Texte intégral
Chasse, Pêche, Nature et Traditions. Bonjour F. Nihous.
Bonjour.
Q- Alors, question rituelle dans ces matinales "Spéciale Présidentielle" : afin de mieux vous situer dans le paysage politique, dites-nous quelle voix vous portez dans cette campagne ?
R- Je pense être le porte-parole de la ruralité dans cette campagne, c'est-à-dire l'ensemble des Français qui vivent en zone rurale : 20% de la population, 15 millions de Français.
Q- Elle n'est pas prise en compte par les autres partis, cette ruralité ?
R- Non, ils en parlent de temps en temps, à chaque élection, quand ils estiment qu'il y a quelques voix à aller grappiller ici ou là, et une fois qu'ils sont aux affaires, ils l'oublient complètement et la crise du monde rural continue.
Q- Alors elle prend quelle forme cette crise justement ?
R- Cette crise c'est une crise de société, dans toutes ses composantes, c'est-à-dire la fermeture des services publics, les problèmes d'emploi et de chômage, les problèmes de sécurité, les problèmes d'écologie. Il y a un vrai problème, en plus, d'incompréhension et de fossé qui se creuse entre les élites parisiennes qui veulent gérer l'ensemble du territoire sans respecter les cultures et les façons de vivre de nos terroirs français.
Q- Quelle est la mesure de votre programme, F. Nihous, qui vous semble la plus emblématique ou en tout cas la plus urgente à mettre en oeuvre ?
R- C'est la fin de la fermeture des services publics dans ces zones rurales justement, et également, couplé à ça, parce que malgré tout je suis le candidat de CPNT, Chasse, Pêche, Nature et Traditions, c'est le retour aux dates de chasse traditionnelle en France.
Q- Est-ce que ça, ça mérite une candidature à la présidentielle, le deuxième point que vous venez de citer : le retour des dates d'ouverture ?
R- Ecoutez, je crois que comme l'ensemble des candidats, je propose un programme, avec un ensemble de mesures, celle-la y figure, d'autres ne veulent pas le faire figurer, mais y font figurer d'autres choses ; vous savez, d'autres ce sont les OGM, d'autres c'est je ne sais pas quoi, il y en a certains, d'ailleurs, dont on ne sait même pas ce qu'ils proposent dans cette campagne. Donc oui, ça fait partie de mon programme, je l'assume complètement, j'en suis fier, je suis le seul candidat chasseur à cette élection. Je rappelle quand même que la chasse ce n'est pas négligeable, c'est 23.000 emplois directs en France, c'est 14 milliards d'euros dépensés par les chasseurs chaque année dans le circuit commercial, et c'est 2 milliards d'euros de taxes payées chaque année par les chasseurs à l'Etat. Donc, ce n'est pas négligeable, c'est à prendre en compte. Mais il n'y a pas que ça dans mon programme, mon programme d'ailleurs s'intitule « la ruralité d'abord. »
Q- La ruralité d'abord, avant la chasse mais tout de même, le nom de votre mouvement c'est tout de même CP... Chasse, Pêche, Nature et Traditions. Donc restons quand même encore un instant sur la question de la chasse. Aucun parti ne peut vous promettre de défendre ce que vous avez envie de défendre comme chasseur ?
R- Des promesses, ils en font depuis 25 ans, il n'y en a pas un qui les a tenues. Moi je rappelle quand même que quand on avait des députés européens menés par J. Saint-Josse au Parlement européen, on avait déposé justement des amendements et des textes visant à modifier les directives de façon à permettre à la France de fixer elle-même ses dates de chasse, ils ont tous voté contre, à gauche, à droite et au centre. Maintenant, ils se disent tous les amis des chasseurs, forcément. Il y a une chose qu'ils savent tous faire avant tout, c'est de compter. Donc ils ont vu le résultat de J. Saint-Josse en 2002 : 1,3 million voix. Ils sont tous en train de lorgner dessus, et essayer de piquer ici ou là. Mais vous savez, les gens, et notamment les chasseurs, préféreront l'original à la copie. Pour les chasseurs et les ruraux, le seul vote utile c'est le vote Nihous.
