Texte intégral
T. Legrand.- Merci d'abord d'être là un 24 décembre, à la veille de Noël. La veille de Noël, c'est une période où l'on consomme beaucoup. Est-ce que, déjà, vous avez des chiffres pour cette période, la période des fêtes, les 15 derniers jours, ou c'est trop tôt ?
R.- Non. C'est évidemment trop tôt. C'est que nous savons, c'est qu'il faut que vous ayez en tête que les Français consomment environ 220 euros par enfant pour leurs courses de Noël, il faut y ajouter les dépenses liées évidemment au réveillon et à la nourriture. Cela veut dire que pour une famille moyenne, Noël, ça peut représenter pas loin de 800 à 1.000 euros de dépenses, ce qui est quand même excessif, très important, très très important pour la consommation.
Q.- On a déjà les chiffres de novembre qui viennent de tomber et qui ne sont pas bons : pour la 3ème fois consécutive, 3ème mois consécutif, la consommation est en baisse. C'est la première fois depuis dix ans qu'on a une si faible consommation à cette époque.
R.- Vous permettrez de les relativiser. D'abord, ce moins 0,1 %, c'est un léger tassement mais qui est le résultat à la fois de fortes hausses sur certains biens d'équipement, comme par exemple l'achat de biens pour son logement, + 4 %, ou les automobiles qui font un bon rebond au mois de novembre avec + 3%. Et puis de l'autre côté, on a une forte baisse qui est notamment liée à l'habillement. Et vous me permettrez d'y voir indéniablement un lien avec les grèves qui se sont déroulées au mois de novembre et qui ont sans doute empêché un certain nombre de nos concitoyens de faire leurs courses et d'accéder à l'achat de certains biens.
Q.- Alors on a quand même remarqué - c'est le Nouvel Observateur qui a fait ce petit calcul - que sur des produits de consommation courante, très populaires, que sur trois ans - je cite quelques marques au hasard -, les Pailles d'or de Lu + 34%, les coquillettes Panzani + 32%, Ricoré + 31%, les saucisses Knacki Herta, 29 %... Ce sont des produits très populaires ! Les augmentations comme ça, en trois ans, ce n'est pas dû simplement à l'augmentation du pétrole ou aux matières premières.
R.- Non, c'est dû à des relations commerciales qui avaient oublié le consommateur final. C'est-à-dire que pendant des années, distributeurs et grands industriels ont négocié dans leur coin, les uns ont augmenté leurs tarifs, les autres ont augmenté leurs avantages commerciaux - ce que l'on appelle les fameuses "marges arrière" - et ils ont un peu oublié le consommateur final. Et la France était devenue le pays le plus cher d'Europe sur les produits de grande consommation. C'est la raison pour laquelle je viens de faire adopter par le Parlement une loi qui va permettre de remettre de la transparence dans les relations entre grands industriels et grands distributeurs, et va permettre surtout de remettre de la concurrence dans les prix, parce que nous pensons que la concurrence c'est bon pour le consommateur final. Le fait que plusieurs enseignes sur un même produit puissent se mettre en concurrence, au total, à la fin, c'est bénéficiaire au consommateur.
Q.- C'est la fameuse réforme des marges-arrière... Est-ce que vous pouvez nous vulgariser cette réforme ?
R.- Les marges-arrière, en deux mots, c'est quoi ? Ce sont les avantages commerciaux que les industriels, les fournisseurs accordent à la grande distribution. C'est-à-dire qu'on vend un produit, mettons tarif 100, et làdessus, on va accorder aux distributeurs un certain nombre d'avantages qui vont aller jusqu'à 30 %, donc c'est très important. C'est par exemple mettre le produit en avant, la fameuse tête de gondole, cela peut être le mettre sur un tract publicitaire dans une zone de chalandise, dans des boîtes aux lettres. Il y a des tas de possibilités. Ce qui est clair, c'est que la grande distribution négocie chaque année ces avantages commerciaux. Jusqu'à présent, jusqu'à 2004, elle ne pouvait pas du tout les réintégrer dans les prix de vente au consommateur ; depuis 2005, elle peut en réintégrer la moitié. Et à partir du 1er janvier, elle pourra réintégrer la totalité de ces avantages promotionnels. Cela veut dire que les distributeurs pourront faire leur métier. Ils pourront à nouveau, sur certains produits, les baisser parce qu'ils considèrent que ce sont des produits d'appel, ils pourront être moins chers qu'un concurrent. Et au total, ce sera bon pour le consommateur.
Q.- Ce n'est pas ce que disent les distributeurs. Ils ne sont pas très contents de votre loi. Ils sont un petit peu déçus par rapport aux promesses de N. Sarkozy. Ils voudraient qu'on supprime carrément les marges-arrière. Pourquoi vous n'avez pas fait ça ?
