Texte intégral
Mesdames, messieurs,
J'ai présenté hier devant le Conseil des ministres un projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration, et à la nationalité.
Ce projet de loi s'intéresse aux trois étapes du parcours de tout ressortissant étranger souhaitant vivre en France : l'immigration, l'intégration, et l'accès à la nationalité.
Permettez-moi d'insister sur ce point : ces trois étapes sont liées. En France, il ne peut y avoir immigration sans intégration, et sans perspective d'accès à la nationalité. Parce que la France n'est pas une juxtaposition de communautés vivant séparément. Parce que la France, terre d'immigration depuis ses origines, n'est devenue Nation que par de puissants efforts d'intégration et de cohésion. Le lien entre immigration, intégration, et identité nationale, se situe au coeur même de notre creuset républicain.
Oui, la France reste une terre d'accueil de l'immigration. Elle continue à accueillir légalement plus de 170.000 étrangers (hors Union européenne) par an pour de longs séjours (>3mois).
Et oui, la France reste aussi une terre d'intégration et d'accès à la nationalité. Près de 110.000 étrangers accèdent chaque année à la nationalité française, soit 4% de la population étrangère, contre moins de 2% dans les autres grands pays européens.
La France ne peut pas accueillir indistinctement tous ceux qui souhaitent s'y établir, parce qu'elle doit intégrer ceux à qui elle a donné droit de séjour, par la langue, par l'éducation, par l'emploi, par le logement.
La qualité de l'accueil et de l'intégration de l'immigration légale et la fermeté dans la lutte contre l'immigration illégale constituent les deux pans d'une même stratégie.
Tels sont les deux objectifs indissociables de ce projet de loi :
1. Renforcer l'accueil et l'intégration de l'immigration légale ;
2. Accroître la lutte contre l'immigration illégale.
Ce projet de loi repose sur trois bases :
Premièrement, les trois directives européennes, faisant suite au Pacte européen sur l'immigration et l'asile adopté sous présidence française de l'Union européenne, et que la France doit transposer avant la fin de l'année 2010. La construction progressive d'une politique européenne de l'immigration et de l'asile est le complément indispensable du grand espace de libre-circulation issu des accords de Schengen. Ce projet de loi assure la transposition en droit français :
1. de la directive « retour », relative aux procédures applicables au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
2. de la directive « carte bleue européenne », qui établit les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d'un emploi hautement qualifié ;
3. de la directive « sanctions », qui fixe des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l'encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier.
Deuxièmement, le rapport de la Commission présidée par Pierre Mazeaud sur la politique des migrations, qui a présenté le 11 juillet 2008 certaines propositions pour améliorer l'efficacité des procédures d'éloignement des étrangers en situation irrégulière interpellés sur le territoire national, constatant qu'aujourd'hui 75% des mesures d'éloignement ne sont pas exécutées, soit par non délivrance du laissez-passer consulaire dans les délais nécessaires, soit par la conjugaison des interventions du juge de la liberté et de la détention et du juge administratif.
Troisièmement, les conclusions du séminaire gouvernemental sur l'identité nationale, présidé par le Premier ministre le 8 février 2010 , qui a conclu notamment à la nécessité de renforcer les politiques d'intégration des ressortissants étrangers entrant et vivant en France.
Ce projet de loi est équilibré : les mesures relatives à l'accueil et l'intégration sont tout aussi importantes que celles qui concernent la lutte contre l'immigration illégale.
Le projet de loi crée un premier titre de séjour européen, d'une durée de 3 ans renouvelable, pour les salariés qualifiés, de niveau BAC+3, dont les conditions de séjour et de travail seront identiques dans les 27 Etats membres. Il s'agit d'un premier titre de séjour européen, qui s'adressera à un grand nombre de migrants. Je vous rappelle que 25% des étrangers entrés en France en 2009 pour de longs séjours disposaient d'un diplôme de l'enseignement supérieur. Il s'agit d'une étape très importante dans la construction d'une politique européenne de l'immigration.