Q- Alors justement, vous pensez que c'est l'Europe qui est en cause dans, disons le tort, les soucis, faits aux chasseurs ?
R- Pas seulement... L'assise des problèmes c'est effectivement une directive européenne de 1979, plus une autre directive en 92, sur Natura 2000, mais avec la complicité, malgré tout, de nos gouvernements, de gauche comme de droite d'ailleurs, qui n'ont jamais eu ni le courage, ni la volonté politique, de tenir leurs promesses pour défendre la chasse française.
Q- Vous pensez que cette question de la chasse, qui est tout de même... il y a des enjeux économiques, vous les avez décrits, il y a un certain nombre de...
R- Et des enjeux culturels aussi.
Q- Des enjeux culturels aussi, un certain nombre de milliers de personnes qui la pratiquent, vous pensez que cet enjeu concerne l'ensemble de la France ou c'est juste un parti très précis sur une question précise ?
R- Non, ça concerne tout le monde, parce que c'est emblématique d'un combat par rapport à une culture, par rapport à une façon de vivre. Cela pourrait être la corrida, ça pourrait être des tas d'autres choses. Celui-là est emblématique, certainement, mais il est révélateur aussi d'un contexte et d'une évolution de société qu'il y a tant en France qu'en Europe, qui est de vouloir tout formater, on veut que tout le monde vive pareil, fasse pareil. Mais vous ne ferez jamais vivre un Finlandais comme un Portugais et un Français, ni un Chti, dont je suis, ou un paysan du Larzac.
Q- Est-ce que votre critique de l'Europe va jusqu'à la critique de la Politique Agricole Commune européenne ?
R- Oui. Déjà, la première critique sur l'Europe elle est simplement que... bon, nous on avait fait campagne pour le « non » au référendum en 2005, comme on l'avait fait au moment de Maastricht aussi en 92. C'est-à-dire que nous, on refuse cette dérive libérale et fédérale de l'Europe, et cette fuite en avant constitue justement l'élargissement. Vous parliez de la question agricole, il faut savoir quand même qu'on a fait rentrer nos principaux concurrents agricoles avec cet élargissement européen. Résultat, maintenant, on a une agriculture qui est encore plus en crise qu'avant. Ensuite, nous ce qu'on demande au niveau européen, c'est justement une Europe qui va respecter les différences, qui va respecter les cultures de chaque pays et qui va permettre à chaque Etat de pouvoir défendre ses intérêts nationaux, avec un genre de droit de veto par rapport à certains textes que d'autres Etats voudraient leur imposer. Pour ce qui est de la question agricole, nous on s'était battu contre la réforme de la PAC au Parlement européen, qui avait été soutenue malgré tout par tout le monde, y compris par ceux qui se définissent comme des agriculteurs maintenant, y compris en se faisant prendre en photo sur un tracteur, et qui maintenant expliquent qu'ils vont défendre l'agriculture française. Je suis désolé, quand on a soutenu cette réforme, quand on soutient la politique agricole européenne telle qu'elle est faite actuellement, ça veut dire qu'on vend l'agriculture française à la concurrence étrangère.
Q- J'aimerais vous citer, F. Nihous, les propos de P. Mangin, qui est agriculteur, président des coopératives de France, peut-être le connaissez-vous. Il s'exprimait dans Les Échos, hier. Et voilà ce qu'il disait : "Pendant des années, la Politique Agricole Commune, européenne donc, nous a apporté une grande sécurité dans l'exercice de notre profession d'agriculteurs, c'était le rêve. Sans elle, on aurait aujourd'hui une agriculture exclusivement industrielle, c'est dans son sillage qu'ont été créés les coopératives, les chambres d'agriculture, les lycées agricoles, la formation professionnelle ; si la PAC disparaissait, des pans entiers de l'agriculture disparaîtraient". Réaction.
