Interview de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, à RMC le 18 janvier 2011, sur la situation en Tunisie, le nouveau prêt à taux zéro (PTZ+), la politique tarifaire de la SNCF et le développement de la filière photovoltaïque.

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Média : Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral

J.-J. Bourdin Notre invitée, ce matin, N. Kosciusko-Morizet, n° 4
du Gouvernement. Je ne dis pas de bêtise, N. Kosciusko-Morizet
?
 
Bonjour.
 
Bonjour. N° 4 du Gouvernement ?
 
Oui !
 
Oui, en charge de l'Écologie, du Développement durable, des
Transports et du Logement.
 
Hmm, hmm.
 
C'est un vaste ministère, N. Kosciusko-Morizet.
 
Très !
 
Mais je vais vous parler de la Tunisie pour commencer. Ça va
vous surprendre, peut-être pas.
 
Comme quoi, l'intitulé du ministère vous a inspiré.
 
Oui, ça m'a inspiré ! Alors, ma première question est
extrêmement directe : comment la France a-t-elle pu soutenir la
semaine dernière encore un dictateur qui a volé son peuple ?
 
Oui, votre question est extrêmement directe...
 
... elle est extrêmement directe.
 
... mais elle est un peu biaisée, Jean-Jacques.
 
Comment biaisée ? Biaisée pourquoi ?
 
D'abord...
 
... n'a-t-il pas volé son peuple ?
 
Jean-Jacques, d'abord, il est trop facile après coup de refaire
l'histoire. Et en plus, en la posant comme ça, vous passez sous
silence une réalité majeure dans nos relations avec la Tunisie, et
d'ailleurs avec les autres pays du Maghreb, c'est-à-dire que là
avec la Tunisie on est en face d'un ancien protectorat. Et donc,
on est dans une relation qui est riche et complexe à la fois et
nous amène...
 
... on ne va pas en permanence trimbaler ce passé...
 
... et qui nous amène à une certaine...
 
... nous empêchant, soyons un peu décomplexés, non, N.
Kosciusko- Morizet ?
 
Jean-Jacques, ce passé est une partie de notre présent. Il fait
aujourd'hui de la communauté tunisienne ce qu'elle est en
France. Moi, je suis maire de Longjumeau, la communauté
tunisienne est l'une des plus grandes communautés immigrées à
Longjumeau. Ça change forcément notre regard sur les choses,
et ça nous amène à avoir une certaine retenue.
 
Bon.
 
Dans l'expression, en particulier.
 
Mais, entre une retenue dans l'expression et un
accompagnement d'une révolte populaire, il y a un monde,
est-ce que vous ne trouvez pas, franchement ? Il y a eu un
début de mea culpa d'ailleurs d'A. Juppé, hier, N.
Kosciusko-Morizet.
 
Non mais, il y a deux choses. Il y a la question de savoir est-ce
qu'on a bien compris ce qui était en train de se passer, est-ce
qu'on a bien compris, bien anticipé...
 
...oui, on l'a bien compris, anticipé.
 
... l'ampleur de ce qui était en train de se passer. A. Juppé l'a
dit, probablement on n'a pas senti à quel point l'exaspération
était grande. Et puis, il y a la question de savoir si on devrait
dans ces cas-là s'exprimer plus fortement, voire intervenir.
Enfin, imaginez, si la France s'en mêlait, s'en mêlait, au moment
où la révolte a lieu... ... s'en était mêlé.
 
S'en était mêlé, vous vous rendez compte...
 
...mais la France s'en est mêlé, N. Kosciusko-Morizet.
 
En quoi ?
 
M. Alliot-Marie a dit qu'on allait envoyer des forces pour aider le
régime tunisien...
 
...non, pas du tout ! Pas du tout ! Vous savez bien que ça c'est
un détournement.
 
...à éviter le désordre.
 
Mais c'est un détournement.
 
Comment ?
 
M. Alliot-Marie n'a pas dit ça.
 
Ce n'est pas un détournement.
 
M. Alliot-Marie a déploré que certaines manifestations tournent
avec des morts de manifestants.
 
Et a proposé qu'on envoie des forces de l'ordre françaises pour
aider le régime à ne pas commettre des exactions.
 
Et a fait remarquer qu'il y avait des techniques d'organisation de
la foule qui permettaient...
 