Le projet de loi comporte une deuxième évolution très importante de la politique française d'immigration, avec la prise en compte des efforts d'intégration pour le renouvellement des titres de séjour, pour la délivrance des cartes de résidents, ainsi que pour l'accès à la nationalité française. Le projet de loi met en place une procédure d'accès accéléré à la nationalité française pour les ressortissants étrangers qui satisfont déjà manifestement la condition d'assimilation posée par le code civil. La durée de présence sur le territoire exigée des candidats à la naturalisation sera réduite à deux ans pour ceux qui ont accompli de tels efforts. Pour le renouvellement des titres de séjour, et pour la délivrance des cartes de résident, l'assiduité aux formations linguistiques et civiques et l'adhésion aux principes et valeurs de la République, devront être pris en compte de manière précise.
Le projet de loi ouvre par ailleurs aux mineurs étrangers isolés la possibilité d'obtenir un titre de séjour à leur majorité, s'ils sont inscrits dans un parcours de formation. Il s'agit là d'une avancée très importante, demandée par les associations de protection de l'enfance. Elle est issue du groupe de travail sur les mineurs étrangers isolés animé par le Ministère au cours de l'année 2009.
Enfin, le projet de loi met en place une charte des droits et devoirs du citoyen, dont la signature sera obligatoire pour les étrangers naturalisés. Cette charte des droits et des devoirs détaillera les engagements réciproques du nouveau Français et de la République. Elle fera l'objet d'une consultation publique dans les prochains mois, à la suite de la première phase du débat sur l'identité nationale. Cette charte des droits et des devoirs du citoyen sera publiée par un décret, après consultation du Conseil d'Etat.
Le deuxième volet du projet de loi est celui de la lutte contre l'immigration irrégulière.
La priorité est tout d'abord de lutter contre ceux qui organisent et exploitent l'immigration clandestine. Face à la situation des étrangers sans titre de séjour employés en France, j'ai pris le 24 novembre dernier une nouvelle circulaire, fondée sur l'article 40 de la loi du 20 novembre 2007, fixant des critères précis de régularisation : 5 années de présence sur le territoire, une année d'ancienneté dans l'entreprise, une promesse d'embauche d'une durée supérieure à un an, dans un métier en tension. Je n'ai aucune intention d'assouplir ces critères. Promettre la régularisation à tout étranger sans titre de séjour exploité par une entreprise française, ce serait encourager les filières clandestines à poursuivre leur triste commerce. La régularisation ne peut être la seule politique publique face à l'immigration clandestine. Il ne faut pas confondre humanité et angélisme. Il n'y a pas de justice sans équilibre entre générosité et fermeté. C'est pourquoi les étrangers sans titre de séjour qui demandent leur régularisation en occupant de manière illégale des locaux publics ou privés continueront à être évacués, comme ils l'ont été ce matin encore à Paris. Et c'est pourquoi aussi les entreprises qui exploitent ces ??trangers sans titre de séjour seront plus durement sanctionnées.
Le projet de loi met en place un nouvel arsenal de sanctions administratives et pénales contre les entreprises qui recourent sciemment, directement ou indirectement, à l'emploi d'étrangers sans titre de séjour. L'autorité administrative pourra, en cas d'emploi d'étrangers en situation irrégulière :
* rendre les employeurs inéligibles aux appels d'offres nationaux et européens, pendant une durée maximale de 6 mois ;
* rendre les employeurs inéligibles aux aides publiques nationales et européennes en matière d'emploi, de formation professionnelle et de culture, pendant une durée maximale de 5 ans ;
* imposer aux employeurs le remboursement des aides publiques reçues l'année précédant l'infraction relevée, en matière d'emploi et de formation professionnelle ;
* ordonner par décision motivée la fermeture d'un établissement, à titre provisoire et pour une durée ne pouvant excéder trois mois. Les modalités de cette fermeture, qui pourra s'accompagner de la saisie à titre conservatoire du matériel professionnel des contrevenants, seront fixées par décret en Conseil d'Etat. En tout état de cause, cette décision de fermeture administrative d'un établissement ne sera ni automatique, ni uniforme. Elle sera proportionnée à l'ampleur des faits constatés.
