Déclaration de M. Benoist Apparu, secrétaire d'Etat au logement et à l'urbanisme, sur la politique de rénovation urbaine aux normes basses consommation, à Paris le 15 juin 2010.

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Circonstance : Colloque de présentation des lauréats du programme de requalification de l'habitat collectif à haute performance énergétique, à la Cité internationale universitaire de Paris le 15 juin 2010

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
La France a fait le choix de prendre une longueur d'avance dans la conduite de politiques de développement durable. Si nous avons voulu être exemplaires, c'est parce que nous vivons dans un monde où en 20 ans, la consommation d'énergies fossiles a augmenté en moyenne de 40%, et même de 80% pour le gaz naturel. C'est parce que nous vivons dans un monde où les émissions de gaz à effet de serre sont en croissance de plus de 40% depuis 1980, à un rythme qui dépasse les 3% par an.
Pour répondre à ce défi, le Président de la République a souhaité, dès 2007, proposer aux Français une vraie révolution, un nouveau modèle de croissance. L'idée n'est pas de faire table rase du passé, mais bien de capitaliser sur nos compétences et nos savoirs-faire pour faire rimer sobriété en matières premières, amélioration du confort de vie et baisse des dépenses en énergie de nos concitoyens.
Et ça n'est pas un hasard si le bâtiment est au coeur de ces préoccupations. Avec plus de 40% des consommations d'énergie de notre pays, et près du quart des émissions de gaz à effet de serre, le bâtiment se retrouve en première ligne dans la lutte contre le changement climatique.
La consommation moyenne d'un logement en France, c'est 240 kWh/m², alors qu'on sait faire du 50 kWh/m² dans le neuf. C'est donc dans le Bâtiment que nous avons le plus de marge de manoeuvre.
Parallèlement à cet objectif, la crise a permis de faire prendre conscience à chacun de l'enjeu social et économique. L'enjeu économique, c'est la réduction des dépenses en énergie de nos concitoyens. Un exemple simple, la facture annuelle de chauffage représente environ 900 euros en moyenne par ménage, avec des variations considérables en fonction de la qualité du logement : moins de 250 euros par an pour une maison « basse consommation », mais plus de 2 000 euros pour une maison mal isolée.
L'enjeu social, c'est évidemment d'aider ceux dont l'empreinte écologique est un véritable fardeau au quotidien. La réduction des inégalités dans notre pays passe véritablement par la réduction des écarts de consommation énergétiques.
Avec Jean-Louis Borloo, nous avons présenté dans le Grenelle Environnement un véritable modèle de la société du bien-vivre. Le plan Bâtiment est l'expression concrète de cette volonté, avec des mesures échelonnées dans le temps qui fixent une véritable feuille de route de la mutation énergétique. L'objectif est clair : faire en 4 ans un saut énergétique aussi important que celui réalisé ces 30 dernières années. Grâce aux mesures incitatives que le Gouvernement a mises en oeuvre, les outils pour faciliter cette transition ont été plébiscités.
L'éco-PTZ distribué par les réseaux bancaires a par exemple été un véritable succès, avec plus de 120 000 demandes : nous avons un an d'avance sur nos objectifs ! Je pense aussi au triplement du prêt à taux zéro dans le neuf et au verdissement d'autres outils fiscaux, comme le Scellier dans l'investissement locatif, ou encore au crédit d'impôt développement durable, à l'éco prêt HLM... Et ça n'est pas tout : fin 2009, nous avons eu 20 000 demandes de certificats BBC, alors que nous en attendions dix fois moins !
Ces financements, aussi efficaces soient-il, ne sont que l'un des facteurs de la mutation en cours. Je suis persuadé que le bâtiment est un secteur d'innovation considérable. A bien des égards, c'est un secteur de haute technologie !
De nouveaux produits apparaissent chaque jour sur le marché et nos techniques de conception s'enrichissent de nouveaux outils. Pour le bâtiment neuf, tous les éléments sont disponibles pour construire des bâtiments d'une nouvelle génération. La réglementation thermique que nous préparons pour 2012 sera l'occasion de généraliser à l'ensemble du neuf des standards exigeants.
Nous ne sommes malheureusement pas autant avancés sur le parc ancien.
C'est pourtant là que se concentrent les défis pour les années à venir. En effet, le parc immobilier se renouvelle lentement : nous ne construisons chaque année qu'une proportion de bâtiments de l'ordre d'un pour cent du parc existant. C'est bien dans l'ancien que se retrouve la plus grande réserve de gains d'énergie.
