Déclaration de M. Christian Estrosi, secrétaire d'Etat chargé de l'outre-mer, sur la préservation de la biodiversité dans l'outre-mer, la protection des aires marines et sur le rayonnement international de la France en matière de protection de l'environnement, Paris le 5 février 2008.

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Circonstance : Rencontres "Environnement Outre-mer - vers un outre-mer exemplaire" à Paris le 5 février 2008-discours de clôture

Texte intégral

Monsieur le Président
Monsieur le Directeur
Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,

Je souhaite commencer par vous remercier tous, vous qui avez animé ces débats et qui avez fait de cette journée une occasion unique de réflexion sur ce thème de l'environnement, et de la place qu'il occupe en Outre-mer.
Revenir sur les débats de cette journée, et vouloir les synthétiser dès cet instant est un exercice très complexe, tant les échanges ont été riches et précis. Il nous faudra quelques jours pour apprécier l'ensemble de vos contributions. Aussi, je préfère retenir quatre idées forces, qui sont autant de challenges que nous devons relever pour notre Outre-mer.

  • Premier challenge : AGIR.

L'immobilisme nous conduit irrémédiablement à notre perte. Il n'est donc plus temps de se poser des questions existentielles. Il faut commencer dès maintenant à s'inscrire dans l'action. Mais encore faut il que les choix de développement durable qui attendent notre pays soient positifs.
Ce n'est pas pour nous que nous allons travailler. C'est pour nos enfants et nos petits enfants. C'est au monde de demain où ils vivront, que nous devons nous projeter, et jeter les bases de cette construction nouvelle .
Une chose est certaine : RIEN NE SERA PLUS COMME AVANT. En plaçant au coeur de ses priorités la protection de l'environnement, et en initiant l'idée du Grenelle de l'environnement, le Président de la République, Nicolas SARKOZY a ouvert la voie de la prise de conscience collective. Son message est simple mais lourd de responsabilité collective et individuelle : Chaque geste en faveur de l'environnement compte.
Nous l'avons bien vu tout au long de cette journée. Nous avons tous des idées. Nous avons tous la volonté d'avancer. Et bien, avançons ensemble !
Mettons toute notre énergie, toutes nos forces à préserver la biodiversité. Car c'est en Outre-mer que vivent plus de la moitié des cétacés et pinnipèdes existants, 98 % des vertébrés, et 96 % des plantes vasculaires pour ne citer que ces exemples.
Mettons toute notre énergie et toutes nos forces à corriger nos comportements pour être plus respectueux de notre environnement. Apprenons et servons nous de ces petits gestes au quotidien qui, additionnés les uns aux autres, permettent d'éviter de nouvelles dégradations, et de restaurer nos dégâts passés.
Agir c'est d'abord un cadre. Celui du plan « vers un Outre-mer exemplaire » le fixe et en précise les objectifs. Vos contributions de ce jour enrichiront nos modes d'action pour cette mise en oeuvre.
Agir ce sont aussi des moyens. La future loi programme pour l'Outre-mer prévoit des mesures d'incitation fortes notamment sur le développement des énergies renouvelables.
A ce titre, je note avec satisfaction que les 4 départements d'Outre-mer ont retenu ce secteur de l'énergie pour l'application de taux majorés dans le cadre des nouvelles zones franches globales d'activité.
Produire en Outre-mer c'est possible. Ainsi, une entreprise ultramarine a décidé d'étendre son activité de production de chauffe eau solaire pour le marché de l'exportation. Voici des exemples à suivre et que les dispositions de la loi de programmation visent à faire émerger en plus grand nombre.
Il faut donc mobiliser toutes les compétences en matière de recherche, de développement industriel pour que l'Outre-mer soit le lieu privilégié sur cette thématique. Il y va d'un nouvel axe de développement économique pour nos territoires ultramarins.
C'est pour cela que les pôles de compétitivité ont été créés. La Réunion a ouvert la voie avec QUALITROPIC. En Guyane, avec Santé Tropicale, en Guadeloupe avec SYNERGILE, ce nouveau dialogue centres de recherche, universités, entreprises a su se nouer. Je souhaite que l'Outre-mer soit présent plus activement dans le futur dispositif pôle qui sera défini cette année. Comme est en train de la faire la Martinique, j'invite les régions, les départements, les collectivités, à lancer dès à présent les bases des futurs pôles de compétitivité de demain. Car c'est en partie par ces pôles que se dressera l'avenir économique de nos territoires.
Il faut repenser nos modes de consommation. Ainsi, réaliser des économies d'énergie est tout aussi important que développer les énergies durables. C'est la construction de logements qu'il faut repenser, c'est un autre urbanisme à concevoir. Les architectes, les urbanistes ont leur rôle à jouer, et les élus locaux ont une responsabilité sur l'élaboration des futurs documents d'urbanisme ou sur la délivrance des permis de construire.