Le projet de loi crée un nouveau régime de responsabilité des donneurs d'ordre, qui s'abritent quelques fois derrière leurs sous-traitants en feignant d'ignorer l'exploitation d'une main d'oeuvre clandestine.
Le projet de loi protège aussi les droits sociaux des étrangers en situation irrégulière employés en France puis réadmis dans leurs pays d'origine, en imposant aux entreprises qui les ont employés de payer les frais de réacheminement, et de verser les arriérés de salaire et de charges sociales, en présumant une relation de travail d'une ancienneté minimale de 3 mois en l'absence de preuve contraire.
Le projet de loi crée une interdiction de retour sur l'ensemble du territoire de l'Union européenne, pour une durée de 3 ans, prolongeable de 2 ans en cas de manquement à une première interdiction de retour, qui pourra être prononcée à l'encontre des étrangers en situation irrégulière visés par une mesure d'éloignement qui auront refusé les propositions de retour volontaire qui leur sont faites.
L'interdiction de retour ne sera ni uniforme ni automatique. La loi pose le principe selon lequel il sera tenu compte de la durée de la présence de l'étranger sur le territoire, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France.
L'interdiction de retour sera abrogée si l'étranger en situation irrégulière respecte le délai qui lui est accordé pour quitter volontairement le territoire. On comprend la logique : un étranger en situation irrégulière qui rentre de lui-même dans son pays d'origine, respectant ainsi la décision d'éloignement, fournit la preuve de sa bonne foi, de sa volonté de respecter les lois du pays. Il n'y a pas de raison de le sanctionner à l'avenir. Inversement, un étranger à qui on a fait confiance, à qui on a accordé un délai de 30 jours pour rentrer dans son pays d'origine, mais qui trahit cette confiance en se maintenant sur le territoire, doit en assumer les conséquences.
Permettez-moi de rappeler que cette mesure constitue la transposition d'une directive adoptée le 18 juin 2009 par le Parlement européen, et qu'elle a été approuvée par les socialistes allemands et espagnols. Seuls les socialistes français s'y sont alors opposés.
Le projet de loi accroît par ailleurs l'efficacité des procédures administratives de lutte contre l'immigration irrégulière :
- Afin de faciliter la délivrance des laissez-passer consulaire par les pays d'origine, et de permettre à la Commission européenne ne poursuivre la négociation des accords de réadmission avec ces pays, la durée maximale de la rétention administrative passera de 32 à 45 jours. Cette durée maximale de rétention restera la plus faible de tous les Etats membres de l'Union européenne.
- Afin d'éviter certaines incohérences, le juge administratif, qui se prononce sur la légalité de la mesure d'éloignement, interviendra désormais systématiquement avant le juge judiciaire, qui se prononce sur la prolongation du maintien en rétention. L'intervention d'un seul ordre de juridiction aurait supposé une modification de la Constitution. C'est pourquoi le projet de loi privilégie la voie d'une meilleure articulation dans l'intervention des deux ordres de juridiction.
Enfin, le projet de loi rend plus explicite l'immunité pénale des personnes qui apportent une aide humanitaire d'urgence aux étrangers en situation irrégulière, la rédaction actuelle de l'article L.622-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers pouvant sembler trop restrictive. L'objectif est de distinguer plus clairement ce qui relève de l'aide humanitaire, qu'il faut soutenir, de la contribution aux filières d'immigration clandestine, qu'il faut empêcher.
Ce projet de loi illustre la volonté de la France d'accroître ses efforts d'intégration des ressortissants étrangers accueillis légalement sur son sol, et d'amplifier la lutte contre l'immigration irrégulière, qui porte atteinte à ces efforts d'intégration, et mine sa protection sociale comme son pacte républicain. Je me suis efforcé d'élaborer un projet de loi ambitieux et équilibré.