Notre capacité à rénover notre parc ancien est également essentielle pour permettre à nos villes de concilier des exigences d'efficacité et de performance avec la richesse du patrimoine architectural de notre pays et la cohérence que donne la continuité historique.
Enfin, je vous l'ai dit, la rénovation dans le parc ancien est une chance de réduire les inégalités entre nos concitoyens. Les bâtiments les plus vétustes sont ceux où les populations sont les plus touchées par la précarité énergétique.
Pour les propriétaires occupants modestes touchés par la précarité énergétique, le Président de la République a souhaité mobiliser 500 millions d'euros dans le cadre du Grand Emprunt, auxquels s'ajouteront une contribution de l'ANAH et des énergéticiens, portant l'effort à 1,25 Meuros pour traiter 300 000 logements. Le montant des travaux qui en résulte est estimé à un peu plus de 3 milliards d'euros : pour nos concitoyens, c'est un investissement d'avenir.
Autre volet de notre engagement : l'Etat a souhaité être exemplaire dans la rénovation du bâti: Le plan Bâtiment du Grenelle Environnement prévoit la rénovation de l'ensemble du parc de logement social existant, en commençant par les 800 000 logements parmi les plus énergivores. Cela réduira considérablement la facture énergétique des français les plus modestes. 40 000 sont déjà programmées, et ça n'est qu'un début.
L'Etat a enfin souhaité engager la rénovation thermique de tous ses bâtiments et de ceux de ses établissements publics d'ici 2013. Cela représente un peu plus de 200 Meuros d'audits et de travaux pour 2009.
C'est pourquoi, nous le savons bien, les projets de rénovation sont souvent plus complexes que les projets neufs. Chaque bâtiment est un cas particulier qui demande de déployer des méthodes de travail nouvelles ainsi qu'une expertise technique et organisationnelle de haut niveau.
Il nous reste du chemin avant de pouvoir rénover des bâtiments aux normes basses consommation, mais nous en connaissons les principales étapes. Après les progrès considérables effectués dans le domaine des matériaux, nous devons passer à des expérimentations grandeur nature, à des prototypes qui seront l'occasion d'améliorer nos savoir-faire et nos méthodologies.
Et je vous l'ai dit en introduction, la rénovation représente un levier de croissance très important. Si, dans l'ensemble, le marché du logement durable représente 600 milliards d'euros, le marché de la rénovation thermique a lui plus que doublé, passant de 9 à 20 milliards d'euros.
La diffusion très rapide des éco prêt à taux zéro représente une activité de 2 milliards d'euros de travaux. Autre exemple : le crédit d'impôt développement durable. Aujourd'hui, l'Etat s'est engagé pour plus de 2,9 milliards d'euros de crédits d'impôt. Et pour 1 euro délivré, c'est 6 euros de travaux réalisés.
Tout cela représente un vivier d'emploi en formation, ou en devenir. Plus de 120 000 emplois sont directement liés à la rénovation, et dans l'ensemble 600 000 emplois vont être créés d'ici 2012 grâce à nos propositions du Grenelle Environnement.
Le programme de requalification à haute performance énergétique de l'habitat collectif, REHA, s'inscrit pleinement dans cette mutation. En partant du terrain, en pariant sur l'effet d'entrainement de projets exemplaires, ce programme nous permettra de montrer que de très hauts niveaux de performance énergétique peuvent être atteints dans des logements anciens.
Il permettra également d'explorer d'autres dimensions du développement durable, en expérimentant l'usage d'éco-matériaux ou encore en développant de nouvelles méthodes de gestion de chantier plus respectueuses de l'environnement.
Je tiens aujourd'hui à remercier bien sûr le plan urbanisme construction architecture, pilote du programme, mais aussi les acteurs : maîtres d'ouvrage, maîtres d'oeuvre, architectes, entreprises, acteurs publics, associations et financeurs qui sont entrain de révolutionner l'art de bâtir et de rénover. Je suis convaincu que nous ne pouvons rien faire sans vos compétences et votre énergie. Vous avez la lourde et passionnante tâche d'influer sur l'évolution des pratiques aujourd'hui nécessaire pour faire de la Ville durable du 21e siècle une réalité.
Enfin, je souhaite adresser toutes mes félicitations aux lauréats du programme. Tout ce qui été imaginé et pensé ici sera bientôt, je l'espère, décliné partout en France.
La prochaine étape, c'est de se donner rendez-vous sur le terrain pour visiter ces bâtiments pionniers.
Merci de votre attention.
Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 15 juin 2010