Conférence de presse de M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement, sur le bilan de l'application de la loi de 1986 sur la protection du littoral, Paris le 24 février 1999.

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Texte intégral

Mesdames, Messieurs,
La France possède un littoral important, 5500 km de côtes en métropole et plus de 1500 km pour loutre-mer, sans compter les rives des grands lacs. 10 % de la population nationale y vit, sur 4 % du territoire.
Alors que lurbanisation en continue de la côte menaçait les espaces naturels, la loi du 3 janvier 1986 « relative à laménagement, la protection et la mise en valeur du littoral », est venue poser les principes de la nécessaire conciliation du développement des activités économiques, agricoles et touristiques qui en font la richesse, avec la protection dun patrimoine naturel souvent exceptionnel mais fragile et menacé. La loi sinscrivait déjà dans une perspective de « développement durable », bien que lexpression nexistât pas à lépoque.
La loi prévoyait un rapport annuel au Parlement, qui na jamais été établi par le passé. Le comité interministériel de la mer du 1er avril 1998 a décidé quil serait réalisé et déposé sur le bureau des assemblées, ce que vient de faire le Premier ministre. Mais ce bilan na dintérêt que sil permet dorienter lavenir. Cest précisément lobjet de la communication que jai faite ce matin au Conseil des ministres, proposant un certain nombre dorientations de la politique du littoral.
Avant de répondre à vos questions, je rappellerai rapidement les grandes orientations de la loi, le bilan qui en est fait et les suites qui seront mises en oeuvre.
Une partie importante de la loi traite de lurbanisme. Elle a dailleurs fait lobjet de débats soutenus et même dun contentieux abondant.
Lobjectif de la loi est de privilégier avant tout une gestion économe de lespace littoral.
Les dispositions de la loi fixent les principes applicables à lextension de lurbanisation, comme la priorité donnée à la continuité avec lexistant, la nécessité de limiter les extensions proches du rivage ou le recul des routes de transit. Elles assurent la préservation des espaces les plus stratégiques : la bande des 100 m le long du rivage, les coupures durbanisation, les espaces remarquables ou caractéristiques du littoral, les espaces boisés.
Lapplication de ces dispositions na pas été sans poser des difficultés mais a été confortée par la jurisprudence. Aujourdhui, les effets sont visibles : les équipements qui nexigent pas la proximité immédiate de leau sont conçus plus à lintérieur, linconstructibilité de la bande des 100 m est bien intégrée dans les esprits, et les principaux espaces naturels sont effectivement préservés.
Laction sera poursuivie pour conforter lapplication des dispositions durbanisme de la loi littoral, dont les principes ne sont aucunement remis en cause.
Offrir une lecture cohérente et stable des règles durbanisme et donc une sécurité accrue pour les projets locaux constitue le fil conducteur de cette action : la poursuite de lélaboration des « directives territoriales daménagement » (DTA), dont cinq sur les sept lancées concernent des zones où sapplique la loi « littoral », apportera cette cohérence et permettra de préciser les modalités dapplication de la loi en fonction des particularités locales.
Les préfets seront invités à agir en liaison avec les communes concernées afin que les procédures nécessaires puissent être menées dans des délais rapprochés pour rendre compatibles les POS qui ne le sont pas encore. Pour aider les élus, sont prévus des outils dassistance comme la diffusion de guides de jurisprudence appliquées.
Enfin la protection du littoral suppose le respect des règles, par une politique rigoureuse de poursuite des infractions et de mise en oeuvre des décisions de justice, au besoin par recours à la démolition.
Une deuxième série de dispositions de la loi traitent des activités exercées sur le littoral et des précautions dont elles doivent faire lobjet : la plaisance, le tourisme ou les extractions de matériaux se voient encadrés par la loi pour mieux respecter les équilibres littoraux. Un volet particulier est consacré aux effets sur les eaux littorales : la loi introduit des dispositions destinées à en améliorer la qualité, tant en ce qui concerne la baignade que lexploitation des ressources biologiques, en prévoyant des normes de qualité, des obligations dassainissement ou des sanctions renforcées en cas dinfraction.