R- C'est ce qui figure dans mon programme, donc tout à fait d'accord.
Q- Donc vous ne critiquez pas la PAC ?
R- Non, il ne faut pas montrer du doigt les agriculteurs maintenant, sachant qu'ils fonctionnent dans un système qu'on leur a imposé. Il ne faut pas oublier quand même que depuis les années 50, on a imposé un système d'hyper-production aussi à l'agriculture. Alors c'est un peu facile maintenant de les lyncher et de les lâcher, en disant : maintenant, débrouillez-vous et essayez de faire autre chose. Je rappelle que la commissaire européenne à l'agriculture vient récemment de déclarer que les agriculteurs devaient trouver un autre métier d'ici 2013 - c'est quand même gravissime d'entendre ça - et que, deuxièmement, on a un commissaire au Commerce extérieur, au niveau de l'Europe, monsieur Mandelson, un Anglais, qui lui part négocier à l'OMC en étant censé défendre notre agriculture, en disant : les Américains ne veulent rien lâcher, mais moi je vais tout donner. Il faut replacer les choses un petit peu. La PAC, elle est là, elle nous a permis d'avoir une agriculture de qualité, elle est reconnue - je rappelle que l'agriculture française c'est la deuxième mondiale - ce n'est pas rien, on ne va quand même pas casser cet outil-là.
Q- Il y a un autre candidat dans la campagne qui parle beaucoup de la ruralité,c'est également J. Bové. Est-ce que vous vous sentez en proximité, F. Nihous, avec lui, et plus largement en proximité avec un certain nombre d'écologistes qui défendent, eux aussi, une approche raisonnée de la nature ?
R- Le deuxième point, je vais y venir après. Par rapport à J. Bové, moi je suis à l'aise. Bon, il mène un combat, comme on en mène chacun dans cette campagne, moi ce que je désapprouve c'est les méthodes, c'est-à-dire moi je ne détruis pas ce que je combats, je me bats sur le terrain des idées, on est en République, moi j'ai fait un choix, lui il a fait un autre choix plus type anarchiste, syndicaliste ou ce genre de choses...
Q- Vous parlez des fauchages d'OGM ?
R- Oui...
Q- Ça c'est une autre époque !
R- Moi aussi je suis contre les OGM, mais moi je ne vais pas détruire l'outil de travail d'autrui, je respecte aussi. Donc on est en République, on est en démocratie, on ne va pas s'en plaindre, il y a des outils pour se défendre, ça passe par l'élection, ça passe par la pression politique, ça passe par le lobbying, mais pas par des méthodes comme ça, ça devient n'importe quoi ça.
Q- Sur le fond alors ?
R- Sur le fond de l'écologie, parce qu'ils sont tous en train de se battre, je vois ici, dans le journal, entre Hulot, Voynet, Bové et compagnie, qui se battent tous pour récupérer l'électorat écologiste, moi je suis à l'aise, je me définis comme un écologiste, mais un écologiste qui agit. Moi je ne suis pas un contemplatif qui développe, comme Voynet ou comme Hulot, une écologie punitive, c'est-à-dire une écologie qui marche qu'à coups de taxes, de punitions, de sanctions, d'exclusions, de restrictions, et qui au final, en caricaturant à peine, va faire de nos zones rurales des réserves d'indiens. Moi je ne suis pas d'accord avec ça. En plus, Hulot s'énerve...
Q- Oui, mais au final, si on ne fait rien, est-ce qu'on aura encore des campagnes ?
R- Non, mais je ne dis pas qu'il ne faut rien faire, je dis qu'il faut faire autrement.
Q- Mais comment alors, F. Nihous ?