...oui, et a proposé l'aide de la France, oui.
 
... qui permettaient d'éviter la mort de manifestants.
 
... et a proposé l'aide de la France.
 
Et encore une fois, tout ça en amont des évènements. Je veux
dire, je ne suis pas en train de dire qu'on est parfaits, je suis en
train simplement de dire que il faut dans le jugement qu'on
porte sur ces évènements qu'on tienne bien compte de l'histoire
ancienne qui est celle d'un protectorat, dans la relation entre la
Tunisie et la France.
 
Alors, j'ai encore deux questions.
 
Et qui fait que si on allait beaucoup plus loin ou qu'on prenait
une position très très différente dans la façon dont nous
exprimons et éventuellement en intervenant dans ces histoires,
dans ces affaires, nous serions immédiatement taxés de revenir
au protectorat. Non mais, c'est un peu paradoxal et c'était un
peu ambigu.
 
Mais non, mais N. Kosciusko-Morizet...
 
Donc, il faut bien tout voir.
 
Bon, alors, je vais vous poser deux questions, et puis on va
passer à autre chose. Première question, F. Mitterrand a-t-il, oui
ou non, la double nationalité, vous le savez, franco-tunisienne ?
 
Écoutez, j'en sais rien. Je ne suis jamais allée en Tunisie.
 
Bon, d'accord.
 
Je le regrette, on dit que c'est très beau, mais personnellement
je ne connais pas la Tunisie.
 
Bon d'accord, d'accord.
 
Donc, vous me posez des questions, alors si vous me demandez
qui a une maison, qui a un truc, je ne peux pas répondre.
 
Alors, autre question, est-ce que nous ne sommes pas aveuglés
par une équation simple : soit la dictature, soit l'islamisme
extrême ? Est-ce qu'il n'y a pas autre chose que cette dualité
insupportable ?
 
Alors, je vais vous dire, ça, c'est une vraie question, et pardon
de vous dire...
 
...ah, merci, N. Kosciusko-Morizet !
 
Pardon de vous dire, J.-J. Bourdin, je trouve que c'est une
question plus intéressante que les précédentes que vous m'avez
posées.
 
Mais oui, mais toutes sont intéressantes !
 
Ça ne veut pas dire que j'ai une meilleure réponse.
 
Ah !
 
Mais cette question-là, elle est, pour moi elle est la plus
pertinente et en plus elle n'est pas pertinente seulement
vis-à-vis de la Tunisie.
 
Exactement.
 
Mais aussi de tous les pays qui sont dans la même situation.
 
Exactement.
 
Pour moi, c'est une question qui reste ouverte et je souhaite...
 
...et alors, quelle est votre réponse ?
 
Je souhaite tellement, oui, qu'il y ait une alternative. C'est
toujours très difficile vis-à-vis de pays qui n'ont pas de tradition
démocratique ancienne parce que on a cette réaction de se dire,
ben peut-être qu'un régime un peu autoritaire c'est finalement
ce qu'il peut y avoir de mieux, en quelque sorte. Et évidemment,
ce n'est pas ce qu'on peut souhaiter de mieux. Ce qu'on peut
souhaiter de mieux c'est une belle démocratie avec des
élections libres, comme on espère qu'il va y en avoir en Tunisie,
avec des partis politiques...
 
...et peut-être en Algérie ou au Maroc.
 
Avec des partis politiques ré autorisés, habilités. Si vous voulez,
est-ce que ça existe, est-ce que c'est un équilibre qui peut
s'installer comme ça ? On sent que les Tunisiens en ont très très
envie. Moi, je lis avec délice les articles sur ce qui se passe en ce
moment dans la rue. Je voyais dans certains journaux du matin,
on parlait de Tunisiens qui avaient patrouillé pour faire en sorte
qu'il n'y ait pas de pillage.
 
Oui, exact.
 
Parce qu'ils soupçonnaient que les pillages, en fait, étaient le fait
du pouvoir sortant - le pouvoir sortant qui tendait à vouloir
démontrer à travers des pillages que...
 
... pour organiser le désordre.
 
