Texte intégral
L'émergence d'une nouvelle société de l'information doit inciter l'Etat à se remettre en question
Que pensez-vous qu'internet puisse apporter au fonctionnement de la démocratie ?
L'internet est en train de réaliser une véritable révolution culturelle puisqu'il facilite les échanges, multiplie les informations, et encourage le débat.
Ce nouveau média est en train de bousculer toutes nos habitudes de pensée et d'organisation, politiques et administratives, qui reposaient sur un certain cloisonnement de l'information et une hiérarchie fonctionnelle.
En tant que Président du Sénat je reçois chaque jour une multitude de questions électroniques venant de toute la France et du monde entier. L'instantanéité des échanges, la richesse des informations, la compatibilité internationale des systèmes, le coût quasi nul des transactions nous donnent accès à un monde global.
La révolution numérique est en cours et doit permettre à notre démocratie de se renouveler et de se moderniser. L'exigence de transparence s'est faite beaucoup plus forte. Grâce à la messagerie électronique chaque citoyen a désormais accès directement et instantanément aux élus et aux administrations. L'internet est donc un instrument de contrôle démocratique de l'action des pouvoirs publics.
Toutes ces potentialités d'internet nous imposent un devoir : éviter l'instauration d'une fracture numérique au sein des sociétés développées et entre le Nord et le Sud.
Faut-il légiférer pour en organiser l'usage dans le domaine politique ?
Le monde politique doit inévitablement s'adapter à cette révolution technologique. Il est tout d'abord nécessaire que le Parlement élabore une législation adaptée à une société décloisonnée et à un monde plus ouvert.
Il faut offrir de nouveaux cadres législatifs indispensables au bon fonctionnement de l'ensemble. L'internet libère en effet les initiatives : la nouvelle économie a déjà pris son envol, les investissements financiers peuvent se faire en ligne, de même pour le commerce ou tout simplement l'activité salariée. L'exploitation de l'internet à tous les niveaux est en pleine croissance, la révolution numérique se répand dans tous les métiers. Le monde politique doit non seulement s'adapter à cette évolution irrésistible mais anticiper les problématiques liées notamment à la vérité et à la sécurité des informations, à la confidentialité de données stratégiques, à la protection des signatures électroniques.
Dans le domaine politique, l'usage de ces nouvelles technologies doit bien évidemment se développer : on ne peut pas être à la traîne, on doit même montrer l'exemple.
Le Sénat a toujours été à la pointe de ces nouvelles technologies avec, en 1995, la mise en ligne du site " senat.fr ", qui aujourd'hui compte 35 000 pages. Nous avons également très rapidement considéré l'internet comme un vecteur de décentralisation et d'un nouvel équilibre de nos territoires : notre site " carrefour des collectivités locales " a été créé pour fédérer ces énergies et répondre aux besoins des élus locaux. Nous avons également mis en place " senat-entreprises " qui regroupe nos principales initiatives en direction du monde économique.
En outre, le Sénat a été la première institution à dédier un site francophone au jeune citoyen, " junior.senat.fr ".
De même, l'émergence d'une nouvelle société de l'information doit inciter l'Etat à se remettre en question : il est essentiel que l'administration de l'Etat accomplisse enfin sa propre réforme. La durée de certains actes administratifs peut être sensiblement réduite, de nombreuses procédures peuvent être allégées, certaines formalités dématérialisées.
La vitesse de réaction des services publics doit davantage être en phase avec les citoyens.
C'est aux responsables politiques d'initier cette grande réforme de l'Etat et de faire en sorte que l'internet soit au service du citoyen, pour plus de service au public et plus de démocratie pour tous.
Etes-vous favorable au vote en ligne ?
Tout dépend ce que l'on entend par vote en ligne. S'il s'agit simplement de permettre aux citoyens de voter aux élections générales, par le truchement de l'internet, j'y suis favorable. A condition bien sûr que l'on maintienne également l'isoloir pour tous ceux qui n'ont pas encore accès à l'internet et que les procédures soient totalement sécurisées pour ceux qui souhaitent voter par internet.