R.- Ce n'est pas ce que dit un distributeur. Vendredi, je suis sorti, j'étais avec C. Lagarde...
Q.- La branche CNPF des distributeurs ne dit pas cela...
R.- Enfin, en tout cas, un grand distributeur bien médiatique conteste cette réforme qu'il approuvait il y a quelques mois, puisque si l'on relit les propos de M. Leclerc, en 2004-2005, ce qu'il préconisait, c'est clairement ce que nous allons faire au 1er janvier. Alors, c'est vrai quand on est grand distributeur, on en veut toujours plus, on veut toujours aller plus loin dans la négociation commerciale, ça fait un peu partie des gênes. Ce que je dis aux grands distributeurs, c'est qu'à partir du 1er janvier, ils pourront faire leur métier, c'est-à-dire négocier avec les industriels, et derrière, choisir les produits sur lesquels ils souhaitent intégrer la baisse des prix pratiqués par les fournisseurs.
Q.- On verra si leurs prix baissent. La loi prévoit aussi d'étendre la possibilité de travailler le dimanche, d'ouvrir le dimanche. Vous étendez cette possibilité aux magasins de meubles ; pourquoi les magasins de meubles ?
R.- Tout simplement, parce qu'on vit quand même dans un drôle de pays. Vous avez des secteurs, comme celui de l'ameublement, où vous avez la conjugaison de la volonté des consommateurs d'aller acheter leurs biens le dimanche. Une chambre à coucher, on ne l'achète pas par hasard en passant devant une vitrine, c'est un achat raisonné qui se fait en famille. Vous avez ensuite la volonté des professionnels de faire des affaires le dimanche, c'est 24 % du chiffre d'affaires d'un magasin d'ameublement qui se réalise le dimanche. Et puis, ensuite, vous avez, point important, des salariés qui, lorsqu'ils travaillent le dimanche dans l'ameublement, sont payés double et ont un jour de récupération. Vous avez ces trois conjugaisons de volonté, et on empêcherait ces gens-là de travailler, au moment où l'on veut chercher de la croissance économique partout, au moment où l'on veut augmenter la croissance ? Eh bien nous avons décidé qu'il fallait assouplir cette législation. Nous commençons par ce travail dans l'ameublement et nous continueront avec les partenaires sociaux. Ce que nous souhaitons, c'est travailler avec les partenaires sociaux et avec les parlementaires pour assouplir une dérogation qui est sans doute d'une autre époque. Vous savez que le principe du repos dominical doit rester, mais il y a aujourd'hui 180 dérogations dans le droit du Travail. Eh bien il faut remettre tout cela à plat.
Q.- On demandera demain à André XXIII, que nous recevons demain matin, ce qu'il pense de ce travail du dimanche.
R.- Nous prendrons bien sûr en compte l'avis des partenaires sociaux, des différents acteurs sociétaux.
Q.- Il y a une autre question de consommation et de pouvoir d'achat qui se pose dans la grande distribution, pour y revenir, c'est les caissières, tout le personnel qui travaille dans la grande distribution. Plus de la moitié de ce personnel est à temps partiel subi et a beaucoup de problèmes de pouvoir d'achat. Quand ils font des heures supplémentaires, quand ils vont faire des heures supplémentaires, souvent, cela n'atteindra pas les 35 heures, donc ils n'auront pas tous les bénéfices que vous voulez accorder aux heures supplémentaires. Il y a une injustice. Est-ce que vous faites pression sur les distributeurs pour qu'ils paient un petit peu mieux les caissières, les manutentionnaires ? Je rappelle que les patrons de ces entreprises sont les plus grandes fortunes de France.
R.- D'abord, il y a un dispositif dans la loi sur le travail, emploi, pouvoir d'achat votée cet été, sur les heures supplémentaires, qui s'appelle "les heures complémentaires", qui prévoit le temps partiel. Deuxièmement, pour ces salariés, un certain nombre de dispositions du projet de loi en cours au Parlement s'appliquent, je pense aux questions de la monétisation des RTT, ou encore au déblocage de la participation. Et puis, dernier élément, vous savez que le Gouvernement a souhaité que les négociations sur les salaires s'engagent dans les branches et en contrepartie, il va mettre sur la table la conditionnalité des aides, c'est-à-dire les exonérations de charges. Ne plus accorder systématiquement des exonérations de charges, mais les accorder en contrepartie d'engagements de négociations salariales. Donc c'est ce que le Gouvernement souhaite faire dans la grande distribution comme ailleurs.
Q.- Merci L. Chatel. Vous ne partez pas en vacances de la semaine ?
R.- Eh bien non, je ne pars pas en vacances parce que le secrétaire d'Etat au Tourisme doit être sur le pont.