Oui, à démontrer qu'il était, en fait, le seul garant de l'ordre, et
que, eux, partis, il n'y avait plus d'ordre possible. Évidemment,
moi, je lis avec délice ces articles-là. Maintenant, bien malin celui
qui peut prédire l'avenir dans un pays qui, encore une fois, et
c'est pas leur faire tort que de dire ça, c'est la réalité, n'a pas de
grande tradition démocratique historique.
 
N. Kosciusko-Morizet, on va parler du nouveau prêt à taux zéro,
le nouveau PTZ, comme on dit déjà, nous allons parler de la
SNCF et des transports, puisque vous avez en charge les
transports.
 
[Pause]
 
Alors, présentation hier du nouveau PTZ +, prêt sans intérêt,
réservé aux propriétaires en devenir. On est bien d'accord...
 
Tous les primo accédants, tous ceux qui achètent pour la
première fois.
 
Tous ceux... quelle que soient les conditions de ressources.
 
Quelles que soient les conditions de ressources. C'est un outil
qui a été présenté par le Premier ministre, qui se veut à la fois
extrêmement puissant et très simple. Il y a un site Internet, il y
a une application iPhone, il y a une application Android, vous
pouvez calculer immédiatement ce à quoi vous avez droit, en
fonction de votre zone géographique, en fonction de la qualité
écologique, énergétique du logement que vous achetez et en
fonction de la taille de votre famille. C'est super simple, c'est
super lisible et c'est beaucoup plus puissant et d'un volume bien
supérieur à ce qui existait par le passé, avec le Prêt à taux zéro.
 
Alors, j'habite, je ne sais pas, à Nantes, par exemple, j'habite à
Nantes, je veux acheter un appartement, je vais voir qui pour
obtenir ce Prêt à taux zéro + ?
 
Le Prêt à taux zéro est distribué par des banques
conventionnées, donc, hier, par exemple, avec le Premier
ministre et B. Apparu, on avait quatre familles qui signaient leur
premier Prêt à taux zéro, c'était avec le Crédit Foncier, qui est
très engagé, d'autres banques le distribuent. Vous avez en
général un prêt principal, et puis vous avez ce Prêt à taux zéro
+, qui peut être distribué par une banque différente de celle de
votre prêt principal...
 
D'accord.
 
Et qui vient comme complément, mais plus que comme
complément.
 
Il peut servir d'apport ?
 
Bien sûr. Non seulement il peut servir d'apport mais en plus et
surtout, pour la première fois, on a là un outil qui permet de
prendre en compte la qualité environnementale du logement,
c'est-à-dire en fait votre capacité à rembourser pour partie,
parce que dans la qualité environnementale du logement, il y a
les charges. Je vous prends un exemple très concret. Avant,
Journaux et invités du matin - Dept. Revues de presse - 01 42 75 54 41
https://rpa.applications.pm.gouv.fr/journaux_et_invites.php3?dat
e=201... 18 sur 43 18/01/2011 12:59 on avait le crédit d'impôt
sur les intérêts d'emprunts. Que vous achetiez quelque chose de
très bonne qualité environnementale, où vous aviez peu de
charges, ou de très mauvaise qualité environnementale où vous
aurez beaucoup de charges, c'était pas pris en compte, et le
crédit d'impôt lui-même n'était pas pris en compte dans votre
capacité à emprunter. Donc, vous n'amélioriez pas capacité à
emprunter. Là, aujourd'hui, le Prêt à taux zéro intègre ces
paramètres de dimension de la famille, de qualité
environnementale du logement. Donc, si vous achetez, bonne
qualité environnementale, vous aurez moins de charges et on
vous prête plus, donc vous pouvez achetez plus grand.
 
C'est parti, là.
 
Là c'est parti.
 
Ça y est, c'est parti...
 
C'est parti depuis le 1er janvier.
 
Et ça va monter en puissance, 350 000 Prêts à taux zéro dans
l'année, à peu près ?
 
Jusqu'à maintenant le Prêt à taux zéro, on était autour de 200
000 par an. Avec ce nouvel outil, donc le Prêt à taux zéro +, on
veut passer à 380 000 par an.
 
380 000 par an.
 
Parce que c'est tout Français, sans condition de ressource, et
comme volume, avant c'était 1 200 000 000 d'euros par an, là
on passe à 2 600 000 000 d'euros par an, donc c'est pour vous
dire l'ambition qui est celle...
 
Encore faut-il trouver des logements à acheter.
 