R- Tous ceux-là portent des méthodes, des recettes qui sont utilisées depuis 25 ans et qui ne marchent pas, puisque l'environnement va plus mal aujourd'hui qu'hier. Je rappelle quand même que D. Voynet a été ministre pendant quelques années à l'époque de Jospin. Qu'est-ce qu'elle a fait ? C'est quand même le gouvernement Jospin, avec les Verts, Cochet et Voynet, qui a autorisé les plantations d'OGM en France, qui a autorisé les enfouissements de déchets nucléaires en France. Alors, après, ils ont belle mine d'aller défiler, comme samedi dernier, contre l'EPR. Attendez ! Il faut être clair quand même. Moi ce que je propose...
Q- Donc vous ne vous sentez aucune proximité intellectuelle ou politique avec ces gens-la ? Hulot, Bové, Voynet.
R- Ah non pas du tout, pas du tout. Sur la question écologique, moi je porte une approche qui est une écologie d'équilibres, qui va respecter l'homme et ses activités, dans le respect de son environnement, et deuxièmement une écologie incitative, c'est-à-dire qui va jouer sur les prix, sur les taxes, sur les charges, pour faire en sorte que tout ce qu'on pourrait appeler les bioproduits ou les énergies renouvelables, soient intéressants pour les Français. Actuellement, faire du bio, ou utiliser tous ces bio-produits, c'est un luxe, avec les problèmes de pouvoir d'achat ou de vie chère - je vous laisse le débat sémantique qui agite d'autres candidats - on ne peut pas se permettre ça. Je vais vous citer un exemple. J'habite en montagne, si j'écoute Voynet ou Hulot, avec leur programme, je vais payer une taxe parce que je roule avec mon diesel. Mais moi, dans mon village, il n'y a pas de train, il n'y a pas de bus, il n'y a rien du tout, j'ai que ma voiture, pour aller faire mes courses, pour aller au boulot, pour tout faire. Moi je préférerais, je veux rouler en voiture propre, le seul problème la voiture propre elle coûte 20% plus cher qu'une voiture normale. Des bio-carburants on n'en trouve nulle part. Agissons plutôt là-dessus.
Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 21 mars 2007
Bonjour.
Q- Alors, question rituelle dans ces matinales "Spéciale Présidentielle" : afin de mieux vous situer dans le paysage politique, dites-nous quelle voix vous portez dans cette campagne ?
R- Je pense être le porte-parole de la ruralité dans cette campagne, c'est-à-dire l'ensemble des Français qui vivent en zone rurale : 20% de la population, 15 millions de Français.
Q- Elle n'est pas prise en compte par les autres partis, cette ruralité ?
R- Non, ils en parlent de temps en temps, à chaque élection, quand ils estiment qu'il y a quelques voix à aller grappiller ici ou là, et une fois qu'ils sont aux affaires, ils l'oublient complètement et la crise du monde rural continue.
Q- Alors elle prend quelle forme cette crise justement ?
R- Cette crise c'est une crise de société, dans toutes ses composantes, c'est-à-dire la fermeture des services publics, les problèmes d'emploi et de chômage, les problèmes de sécurité, les problèmes d'écologie. Il y a un vrai problème, en plus, d'incompréhension et de fossé qui se creuse entre les élites parisiennes qui veulent gérer l'ensemble du territoire sans respecter les cultures et les façons de vivre de nos terroirs français.
Q- Quelle est la mesure de votre programme, F. Nihous, qui vous semble la plus emblématique ou en tout cas la plus urgente à mettre en oeuvre ?
R- C'est la fin de la fermeture des services publics dans ces zones rurales justement, et également, couplé à ça, parce que malgré tout je suis le candidat de CPNT, Chasse, Pêche, Nature et Traditions, c'est le retour aux dates de chasse traditionnelle en France.
Q- Est-ce que ça, ça mérite une candidature à la présidentielle, le deuxième point que vous venez de citer : le retour des dates d'ouverture ?