Source http://www.immigration.gouv.fr, le 2 avril 2010
J'ai présenté hier devant le Conseil des ministres un projet de loi relatif à l'immigration, à l'intégration, et à la nationalité.
Ce projet de loi s'intéresse aux trois étapes du parcours de tout ressortissant étranger souhaitant vivre en France : l'immigration, l'intégration, et l'accès à la nationalité.
Permettez-moi d'insister sur ce point : ces trois étapes sont liées. En France, il ne peut y avoir immigration sans intégration, et sans perspective d'accès à la nationalité. Parce que la France n'est pas une juxtaposition de communautés vivant séparément. Parce que la France, terre d'immigration depuis ses origines, n'est devenue Nation que par de puissants efforts d'intégration et de cohésion. Le lien entre immigration, intégration, et identité nationale, se situe au coeur même de notre creuset républicain.
Oui, la France reste une terre d'accueil de l'immigration. Elle continue à accueillir légalement plus de 170.000 étrangers (hors Union européenne) par an pour de longs séjours (>3mois).
Et oui, la France reste aussi une terre d'intégration et d'accès à la nationalité. Près de 110.000 étrangers accèdent chaque année à la nationalité française, soit 4% de la population étrangère, contre moins de 2% dans les autres grands pays européens.
La France ne peut pas accueillir indistinctement tous ceux qui souhaitent s'y établir, parce qu'elle doit intégrer ceux à qui elle a donné droit de séjour, par la langue, par l'éducation, par l'emploi, par le logement.
La qualité de l'accueil et de l'intégration de l'immigration légale et la fermeté dans la lutte contre l'immigration illégale constituent les deux pans d'une même stratégie.
Tels sont les deux objectifs indissociables de ce projet de loi :
1. Renforcer l'accueil et l'intégration de l'immigration légale ;
2. Accroître la lutte contre l'immigration illégale.
Ce projet de loi repose sur trois bases :
Premièrement, les trois directives européennes, faisant suite au Pacte européen sur l'immigration et l'asile adopté sous présidence française de l'Union européenne, et que la France doit transposer avant la fin de l'année 2010. La construction progressive d'une politique européenne de l'immigration et de l'asile est le complément indispensable du grand espace de libre-circulation issu des accords de Schengen. Ce projet de loi assure la transposition en droit français :
1. de la directive « retour », relative aux procédures applicables au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
2. de la directive « carte bleue européenne », qui établit les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d'un emploi hautement qualifié ;
3. de la directive « sanctions », qui fixe des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l'encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier.
Deuxièmement, le rapport de la Commission présidée par Pierre Mazeaud sur la politique des migrations, qui a présenté le 11 juillet 2008 certaines propositions pour améliorer l'efficacité des procédures d'éloignement des étrangers en situation irrégulière interpellés sur le territoire national, constatant qu'aujourd'hui 75% des mesures d'éloignement ne sont pas exécutées, soit par non délivrance du laissez-passer consulaire dans les délais nécessaires, soit par la conjugaison des interventions du juge de la liberté et de la détention et du juge administratif.
Troisièmement, les conclusions du séminaire gouvernemental sur l'identité nationale, présidé par le Premier ministre le 8 février 2010 , qui a conclu notamment à la nécessité de renforcer les politiques d'intégration des ressortissants étrangers entrant et vivant en France.
Ce projet de loi est équilibré : les mesures relatives à l'accueil et l'intégration sont tout aussi importantes que celles qui concernent la lutte contre l'immigration illégale.
Le projet de loi crée un premier titre de séjour européen, d'une durée de 3 ans renouvelable, pour les salariés qualifiés, de niveau BAC+3, dont les conditions de séjour et de travail seront identiques dans les 27 Etats membres. Il s'agit d'un premier titre de séjour européen, qui s'adressera à un grand nombre de migrants. Je vous rappelle que 25% des étrangers entrés en France en 2009 pour de longs séjours disposaient d'un diplôme de l'enseignement supérieur. Il s'agit d'une étape très importante dans la construction d'une politique européenne de l'immigration.