Alors, c'est l'autre...
 
Alors, des appartements ou des maisons.
 
C'est l'autre partie, c'est l'autre volet de la politique.
 
Oui.
 
C'est quelque chose qu'on a bien sûr engagé, et depuis plusieurs
années...
 
Oui, enfin...
 
Si si si...
 
Oui, d'accord, mais enfin...
 
La chaîne d'accès au logement...
 
Quels sont les derniers chiffres ?
 
La chaîne d'accès au logement elle est multiple, c'est-à-dire que
l'on a d'abord augmenté très fortement la construction de
logements sociaux. Pourquoi ? Parce que c'est aussi en faisant
en sorte, si vous voulez, que dans tous les types d'accès au
logement il y ait ce qu'il faut, qu'on résout le problème. On est à
120 000 logements sociaux financés par an, je vous rappelle
qu'en 2000 on était à 40 000 logements sociaux financés, par
an.
 
Bon, 120 000. Partout ? Et que vous dites aux maires qui ne
veulent pas accueillir de logements sociaux, alors ?
 
Attendez, attendez ! Partout, mais surtout de plus en plus en
Ile-de-France, parce qu'un des problèmes que l'on avait avant,
c'était que la proportion de logements sociaux financés en
Ile-de-France et en zones tendues, était trop faible.
 
C'est vrai. Vous êtes à combien à Longjumeau, vous ?
 
Moi ? Je suis entre 30 et 40 % de logements sociaux. Vous ne
m'aurez pas là-dessus.
 
Donc, vous ne payez pas de prime.
 
Non, parce que la limite basse, c'est 20 %...
 
Enfin, de prime... pardon ! Pardon ! D'amende !
 
Le minimum requis est 20 %, je suis à 30 ou 40 % de logements
sociaux.
 
Bravo, bravo !
 
Mais, enfin, mais c'est une politique qui est menée sur toute la
France, Longjumeau n'est pas seule concernée.
 
Dans les Hauts-de-Seine on peut faire un meilleur effort, quoi.
 
Oui, ça dépend des endroits des Hauts-de-Seine, mais surtout,
ce qui est important, dans les politiques que nous mettons en
place...
 
A Neuilly, par exemple.
 
... c'est qu'elles sont ciblées sur les régions sur lesquelles c'est
le plus tendu. Le Prêt à taux zéro +, vous voulez acheter
quelque chose, un bien, vous êtes primo accédant, c'est ciblé
dans le neuf pour vous inciter à aller vers le neuf, et on vous
donne plus si vous êtes dans une zone très tendue, par exemple
en Ile-de-France, dans ce cas-là vous pouvez emprunter plus
avec le Prêt à taux zéro +. Les logements sociaux, on essaie de
construire plus en Ile-de-France. Maintenant, je ne vous dis pas
que ça résout l'ensemble des problèmes et on est sur un travail
avec B. Apparu, en 2011, que l'on appelle urbanisme de projets,
pour libérer plus de terrain, tout simplement....
 
Donc, libérer des terrains, construire plus...
 
... pour pouvoir construire plus, parce qu'il ne suffit pas d'avoir
plus le moyen d'emprunter...
 
Ça c'est évident.
 
Il faut aussi avoir des biens sur le marché.
 
Évidemment, et puis les prix, dites-moi, qui s'envolent.
 
Oui, mais les prix, ils sont liés aussi à l'offre. Quand il y a
beaucoup de demandes et qu'il y a peu d'offres, eh bien les prix
s'envolent.
 
C'est bien beau d'avoir un Prêt à taux zéro, mais si le prix
progresse, progresse à vitesse grand V....
 
Mais c'est pour ça qu'on travaille sur les deux, on travaille sur
votre solvabilité, votre possibilité à acheter mais aussi sur le
nombre de biens qui sont mis sur le marché. Alors, je le disais,
on a beaucoup accéléré, pour les logements sociaux, ça remonte
un peu pour la construction, il y a eu un creux considérable avec
la crise, et on veut libérer du terrain, accélérer les choses en
matière de construction, pour pouvoir offrir plus de possibilités.
 
Réforme fiscale, qui se profile à l'horizon, pour le printemps,
probablement. Alors, vers une taxation des plus values
immobilières sur la résidence principale. On supprime l'ISF, on
est d'accord, et parallèlement, au-delà de 1 200 000 euros, lorsque
je revends mon appartement ou ma maison, je suis taxé. C'est
bien ça, c'est une bonne idée ?
 
