ayant rien, donc c'est le fruit de mon travail et en même temps, c'était plus facile à cette époque que maintenant. Et la vraie question, aujourd'hui, c'est que des jeunes dans la situation dans laquelle j'étais, c'est-à-dire diplômée de l'enseignement supérieur avec un bon salaire de départ, aujourd'hui, auront beaucoup plus de difficultés à se constituer un patrimoine, et même à être propriétaire de leur logement à cause, justement, du prix de l'immobilier. Et c'est cela aussi que je veux changer. Je veux que les Français et les familles soient propriétaires de leur logement. Aujourd'hui, un Français sur deux est propriétaire de son logement. Mon objectif, je l'ai déjà dit, c'est que 80 % des Français puissent réussir à acquérir leur logement, et je mettrai en place des dispositifs notamment de crédits très peu chers pour permettre aux familles d'accéder à leur logement quel que soit leur niveau de revenus. Je veux aussi que les familles qui habitent des logements sociaux et qui paient bien leur loyer, qui font leurs efforts pour payer leur loyer durablement, puissent devenir, au bout de 15 ans, propriétaire du logement qu'ils habitent.
Q- Une dernière question sur G. Frêche, il l'a annoncé hier qu'il se mettait en retrait durant deux ou trois mois du Parti socialiste pour ne pas vous gêner, a-t-il dit, S. Royal. Souhaitez-vous malgré tout que la procédure devant un tribunal des conflits du Parti Socialiste qui peut aboutir à son exclusion, se poursuive ?
R- Je pense que ce qu'il a fait est bien et qu'on peut en rester là ; et que pour le reste, c'est à lui de voir comment... ou s'il peut continuer, je crois, à exprimer des excuses pour des mots qui ont profondément blessé, avec lequel je suis en désaccord.
Q- Mais on peut en rester là sur G. Frêche ?
R- Je le crois.
S. Royal qui va, donc, poursuivre le dialogue tout à l'heure avec les
auditeurs.
Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 17 janvier 2007