R- Ecoutez, je crois que comme l'ensemble des candidats, je propose un programme, avec un ensemble de mesures, celle-la y figure, d'autres ne veulent pas le faire figurer, mais y font figurer d'autres choses ; vous savez, d'autres ce sont les OGM, d'autres c'est je ne sais pas quoi, il y en a certains, d'ailleurs, dont on ne sait même pas ce qu'ils proposent dans cette campagne. Donc oui, ça fait partie de mon programme, je l'assume complètement, j'en suis fier, je suis le seul candidat chasseur à cette élection. Je rappelle quand même que la chasse ce n'est pas négligeable, c'est 23.000 emplois directs en France, c'est 14 milliards d'euros dépensés par les chasseurs chaque année dans le circuit commercial, et c'est 2 milliards d'euros de taxes payées chaque année par les chasseurs à l'Etat. Donc, ce n'est pas négligeable, c'est à prendre en compte. Mais il n'y a pas que ça dans mon programme, mon programme d'ailleurs s'intitule « la ruralité d'abord. »
Q- La ruralité d'abord, avant la chasse mais tout de même, le nom de votre mouvement c'est tout de même CP... Chasse, Pêche, Nature et Traditions. Donc restons quand même encore un instant sur la question de la chasse. Aucun parti ne peut vous promettre de défendre ce que vous avez envie de défendre comme chasseur ?
R- Des promesses, ils en font depuis 25 ans, il n'y en a pas un qui les a tenues. Moi je rappelle quand même que quand on avait des députés européens menés par J. Saint-Josse au Parlement européen, on avait déposé justement des amendements et des textes visant à modifier les directives de façon à permettre à la France de fixer elle-même ses dates de chasse, ils ont tous voté contre, à gauche, à droite et au centre. Maintenant, ils se disent tous les amis des chasseurs, forcément. Il y a une chose qu'ils savent tous faire avant tout, c'est de compter. Donc ils ont vu le résultat de J. Saint-Josse en 2002 : 1,3 million voix. Ils sont tous en train de lorgner dessus, et essayer de piquer ici ou là. Mais vous savez, les gens, et notamment les chasseurs, préféreront l'original à la copie. Pour les chasseurs et les ruraux, le seul vote utile c'est le vote Nihous.
Q- Alors justement, vous pensez que c'est l'Europe qui est en cause dans, disons le tort, les soucis, faits aux chasseurs ?
R- Pas seulement... L'assise des problèmes c'est effectivement une directive européenne de 1979, plus une autre directive en 92, sur Natura 2000, mais avec la complicité, malgré tout, de nos gouvernements, de gauche comme de droite d'ailleurs, qui n'ont jamais eu ni le courage, ni la volonté politique, de tenir leurs promesses pour défendre la chasse française.
Q- Vous pensez que cette question de la chasse, qui est tout de même... il y a des enjeux économiques, vous les avez décrits, il y a un certain nombre de...
R- Et des enjeux culturels aussi.
Q- Des enjeux culturels aussi, un certain nombre de milliers de personnes qui la pratiquent, vous pensez que cet enjeu concerne l'ensemble de la France ou c'est juste un parti très précis sur une question précise ?
R- Non, ça concerne tout le monde, parce que c'est emblématique d'un combat par rapport à une culture, par rapport à une façon de vivre. Cela pourrait être la corrida, ça pourrait être des tas d'autres choses. Celui-là est emblématique, certainement, mais il est révélateur aussi d'un contexte et d'une évolution de société qu'il y a tant en France qu'en Europe, qui est de vouloir tout formater, on veut que tout le monde vive pareil, fasse pareil. Mais vous ne ferez jamais vivre un Finlandais comme un Portugais et un Français, ni un Chti, dont je suis, ou un paysan du Larzac.
Q- Est-ce que votre critique de l'Europe va jusqu'à la critique de la Politique Agricole Commune européenne ?