Bon, d'abord, c'est une piste de réflexion, donc il n'y a rien de
décidé en la matière, mais moi je trouve que c'est d'assez bon
sens. Je veux dire, on ne va pas taxer le capital lui-même,
puisque le capital en lui-même, surtout quand c'est de
l'immobilier, il ne produit pas, donc ça veut dire que tous les ans
vous devez chercher de quoi financer la taxe alors que votre
bien ne produit pas forcément. En revanche, au moment où vous
faites la plus-value, donc les revenus du capital, ça, oui, on
pourrait les taxer plus, c'est du transfert de l'un vers l'autre.
 
Taxer plus les revenus du capital, quel que soit le capital.
 
Transférer. Transférer du capital vers le revenu du capital.
 
Là, en l'occurrence, c'est de l'immobilier, mais...
 
Là, il y a du bon sens derrière. Le moment où vous faites
l'argent sur le capital, c'est le moment où il y a de l'argent
disponible. Le moment où vous êtes juste avec votre capital qui
ne rapporte pas forcément, c'est un moment qui est quand
même plus délicat. Moi je trouve que c'est du bon sens.
 
Bon, mais il faut un plancher, quand même, 1 200 000 euros, c'est
un bon plancher.
 
Bon, après... Attendez, il faut regarder de très près tout ce que
ça veut dire.
 
Il est nécessaire, il faut un plancher quand même.
 
Mais il faut regarder de très près tout ce que ça veut dire, et je
disais, c'est juste une idée qui court en ce moment, et je trouve
que l'idée est assise sur quelque chose de bon sens.
 
Plutôt bonne, plutôt bonne cette idée. N. Kosciusko-Morizet, si
on parlait de la SNCF un peu ? Et des retards à la SNCF ?
 
Ah, je sens que vous avez été récemment dans un train,J.-J.
Bourdin...
 
Non... Mais oui, j'ai été récemment dans un train. J'ai calculé : 7
fois le train depuis début janvier, 4 retards sur 7.
 
D'abord je vous remercie de prendre si souvent le train.
 
Mais oui. Non, mais j'adore le train.
 
Moi aussi.
 
Quand il arrive à l'heure ! Et quand surtout on me donne des
explications quand il y a du retard. Et de bonnes explications.
 
Alors... mais je participe à 100 % de ça. C'est la raison pour
laquelle, d'abord, avec T. Mariani, on a demandé des
explications - et un peu plus que des explications - très, très
précises sur un certain nombre de retards qui ont eu lieu
récemment et notamment sur celui qui a été plus
emblématique, qui a été le train Strasbourg - Port-Bou sur lequel
il y a eu une suite de dysfonctionnements dont certains très
importants.
 
Enfin, la SNCF nous a menti, quand même.
 
Surtout, oui, il y a 5 dysfonctionnements à la suite, donc il y a
eu une espèce d'enchevêtrements, de calamités sur ce train
dont certains d'ailleurs amènent à se poser des questions
importantes de réorganisation. Et donc il y a plusieurs choses. Il
y a trois choses qui sont mises en oeuvre à la suite de ces
dysfonctionnements. D'abord, il y a un certain nombre de
problèmes qui sont apparus sur ce Strasbourg - Port-Bou, par
exemple le rappel des conducteurs, deux heures avant leur prise
de service, pour être sûr qu'ils sont bien là, que tout a été fait,
que le conducteur ne va pas manquer à l'appel. C'est un des
problèmes qui a fait que Strasbourg - Port-Bou a eu à un
moment 5 heures de retard - il a eu beaucoup plus que ça - mais
5 heures étaient liées à ça. Le plan neige, parce qu'en fait on
s'est rendu compte qu'on pouvait faire mieux sur les retards liés
à la neige. Ça a l'air b??te. Il y aura forcément des retards en
situation de neige parce que les TGV ont les fait ralentir quand il
neige.
 
Non mais...
 
Attendez, attendez ! Je poursuis.
 
Oui.
 
L'information aux voyageurs, une fois qu'on est en situation de
crise ou en situation de retard. Moi j'ai été très frappée de
constater qu'on était souvent moins bien informé dans le train
que sur le quai.
 
