Déclaration de M. Eric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, sur le bilan de la mise en oeuvre du nouveau dispositif d'assistance juridique aux étrangers en situation irrégulière placés en centres de rétention administrative, à Paris le 12 juillet 2010.

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Circonstance : Réunion avec les associations intervenant dans les centres de rétention administrative, à Paris le 12 juillet 2010

Texte intégral

Messieurs les présidents et directeurs,
Je voudrais tout d'abord vous remercier d'avoir accepté de participer à cette réunion de bilan des 6 premiers mois de mise en oeuvre du nouveau dispositif d'assistance juridique aux étrangers en situation irrégulière placés en centres de rétention administrative.
Les conventions entrées en vigueur le 1er janvier 2010 sont issues de l'appel d'offres lancé le 18 décembre 2008, qui formalisait ce marché en 8 lots. 6 associations y avaient répondu.
Une procédure contentieuse a été engagée contre ce marché public le 17 avril 2009.
Le Conseil d'Etat a clos ce débat le 16 novembre 2009, en jugeant qu'une seule de ces 6 associations, celle qui avait remporté le plus petit lot, le lot n°5 relatif à l'outre-mer, pouvait être considérée comme ne présentant pas des garanties suffisantes d'indépendance et de compétence, et en validant tout le reste du marché. En validant les marchés conclus par l'administration, le Conseil d'Etat a considéré que les conventions passées avec les personnes morales sélectionnées portaient bien non seulement sur l'information, mais aussi sur l'accueil et le soutien des étrangers, pour permettre l'exercice effectif de leurs droits.
Comme j'ai eu l'occasion de le rappeler à de multiples reprises, l'intention du Gouvernement n'a jamais été, et n'est pas, de restreindre les prestations d'assistance offertes aux étrangers en situation irrégulière placés en rétention administrative, mais seulement de l'ouvrir au pluralisme associatif.
La France doit être fière d'avoir mis en place depuis 30 ans des centres de rétention administrative, capables d'accueillir les étrangers en situation irrégulière en cours de reconduite dans leurs pays d'origine, dans des conditions qui ont été sans cesse améliorées, en maintenant leur liberté d'aller et venir à l'intérieur des centres, le libre accès des familles, le libre accès des avocats, le libre accès au téléphone et aux espaces de vie.
La France doit être fière d'être l'un des rares pays, en Europe et dans le monde, à proposer aux étrangers en situation irrégulière l'assistance d'associations spécialisées, présentes en permanence dans l'ensemble des centres de rétention, et financées par l'Etat.
La France doit être fière d'être le pays d'Europe qui a mis en place la durée maximale de rétention administrative la plus courte.
Permettez-moi de rappeler que le budget consacré à l'accompagnement social et juridique des ressortissants étrangers en situation irrégulière placés en rétention a été augmenté de 2 millions d'euros pour l'année 2010, et représentera cette année pour l'Etat une dépense budgétaire de 11,5 millions d'euros, dont 5,5 millions d'euros pour la prise en charge sanitaire et médicale, et 6 millions d'euros pour l'accompagnement social et juridique (1,4 million d'euros pour la zone d'attente de Roissy et 4,6 millions d'euros pour les centres de rétention administrative).
En traitant dignement les étrangers en situation irrégulière en cours de reconduite dans leurs pays d'origine, nous honorons notre tradition républicaine de protection des droits de l'Homme.
Le premier bilan d'activité, issu de ces six premiers mois de mise en oeuvre du nouveau marché d'assistance juridique aux étrangers en situation irrégulière placés en rétention administrative, me semble favorable. Les services du Ministère ont réuni les chefs de centre le 5 février. Les associations attributaires ont été réunies le 9 février et le 11 juin.
Il ressort de ces différents échanges que l'information, l'accueil et le soutien des étrangers en situation irrégulière placés en rétention, pour permettre l'exercice effectif de leurs droits, n'ont pas été restreints. Ils se sont mêmes accrus.
Du 1er janvier 2010 au 30 juin 2010, 1.028 recours ont été déposés par des ressortissants étrangers placés dans les centres de rétention gérés par la Police aux Frontières, soit une progression de 3% par rapport au premier semestre 2009.
Cette progression n'est pas due à l'accroissement du taux d'occupation des centres de rétention, puisque ce taux baisse de 60% à 58% au cours du premier semestre 2010.
Le pluralisme associatif n'a pas été une gêne pour l'assistance apportée aux retenus. L'intervention de nouveaux acteurs, dont l'indépendance et la compétence sont reconnus, a au contraire généré de nouvelles pratiques, au service de la protection des droits des retenus.
Les relations entre les agents des services de police et de gendarmerie qui gèrent les centres de rétentions et les associations assurant l'information, l'accueil et le soutien des étrangers en situation irrégulière placés en rétention, sont globalement bonnes.
Un certain nombre de difficultés techniques ont bien sûr été rencontrées. Mais elles me paraissent pouvoir être surmontées.
Je citerai tout d'abord les difficultés créées par le retard de mise en oeuvre des conventions, qui devaient initialement entrer en vigueur le 2 juin 2009. La Direction de l'Immigration recevra les associations concernées avant la fin du mois pour évaluer le préjudice subi. Je rappellerai néanmoins que la suspension des conventions a été demandée et obtenue par une association auprès du Tribunal administratif de Paris, puis annulée par le Conseil d'Etat, qui a validé la procédure suivie pour 7 des 8 lots de l'appel d'offres. Sur ces 7 lots, l'Etat n'a commis aucune faute, et je ne suis pas sûr que sa responsabilité puisse être engagée sans faute de sa part. Cette question doit donc être approfondie dans les prochaines semaines.
Je citerai ensuite le retard dans le versement des avances et dans le paiement des factures du 1er trimestre. Certains dossiers ne permettaient pas de justifier le service fait. Ces difficultés sont inhérentes à la mise en place d'un nouveau service par de nouveaux prestataires. Je souhaite qu'elles puissent être progressivement surmontées.
A ce jour, le règlement des factures relatives au premier trimestre a été effectué pour l'ensemble des prestataires. J'espère que les factures relatives au deuxième trimestre pourront être réglées plus rapidement, dans le respect des règles budgétaires qui s'imposent.
Je citerai enfin le fonctionnement au sein des CRA.
Concernant l'accès aux retenus, il convient de rappeler que les associations doivent utiliser les locaux mis à leur disposition. La loi garantit un libre accès des retenus aux associations, et non pas l'inverse. La présence d'une permanence associative dans chaque centre de rétention administrative ne doit pas signifier la présence d'une permanence associative dans chacune des pièces de chacun des centres de rétention administrative.
Concernant la disparité des pratiques au sein des CRA, le placement à l'isolement et le menottage des retenus sont des sujets de préoccupation légitimes. J'ai souhaité qu'une circulaire soit prise, afin d'harmoniser ces pratiques, dans un sens favorable aux retenus : la liste des cas de placement à l'isolement et de menottage a été précisée limitativement, et restreinte aux seuls cas où ils sont indispensables à la mise en oeuvre de la procédure d'éloignement. Cette circulaire a été signée le 14 juin 2010.
Je vous laisse maintenant la parole pour exposer votre propre bilan de ces 6 premiers mois du nouveau dispositif d'assistance aux retenus.Source http://www.immigration.gouv.fr, le 20 juillet 2010