R- Oui. Déjà, la première critique sur l'Europe elle est simplement que... bon, nous on avait fait campagne pour le « non » au référendum en 2005, comme on l'avait fait au moment de Maastricht aussi en 92. C'est-à-dire que nous, on refuse cette dérive libérale et fédérale de l'Europe, et cette fuite en avant constitue justement l'élargissement. Vous parliez de la question agricole, il faut savoir quand même qu'on a fait rentrer nos principaux concurrents agricoles avec cet élargissement européen. Résultat, maintenant, on a une agriculture qui est encore plus en crise qu'avant. Ensuite, nous ce qu'on demande au niveau européen, c'est justement une Europe qui va respecter les différences, qui va respecter les cultures de chaque pays et qui va permettre à chaque Etat de pouvoir défendre ses intérêts nationaux, avec un genre de droit de veto par rapport à certains textes que d'autres Etats voudraient leur imposer. Pour ce qui est de la question agricole, nous on s'était battu contre la réforme de la PAC au Parlement européen, qui avait été soutenue malgré tout par tout le monde, y compris par ceux qui se définissent comme des agriculteurs maintenant, y compris en se faisant prendre en photo sur un tracteur, et qui maintenant expliquent qu'ils vont défendre l'agriculture française. Je suis désolé, quand on a soutenu cette réforme, quand on soutient la politique agricole européenne telle qu'elle est faite actuellement, ça veut dire qu'on vend l'agriculture française à la concurrence étrangère.
Q- J'aimerais vous citer, F. Nihous, les propos de P. Mangin, qui est agriculteur, président des coopératives de France, peut-être le connaissez-vous. Il s'exprimait dans Les Échos, hier. Et voilà ce qu'il disait : "Pendant des années, la Politique Agricole Commune, européenne donc, nous a apporté une grande sécurité dans l'exercice de notre profession d'agriculteurs, c'était le rêve. Sans elle, on aurait aujourd'hui une agriculture exclusivement industrielle, c'est dans son sillage qu'ont été créés les coopératives, les chambres d'agriculture, les lycées agricoles, la formation professionnelle ; si la PAC disparaissait, des pans entiers de l'agriculture disparaîtraient". Réaction.
R- C'est ce qui figure dans mon programme, donc tout à fait d'accord.
Q- Donc vous ne critiquez pas la PAC ?
R- Non, il ne faut pas montrer du doigt les agriculteurs maintenant, sachant qu'ils fonctionnent dans un système qu'on leur a imposé. Il ne faut pas oublier quand même que depuis les années 50, on a imposé un système d'hyper-production aussi à l'agriculture. Alors c'est un peu facile maintenant de les lyncher et de les lâcher, en disant : maintenant, débrouillez-vous et essayez de faire autre chose. Je rappelle que la commissaire européenne à l'agriculture vient récemment de déclarer que les agriculteurs devaient trouver un autre métier d'ici 2013 - c'est quand même gravissime d'entendre ça - et que, deuxièmement, on a un commissaire au Commerce extérieur, au niveau de l'Europe, monsieur Mandelson, un Anglais, qui lui part négocier à l'OMC en étant censé défendre notre agriculture, en disant : les Américains ne veulent rien lâcher, mais moi je vais tout donner. Il faut replacer les choses un petit peu. La PAC, elle est là, elle nous a permis d'avoir une agriculture de qualité, elle est reconnue - je rappelle que l'agriculture française c'est la deuxième mondiale - ce n'est pas rien, on ne va quand même pas casser cet outil-là.
Q- Il y a un autre candidat dans la campagne qui parle beaucoup de la ruralité,c'est également J. Bové. Est-ce que vous vous sentez en proximité, F. Nihous, avec lui, et plus largement en proximité avec un certain nombre d'écologistes qui défendent, eux aussi, une approche raisonnée de la nature ?
R- Le deuxième point, je vais y venir après. Par rapport à J. Bové, moi je suis à l'aise. Bon, il mène un combat, comme on en mène chacun dans cette campagne, moi ce que je désapprouve c'est les méthodes, c'est-à-dire moi je ne détruis pas ce que je combats, je me bats sur le terrain des idées, on est en République, moi j'ai fait un choix, lui il a fait un autre choix plus type anarchiste, syndicaliste ou ce genre de choses...