Le projet de loi comporte une deuxième évolution très importante de la politique française d'immigration, avec la prise en compte des efforts d'intégration pour le renouvellement des titres de séjour, pour la délivrance des cartes de résidents, ainsi que pour l'accès à la nationalité française. Le projet de loi met en place une procédure d'accès accéléré à la nationalité française pour les ressortissants étrangers qui satisfont déjà manifestement la condition d'assimilation posée par le code civil. La durée de présence sur le territoire exigée des candidats à la naturalisation sera réduite à deux ans pour ceux qui ont accompli de tels efforts. Pour le renouvellement des titres de séjour, et pour la délivrance des cartes de résident, l'assiduité aux formations linguistiques et civiques et l'adhésion aux principes et valeurs de la République, devront être pris en compte de manière précise.
Le projet de loi ouvre par ailleurs aux mineurs étrangers isolés la possibilité d'obtenir un titre de séjour à leur majorité, s'ils sont inscrits dans un parcours de formation. Il s'agit là d'une avancée très importante, demandée par les associations de protection de l'enfance. Elle est issue du groupe de travail sur les mineurs étrangers isolés animé par le Ministère au cours de l'année 2009.
Enfin, le projet de loi met en place une charte des droits et devoirs du citoyen, dont la signature sera obligatoire pour les étrangers naturalisés. Cette charte des droits et des devoirs détaillera les engagements réciproques du nouveau Français et de la République. Elle fera l'objet d'une consultation publique dans les prochains mois, à la suite de la première phase du débat sur l'identité nationale. Cette charte des droits et des devoirs du citoyen sera publiée par un décret, après consultation du Conseil d'Etat.
Le deuxième volet du projet de loi est celui de la lutte contre l'immigration irrégulière.
La priorité est tout d'abord de lutter contre ceux qui organisent et exploitent l'immigration clandestine. Face à la situation des étrangers sans titre de séjour employés en France, j'ai pris le 24 novembre dernier une nouvelle circulaire, fondée sur l'article 40 de la loi du 20 novembre 2007, fixant des critères précis de régularisation : 5 années de présence sur le territoire, une année d'ancienneté dans l'entreprise, une promesse d'embauche d'une durée supérieure à un an, dans un métier en tension. Je n'ai aucune intention d'assouplir ces critères. Promettre la régularisation à tout étranger sans titre de séjour exploité par une entreprise française, ce serait encourager les filières clandestines à poursuivre leur triste commerce. La régularisation ne peut être la seule politique publique face à l'immigration clandestine. Il ne faut pas confondre humanité et angélisme. Il n'y a pas de justice sans équilibre entre générosité et fermeté. C'est pourquoi les étrangers sans titre de séjour qui demandent leur régularisation en occupant de manière illégale des locaux publics ou privés continueront à être évacués, comme ils l'ont été ce matin encore à Paris. Et c'est pourquoi aussi les entreprises qui exploitent ces ??trangers sans titre de séjour seront plus durement sanctionnées.
Le projet de loi met en place un nouvel arsenal de sanctions administratives et pénales contre les entreprises qui recourent sciemment, directement ou indirectement, à l'emploi d'étrangers sans titre de séjour. L'autorité administrative pourra, en cas d'emploi d'étrangers en situation irrégulière :
* rendre les employeurs inéligibles aux appels d'offres nationaux et européens, pendant une durée maximale de 6 mois ;
* rendre les employeurs inéligibles aux aides publiques nationales et européennes en matière d'emploi, de formation professionnelle et de culture, pendant une durée maximale de 5 ans ;
* imposer aux employeurs le remboursement des aides publiques reçues l'année précédant l'infraction relevée, en matière d'emploi et de formation professionnelle ;
* ordonner par décision motivée la fermeture d'un établissement, à titre provisoire et pour une durée ne pouvant excéder trois mois. Les modalités de cette fermeture, qui pourra s'accompagner de la saisie à titre conservatoire du matériel professionnel des contrevenants, seront fixées par décret en Conseil d'Etat. En tout état de cause, cette décision de fermeture administrative d'un établissement ne sera ni automatique, ni uniforme. Elle sera proportionnée à l'ampleur des faits constatés.