C'est vrai.
 
Mais il y a des raisons à ça. C'est que le contrôleur lui-même
dispose de peu d'informations. Donc le président de la SNCF
nous a proposé un plan de rattrapage là-dessus.
 
Il va y avoir des téléphones maintenant, j'ai lu ça...
 
Non mais avoir des Smart phones pour avoir l'information pour
que le conducteur puisse la diffuser, c'est assez basique mais ça
n'existait pas. Avoir une formation - ça va être fait en 2011 - de
tous les contrôleurs pour l'information en situation de crise.
 
Pour être un vrai chef de train, quoi.
 
Avoir du renforcement des équipes en situation de crise pour
pouvoir se mettre à la disposition des contrôleurs et leur donner
cette information qu'ils doivent rebasculer. Et puis, dernière
chose, il y a un certain nombre de lignes dont la SNCF reconnaît
qu'elles sont malades, malades du retard. Il y a 12 lignes plus 3
TGV, 3 lignes TGV qui ont été identifiées comme
particulièrement sensibles de ce point de vue-là et là-dessus, la
SNCF s'est engagée à mettre en place un plan spécifique, très
transparent, avec l'affichage des retards, le monitoring des
retards et des investissements pour pouvoir résorber ce
problème et soigner ces lignes malades.
 
Alors nous verrons, mais quand même - quand même, est-ce
que les billets TGV vont coûter plus cher fin janvier ?
 
Oh, bien, c'est la saison tous les ans où se pose l'augmentation
des tarifs.
 
Alors est-ce que ça va augmenter fin janvier ?
 
La SNCF nous a demandé à T. Mariani et moi une augmentation
que nous avons jugée à ce stade trop importante.
 
Elle était de 2 %.
 
Non, non, non ! Ils m'ont demandé 5.
 
5 % ? La SNCF vous a demandé 5 % ? Et vous accordez combien
?
 
On a dit que ce n'était pas possible et on sera probablement
entre 2 et 3.
 
C'est-à-dire que fin janvier, les billets de TGV vont augmenter
entre 2 et 3 %.
 
C'est une moyenne et ça dépend des billets. Laissez-moi vous
expliquer pourquoi.
 
Mais vous confirmez : entre 2 et 3 % fin janvier ?
 
Mais laissez-moi vous expliquer pourquoi. Donc c'est une
augmentation qui est un peu supérieure à l'inflation. L'inflation
est aujourd'hui de 1,5.
 
On rappellera que ça a augmenté au mois de juillet.
 
Pour deux motifs - pour deux motifs, supérieure à l'inflation.
Pour un motif qui est, vous savez, SNCF augmente les péages
qu'elle paye à RFF qui est gestionnaire du réseau.
 
Oui, Réseau Ferré de France.
 
Pour avoir des investissements, des investissements sur les
rails, des investissements sur les voies qui permettent
justement de lutter contre les retards, de lutter ici ou là contre
l'engorgement. Ça c'est le premier. Et le deuxième, c'est le
problème du matériel. On a certaines lignes TGV sur lesquelles
le matériel date maintenant d'il y a 30 ans, on arrive en phase
de renouvellement du matériel et il s'agit que le matériel reste
toujours à la hauteur des attentes.
 
Bon. Alors entre 2 et 3 % fin janvier, augmentation des tickets,
des billets TGV. Alors là, je vais me faire le porte-parole d'un de
nos auditeurs qui nous a expliqué qu'il était un habitué de la
ligne Le Mans - Paris, Paris - Le Mans. Alors là, c'est
catastrophique. Sur l'année 2010, 60 heures de retards
accumulés, 1 heure et demi en moyenne par semaine, parfois
beaucoup plus. Enfin, bon ! Et lui demande le gel de
l'augmentation des billets.
 
Il y a eu une pétition.
 
Eh bien oui !
 
Il y a eu un rassemblement à l'intérieur du train même, dans le
wagon-restaurant.
 
Oui, exact. Exact, exact ! Et maintenant ils disent qu'ils ont
dépassé 8 000 signatures.
 
Et il y a surtout une rencontre qui est prévue avec la SNCF très
rapidement. Et je crois que ça doit faire partie des lignes de -
comment dire les choses pudiquement ? - de progrès.
 
