Interview de M. Frédéric Lefebvre, porte-parole de l'UMP, à France Info le 8 septembre 2009, sur les modalités de la contribution climat-énergie ou "taxe carbone" et concernant la grippe A, les mesures d'organisation du travail face à une extension de la pandémie.

Prononcé le

Média : France Info

Texte intégral

R. Duchemin.- Bonjour F. Lefebvre.

Bonjour R. Duchemin.

Merci d'être avec nous. Vous êtes donc rétabli aujourd'hui ? Première question. Est-ce que ça va mieux, ce claquage ?

Pas encore, ça prend du temps, vous savez, un claquage. Les Français qui en ont eu le savent.

C'est la raison pour laquelle vous êtes ailleurs que dans le studio de France Info ce matin. Alors dites-moi, on dirait en ce moment que les problèmes d'arbitrage empoisonnent un petit peu la majorité : le forfait hospitalier ce week-end, la taxe carbone. D'où vient ce besoin de toujours lancer, finalement, des ballons d'essai ?

Vous savez, ce ne sont pas des ballons d'essai. C'est assez classique. Au mois de septembre - vous reprenez les Unes des radios, et de France Info et vous verrez qu'- il y a toujours des problèmes d'arbitrages, puisque c'est le moment où un Gouvernement arbitre avant la présentation au Parlement de la loi de Finance et la loi de Financement de la Sécurité sociale.

Mais on arbitre justement en « prenant la température de l'opinion », en lançant comme ça des choses pour voir si ça marche ou si ça rebondit ?

Regardez, prenons par exemple la contribution climat-énergie, ce n'est pas un ballon d'essai. D'abord c'est une contribution qui est décidée, qui a été décidée au Grenelle de l'environnement, c'était même un engagement du président de la République devant les Français. J'ajoute que ce n'était pas qu'un engagement de N. Sarkozy puisque madame Royal, qui est contre aujourd'hui, s'y était elle aussi engagée en signant la charte de monsieur Hulot. Donc s'il y a bien un sujet qui a été débattu dans le pays, c'est celui-là. Alors il s'agit maintenant d'en définir les modalités, parce que le Gouvernement a décidé que cette contribution climat-énergie elle se ferait à prélèvement constant, ça veut dire qu'il n'y aurait pas un centime dans les caisses de l'Etat, mais qu'il y aurait redistribution aux Français. Il faut donc définir les modalités.

Précisément, c'est là qu'on attend les arbitrages, notamment de N. Sarkozy, ça va se passer jeudi...

Exactement.

Il y a une réunion qui est prévue demain. Est-ce que le Gouvernement est prêt aujourd'hui, et la majorité aussi, à faire en sorte que cette taxe ne soit pas vécue comme un impôt de plus par les Français ?

Ce ne sera pas un impôt de plus. Ce n'est absolument pas une augmentation d'impôt, c'est une réorganisation de l'impôt. Et vous dites que l'arbitrage...

Mais vous avez beau le dire, visiblement les Français ne l'entendent pas de cette oreille-là puisque plus de 66 % disent aujourd'hui "attention, la taxe carbone c'est une taxe en plus".

Ça ne m'étonne pas.

Ça ne vous étonne pas ?

R. Duchemin, ça ne m'étonne pas, puisque tout le monde passe son temps à leur répéter que c'est une taxe en plus. Vous savez, les Français ils écoutent la radio, ils écoutent quand M. Aubry, madame Royal ou d'autres, expliquent que c'est un impôt de plus, eh bien ils écoutent. Et donc ça va être la preuve par les faits. Et N. Sarkozy a l'habitude de faire ce qu'il dit, les Français le savent, et sur cette contribution, il y a un engagement qui est pris, c'est que ce serait à prélèvement constant, vous verrez, ce sera à prélèvement constant. Le vrai sujet, vous savez, j'irai moi, à la fin du mois de septembre, en Suède et au Danemark, pour voir comment ces deux pays, qui ont appliqué la contribution climat-énergie, l'ont fait pour qu'il n'y ait pas de conséquence, ni sur le pouvoir d'achat, ni sur la consommation, et pour qu'il y ait une redistribution. Voilà. Je crois que, à notre pays de montrer la voie, au côté de ces autres pays, parce que ce qu'on joue c'est l'avenir de la planète, c'est l'avenir de nos enfants. Il faut que dans ce pays, où on a l'habitude que la fiscalité pèse sur le travail, il faut qu'on s'habitue à ce qu'il y ait une fiscalité qui pèse sur la pollution.