S'il s'agit de voter en ligne sur chaque projet de loi, voire sur chaque article de loi, alors nous changerions de système démocratique. Ce serait le passage d'une démocratie représentative à une démocratie directe absolue.
Je n'y suis pas favorable, car la démocratie représentative est un rempart contre les dérives extrémistes et le meilleur gardien des libertés individuelles.
En revanche, il est souhaitable de créer de plus en plus d'espace d'échanges et de réflexions entre le citoyen et le politique. J'ai souhaité pour ma part au sein de l'Assemblée que je préside créer un club en ligne, le " club.senat.fr " qui se veut un véritable laboratoire d'idées, au sein duquel sont conviés à réfléchir ensemble des acteurs, des penseurs et des régulateurs de la nouvelle économie.
Le cybercitoyen : utopie ou vérité de demain ?
Face à la masse des données accessibles sur les réseaux et face aux immenses potentialités de l'internet, l'homme doit rester maître du jeu. Une cyberdémocratie ne peut se substituer à la démocratie car elle impliquerait une société virtuelle basée sur les capacités technologiques plutôt que sur les besoins du citoyen. Il s'agit à mon sens d'une société utopique vers laquelle nous n'irons pas. La vérité est certainement entre les deux.
L'internet est en revanche un formidable vecteur de la démocratie partout dans le monde. La masse et la diversité des informations qu'il véhicule, la possibilité de participation qu'il offre à chacun constituent autant d'expressions de la liberté démocratique.
Je constate pour m'en réjouir que le décloisonnement de notre société est en train d'inscrire nos concitoyens dans une logique de réseaux interactifs où l'information est accessible à tous, où chacun peut intervenir à tout moment. Chaque français a sa place dans la société de l'information et doit pouvoir en tirer parti pour se réaliser.
La facilité et l'instantanéité de l'interaction entre ce qui se fait à la base et ce qui se décide au sommet sont amenées à changer inévitablement la nature de la relation entre le citoyen et l'autorité politique. C'est en ce sens que l'on peut en effet considérer la naissance d'une nouvelle forme de citoyenneté , plus ouverte, plus dynamique et participative : une cybercitoyenneté.
(Source http://www.senat.fr, le 11 avril 2001)
Que pensez-vous qu'internet puisse apporter au fonctionnement de la démocratie ?
L'internet est en train de réaliser une véritable révolution culturelle puisqu'il facilite les échanges, multiplie les informations, et encourage le débat.
Ce nouveau média est en train de bousculer toutes nos habitudes de pensée et d'organisation, politiques et administratives, qui reposaient sur un certain cloisonnement de l'information et une hiérarchie fonctionnelle.
En tant que Président du Sénat je reçois chaque jour une multitude de questions électroniques venant de toute la France et du monde entier. L'instantanéité des échanges, la richesse des informations, la compatibilité internationale des systèmes, le coût quasi nul des transactions nous donnent accès à un monde global.
La révolution numérique est en cours et doit permettre à notre démocratie de se renouveler et de se moderniser. L'exigence de transparence s'est faite beaucoup plus forte. Grâce à la messagerie électronique chaque citoyen a désormais accès directement et instantanément aux élus et aux administrations. L'internet est donc un instrument de contrôle démocratique de l'action des pouvoirs publics.
Toutes ces potentialités d'internet nous imposent un devoir : éviter l'instauration d'une fracture numérique au sein des sociétés développées et entre le Nord et le Sud.
Faut-il légiférer pour en organiser l'usage dans le domaine politique ?
Le monde politique doit inévitablement s'adapter à cette révolution technologique. Il est tout d'abord nécessaire que le Parlement élabore une législation adaptée à une société décloisonnée et à un monde plus ouvert.
Il faut offrir de nouveaux cadres législatifs indispensables au bon fonctionnement de l'ensemble. L'internet libère en effet les initiatives : la nouvelle économie a déjà pris son envol, les investissements financiers peuvent se faire en ligne, de même pour le commerce ou tout simplement l'activité salariée. L'exploitation de l'internet à tous les niveaux est en pleine croissance, la révolution numérique se répand dans tous les métiers. Le monde politique doit non seulement s'adapter à cette évolution irrésistible mais anticiper les problématiques liées notamment à la vérité et à la sécurité des informations, à la confidentialité de données stratégiques, à la protection des signatures électroniques.