Oui, oui, ça... De progrès. Gel de l'augmentation des billets, pas
question pour certaines lignes qui sont pénalisées aujourd'hui ?
 
Vous savez, il y a... Il faut aussi... L'augmentation des billets que
vous citez, c'est une augmentation moyenne donc ça n'empêche
pas de différencier en fonction des lignes. Maintenant, il faut voir
que ces augmentations ce n'est pas pour le plaisir. On demande
par ailleurs des efforts en termes de productivité à la SNCF.
Cette augmentation, elle est là pour la mise à niveau du
matériel, elle est là pour l'investissement sur les voies donc elle
est là aussi pour éviter les retards. Il y a un moment où ça
tourne en rond, oui. Il faut investir pour pouvoir avoir une
meilleure qualité.
 
M. Belliard ! M. Belliard (de RMC) : Bonjour. Une question de
Bertrand en Haute- Garonne. En fait, ils sont très nombreux à
nous avoir appelés concernant le photovoltaïque, Bertrand vous
demande : voilà, on sait que l'objectif photovoltaïque allemand
est d'installer une puissance de 50 gigawatts pour 2020. Alors,
puisqu'on compare souvent les deux pays, quel est précisément
l'objectif français ?
 
Alors, on est, sur un objectif en 2012 et un objectif en 2020,
parce que l'on est sur un double objectif, et en 2020 on est sur
un objectif de 5 000 et quelques mégawatts, et on sera
au-dessus de 5 000 et quelques mégawatts.
 
Plus que les Allemands ?
 
Non, on n'est pas plus que les Allemands, ils ont commencé plus
tôt que nous. On est plutôt en phase de rattrapage. Mais,
surtout, le sujet, ce n'est pas seulement le volume, et c'est pour
ça qu'on a choisi de remettre à plat le dispositif de soutien au
photovoltaïque, parce qu'évidemment on a, avec le Grenelle de
l'environnement, des ambitions en termes de volumes, mais moi
je voudrais que ce volume, derrière, ce soit la création d'une
filière industrielle en France, avec des emplois pérennes et pas
seulement des emplois dans l'installation et dans les bureaux
d'études, qui sont des emplois importants, mais aussi des
emplois dans la production.
 
Pour fabriquer des panneaux en France, on est d'accord.
 
Et c'est la raison pour laquelle aujourd'hui on remet à plat le
dispositif de soutien, c'est qu'on a été face à une véritable bulle
photovoltaïque, dans laquelle il y avait des projets absolument
formidables, et il y en avait d'autres qui étaient supports à
spéculation, et surtout une majorité des panneaux étaient des
panneaux importés.
 
Oui, de Chine notamment.
 
On ne réussissait pas à développer la filière industrielle.
L'écologie, le Grenelle, ça doit aussi être de l'emploi industriel.
 
Mais comment allez-vous réussir à développer la filière
industrielle ?
 
Eh bien je vous donne un exemple : les critères que l'on appelle
d'intégration au bâti étaient insuffisants. Ils n'étaient pas assez
sévères, et donc, en fait, n'importe quel panneau pouvait entrer
dans les critères d'intégration au bâti. Si on est plus sévère, on
va vers des technologies qui sont celles des industriels français.
Donc on peut le faire...
 
Et des panneaux plus performants.
 
.... légalement, on ne dit pas « on interdit les panneaux chinois,
on veut que des panneaux français », non non, on le fait
légalement, mais on...
 
On favorise la qualité.
 
... on met en place des critères qui favorisent la qualité et la
qualité elle est chez nous et derrière on développe des
technologies qu'on pourra revendre à l'étranger et devenir à
notre tour exportateur. Il n'y a pas que les Chinois qui peuvent
être exportateurs de panneaux !
 
N. Kosciusko-Morizet, j'ai une question politiquement concrète. À
partir de combien de temps de retard peut-on demander un
remboursement partiel à la SNCF ?
 
C'est 30 minutes il me semble.
 
Oui. Bravo. Au moins 30 minutes.
 
Vous savez, je prends le train aussi.
 
Au moins 30 minutes.
 
Oui.
 
Bon, très bien. Merci d'être venue nous voir ce matin.
 
Merci à vous.
 
Source : Premier ministre,  Service d'Information du Gouvernement, le 18 janvier 2011