F. Lefebvre, tout le monde a l'air de vouloir, en ce moment, jouer la partition de l'ouverture, quand la gauche regarde au centre et vice et versa, vous, vous avez l'air de vouloir maintenant, à l'UMP, faire les yeux doux aux écolos. Est-ce qu'on va finir par s'y retrouver ?

Vous savez, il ne s'agit pas de faire les yeux doux. Je disais tout à l'heure, quand N. Sarkozy, avant la présidentielle, a signé la charte de N. Hulot, qu'il a déclenché...

Il n'est pas le seul à l'avoir signée !

Il n'est pas le seul, je le rappelais tout à l'heure, malheureusement il est le seul à respecter ses engagements, c'est une grande différence avec les autres.

Il est Président.

Oui, il est Président, mais ça n'empêche pas, quand on est dans l'opposition, que quand on s'est engagé à quelque chose, au moins dans la parole, on le respecte. Il a enclenché ensuite le Grenelle de l'environnement, il a mis autour de la table tous les acteurs de l'environnement, les associations, les hommes et les femmes politiques, et il est bien décidé - il a porté d'ailleurs ce message au niveau international - il est bien décidé à ce que la France soit moteur sur cette question. Ça fait évidemment des points communs avec les écologistes. Et on a vu d'ailleurs aux dernières élections européennes que beaucoup de nos électeurs avaient voté écologiste. Les sondages le montraient. Ça veut dire simplement qu'il y a une préoccupation forte des Français sur l'avenir de la planète, sur l'avenir et le bien-être de leurs enfants, et cette préoccupation c'est une des préoccupations majeures du Gouvernement. On a un grand emprunt qui est lancé, il va falloir notamment qu'on définisse un certain nombre d'investissements pour l'avenir, et je pense qu'un investissement très lourd dans la voiture électrique, par exemple, pour qu'enfin notre pays soit moteur sur cette question, serait une bonne chose. C'est un exemple.

F. Lefebvre, la grippe A est en train de gagner du terrain en France, il y a un appel qui est lancé ce matin dans Libération, les syndicats, notamment, aimeraient bien être associés à une réflexion plus générale. Alors c'est vrai que ça va poser pas mal de problèmes au niveau de l'organisation du travail, est-ce qu'on va télé-travailler davantage ?

Eh bien, voilà. Vous vous souvenez de ma proposition qui avait fait tant de bruit ?

Oui, vous la mettez en pratique en ce moment d'ailleurs.

Je la mets en pratique moi-même ; tout le monde l'était tombé dessus à bras raccourcis, et vous allez voir que le télétravail va être une des solutions pour que notre économie fonctionne, si par malheur la pandémie que nous redoutons a lieu.

Mais comment on va faire, par exemple, pour payer les heures supplémentaires aux salariés ? Est-ce que tout ça c'est tranché, est-ce que tout ça c'est géré ?

De toute façon les heures supplémentaires seront payées, mais il va falloir que dans les entreprises, il va falloir que dans les associations, il va falloir que dans les écoles, il va falloir que - et je voyais que ça faisait polémique - qu'à la justice, dans la police, tout le monde s'organise. S'il y a une pandémie, il va bien falloir que la vie continue. Et donc c'est tout, aujourd'hui, la mobilisation du gouvernement, pour mettre en place, secteur par secteur, un fonctionnement normal de la société. Parce que si on ajoute une crise sanitaire, non maîtrisée, à une crise économique, vous voyez ce que cela peut donner.

D'un mot, F. Lefebvre, votre avenir proche. On vous donnait entrant au Gouvernement, il y a eu le couac sur Internet à Matignon, est-ce que vous voyez l'espoir d'un portefeuille ministériel s'envoler ou juste différé ?

Vous savez, rentrer au Gouvernement, ni ça ne se demande, ni ça ne se refuse. Et pour le moment, j'ai décidé d'utiliser ma liberté que vous connaissez, mon authenticité et le temps qui m'est offert, pour essayer d'apporter ma contribution à ce monde moderne que je souhaite. Alors je vais... je prépare un livre, avec un certain nombre de propositions, il y a beaucoup de tabous dans notre pays, et je pense qu'il faut qu'on réfléchisse et qu'on propose des choses fortes. J'irai, d'ailleurs, à plusieurs reprises durant les prochains mois, à l'étranger pour confronter mes idées à la réalité, à la réalité qui s'applique parfois dans des pays qui sont voisins, et qu'on ne sait pas regarder. Vous avez compris, en réalité je souhaite contribuer et apporter, à ma famille politique et à mon pays, pendant toutes ces semaines.

Merci F. Lefebvre d'avoir été en direct ce matin sur France Info.

Merci à vous.

Source : Premier ministre, Service d'Information du Gourvernement, le 8 septembre 2009