Limpact de la loi sur les activités économiques est le plus difficile à mesurer : le tourisme, principale activité sur le littoral en terme de chiffre daffaire et demploi, a continué à se développer, sans doute de façon moins désordonnée, lencadrement de la loi ayant évité que ne se détériore lattractivité du littoral.
Pour lavenir, les principes posés par la loi « littoral » doivent rester les fondements de laction publique. Le développement maîtrisé des activités, notamment celles qui bénéficient de la proximité de la mer comme les activités portuaires, la pêche et les cultures marines, le tourisme, doit intégrer les préoccupations liées au respect des équilibres physiques, biologiques et écologiques, à la préservation des sites et paysages. Une telle perspective implique la coordination de nombreux acteurs.
A cet égard, les démarches de planification territoriale continueront à être encouragées, notamment les schémas de mise en valeur de la mer dont la procédure délaboration sera réformée afin de la simplifier et de mieux organiser lassociation des collectivités territoriales.
Les contrats Etat-Régions contribueront à la mise en oeuvre de cette politique concertée du littoral, en comprenant des volets consacrés au tourisme, au développement économique, notamment portuaire, ainsi quà la protection du littoral, y compris à la lutte contre lérosion marine. Les contrats dagglomération et de pays, associant si possible les collectivités de larrière-pays aux communes côtières, devront être loccasion dune approche intercommunale des actions à engager sur le littoral.
Enfin, afin de favoriser au niveau national le débat sur la politique du littoral un groupe de travail spécialisé sera crée au sein du Comité national daménagement de développement du territoire.
La gestion du domaine public maritime, et notamment des plages, fait lobjet dans la loi « littoral » de précisions qui nexistaient pas auparavant dans les textes : lobjectif est de clarifier les situations et surtout de garantir un plus large accès du public au rivage.
Le bilan montre que la gestion du domaine public sopère dans une plus grande clarté : les enquêtes publiques, auxquelles sont soumis dorénavant tous changements substantiels dutilisation et les concessions de plage, ont permis un meilleur respect des vocations de ce domaine. Les concessions dendigage au profit dintérêts particuliers, tant critiquées par le passé, ont disparu.
Lobjectif du Gouvernement est de poursuivre cette mise en valeur du littoral respectueuse de lenvironnement.
Les conditions de gestion des plages méritent une modernisation pour tenir compte de lévolution de la demande vers plus de services mais aussi de la nécessité de développer la transparence des attributions des sous-traités. Un cahier des charges rénové sera élaboré à cette fin.
La mise en oeuvre du sentier du littoral sera activement poursuivie et les dispositions réglementaires applicables aux espaces remarquables seront adaptées pour favoriser les équipements légers daccueil du public compatibles avec leur préservation, comme les pistes cyclables.
Pour laccueil des activités nautiques, lutilisation des espaces portuaires existants sera privilégiée et les adaptations seront apportées aux textes relatifs au régime des mouillages collectifs pour mieux répondre à lobjectif de développer une offre complémentaire aux ports de plaisance et de résorber les zones de mouillages sauvages actuelles.
Enfin, laction conduite par le conservatoire du littoral et des rivages lacustres sera largement soutenue, tout particulièrement les démarches contractuelles engagées avec les collectivités concernées, dans le but de concilier au mieux la protection des milieux et leur mise en valeur au bénéfice du développement local.
Vous laurez compris, le bilan de la loi « littoral » a été loccasion de constater que les principes introduits par cette loi sont plus que jamais dactualité.
Cest pourquoi, les orientations ainsi définies sinscrivent, tout en tenant compte des adaptations nécessaires, en totale continuité avec les principes posés par la loi « littoral ». Elles contribueront à conforter lapport du littoral à lactivité économique du pays et à préserver pour les génération futures un patrimoine irremplaçable.