Q- Vous parlez des fauchages d'OGM ?
R- Oui...
Q- Ça c'est une autre époque !
R- Moi aussi je suis contre les OGM, mais moi je ne vais pas détruire l'outil de travail d'autrui, je respecte aussi. Donc on est en République, on est en démocratie, on ne va pas s'en plaindre, il y a des outils pour se défendre, ça passe par l'élection, ça passe par la pression politique, ça passe par le lobbying, mais pas par des méthodes comme ça, ça devient n'importe quoi ça.
Q- Sur le fond alors ?
R- Sur le fond de l'écologie, parce qu'ils sont tous en train de se battre, je vois ici, dans le journal, entre Hulot, Voynet, Bové et compagnie, qui se battent tous pour récupérer l'électorat écologiste, moi je suis à l'aise, je me définis comme un écologiste, mais un écologiste qui agit. Moi je ne suis pas un contemplatif qui développe, comme Voynet ou comme Hulot, une écologie punitive, c'est-à-dire une écologie qui marche qu'à coups de taxes, de punitions, de sanctions, d'exclusions, de restrictions, et qui au final, en caricaturant à peine, va faire de nos zones rurales des réserves d'indiens. Moi je ne suis pas d'accord avec ça. En plus, Hulot s'énerve...
Q- Oui, mais au final, si on ne fait rien, est-ce qu'on aura encore des campagnes ?
R- Non, mais je ne dis pas qu'il ne faut rien faire, je dis qu'il faut faire autrement.
Q- Mais comment alors, F. Nihous ?
R- Tous ceux-là portent des méthodes, des recettes qui sont utilisées depuis 25 ans et qui ne marchent pas, puisque l'environnement va plus mal aujourd'hui qu'hier. Je rappelle quand même que D. Voynet a été ministre pendant quelques années à l'époque de Jospin. Qu'est-ce qu'elle a fait ? C'est quand même le gouvernement Jospin, avec les Verts, Cochet et Voynet, qui a autorisé les plantations d'OGM en France, qui a autorisé les enfouissements de déchets nucléaires en France. Alors, après, ils ont belle mine d'aller défiler, comme samedi dernier, contre l'EPR. Attendez ! Il faut être clair quand même. Moi ce que je propose...
Q- Donc vous ne vous sentez aucune proximité intellectuelle ou politique avec ces gens-la ? Hulot, Bové, Voynet.
R- Ah non pas du tout, pas du tout. Sur la question écologique, moi je porte une approche qui est une écologie d'équilibres, qui va respecter l'homme et ses activités, dans le respect de son environnement, et deuxièmement une écologie incitative, c'est-à-dire qui va jouer sur les prix, sur les taxes, sur les charges, pour faire en sorte que tout ce qu'on pourrait appeler les bioproduits ou les énergies renouvelables, soient intéressants pour les Français. Actuellement, faire du bio, ou utiliser tous ces bio-produits, c'est un luxe, avec les problèmes de pouvoir d'achat ou de vie chère - je vous laisse le débat sémantique qui agite d'autres candidats - on ne peut pas se permettre ça. Je vais vous citer un exemple. J'habite en montagne, si j'écoute Voynet ou Hulot, avec leur programme, je vais payer une taxe parce que je roule avec mon diesel. Mais moi, dans mon village, il n'y a pas de train, il n'y a pas de bus, il n'y a rien du tout, j'ai que ma voiture, pour aller faire mes courses, pour aller au boulot, pour tout faire. Moi je préférerais, je veux rouler en voiture propre, le seul problème la voiture propre elle coûte 20% plus cher qu'une voiture normale. Des bio-carburants on n'en trouve nulle part. Agissons plutôt là-dessus.
Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 21 mars 2007