Le projet de loi crée un nouveau régime de responsabilité des donneurs d'ordre, qui s'abritent quelques fois derrière leurs sous-traitants en feignant d'ignorer l'exploitation d'une main d'oeuvre clandestine.
Le projet de loi protège aussi les droits sociaux des étrangers en situation irrégulière employés en France puis réadmis dans leurs pays d'origine, en imposant aux entreprises qui les ont employés de payer les frais de réacheminement, et de verser les arriérés de salaire et de charges sociales, en présumant une relation de travail d'une ancienneté minimale de 3 mois en l'absence de preuve contraire.
Le projet de loi crée une interdiction de retour sur l'ensemble du territoire de l'Union européenne, pour une durée de 3 ans, prolongeable de 2 ans en cas de manquement à une première interdiction de retour, qui pourra être prononcée à l'encontre des étrangers en situation irrégulière visés par une mesure d'éloignement qui auront refusé les propositions de retour volontaire qui leur sont faites.
L'interdiction de retour ne sera ni uniforme ni automatique. La loi pose le principe selon lequel il sera tenu compte de la durée de la présence de l'étranger sur le territoire, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France.
L'interdiction de retour sera abrogée si l'étranger en situation irrégulière respecte le délai qui lui est accordé pour quitter volontairement le territoire. On comprend la logique : un étranger en situation irrégulière qui rentre de lui-même dans son pays d'origine, respectant ainsi la décision d'éloignement, fournit la preuve de sa bonne foi, de sa volonté de respecter les lois du pays. Il n'y a pas de raison de le sanctionner à l'avenir. Inversement, un étranger à qui on a fait confiance, à qui on a accordé un délai de 30 jours pour rentrer dans son pays d'origine, mais qui trahit cette confiance en se maintenant sur le territoire, doit en assumer les conséquences.
Permettez-moi de rappeler que cette mesure constitue la transposition d'une directive adoptée le 18 juin 2009 par le Parlement européen, et qu'elle a été approuvée par les socialistes allemands et espagnols. Seuls les socialistes français s'y sont alors opposés.
Le projet de loi accroît par ailleurs l'efficacité des procédures administratives de lutte contre l'immigration irrégulière :
- Afin de faciliter la délivrance des laissez-passer consulaire par les pays d'origine, et de permettre à la Commission européenne ne poursuivre la négociation des accords de réadmission avec ces pays, la durée maximale de la rétention administrative passera de 32 à 45 jours. Cette durée maximale de rétention restera la plus faible de tous les Etats membres de l'Union européenne.
- Afin d'éviter certaines incohérences, le juge administratif, qui se prononce sur la légalité de la mesure d'éloignement, interviendra désormais systématiquement avant le juge judiciaire, qui se prononce sur la prolongation du maintien en rétention. L'intervention d'un seul ordre de juridiction aurait supposé une modification de la Constitution. C'est pourquoi le projet de loi privilégie la voie d'une meilleure articulation dans l'intervention des deux ordres de juridiction.
Enfin, le projet de loi rend plus explicite l'immunité pénale des personnes qui apportent une aide humanitaire d'urgence aux étrangers en situation irrégulière, la rédaction actuelle de l'article L.622-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers pouvant sembler trop restrictive. L'objectif est de distinguer plus clairement ce qui relève de l'aide humanitaire, qu'il faut soutenir, de la contribution aux filières d'immigration clandestine, qu'il faut empêcher.
Ce projet de loi illustre la volonté de la France d'accroître ses efforts d'intégration des ressortissants étrangers accueillis légalement sur son sol, et d'amplifier la lutte contre l'immigration irrégulière, qui porte atteinte à ces efforts d'intégration, et mine sa protection sociale comme son pacte républicain. Je me suis efforcé d'élaborer un projet de loi ambitieux et équilibré.
Source http://www.immigration.gouv.fr, le 2 avril 2010