  • Second challenge : CONCILIER

Dès maintenant, nous devons savoir concilier croissance économique et préservation de l'environnement. Certes, c'est un exercice parfois difficile mais le développement durable est à ce prix.
Oui, la préservation de l'environnement est désormais une priorité, parce que les interactions entre la santé des populations et leur environnement sont de plus en plus préoccupantes ; parce que la biodiversité est une richesse qui n'est renouvelable que sur le très long terme, et dont déjà on déplore l'extinction de multiples espèces floristique ou faunistiques.
Le Grenelle de l'environnement n'est pas qu'un exercice de style. La récente décision prise de ne pas donner suite à un projet minier aurifère pour des motifs écologiques témoigne de ce changement de priorité.
Concilier c'est avant tout appréhender l'ensemble des enjeux en présence. Et là aussi, l'Outre-mer peut être exemplaire. Sur les risques naturels par exemple, la Martinique a été le premier département français à rendre applicable, sur l'ensemble de ses communes, des plans de prévention. Mayotte entre dans ce processus d'élaboration de plans particuliers des risques et 3 communes vont s'engager dans cette voie.
Là encore, la technologie peut aider à la compréhension de phénomènes naturels, pour mieux s'y préparer, alerter, et développer une politique de prévention d'occupation des espaces ou de construction.
Concilier c'est un engagement de tous pour remettre l'homme et l'environnement au coeur des enjeux. Ainsi, en présentant son plan ambitieux « La Réunion 2030 », cette région propose un véritable projet de société. Ce n'est pas seulement le recours à 100 % d'énergies renouvelables dont il s'agit. C'est un véritable plan de développement durable.
Avec ce plan, La Réunion devient exemplaire. C'est toute la capacité à rebondir d'une région ultramarine dont il est question. C'est cela la vraie richesse de l'Outre-mer en laquelle je crois.

  • Troisième challenge : CONVAINCRE

L'Outre-mer français, c'est la France des trois océans : Indien, Pacifique, Atlantique. Il représente 97 % de la superficie des 11 millions de Km2 des eaux maritimes françaises.
L'Outre-mer français, c'est aussi, du fait que ses territoires sont situés dans les deux hémisphères et en zone tropicale, la première richesse de biodiversité française terrestre ou marine. 60 % de toutes les espèces de baleine, cachalot, dauphin, phoque ou otarie sont présentes et vivent sous notre protection.
Ces mammifères marins sont parmi les espèces les plus vulnérables, trois d'entre eux figurant aujourd'hui sur la liste des 10 animaux en voie de disparition. Maints accords internationaux existent pour protéger ces mammifères et s'intègrent dans le cadre de la protection internationale de la biodiversité.
Enfin, l'Outre-mer français, c'est la totalité des 55 000 Km2 des coraux français, qui représentent 10 % des récifs du monde.
En tant que secrétaire d'Etat chargé de l'Outre-mer, je suis le responsable et le dépositaire temporaire de ce patrimoine dont je dois, au nom de mes compatriotes, veiller à la préservation.
Mais, la protection de notre environnement ne peut être l'affaire que de quelques Etats car c'est de l'avenir de notre planète et des futures générations dont il s'agit.
Il nous faut donc convaincre que la voie nouvelle que nous suivons, doit être adoptée par le plus grand nombre.
La France, leader historique de l'océanographie, avec IFREMER ou l'IRD, doit proposer, initier et appliquer une approche pragmatique, mais surtout opérationnelle pour donner l'exemple et prendre la tête du sauvetage des océans.
Pour convaincre, la France doit pour cela s'appliquer à elle même ce qu'elle sollicite des autres.
C'est tout l'enjeu de la protection des aires marines. A La Réunion, en Guadeloupe, en Polynésie française, en Nouvelle Calédonie, et bientôt à Mayotte, la création d'aires marines protégées ou de parc naturel marin sont abouties ou lancées. Je sais que ces périmètres de protection posent de multiples interrogations de la part des utilisateurs de la mer qui craignent pour le maintien de leur activité. Mais quelle autre réponse à donner que celle du parc marin d'Iroise dont les pêcheurs eux même sont les plus ardents défenseurs.
Le 24 janvier dernier, je me suis rendu à Washington pour le lancement de l'année internationale des récifs coralliens J'ai également plaidé pour l'inscription de la barrière de corail de Nouvelle Calédonie au patrimoine mondial de l'UNESCO.
Sur près de 1 600 kilomètres de longueur, cette barrière est reconnue par la communauté internationale comme un « hot spot » de la biodiversité mondiale. Cet écosystème présente l'un des plus variés et des plus vastes ensemble récifaux du monde. La France a donc agi pour protéger cet espace.
Aussi, l'inscription de ces récifs, revêt une importance toute particulière au regard des efforts consentis localement pour parvenir à ce résultat.
Elle constituerait également une marque d'encouragement pour l'ensemble des Etats qui s'investissent dans la protection des récifs.
Et enfin, et pour le ministre français de l'Outre-mer que je suis, ce serait une immense joie car ce serait le premier site ultramarin à bénéficier d'une telle inscription.
C'est par ce type d'actions que nous arriverons à convaincre les Etats de nous suivre.

  • Quatrième challenge : RAYONNER

Nos efforts en matière de protection de l'environnement doivent permettre à la France, et à son Outre-mer, de renforcer sa position dans le concert international.
Ce rayonnement sera jugé à l'aune de notre capacité interne à faire bouger les choses.
Déjà, dans le Pacifique Sud, la coopération avec l'Australie, notamment pour la surveillance des zones de pêche de nos terres australes et antarctiques françaises donnent d'excellents résultats. Il faut aller plus loin et je compte proposer l'instauration d'une zone étendue de protection des mammifères marins dans cette zone.
Lors de mon déplacement à Washington, j'avais évoqué avec le département d'Etat américain, l'intérêt d'une initiative en faveur de la lutte contre le trafic de la faune et de la flore sauvage. Cette proposition vient de retenir toute l'attention des autorités américaines.
Au second semestre 2008, nous assumerons la présidence de l'Union européenne. Ce sera un moment important pour faire valoir et partager notre vision nouvelle de l'environnement.
Rayonner, ce sera aussi, pour les entreprises ultramarines ayant acquis un savoir faire dans des domaines nouveaux ouverts par la protection de l'environnement, la conquête de marchés économiques.
L'Outre-mer exemplaire en matière d'environnement peut, grâce à votre contribution à tous, devenir une réalité. Je vous remercie sincèrement d'avoir participé aujourd'hui et de m'apporter demain, votre contribution active.

Source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 13 février 2008