Q.- Et donc le 31, vous serez à l'Elysée pour les voeux du Président...
R.- Je devrai passer un moment avec le Président.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 24 décembre 2007
R.- Non. C'est évidemment trop tôt. C'est que nous savons, c'est qu'il faut que vous ayez en tête que les Français consomment environ 220 euros par enfant pour leurs courses de Noël, il faut y ajouter les dépenses liées évidemment au réveillon et à la nourriture. Cela veut dire que pour une famille moyenne, Noël, ça peut représenter pas loin de 800 à 1.000 euros de dépenses, ce qui est quand même excessif, très important, très très important pour la consommation.
Q.- On a déjà les chiffres de novembre qui viennent de tomber et qui ne sont pas bons : pour la 3ème fois consécutive, 3ème mois consécutif, la consommation est en baisse. C'est la première fois depuis dix ans qu'on a une si faible consommation à cette époque.
R.- Vous permettrez de les relativiser. D'abord, ce moins 0,1 %, c'est un léger tassement mais qui est le résultat à la fois de fortes hausses sur certains biens d'équipement, comme par exemple l'achat de biens pour son logement, + 4 %, ou les automobiles qui font un bon rebond au mois de novembre avec + 3%. Et puis de l'autre côté, on a une forte baisse qui est notamment liée à l'habillement. Et vous me permettrez d'y voir indéniablement un lien avec les grèves qui se sont déroulées au mois de novembre et qui ont sans doute empêché un certain nombre de nos concitoyens de faire leurs courses et d'accéder à l'achat de certains biens.
Q.- Alors on a quand même remarqué - c'est le Nouvel Observateur qui a fait ce petit calcul - que sur des produits de consommation courante, très populaires, que sur trois ans - je cite quelques marques au hasard -, les Pailles d'or de Lu + 34%, les coquillettes Panzani + 32%, Ricoré + 31%, les saucisses Knacki Herta, 29 %... Ce sont des produits très populaires ! Les augmentations comme ça, en trois ans, ce n'est pas dû simplement à l'augmentation du pétrole ou aux matières premières.
R.- Non, c'est dû à des relations commerciales qui avaient oublié le consommateur final. C'est-à-dire que pendant des années, distributeurs et grands industriels ont négocié dans leur coin, les uns ont augmenté leurs tarifs, les autres ont augmenté leurs avantages commerciaux - ce que l'on appelle les fameuses "marges arrière" - et ils ont un peu oublié le consommateur final. Et la France était devenue le pays le plus cher d'Europe sur les produits de grande consommation. C'est la raison pour laquelle je viens de faire adopter par le Parlement une loi qui va permettre de remettre de la transparence dans les relations entre grands industriels et grands distributeurs, et va permettre surtout de remettre de la concurrence dans les prix, parce que nous pensons que la concurrence c'est bon pour le consommateur final. Le fait que plusieurs enseignes sur un même produit puissent se mettre en concurrence, au total, à la fin, c'est bénéficiaire au consommateur.
Q.- C'est la fameuse réforme des marges-arrière... Est-ce que vous pouvez nous vulgariser cette réforme ?
R.- Les marges-arrière, en deux mots, c'est quoi ? Ce sont les avantages commerciaux que les industriels, les fournisseurs accordent à la grande distribution. C'est-à-dire qu'on vend un produit, mettons tarif 100, et làdessus, on va accorder aux distributeurs un certain nombre d'avantages qui vont aller jusqu'à 30 %, donc c'est très important. C'est par exemple mettre le produit en avant, la fameuse tête de gondole, cela peut être le mettre sur un tract publicitaire dans une zone de chalandise, dans des boîtes aux lettres. Il y a des tas de possibilités. Ce qui est clair, c'est que la grande distribution négocie chaque année ces avantages commerciaux. Jusqu'à présent, jusqu'à 2004, elle ne pouvait pas du tout les réintégrer dans les prix de vente au consommateur ; depuis 2005, elle peut en réintégrer la moitié. Et à partir du 1er janvier, elle pourra réintégrer la totalité de ces avantages promotionnels. Cela veut dire que les distributeurs pourront faire leur métier. Ils pourront à nouveau, sur certains produits, les baisser parce qu'ils considèrent que ce sont des produits d'appel, ils pourront être moins chers qu'un concurrent. Et au total, ce sera bon pour le consommateur.
Q.- Ce n'est pas ce que disent les distributeurs. Ils ne sont pas très contents de votre loi. Ils sont un petit peu déçus par rapport aux promesses de N. Sarkozy. Ils voudraient qu'on supprime carrément les marges-arrière. Pourquoi vous n'avez pas fait ça ?
R.- Ce n'est pas ce que dit un distributeur. Vendredi, je suis sorti, j'étais avec C. Lagarde...