Dans le domaine politique, l'usage de ces nouvelles technologies doit bien évidemment se développer : on ne peut pas être à la traîne, on doit même montrer l'exemple.
Le Sénat a toujours été à la pointe de ces nouvelles technologies avec, en 1995, la mise en ligne du site " senat.fr ", qui aujourd'hui compte 35 000 pages. Nous avons également très rapidement considéré l'internet comme un vecteur de décentralisation et d'un nouvel équilibre de nos territoires : notre site " carrefour des collectivités locales " a été créé pour fédérer ces énergies et répondre aux besoins des élus locaux. Nous avons également mis en place " senat-entreprises " qui regroupe nos principales initiatives en direction du monde économique.
En outre, le Sénat a été la première institution à dédier un site francophone au jeune citoyen, " junior.senat.fr ".
De même, l'émergence d'une nouvelle société de l'information doit inciter l'Etat à se remettre en question : il est essentiel que l'administration de l'Etat accomplisse enfin sa propre réforme. La durée de certains actes administratifs peut être sensiblement réduite, de nombreuses procédures peuvent être allégées, certaines formalités dématérialisées.
La vitesse de réaction des services publics doit davantage être en phase avec les citoyens.
C'est aux responsables politiques d'initier cette grande réforme de l'Etat et de faire en sorte que l'internet soit au service du citoyen, pour plus de service au public et plus de démocratie pour tous.
Etes-vous favorable au vote en ligne ?
Tout dépend ce que l'on entend par vote en ligne. S'il s'agit simplement de permettre aux citoyens de voter aux élections générales, par le truchement de l'internet, j'y suis favorable. A condition bien sûr que l'on maintienne également l'isoloir pour tous ceux qui n'ont pas encore accès à l'internet et que les procédures soient totalement sécurisées pour ceux qui souhaitent voter par internet.
S'il s'agit de voter en ligne sur chaque projet de loi, voire sur chaque article de loi, alors nous changerions de système démocratique. Ce serait le passage d'une démocratie représentative à une démocratie directe absolue.
Je n'y suis pas favorable, car la démocratie représentative est un rempart contre les dérives extrémistes et le meilleur gardien des libertés individuelles.
En revanche, il est souhaitable de créer de plus en plus d'espace d'échanges et de réflexions entre le citoyen et le politique. J'ai souhaité pour ma part au sein de l'Assemblée que je préside créer un club en ligne, le " club.senat.fr " qui se veut un véritable laboratoire d'idées, au sein duquel sont conviés à réfléchir ensemble des acteurs, des penseurs et des régulateurs de la nouvelle économie.
Le cybercitoyen : utopie ou vérité de demain ?
Face à la masse des données accessibles sur les réseaux et face aux immenses potentialités de l'internet, l'homme doit rester maître du jeu. Une cyberdémocratie ne peut se substituer à la démocratie car elle impliquerait une société virtuelle basée sur les capacités technologiques plutôt que sur les besoins du citoyen. Il s'agit à mon sens d'une société utopique vers laquelle nous n'irons pas. La vérité est certainement entre les deux.
L'internet est en revanche un formidable vecteur de la démocratie partout dans le monde. La masse et la diversité des informations qu'il véhicule, la possibilité de participation qu'il offre à chacun constituent autant d'expressions de la liberté démocratique.
Je constate pour m'en réjouir que le décloisonnement de notre société est en train d'inscrire nos concitoyens dans une logique de réseaux interactifs où l'information est accessible à tous, où chacun peut intervenir à tout moment. Chaque français a sa place dans la société de l'information et doit pouvoir en tirer parti pour se réaliser.
La facilité et l'instantanéité de l'interaction entre ce qui se fait à la base et ce qui se décide au sommet sont amenées à changer inévitablement la nature de la relation entre le citoyen et l'autorité politique. C'est en ce sens que l'on peut en effet considérer la naissance d'une nouvelle forme de citoyenneté , plus ouverte, plus dynamique et participative : une cybercitoyenneté.
(Source http://www.senat.fr, le 11 avril 2001)