Q.- La branche CNPF des distributeurs ne dit pas cela...
R.- Enfin, en tout cas, un grand distributeur bien médiatique conteste cette réforme qu'il approuvait il y a quelques mois, puisque si l'on relit les propos de M. Leclerc, en 2004-2005, ce qu'il préconisait, c'est clairement ce que nous allons faire au 1er janvier. Alors, c'est vrai quand on est grand distributeur, on en veut toujours plus, on veut toujours aller plus loin dans la négociation commerciale, ça fait un peu partie des gênes. Ce que je dis aux grands distributeurs, c'est qu'à partir du 1er janvier, ils pourront faire leur métier, c'est-à-dire négocier avec les industriels, et derrière, choisir les produits sur lesquels ils souhaitent intégrer la baisse des prix pratiqués par les fournisseurs.
Q.- On verra si leurs prix baissent. La loi prévoit aussi d'étendre la possibilité de travailler le dimanche, d'ouvrir le dimanche. Vous étendez cette possibilité aux magasins de meubles ; pourquoi les magasins de meubles ?
R.- Tout simplement, parce qu'on vit quand même dans un drôle de pays. Vous avez des secteurs, comme celui de l'ameublement, où vous avez la conjugaison de la volonté des consommateurs d'aller acheter leurs biens le dimanche. Une chambre à coucher, on ne l'achète pas par hasard en passant devant une vitrine, c'est un achat raisonné qui se fait en famille. Vous avez ensuite la volonté des professionnels de faire des affaires le dimanche, c'est 24 % du chiffre d'affaires d'un magasin d'ameublement qui se réalise le dimanche. Et puis, ensuite, vous avez, point important, des salariés qui, lorsqu'ils travaillent le dimanche dans l'ameublement, sont payés double et ont un jour de récupération. Vous avez ces trois conjugaisons de volonté, et on empêcherait ces gens-là de travailler, au moment où l'on veut chercher de la croissance économique partout, au moment où l'on veut augmenter la croissance ? Eh bien nous avons décidé qu'il fallait assouplir cette législation. Nous commençons par ce travail dans l'ameublement et nous continueront avec les partenaires sociaux. Ce que nous souhaitons, c'est travailler avec les partenaires sociaux et avec les parlementaires pour assouplir une dérogation qui est sans doute d'une autre époque. Vous savez que le principe du repos dominical doit rester, mais il y a aujourd'hui 180 dérogations dans le droit du Travail. Eh bien il faut remettre tout cela à plat.
Q.- On demandera demain à André XXIII, que nous recevons demain matin, ce qu'il pense de ce travail du dimanche.
R.- Nous prendrons bien sûr en compte l'avis des partenaires sociaux, des différents acteurs sociétaux.
Q.- Il y a une autre question de consommation et de pouvoir d'achat qui se pose dans la grande distribution, pour y revenir, c'est les caissières, tout le personnel qui travaille dans la grande distribution. Plus de la moitié de ce personnel est à temps partiel subi et a beaucoup de problèmes de pouvoir d'achat. Quand ils font des heures supplémentaires, quand ils vont faire des heures supplémentaires, souvent, cela n'atteindra pas les 35 heures, donc ils n'auront pas tous les bénéfices que vous voulez accorder aux heures supplémentaires. Il y a une injustice. Est-ce que vous faites pression sur les distributeurs pour qu'ils paient un petit peu mieux les caissières, les manutentionnaires ? Je rappelle que les patrons de ces entreprises sont les plus grandes fortunes de France.
R.- D'abord, il y a un dispositif dans la loi sur le travail, emploi, pouvoir d'achat votée cet été, sur les heures supplémentaires, qui s'appelle "les heures complémentaires", qui prévoit le temps partiel. Deuxièmement, pour ces salariés, un certain nombre de dispositions du projet de loi en cours au Parlement s'appliquent, je pense aux questions de la monétisation des RTT, ou encore au déblocage de la participation. Et puis, dernier élément, vous savez que le Gouvernement a souhaité que les négociations sur les salaires s'engagent dans les branches et en contrepartie, il va mettre sur la table la conditionnalité des aides, c'est-à-dire les exonérations de charges. Ne plus accorder systématiquement des exonérations de charges, mais les accorder en contrepartie d'engagements de négociations salariales. Donc c'est ce que le Gouvernement souhaite faire dans la grande distribution comme ailleurs.
Q.- Merci L. Chatel. Vous ne partez pas en vacances de la semaine ?
R.- Eh bien non, je ne pars pas en vacances parce que le secrétaire d'Etat au Tourisme doit être sur le pont.
Q.- Et donc le 31, vous serez à l'Elysée pour les voeux du Président...
R.- Je devrai passer un moment avec le Président.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 24 décembre 2007